Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 6, 24 mai 2019, n° 17/17085

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 - ch. 6, 24 mai 2019, n° 17/17085
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/17085
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 26 juin 2017, N° 16/03817
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 6

ARRÊT DU 24 MAI 2019

(n°73-2019, 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/17085 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B4BVS

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Juin 2017 – Tribunal de grande instance de Paris – 7e chambre 1re section – RG n° 16/03817

APPELANTS

Monsieur D X, architecte DPLG

ayant son siège […]

[…]

N° SIRET : 326 002 086

prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

Et

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS -MAF

ayant son […]

[…]

prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

Représentés par Me Pascale C, avocate au barreau de PARIS, toque : K0090

Ayant pour avocat plaidant Me Bernard-René PELTIER

INTIMÉES

SARL G H, prise en la personne de son liquidateur judiciaire (la SELARL B J)

ayant son siège social […]

[…]

N° SIRET : 428 215 503

prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

Et

SELARL B J, mandataire judiciaire, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la SARL G H

ayant son siège […]

[…]

prise en la personne

Représentées par Me Bruno THORRIGNAC, avocat au barreau de PARIS, toque : D0125

Assistées de Me Esther PROUZET, avocate au barreau de PARIS, toque : D0125

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 8 Mars 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Sabine LEBLANC, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Annie DABOSVILLE, présidente de chambre

Madame Marie-José DURAND, conseillère

Mme Sabine LEBLANC, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Mme K L

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Annie DABOSVILLE, Présidente de chambre et par K L, greffière présente lors de la mise à disposition, à laquelle a été remise la minute par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par décision du tribunal de grande instance de Créteil du 20 janvier 2004, l’université Paris IV a été autorisée à vendre le château de Morigny situé sur la commune de Morigny-Champigny dans l’Essonne dont elle était propriétaire.

Monsieur X architecte a dressé un constat de l’état apparent le 20 mars 2006.

Le 26 juin suivant, le cabinet Y, missionné par l’université PARIS IV, a établi

un état parasitaire du bien mentionnant la présence de champignons xylophages.

Le 6 juillet 2006, la Société G H a demandé à Monsieur X, architecte, son avis sur cet état parasitaire et le 10 juillet, l’architecte a transmis une proposition d’honoraires et un descriptif pour les travaux de restauration sans traitement des champignons xylophages.

La vente a été conclue par un compromis du 5 juillet 2006 puis régularisée par acte authentique du 2 novembre 2006 au profit de la société G H pour y réaliser une opération de restauration, de division en appartements, puis de revente.

La société G H a opéré une revente après division et cédé ainsi différents lots composant ce bâtiment, dont un appartement de type F4 à Madame Z, par un acte de vente régularisé le 27 décembre 2006.

Une association syndicale libre du château de Morigny (ASL) a été alors constituée par des copropriétaires et la Société G H est devenue le premier syndic de l’immeuble.

Les travaux de rénovation ont été entrepris sous l’égide de l’ASL, laquelle a fait appel à Monsieur X, en qualité de maître d’oeuvre.

La société SOCOREPA s’est vue confier la réalisation des travaux et la société CEDIF est intervenue en qualité d’assistant technique à la maîtrise d’ouvrage.

Elle a détecté la présence de mérules au niveau de la structure bois du bâtiment lors des démolitions en 2010.

Madame Z a engagé une procédure le 11 avril 2011 devant le tribunal de grande instance d’Evry, contre sa venderesse, la société G H, l’ASL et le syndicat des copropriétaires du château, sollicitant la désignation d’un expert judiciaire et l’allocation d’une provision.

Par un accord du 21 juillet 2011, la société G H a transigé avec les membres de l’ASL du château de Morigny, le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic la Société BPM, la société CEDIF, la société SOCOREPA.

Madame Z a abandonné la procédure qu’elle avait initiée.

Le protocole ainsi régularisé:

— a fixé le montant des travaux supplémentaires de traitement des parties communes lié à la découverte des mérules détaillés dans un devis SOCOREPA, validé en assemblée générale des copropriétaires du 16 février 2011, à 266 073,78 € HT soit 280 707,83 € TTC,

— décidé de la répartition de la prise en charge de cette somme de la manière suivante :

—  50 % du montant TTC soit 147 670,95 € à la charge de la Société G H

—  50 % du montant HT soit 133 036,89 € à la charge de l’ASL.

