Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 8, 19 mars 2019, n° 16/25210

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 8, 19 mars 2019, n° 16/25210
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/25210
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 13 novembre 2016, N° 2014034828
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 octobre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 8

ARRÊT DU 19 MARS 2019

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/25210 – N° Portalis 35L7-V-B7A-B2HIM

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Novembre 2016 – Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2014034828

APPELANTE

Madame [U] [Y]

née le [Date naissance 5] 1959 à [Localité 10] (92)

Demeurant : [Adresse 6]

[Localité 8]

Représentée par Me Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

INTIMÉS

— Monsieur [O] [Z]

né le [Date naissance 3] 1952 à [Localité 9]

[Adresse 1]

[Localité 8]

— SA GET – GESTION ET ETUDES TECHNIQUES DU BATIMENT

Ayant son siège social : [Adresse 4]

[Localité 7]

N° SIRET : 632 049 185 (PARIS)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

— SCI LE MURAT SUR SEINE

Ayant son siège social : [Adresse 2]

[Localité 7]

N° SIRET : 480 155 878 (PARIS)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentées par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 Janvier 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre

Mme Anne-Sophie TEXIER, Conseillère

Mme Florence DUBOIS-STEVANT, Conseillère, rédacteur,

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l’audience par Madame Florence DUBOIS-STEVANT, dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Laure POUPET

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, Présidente de chambre et par, Saoussen HAKIRI Greffier auquel la minute de la présente décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

La SCI Le Murat sur Seine avait pour associés Mme [U] [Y] à hauteur de 49 %, M. [O] [Z] à hauteur de 1 % et la société Gestion et études techniques du bâtiment ('la société GET'), dont M. [Z] est actionnaire majoritaire et président du directoire, à hauteur de 50 %. Elle avait pour objet la construction et la vente en état de futur achèvement d’un immeuble à usage d’habitation composé de neuf appartements.

A la suite d’un différend entre Mme [Y] et M. [Z], une conciliation est intervenue. Un accord global entérinant deux protocoles d’accord, signés le 11 novembre 2013, a été homologué par ordonnance du président du tribunal de commerce de Paris du 11 décembre 2013. En vertu de ces protocoles, Mme [Y] s’est engagée à céder l’ensemble de ses droits et parts dans la société GET, la SCI Le Murat sur Seine et trois autres sociétés, un solde de tout compte a été établi et Mme [Y] a reçu la somme de 70.510 euros.

Le 13 décembre 2013, Mme [Y], M. [Z], la société GET et la SCI Le Murat sur Seine ont conclu sous seing privé un acte de cession des parts sociales de Mme [Y] dans la SCI à la société GET au prix de 1 euros.

En mai 2014, la société GET a transmis à Mme [Y] les comptes annuels de la SCI Le Murat sur Seine arrêtés au 31 décembre 2013 faisant apparaître un résultat bénéficiaire de 561.627 euros au lieu d’un résultat déficitaire de 200.601 euros prévu au moment de l’accord.

Le 11 juin 2014, Mme [Y] a fait assigner les sociétés GET et Le Murat sur Seine ainsi que M. [Z] devant le tribunal de commerce de Paris.

Selon le jugement, elle a demandé, au visa des articles 1109, 1116 et 1382 anciens du code civil et en invoquant des manoeuvres dolosives de la part de M. [Z] et de la société GET lors de la transaction, la condamnation solidaire des défendeurs à lui payer la somme de 129.362,62 euros, celle de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts et celle de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 14 novembre 2016, le tribunal a débouté Mme [Y] de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée à payer la somme de 6.000 euros à la société GET, à la SCI Le Murat sur Seine et à M. [Z], à répartir par tiers, au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il a considéré que Mme [Y] ne démontrait pas l’existence des manoeuvres dolosives alléguées.

