Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 24 juin 2020, n° 18/19270

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Chronologie de l’affaire

Commentaires3

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Gouache Avocats · 13 décembre 2023

Lorsque la clause destination du bail commercial prévoit que le local est à usage exclusif de bureaux, le statut des baux commerciaux ne s'applique pas pleinement. Un régime spécifique gère la fixation du loyer. Le preneur ne bénéficie pas de la règle du plafonnement des loyers. Votre bail commercial porte-t-il sur des locaux à usage de bureaux ? Pour savoir si votre bail commercial est soumis au régime spécifique des bureaux, il convient tout d'abord de vérifier si vos locaux constituent des bureaux. En général, constituent des bureaux les locaux dans lesquels une activité …

 

www.berrebi-avocats.com · 16 janvier 2021

Bail commercial ~ Cour de cassation, 17 Septembre 2020, n°19-14.168 Le bailleur qui réclame au preneur, conformément au bail commercial, le remboursement de diverses dépenses et taxes, est tenu d'établir sa créance en démontrant l'existence et le montant de ces charges. Selon la Cour de cassation, pour conserver les sommes versées au titre des provisions, le bailleur doit justifier du montant des dépenses. A défaut, il doit restituer au preneur les sommes versées au titre des provisions. Bail commercial ~ Cour d'appel de Paris, 24 Juin 2020, n° 18/19270 Aux termes de l'article R.145-11 du …

 

Cabinet Neu-Janicki · 1er novembre 2020

En cas d'indemnité d'éviction pour des locaux à usage de bureaux, il n'existe pas de valeur de droit au bail dans la mesure où les locaux étant à usage exclusif de bureaux, le loyer aurait été fixé à la valeur locative de marché. Pour mémoire, la méthode d'évaluation du droit au bail se fait par la différence entre d'une part la valeur locative dite de marché des locaux objets de l'éviction (ou le loyer qu'il faudra payer au prix du marché pour des locaux équivalents) et d'autre part le loyer contractuel des locaux dans l'hypothèse de renouvellement du bail. En application des articles …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 3, 24 juin 2020, n° 18/19270
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/19270
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Bobigny, 25 juin 2018, N° 17/08122
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 24 JUIN 2020

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/19270 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6HB5

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Juin 2018 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 17/08122

APPELANTE

SARL IV'I agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 484 150 594

[…]

[…]

Représentée par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010, avocat postulant

Assistée de Me Bruno AGID, avocat au barreau de PARIS, toque P 405

INTIMÉE

SYNDICAT UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES - UNSA

[…]

[…]

Représentée par Me Hélène LECAT de la SCP LECAT ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0027

COMPOSITION DE LA COUR :

En application :

- de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19;

- de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété, notamment ses articles 1er et 8 ;

- de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 modifiée relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période ;

L'affaire a été retenue selon la procédure sans audience le 2 juin 2020, les avocats y ayant consenti expressément ou ne s'y étant pas opposés dans le délai de 15 jours de la proposition qui leur a été faite de recourir à cette procédure ;

La cour composée comme suit en a délibéré :

Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre

Madame Sandrine GIL, conseiller

Madame Elisabeth GOURY, conseillère

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE :

Suivant acte du 15 septembre 2005, la société OPERATION BUREAUX BAGNOLET, aux droits de laquelle se présente le syndicat UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES dit 'UNSA', a consenti à la société IV'I un bail commercial portant sur des locaux à usage de bureaux d'une surface de 72,05 m²situés au 1er étage d'un immeuble édifié […] à Bagnolet (93), pour une durée de neuf années à compter du 15 septembre 2015 pour se terminer le 14 septembre 2014.

L'activité autorisée par le bail est : ' entreprise de conception et d'aménagement de surfaces d'expositions'.

Le bail a été conclu en contrepartie d'un loyer de 8.629,17 euros par an, hors taxes et hors charges, avec indexation annuelle en fonction de l'indice INSEE du coût de la construction.

Par acte d'huissier de justice du 5 mars 2014, l'UNSA a fait signifier à la société IV'I un congé pour le 14 septembre 2014, terme du bail, avec refus de renouvellement et offre de paiement d'une indemnité d'éviction.

Le 9 janvier 2015, le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny, saisi à la requête de la société IV'I, a désigné M. X Y en qualité d'expert judiciaire avec mission de donner son avis sur le montant de l'indemnité d'éviction éventuellement due par l'UNSA.

Pendant le cours de l'expertise, le 1er avril 2015, la société IV'I a conclu un bail commercial avec la SCI GABOULARD A portant sur des locaux dans un ensemble immobilier situé 114, […] et […], à […].

Le 31 juillet 2015, la société IV'I a restitué les lieux à l'UNSA.

L'expert a déposé son rapport le 6 septembre 2016, concluant, d'une part, que l'éviction avait entraîné le transfert de l'activité de la société IV'I dans des locaux de remplacement, d'autre part, que l'indemnité d'éviction due à l'intéressée pouvait être estimée à 21.473 euros.