Ce protocole a été signé par le président de l’ASL, le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic, la société CEDIF et la société SOCOREPA mais pas par tous

les membres de l’ASL.

Monsieur M A n’a pas signé le protocole et a introduit une procédure au fond devant le tribunal de grande instance d’Évry aux fins d’obtenir la condamnation de la société G H et de Monsieur X au paiement de diverses sommes au titre de ses préjudices résultant de la découverte de mérules dans le château.

Par jugement du 16 mars 2015, le tribunal a estimé que la présence de mérules constituait un vice caché au sens de l’article 1641 du code civil et a condamné la société G H à lui régler la somme de 5 332,50 € au titre du coût supplémentaire de travaux et à 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens. Cette décision a rejeté l’appel en garantie formé par la société G H contre Monsieur X.

Un appel a été interjeté à l’encontre de cette décision le 21 janvier 2016.

Par arrêt du 17 novembre 2017, la cour d’appel de Paris a infirmé la décision en ce qu’elle

avait rejeté l’appel en garantie formé contre M. X et a condamné l’architecte à garantir intégralement la société G H de la condamnation prononcée à son encontre au bénéfice de M. A.

Les 1er et 3 février 2016, la société G H et la SELARL B J ont sollicité la condamnation de Monsieur X et de la compagnie MAF à leur régler la somme de 147 670,95 € en principal correspondant à l’indemnité versée à l’ASL du château de Morigny et au syndicat des copropriétaires du château aux termes du protocole.

Par jugement dont appel en date du 27 juin 2017, le tribunal de grande instance de Meaux a condamné M. X et la Compagnie MAF à payer à la société G H, assistée de la SELARL B J, les sommes suivantes avec exécution provisoire :

—  100 000 € avec intérêt au taux légal à compter de la décision,

—  3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur X et la compagnie MAF ont interjeté appel de cette décision selon

déclaration du 4 septembre 2017 et intimé la société G H et la SELARL B J, mandataire judiciaire.

Par jugement du 3 janvier 2018 publié au BODACC le 14 janvier 2018 la liquidation judiciaire a été prononcée et la SELARL B J désignée comme liquidateur de la Société G H.

Par conclusions du 7 février 2019, M. X et la MAF demandent à la cour de :

«Recevoir Monsieur X en ses conclusions, et le déclarant bien fondé,

vu l’article 1147 du code civil, vu le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 27 juin 2017, vues les pièces produites,

— infirmer le jugement entrepris, et statuant à nouveau,

— déclarer prescrite l’action de G H,

— déclarer mal fondée, l’action et les demandes de G H, les

débouter,

— déclarer Monsieur X hors de cause,

— condamner G H à indemniser Monsieur X des frais irrépétibles que l’action le contraint d’exposer à hauteur de 3 000 € au visa de l’article 700 du code de procédure civile,

et fixer au passif du redressement judiciaire de ladite société, cette somme et admettre Me C à poursuivre les dépens au visa de l’article 699 du code de procédure civile »

Par conclusions du 1er février 2018 la société G H et la SELARL B J demandent à la cour :

«Vu l’article 1147 (ancienne rédaction) du code civil,

Vu l’article L 124-3 du code des assurances,

Vu les pièces produites,

I/ Sur la condamnation de M. X et de la MAF :

— Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir

soulevée par Monsieur X et la MAF,

— Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a consacré la responsabilité de M.