Mme [Y] a fait appel du jugement par déclaration du 15 décembre 2016 et, par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 19 octobre 2018, elle demande à la cour :

— d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

— de condamner la SCI Le Murat sur Seine à lui payer une somme de 275.197,23 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2014 et capitalisation des intérêts, à titre principal au titre du résultat bénéficiaire réalisé par cette société au 31 décembre 2013, subsidiairement au titre du solde de son compte courant d’associé après affectation du dividende procédant de la répartition du bénéfice réalisé au titre de l’exercice 2013 ;

— de condamner solidairement la société GET, M. [Z] et la SCI Le Murat sur Seine au paiement d’une somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ;

— de condamner solidairement la société GET, M. [Z] et la SCI Le Murat sur Seine au paiement d’une somme de 30.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel avec droit de recouvrement direct.

Elle soutient que sa demande principale en paiement de dividendes n’est pas nouvelle en cause d’appel dès lors qu’elle l’avait formulée dans son assignation, que si elle avait complété sa demande principale d’autres demandes, elle ne l’avait pas abandonnée, ni ne s’en était désistée et que le tribunal a ainsi omis de statuer sur la demande en paiement de dividendes.

Sur le fond, elle prétend que la SCI Le Murat sur Seine lui est redevable du paiement des dividendes dès lors que, lors de l’assemblée générale du 27 juin 2014, les associés de la société ont pris une décision de distribution du bénéfice ressortant des comptes sociaux au 31 décembre 2013, qu’en vertu de cette décision elle est créancière d’une somme de 275.197,23 euros à l’endroit de la société et que cette créance n’a pu se compenser avec une créance réciproque dont la société aurait été titulaire. Elle fait valoir que la décision de distribution du bénéfice de l’exercice 2013 est effective puisque l’assemblée générale du 27 juin 2014 a approuvé les comptes et décidé d’affecter et de répartir le bénéfice entre les associés et que le versement à son profit s’est opéré par affectation à son compte courant.

Elle soutient qu’elle-même et la société GET ont expressément convenu dans le protocole d’accord transactionnel, en son article 2.3, et dans l’acte de cession de ses parts sociales du 13 décembre 2013 qu’elle bénéficierait de la répartition du résultat de l’exercice 2013, que cet acte du 13 décembre 2013 est opposable à la SCI Le Murat sur Seine, que sa créance ne s’est pas compensée avec une éventuelle créance de la société dès lors que l’acte du 13 décembre 2013 a matérialisé les abandons réciproques de leurs créances respectives – Mme [Y] étant alors titulaire d’un compte courant d’associé débiteur et d’un autre compte courant d’associé créditeur – et que la compensation opérée le 27 juin 2014 entre les dividendes lui revenant et le solde prétendument débiteur de son compte courant ne lui est donc pas opposable.

Mme [Y] estime que l’indemnité transactionnelle versée par la société GET n’a pas soldé ses droits dans la SCI Le Murat sur Seine mais seulement le différend qui existait entre les associés de plusieurs sociétés, dont la SCI. Elle conteste l’interprétation que les intimés font de la commune intention des parties au protocole d’accord transactionnel.

Mme [Y] soutient que sa demande subsidiaire en remboursement du solde créditeur de son compte courant d’associé est recevable sur le fondement de l’article 564 du code de procédure civile au motif qu’elle n’a eu connaissance de la décision de distribution du bénéfice de la SCI Le Murat sur Seine et des modalités de son paiement par imputation du montant qui lui revenait sur son compte courant débiteur, sans qu’il soit tenu compte des abandons de créances réciproques, qu’après avoir eu communication, le 12 mai 2017 en cours de procédure d’appel, d’une copie du procès-verbal de l’assemblée générale de la société du 27 juin 2014.

Sur le fond, elle prétend que, le paiement du dividende lui revenant étant intervenu par affectation sur son compte courant d’associé, sa créance n’est plus une créance de dividendes mais une créance au titre du solde de son compte courant, et qu’il est de principe que l’associé peut en demander le remboursement à tout moment. Elle fait valoir que la renonciation à toute réclamation de remboursement au titre de l’ensemble des comptes courants dont se prévalent les intimés n’a produit ses effets que de manière immédiate et non pour l’avenir et que la décision de la SCI Le Murat sur Seine d’ouvrir un compte courant à son nom dans ses livres est un fait juridique et comptable quand bien même une telle ouverture n’était pas justifiée.