Le 31 juillet 2017, la société IV'I a fait assigner l'UNSA devant le tribunal de grande instance de Bobigny aux fins de condamnation à lui payer une indemnité d'éviction.

Par jugement du 26 juin 2018, le tribunal de grande instance de Bobigny a :

- Dit que le bail du 15 septembre 2005 portant sur des locaux situés […] à Bagnolet (93) a pris fin le 14 septembre 2014 par suite du congé délivré le 5 mars 2014 par l'UNSA à la société IV'I,

- Condamné l'UNSA à payer à la société IV'I la somme de 25.674,59 € à titre d'indemnité d'éviction, outre les intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

- Condamné l'UNSA à payer à la société IV'I la somme de 1.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Débouté la société IV'I du surplus de ses demandes,

- Condamné l'UNSA aux dépens, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire ;

- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement en toutes ses dispositions.

Par déclaration du 30 juillet 2018, la SARL IV'I a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par le RPVA le 6 avril 2019, la SARL IV'I, demande à la cour de :

Vu les articles L. 145-14 et L 145-17 du Code de Commerce,

- RECEVOIR la société IV'I en ses demandes ;

- REFORMER le jugement entrepris

Y faisant droit et statuant à nouveau :

- CONDAMNER l'UNSA à payer à la société IV'I la somme de 124 390 euros au titre de l'indemnité d'éviction de transfert ;

- CONDAMNER l'UNSA à payer à la société IV'I la somme de 76.392,39 euros au titre de l'indemnité d'éviction accessoire se décomposant comme suit :

. Frais d'agence et de conseil (frais de remploi) : 12 272,80 €

. Frais de déménagement et de réinstallation : 36.389,55€ HT

. Double loyer : 11 100 € HT

. Frais divers administratifs : 6 163,54 € HT

. Trouble commercial : 7 883,50 € HT

. Frais d'amortissement : 2 583 € HT

- CONDAMNER l'UNSA à payer à la société IV'I la somme de 8 000 euros par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- CONDAMNER l'UNSA aux dépens, en ce compris les frais d'expertise.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par le RPVA le 8 janvier 2019, le syndicat UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES (U.N.S.A.), demande à la cour de :

A TITRE PRINCIPAL :

- CONFIRMER le jugement rendu le 26 juin 2018, la 5ème chambre 2ème section du Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY,

Et, en conséquence,

- DEBOUTER la SARL IV'I de l'intégralité des demandes, fins et conclusions,

- CONDAMNER la SARL IV'I à verser à L'UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES dite UNSA la somme de 5.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- CONDAMNER en outre la SARL IV'I aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Lecat et Associés dans les termes de l'article 699 du CPC

A TITRE SUBSIDIAIRE :

- si le Tribunal devait entrer en voie de condamnation, que celle-ci soit conforme aux conclusions rendues par l'expert en première instance, à savoir que l'indemnité d'éviction sollicitée suite au refus de renouvellement de bail, soit ramenée à la somme de 21.473 €,

- CONDAMNER la SARL IV'I à verser à L'UNION NATIONALE DES SYNDICATS AUTONOMES dite UNSA la somme de 5.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- CONDAMNER en outre la SARL IV'I aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Lecat et Associés dans les termes de l'article 699 du CPC.

L'affaire était fixée pour être plaidée à l'audience du 2 juin 2020 à 14h. Compte tenu de l'état d'urgence sanitaire, conformément aux ordonnances de roulement rectificatives du premier président de la cour d'appel de Paris en date des 23 avril 2020 et 20 mai 2020, et en application de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020, le président de la chambre a décidé que la procédure se déroulerait selon la procédure sans audience et en a informé les parties.

Les parties ont expressément accepté le recours à la procédure sans audience de plaidoiries en application de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020.

La clôture a été prononcée le 2 juin 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'indemnité principale d'éviction

Les deux parties ne contestent pas que l'indemnité d'éviction doit prendre la forme d'une indemnité dite de transfert, égale à la valeur du droit au bail.

La société locataire s'étant réinstallée en cours de procédure, soutient que le calcul du différentiel de loyers, doit s'effectuer en prenant en compte le loyer des locaux dans lesquels elle s'est réinstallée en cours de procédure, que cependant les nouveaux locaux étant plus spacieux que les locaux délaissés, compte tenu du prix au m² des nouveaux locaux de 500 euros le m², des références dans le 20° pour des locaux équivalents, appliqué à la surface des locaux délaissés de 72m², le montant du loyer à prendre en compte pour les nouveaux locaux est de 35.576 euros, le loyer théorique du local délaissé étant selon l'expert de 12.960 euros, le différentiel de loyer s'établit à la somme de 22.616 euros (35.576-12 960), auquel il convient d'affecter un coefficient de 5,5 compte tenu de la bonne situation des bureaux, la valeur du droit au bail s'élevant alors à la somme de 124.390 euros. Elle considère que les nouveaux locaux sont relativement équivalents à ceux de Bagnolet, en termes d'emplacement puisqu'ils se situent à 1km des locaux délaissés, tous deux dans un ensemble immobilier de bureaux, que leurs surfaces ne diffèrent que de 13m², soit 18% ; qu'il importe peu que les nouveaux locaux pris à bail appartiennent à une SCI détenue par les deux associés de la société locataire dans la mesure où il s'agit de personnes morales distinctes, qu'elle établit en outre que le loyer pratiqué n'est pas un loyer de convenance puisqu'il est conforme au marché.