X et la garantie de la MAF à l’égard de la société G H et,

En conséquence,

— Rejeter l’appel de M. X et de la MAF

— Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il est entré en voie de condamnation à

l’encontre de M. X et de la compagnie MAF

II/ Sur le montant de l’indemnisation allouée à la Société G H et la SELARL B J :

A titre principal :

— Rejeter l’appel de M X et de la MAF,

— Infirmer partiellement le jugement en ce qu’il a limité le préjudice de la Société

G à hauteur de 100 000 €,

— Condamner in solidum Monsieur D X et son assureur, la compagnie

MAF à régler à la SELARL B J ès qualité de liquidateur

judiciaire de la Société G H et la Société G

H, la somme de 147 670,95 € avec intérêts au taux légal à

compter de la délivrance de l’assignation, correspondant à la somme que la

requérante a dû régler à l’ASL dans le cadre du protocole transactionnel régularisé

avec l’ASL du Château MORIGNY ;

A titre subsidiaire :

— Rejeter l’appel de M X et de la MAF,

— Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné Monsieur D

X et son assureur, la compagnie MAF à régler à la SELARL B

J ès qualité de liquidateur judiciaire de la Société G

H et la société G H, la somme de 100 000 €,

III/ Frais irrépétibles et dépens :

— Condamner in solidum Monsieur X et la MAF au paiement de la somme de

5 000 € au profit des concluantes, au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Bruno Thorrignac avocat aux

offres de droit.

DISCUSSION

Sur prescription

Monsieur X et la MAF soutiennent que la société G H serait prescrite en son action. Ils indiquent que la société G H aurait dû agir dans un délai de 5 ans courant à compter du jour où, titulaire du droit, elle a connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettaient de l’exercer. Ils prétendent que le point de départ de l’action se situerait au jour de la connaissance du vice caché par la société G H donc :

— soit le 26 juin 2006 avec le rapport Y qui émettait des réserves sur les zones cachées,

— soit au plus tard, à la date à laquelle la présence de mérules est identifiée :

— grâce aux démolitions structurelles de septembre 2010,

— ou par le rapport F d’octobre 2010 qui marque avec certitude sa connaissance de la découverte du vice caché,

— ou par sa dénonciation par Monsieur X le 30 novembre 2010.

Ils ajoutent que dans le protocole du 21 juillet 2011, la société G H reconnaît que la présence de mérules a été détectée au moment des démolitions c’est-à-dire en septembre 2010.

Ils en concluent que dans tous les cas le délai de forclusion de 5 ans était dépassé au jour de l’assignation du 1er février 2017.

La prescription a été rejetée par les premiers juges qui ont refusé de fixer le point de départ de la prescription à novembre 2010 soulignant, la société G H étant un profane en matière de parasites et que la lettre de M. X informant de la présence de mérules a été adressée à la société CEDIF et non à la société G H. Ils ont donc retenu qu’il n’était pas établi que la société G H avait eu connaissance de cette lettre avant le 1er février 2011, soit plus de 5 ans avant l’assignation.

Pour la société G H et la SELARL B J ès qualité de liquidateur aucune prescription n’est encourue en l’espèce.

Elles répondent à cet effet que même à supposer que la société G H eut été informée et dûment avisée en novembre 2010, ou même avant, de ce que des mérules affectaient le bâtiment et donc qu’elle avait eu connaissance d’une faute de Monsieur X, elle ne disposait alors d’aucun intérêt à agir contre Monsieur X car à cette date, elle ne subissait aucun préjudice et n’avait aucun intérêt à agir contre ce dernier.

La société G H explique qu’elle a procédé à la vente des lots de l’immeuble litigieux, dont notamment celui de Madame Z, le 27 décembre 2006 dans des conditions tout à fait normales et au prix qu’elle souhaitait et que ce n’est qu’à compter du jour où elle a été mise en cause judiciairement par Madame Z, le 11 avril 2011 qu’elle a pu avoir un intérêt à agir contre l’architecte puisque subissant alors un préjudice en lien avec la présence de mérules non détectés par l’architecte.

Ayant assigné Monsieur X et la MAF en février 2016, la société G H prétend donc avoir interrompu la prescription avant l’expiration du délai de 5 ans courant depuis avril 2011 et expirant en avril 2016.

*

L’article 2224 du code civil dispose :

« Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

La Société G H n’agit pas sur le fondement de l’article 1641 du code civil mais sur le fondement de l’ancien article 1147 du même code. L’architecte n’est pas en effet tenu à la garantie des vices cachés. Or, si la connaissance du vice caché constitue le point de départ de l’action en garantie des vices cachés sur le fondement de l’article 1641 du code civil, tel n’est pas le cas, s’agissant de l’action en responsabilité contractuelle exercée par le vendeur à l’égard de l’architecte.