Sur sa demande dommages-intérêts, Mme [Y] soutient enfin que la société GET et M. [Z] ont manqué à leur obligation d’exécuter la transaction de bonne foi en ne respectant pas leur obligation, prévue à l’article 2.2 du protocole d’accord, de lui proposer spontanément toute modification du protocole qui pouvait s’avérer nécessaire alors que la vente définitive d’un appartement au 27 novembre 2013 et la promesse de vente d’un deuxième appartement conclue le 25 novembre 2013 auraient justifié la conclusion d’avenants. Elle estime avoir subi un préjudice moral résultant de la dissimulation de la vente de ces deux actifs.

Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 30 novembre 2018, la société GET, M. [Z] et la SCI Le Murat sur Seine demandent à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter Mme [Y] de l’ensemble de ses demandes et de la condamner au paiement à leur profit de la somme de 30.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et celle de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’appel avec droit de recouvrement direct.

Ils soutiennent en premier lieu que, l’effet dévolutif de l’appel ne s’exerçant que dans les limites du litige sur lequel les parties ont demandé au premier juge de statuer, la demande en paiement de dividendes formée par Mme [Y] est irrecevable car nouvelle en cause d’appel. Ils font valoir que Mme [Y] a, en première instance, substitué à sa demande initiale en paiement de dividendes une demande indemnitaire, que le tribunal a statué sur cette demande indemnitaire sans avoir omis de statuer sur la demande initiale qui n’a pas été reprise à l’audience et que sa demande en paiement de dividendes formée en appel est donc nouvelle.

Sur le fond, ils soutiennent que le bénéfice fiscal 2013 a été imputé sur un compte courant resté au nom de Mme [Y] – bien qu’elle n’était plus associée de la SCI Le Murat sur Seine au 31 décembre 2013 et que son compte courant n’ait plus d’effectivité en vertu de la clause de renonciation – conformément au protocole. Ils exposent que la valeur liquidative, négative, du compte courant d’associé de Mme [Y] a été prise en compte pour déterminer le montant de la transaction, que l’intention des parties n’était pas à la fois d’indemniser Mme [Y] de sa sortie des deux sociétés civiles immobilières visées dans le protocole, et ce sur la base d’une valeur liquidative des comptes courants intégrant les résultats projetés en 2013, et, en outre, de lui attribuer le résultat bénéficiaire de ce même exercice 2013 sous forme de distribution de dividendes.

Sur la demande subsidiaire de Mme [Y] en remboursement de compte courant d’associé, ils soulèvent son irrecevabilité au motif qu’elle est nouvelle en cause d’appel. Ils allèguent que l’appelante n’a formulé en première instance aucune demande en remboursement de compte courant et qu’elle n’a découvert en cause d’appel ni l’existence du bénéfice fiscal de la SCI Le Murat sur Seine ni son imputation sur son compte courant.

Sur le fond, ils soutiennent que l’indemnité transactionnelle versée a pris en considération les différents comptes courants au nom de Mme [Y] dans les différentes sociétés visées par le protocole, que les parties ont réciproquement renoncé à toute réclamation de remboursement au titre de l’ensemble des comptes courants d’associés détenus dans les sociétés visées, que, s’agissant de la SCI Le Murat sur Seine, le sens de cette clause était d’empêcher que Mme [Y] soit recherchée au titre de son compte courant négatif puisque la projection de l’état liquidatif faisait apparaître une position négative de ce compte courant à hauteur de 49.064 euros, que ce solde négatif a été pris en compte dans le montant de la transaction, que l’intention des parties étaient de forfaitiser les projections de résultats estimées au jour de la transaction de sorte que les résultats réels ne puissent donner lieu à aucune réclamation de part et d’autre.

Sur la demande de dommages-intérêts de Mme [Y], ils soutiennent que le protocole ne fait peser sur la société GET et M. [Z] aucune obligation de proposer à Mme [Y] toute modification mais qu’il prévoit la seule possibilité de le modifier par un accord ultérieur, et que Mme [Y] a signé un protocole transactionnel dont les bases, claires, ne peuvent être remises en cause.

Sur leur demande reconventionnelle, ils prétendent que la poursuite de la procédure en cause d’appel par Mme [Y] est caractéristique de l’abus du droit d’agir en justice. Ils font valoir que, depuis la signature du protocole, Mme [Y] a multiplié les procès cherchant à remettre en cause la transaction par tous moyens, qu’elle a perdu au fond tous les procès engagés, que le jugement frappé d’appel est parfaitement motivé de sorte qu’elle ne pouvait se méprendre sur l’étendue de ses droits, qu’elle a développé en appel une nouvelle argumentation et qu’elle a ainsi fait preuve d’une parfaite mauvaise foi en multipliant les procédures contentieuses avec à chaque fois de nouvelles demandes pour obtenir le paiement d’une somme qui ne lui est pas due et alors même qu’elle a été indemnisée dans le cadre d’une conciliation menée sous l’égide du tribunal de commerce.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux dernières conclusions notifiées.

SUR CE,

Il sera au préalable relevé que Mme [Y] ne sollicite plus devant la cour la condamnation des intimés au paiement de la somme de 129.362,62 euros pour dol. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté Mme [Y] de sa demande de ce chef.

Sur la demande principale

Sur la recevabilité

Aux termes de l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

Devant le tribunal de commerce, la procédure est orale en vertu de l’article 860 du code de procédure civile et, aux termes de l’article 446-2 du même code, dans sa rédaction applicable en la cause, lorsque les parties formulent leurs prétentions et moyens par écrit, le juge peut, avec leur accord, prévoir qu’elles seront réputées avoir abandonné les prétentions et moyens non repris dans leurs dernières écritures communiquées. Il en résulte qu’à défaut d’accord des parties, le tribunal demeure saisi de l’ensemble des prétentions qui lui ont été soumises par écrit.

L’assignation délivrée par Mme [Y] le 11 juin 2014 fait état notamment d’une demande de condamnation in solidum des défendeurs au paiement de la somme de 275.197,23 euros correspondant à la quote-part du bénéfice revenant à Mme [Y] au titre de l’exercice 2013 de la SCI Le Murat sur Seine et de celle de 169.002 euros en réparation des préjudices économiques et moraux subis.

Il résulte des mentions du jugement que tribunal a statué au vu des seules dernières écritures des parties. Le tribunal fait ainsi état de demandes de condamnation in solidum des défendeurs au paiement de la somme de 129.362,62 euros pour dol et de celle de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts, sans reprendre les demandes formulées dans l’assignation. Or il n’est mentionné dans le jugement ni que Mme [Y] a expressément renoncé à sa demande initiale en paiement de sa quote-part du bénéfice de la SCI Le Murat sur Seine lui revenant, ni que les parties ont exprimé leur accord de voir le juge considérer abandonnées les prétentions et moyens non repris dans leurs dernières écritures communiquées conformément à l’article 446-2 du code de procédure civile.

La demande en paiement de la somme de 275.197,23 euros correspondant à la quote-part du résultat bénéficiaire réalisé par cette société au 31 décembre 2013 revenant à Mme [Y] n’est donc pas nouvelle en cause d’appel et doit être déclarée recevable.

Sur le fond

Le protocole d’accord conclu le 11 novembre 2013 portant sur la SCI Le Murat sur Seine, une deuxième SCI et deux sociétés de fait, prévoit qu’il est dû à Mme [Y], au terme d’un compte entre les parties englobant la situation des quatre sociétés, la somme de 70.510 euros, que la société GET et M. [Z] acceptent à titre transactionnel et définitif, pour solde de tout compte, de verser à Mme [Y] la somme de 70.510 euros, que Mme [Y] reconnaît être remplie de l’intégralité de ses droits à l’encontre de la société GET et de M. [Z] et qu’en contrepartie du paiement de la somme due, elle cède l’ensemble de ses droits et actions dans les sociétés objet du protocole. Au point 2.3, il est ajouté que 'Mme [Y] bénéficiera des résultats tels que déclarés à l’administration fiscale conformément aux comptes de résultats prévisionnels au 31 décembre 2013 établis et communiqués par la société GET le 21 octobre 2013.'