La prescription d’une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’avait pas eu précédemment connaissance.

En l’espèce ce n’est pas la connaissance de la faute de l’architecte apprise par la découverte du vice caché qui réalise le dommage de la société G H. Cette découverte n’est constitutive que d’un germe du dommage.

Le dommage résulte d’une condamnation et il en est de même d’une transaction qui a, elle aussi, autorité de chose jugée. La société G H qui sollicite la garantie de M. X pour le montant mis à sa charge par le protocole n’avait pas nécessairement connaissance de

l’ampleur de son préjudice avant la signature du protocole d’accord du 21 juillet 2011 conclu avec l’association libre des copropriétaires, la CEDIF, la SOCOREPA et le syndicat des copropriétaires, protocole qui vaut transaction.

Cependant elle reconnaît que l’assignation en référé-expertise qu’elle s’est vue délivrer en avril 2011, bien que qu’à l’initiative d’un seul acquéreur, Madame Z, qui n’a d’ailleurs pas poursuivi son action judiciaire, lui a révélé le dommage. La prescription de l’action en responsabilité contractuelle a donc couru à compter de cette date. En conséquence, lors de l’assignation en indemnisation de son préjudice contre Monsieur X délivrée les 1er et 3 février 2016, la prescription quinquennale de droit commun n’était pas acquise et l’action de la société G H représentée par son liquidateur est recevable. Le jugement critiqué sera donc confirmé par substitution de motifs.

Sur la responsabilité de M X

Monsieur X et la MAF font valoir que l’architecte est tenu d’une obligation de moyen et que la mission de Monsieur X qui lui avait été confiée par l’université de Paris IV était de faire un diagnostic avant la vente à la société G H de l’état apparent de la solidité du clos du couvert, des canalisations et des équipements communs de sécurité dans le cadre de l’article L 111-6-'2 du code de la construction en vue de la mise en copropriété. Il souligne qu’il n’était tenu à aucun démontage ni destruction structurelle et prétend que la mérule n’est pas décelable sans destruction structurelle et rappelle que c’est pendant la phase de démolition que la société TECH PATRIMONIALE a découvert la mérule sur des structures de bois masqués car elle se développe dans l’obscurité absolue et constitue donc un vice caché.

Il explique qu’il n’était pas en charge des diagnostics parasitaires, que l’université Paris IV avait missionné le cabinet Y qui dans son rapport le 26 juin 2006 note la présence de champignons xylophages, qui n’étaient pas des mérules. Il fait valoir que sa mission était d’ailleurs terminée lors du dépôt de ce rapport.

La société G H représentée par son liquidateur expose que Monsieur X a réalisé un mauvais diagnostic en mars 2006 et, au surplus, a manqué à son devoir de conseil en qualité de maître d''uvre, au regard des éléments qui lui ont été fournis par elle. Ainsi, elle relève que Monsieur X a établi le 20 mars 2006, un premier diagnostic relatif à l’état « apparent » du bâtiment et qu’aucune observation n’était formulée par lui sur la présence de mérules affectant pourtant directement la solidité du clos et du couvert. Elle fait valoir que par courrier du 6 juillet 2006 c’est-à-dire après remise du premier rapport de Monsieur X, elle a interrogé ce dernier pour obtenir son analyse de l’état parasitaire établi dans le cadre de la vente régularisée entre l’UNIVERSITÉ PARIS IV et la société G H, par le cabinet Y qui précisait :

« Eléments structurels altérés :

— solives apparentes à des degrés divers,

— Plusieurs lames de parquets (particulièrement : grand salon.),

— Des éléments de charpente à des degrés divers,

— L’escalier de l’appartement n°1,

[…],

— Des pieds d’huisseries de porte,

— Des plinthes au rez-de-chaussée du château (particulièrement bureau ; sas cour),

[…],

Altérations constatées, variables selon les éléments :

— Champignons lignivores :

[…]

— Coniophores etc.