L’acte de cession des parts sociales de Mme [Y] dans la SCI Le Murat sur Seine, conclu le 13 décembre 2013, prévoit quant à lui que 'nonobstant la présente cession de parts, le cédant et le cessionnaire conviennent expressément que Mme [Y] participera à la répartition du résultat social de la société pour l’exercice clos au 31 décembre 2013' et précise que le résultat social a été arrêté provisoirement pour ledit exercice 2013 à une perte globale de 200.601 euros et pour la quote-part de Mme [Y] à une perte de 98.294 euros. Il stipule également que, d’un commun accord, le cédant et le cessionnaire renoncent à toute demande de remboursement de compte courant.

Cet acte de cession de parts de la SCI Le Murat sur Seine est un acte d’exécution du protocole transactionnel. La clause de cet acte de cession prévoyant la participation de Mme [Y] à la répartition du résultat social est l’application, à cette seule SCI, du point 2.3 du protocole transactionnel qui porte, lui, sur quatre sociétés.

Il s’en déduit que la clause de l’acte de cession de parts dont se prévaut Mme [Y] ne peut être lue et interprétée qu’à l’aune des dispositions du protocole transactionnel.

Or l’indemnité transactionnelle a été fixée à partir de l’imputation aux comptes courants des associés des résultats projetés des sociétés objet du protocole au 31 décembre 2013 et au 31 décembre 2014 et évalués à partir des prévisions des prix de cession des actifs immobiliers restant à céder et des charges jusqu’à la fin des opérations immobilières de chaque société.

La participation de Mme [Y] aux résultats de la SCI Le Murat sur Seine prévue par l’acte de cession de ses parts est la traduction de la commune intention des parties au protocole transactionnel d’indemniser Mme [Y] à hauteur du solde global de tous ses comptes courants d’associé dans les quatre sociétés résultant de la projection des résultats sociaux imputés à ces comptes courants, seul le compte courant de Mme [Y] dans la SCI Le Murat sur Seine affichant une projection négative et ce solde global étant positif. Elle n’est pas un engagement pris par les parties à l’acte de cession des parts sociales d’attribuer à Mme [Y] un éventuel résultat bénéficiaire sous forme de distribution de dividendes.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que Mme [Y] n’est titulaire d’aucune créance de dividendes à l’endroit de la SCI Le Murat sur Seine et qu’elle doit en conséquence être déboutée de sa demande principale.

Sur la demande subsidiaire

Sur la recevabilité

L’assignation du 11 juin 2014 ne comprend pas de demande de remboursement du compte courant d’associé de Mme [Y].

Mme [Y] affirme que sa demande est recevable en cause d’appel car elle n’a eu connaissance de l’affectation du bénéfice qu’au vu de la communication en appel du procès-verbal de l’assemblée générale du 27 juin 2014.

En appel, Mme [Y] fonde sa demande subsidiaire sur la décision des associés de la SCI Le Murat sur Seine de maintenir son compte courant d’associé, d’une part, et d’affecter le résultat bénéficiaire de l’exercice 2013 aux comptes courants des associés, d’autre part.

Il ne ressort pas des pièces versées aux débats que Mme [Y] a eu connaissance de cette décision, prise lors de l’assemblée générale du 27 juin 2014 postérieurement à l’assignation, avant la communication du procès-verbal de cette assemblée générale en appel. L’ordonnance de référé dont se prévalent les intimés ne fait pas état de cette assemblée générale puisqu’elle a été rendue avant, le 27 mai 2014.

Il s’en déduit que la demande de Mme [Y], résultant de la révélation des décisions de l’assemblée générale de la SCI Le Murat sur Seine du 27 juin 2014 pendant la procédure d’appel, est recevable.

Sur le fond

Comme il a été dit précédemment, l’indemnité transactionnelle perçue par Mme [Y] est intervenue en considération du solde de ses comptes courants dans les quatre sociétés objet du protocole transactionnel.

En outre, l’acte de cession des parts sociales de Mme [Y] dans la SCI Le Murat sur Seine stipule que, d’un commun accord, le cédant et le cessionnaire renoncent à toute demande de remboursement de compte courant.

L’affectation du résultat bénéficiaire aux comptes courants d’associés, dont celui de Mme [Y], correspond à l’exécution du protocole transactionnel du 11 novembre 2013 et à l’acte de cession des parts sociales du 13 décembre 2013 comme cela résulte des termes mêmes du procès-verbal de l’assemblée générale du 27 juin 2014 qui fait explicitement référence à 'l’accord intervenu avec Mme [Y] lors de la cession de ses parts en date du 13 décembre 2013.' Cette décision ne fait naître aucune créance au profit de Mme [Y] postérieurement à sa renonciation à toute demande de remboursement de compte courant.

Mme [Y] n’est donc titulaire d’aucune créance de compte courant à l’endroit de la SCI Le Murat sur Seine. Elle doit en conséquence être également déboutée de sa demande subsidiaire.

Sur la demande en dommages-intérêts

L’article 2.2 du protocole d’accord stipule que les avenants au protocole évoqués à titre liminaire devront être signés au plus tard le 27 novembre 2013. Il est en effet exposé à titre liminaire dans ce protocole qu''eu égard aux incidences fiscales, financières et comptables notamment, attachés au retrait d’un associé d’une société, que celle-ci soit de droit ou de fait, il est entendu entre les parties que le protocole a vocation à fixer le cadre de leur séparation. De la sorte, il pourra être considéré opportun par les parties, ce qu’elles acceptent d’ores et déjà, d’apporter des précisions au protocole. En ce cas, il sera établi un ou des avenants au protocole qui sera ou seront signés le 27 novembre 2013 au plus tard.'

Il ne résulte de ces stipulations aucune obligation pesant sur les parties de proposer spontanément à l’autre partie toute modification du protocole qui pourrait s’avérer nécessaire comme le soutient Mme [Y]. Elle doit également être déboutée de sa demande de dommages-intérêts. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée par les intimés

La méprise sur l’étendue de ses droits et les chances de succès de ses prétentions ne suffit pas à qualifier d’abusive la procédure initiée et poursuivie par Mme [Y]. La multiplicité des procès qu’elle a initiés à l’encontre des intimés ne caractérise pas un abus du droit d’agir en justice pour faire valoir ses prétentions, quelle que soit l’issue des litiges. En outre le tribunal a omis de statuer sur la demande initiale formée par Mme [Y] et l’appelante a formé une demande nouvelle en cause d’appel après la révélation de faits pendant la procédure d’appel.

La SCI Le Murat sur Seine, la société GET et M. [Z] seront dès lors déboutés de leur demande de dommages-intérêts.

En définitive, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions, Mme [Y] déboutée de ses demandes et les intimés déboutés de leur demande reconventionnelle.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes dispositions ;

Y ajoutant,

DÉCLARE recevables les demandes de Mme [U] [Y] formées au titre d’une participation au résultat de l’exercice 2013 de la SCI Le Murat sur Seine et au titre d’un solde de compte courant ;

DÉBOUTE Mme [U] [Y] de ces deux demandes ;

DÉBOUTE la SCI Le Murat sur Seine, la société GET et M. [O] [Z] de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE Mme [U] [Y] à payer à la SCI Le Murat sur Seine, à la société GET et à M. [O] [Z] pris ensemble la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [U] [Y] aux dépens d’appel et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre le droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente

Saoussen HAKIRI Marie-Christine HEBERT-PAGEOT

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Textes cités dans la décision

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