[…]

— petites vrillettes

— grosses vrillettes

— Hespérophanès

Eléments altérés par des champignons de pourriture et des larves spécifiques

aux arbres sur pied ou pourrissant : Arbres morts, bûches, souches

Traces d’infiltrations en partie haute des murs périmétriques du château, au

premier et au deuxième étage.

Absence d’infestation de termites dans le château, les dépendances et le parc ».

Elle fait valoir que Monsieur X n’a formulé aucune remarque particulière sur ce document et au contraire, a, par la suite, établi un descriptif de travaux accompagné d’une proposition d’honoraires le 10 juillet 2006 ne prenant absolument pas en considération la nécessité de purger les mérules.

Pourtant un spécialiste du traitement des mérules, Monsieur F, missionné dans le courant du mois d’octobre 2010, est venu préciser, sans que cela n’ait jamais été contesté par Monsieur X, que « les désordres liés aux champignons ont commencé, il y a plus de trente ans et ont progressé sournoisement au fil des ans ».

Elle en conclut que le maître d''uvre a manqué à ses obligations car il se devait, d’une part, d’alerter la société G H de la présence de mérules dans l’immeuble et d’autre part, de prévoir les travaux visant à remédier à la présence de ce champignon.

Elle rappelle que le maître d''uvre engage sa responsabilité contractuelle pour avoir omis de prévoir certains travaux nécessaires dans son descriptif et qu’en l’espèce, M. X aurait dû entreprendre les démarches nécessaires pour s’assurer de l’état de l’immeuble au moyen notamment de l’état parasitaire qui lui a été communiqué le 6 juillet 2006 c’est-à-dire avant établissement de son CCTP. Elle invoque donc un manquement de Monsieur X qui engage donc sa responsabilité sur le fondement de l’article 1147 du code civil à son égard.

*

En effet Monsieur X ne peut valablement prétendre que sa mission était terminée et qu’il n’avait pas à commenter l’état parasitaire que la société G H lui avait transmis pour avis

technique par lettre du 6 juillet 2006 (pièce 4) dans la perspective de lui voir confier une mission complète de maîtrise d''uvre touchant la restauration complète du château de Morigny.

Il ne peut également soutenir que la société G H était un professionnel de l’immobilier pour dénier sa responsabilité, alors qu’elle n’est pas un spécialiste et lui demandait précisément conseil.

Certes M D X, dans le cadre de sa mission de vérification de l’état apparent de l’immeuble en vue de sa mise en copropriété du 20 mars 2006, n’avait pas de démolitions à réaliser pour s’assurer de l’absence de mérule. Il rappelle d’ailleurs dans son constat d’état apparent que celui-ci ne se substitue pas à l’état parasitaire.

Mais en première page de ce constat de l’état apparent, Monsieur X indique également :

« liste des différents états, objets du présent constat :

état apparent de solidité du clos

état apparent de solidité du couvert… »

et se contente ensuite de noter dans un tableau avec des cases cochées « solidité de l’immeuble assurée par façade et refends : oui, tout en notant des traces d’humidité dans les combles des infiltrations et remontées d’eau, de l’humidité en partie basse mais pas d’affaissement de tassement dans les parties accessibles de la charpente en bois »

Toutefois, il sera averti de la présence de champignons lignivores dans les cloisons des le 6 juillet 2006 par l’état parasitaire de M. Y du 26 juin qui lui a été transmis et qui évoquait de nombreuses altérations d’éléments de structure du château (solives apparentes, plusieurs lames de parquet, des éléments de charpente à des degrés divers, l’escalier de l’appartement n°1, cloisons, des cages d’escalier, des pieds d’huissiers de porte, des plinthes au rez-de-chaussée, les charpentes, linteaux et poteaux des dépendances) par l’action des champignons lignivores.

Il ne peut pas en effet soutenir de bonne foi que les mérules n’étaient pas désignées alors qu’elles sont un champignon lignivore, ce qu’un professionnel ne peut ignorer. De plus, les conclusions de Monsieur Y transmises étaient fondées sur des éléments visuels, sans sondages destructifs ni démolitions, puisque celles-ci n’interviendront qu’en 2010 et M. D X ne peut donc prétendre que la présence de ce champignon n’aurait pas été visible par lui sans sondages destructifs et n’aurait pu être détectée qu’après démontage des cloisons. Surtout compte tenu de l’état d’avancement des dégradations dues à une présence de mérule qui, selon le rapport F (de 2010), remonte à plus de 30 ans. Ainsi, il est certain, qu’en mars 2006, date de réalisation du premier diagnostic de M. X sur l’état apparent de l’immeuble, les mérules étaient décelables.

M. X a donc réalisé un constat de l’apparent très succint , insuffisant et dès lors erroné et a manqué à son devoir de conseil à l’égard de la société G H sur les travaux à réaliser après la prise de connaissance du rapport de l’état parasitaire. Sa responsabilité contractuelle est engagée à l’égard de celle-ci même si c’est l’université qui lui a donné mission de constater l’état apparent, car la société G H a acquis le château.

Sur l’indemnisation du préjudice

Monsieur X et la MAF soutiennent que la faute de l’architecte n’a généré aucun préjudice pour la société G H qui aurait dû de toute façon prendre à sa charge le coût de ce traitement.

Ils exposent que le diagnostic n’est pas à l’origine des désordres donc du lien de causalité avec un préjudice financier. Ils soutiennent que l’indemnisation de la faute du diagnostiqueur doit être limitée au surcoût des travaux rendus nécessaires par l’aggravation du budget des travaux entre la date de diagnostic insuffisant et celle de réalisation effective des travaux de reprise mais que la société G H n’en justifie pas. Ils contestent la perte de chance de renégocier le prix de vente du lot et font valoir le coût du traitement de la mérule représente moins de 5 % du prix de vente et ne bouleverse pas l’économie des contrats et marchés. Ils ajoutent que la mérule est un aléa irrésistible et un vice caché. Enfin ils font valoir que Monsieur X ne saurait être tenu pour responsable des délais induits par les discussions entre les parties afin de parvenir à une transaction.

La société G H prétend que si elle avait su que des travaux supplémentaires étaient nécessaires elle aurait modifié le prix de vente des lots en conséquence pour intégrer le coût de ces travaux. À défaut elle demande le remboursement de la somme de 147'670,95 euros qu’elle a dû supporter en vertu du protocole d’accord.

La société G H et la SELARL J sollicitaient en première instance la condamnation de M. X et de la MAF au paiement d’une somme de 147 670,95 € mais le tribunal n’a retenu qu’une somme de 100 000 € au titre d’une perte de chance.

*

Si en effet il n’y a pas de lien de causalité entre la faute de l’architecte qui n’a pas détecté la mérule et la nécessité de travaux réparatoires pour l’éradiquer, et si l’architecte, qui n’est pas à l’origine des désordres, n’est donc pas tenu de prendre en charge la totalité du coût des travaux, il n’en reste pas moins que nécessairement son manquement à son obligation de conseil par son absence de mise en garde de la société G H qui l’avait interrogé le 6 juillet 2006 sur l’état parasitaire, a empêché la société G H de renégocier le prix de la vente qui sera signée par acte notarié du 2 novembre 2006 et d’intégrer dans ses coûts financiers le montant des travaux réparatoires pour fixer le montant du prix de revente.

Son absence de prévision de travaux nécessaires le 10 juillet 2006 a, il reconnaît lui-même dans sa lettre du 30 novembre 2010 ( pièce 8) qui informe officiellement les constructeurs de la présence de mérules, entrainé la nécessité de modifier le planning prévisionnel des travaux de l’ordre de 3 mois supplémentaires, ce qui a également un coût financier que le maître d’ouvrage l’ASL a nécessairement inclus dans protocole d’accord signé avec la société G H.

En conséquence c’est à juste titre que les premiers juges ont indemnisé à hauteur de 100'000 € le préjudice subi par la société G H résultant de la faute de Monsieur X. En conséquence le jugement entrepris sera confirmé sur ce point .

Sur les frais de procédure

L’équité commande de faire application en cause d’appel des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans les termes du présent dispositif au profit de la société G H représentée par son liquidateur.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Condamne in solidum Monsieur X et la MAF à verser à la société G H représentée par son liquidateur la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d’appel avec application de l’article 699 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente

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