La bailleresse conclut à la confirmation du jugement entrepris, elle conteste que le différentiel de loyers soit calculé par rapport au loyer des nouveaux locaux, dans la mesure où la conclusion du nouveau bail entre la société locataire et la SCI Z A constitue, compte tenu des liens existant entre ces deux entités, une opération patrimoniale destinée à permettre aux deux associés de la société IV'I de se procurer des revenus par le biais de la SCI qu'ils ont créée à cette fin, que le loyer convenu est de pure convenance, que la société IV'I n'établit pas le prix du marché pour la prise à bail de locaux comparables, que de surcroît la valeur d'un loyer commercial situé à Paris, dans le 20° arrondissement est sensiblement différente de la valeur des précédents locaux situés à Bagnolet, dans un quartier nettement moins attrayant, et dans des locaux peu accessibles ainsi que la visite des lieux lors de l'expertise a permis de le constater.

Le droit au bail, élément incorporel du fonds constitue l'indemnisation minimale à laquelle

peut prétendre le locataire évincé ; sa valeur représente la perte de l'avantage patrimonial qui résulte de l'infériorité du loyer par rapport à la valeur locative des locaux.

Sa méthode d'évaluation se fait par différence entre d'une part la valeur locative dite de marché des locaux objets de l'éviction (ou le loyer qu'il faudra payer au prix du marché pour des locaux équivalents ) et d'autre part le loyer contractuel des locaux dans l'hypothèse de renouvellement du bail.

Dans l'hypothèse où le preneur s'est effectivement réinstallé dans un nouveau local équivalent avant la fixation de l'indemnité, il convient de prendre en compte le coût locatif de ce local dès lors qu'en application des dispositions de l'article L. 145-14 du code de commerce, ne doit être indemnisé que le préjudice effectivement subi découlant du refus de renouvellement.

Encore faut-il que le prix convenu corresponde au prix du marché pour des locaux équivalents et que la réinstallation se fasse dans des locaux équivalents.

En l'espèce, selon le bail liant L'UNSA à la société IV'I les locaux délaissés à usage de bureaux étaient décrits ainsi qu'il suit dans le bail 'une partie des locaux à usage de bureaux suivants dépendant d'un bâtiment situé à […] situé au 1erétage d'une surface de 72, 05 m² situés au 1er étage (...)

L'accès se fera par une entrée commune à deux autres locaux.

Le preneur partagera également des parties communes propres aux bureaux du 1er étage avec les deux autres locataires d'une surface de 19,38m² composée de l'entrée et du couloir longeant la salle de réunion permettant l'accès aux WC ainsi que des WC (soit une surface de 6,46 m² venant s'ajouter à la surface occupée par chacun)'.

Selon la description qu'en donne l'expert judiciaire, ces locaux sont situés au premier étage d'un immeuble comportant un rez-de-chaussée et un étage droit, et sont constitués par trois pièces (salle de réunion, un grand bureau et une pièce pour la photocopieuse et les archives), accessibles par des parties communes partagées (un couloir et des sanitaires).

Selon l'expert judiciaire, les nouveaux locaux occupés par la société IV'I, présentent les caractéristiques suivantes :

-ils consistent en une boutique en pied d'immeuble, et non en bureaux classiques en étage comme les locaux litigieux

-ils sont situés sur une partie banale de la rue des Pyrénées, mais l'emplacement est de qualité supérieure à celui des locaux litigieux de Bagnolet,

-ils appartiennent à une SCI ayant les mêmes associés que la société IV'I

-ces locaux ont été acquis brut de béton par la SCI bailleresse qui y a fait effectuer d'importants travaux par la société locataire

-le loyer de 500 le m² est sensiblement supérieur à la valeur locative.

La cour relève que c'est à juste titre que le premier juge a rappelé que l'existence de liens entre la SCI Z A et la société locataire n'est pas de nature, à elle seule à priver cette dernière du droit à l'indemnité d'éviction prévu à l'article L145-14 du code de commerce.

Cependant, même s'il ne peut être présumé de ce simple fait que le nouveau loyer convenu serait de convenance, encore faut-il qu'il corresponde au prix du marché, or l'expert judiciaire indique qu'il est sensiblement supérieur à la valeur locative, et cet avis n'est pas utilement contredit par la société locataire, faute pour elle de justifier de ses allégations par des pièces différentes de celles analysées par le premier juge, qui les a à juste titre estimées non pertinentes.

En toute hypothèse, les nouveaux locaux doivent être équivalents aux locaux délaissés. En l'espèce, les anciens locaux, diffèrent nettement quant à leur configuration (locaux en étage desservi par un couloir commun à d'autres locataires avec usage de sanitaires communs), avec les nouveaux locaux, indépendants et en pied d'immeuble, quant à leur emplacement et aux prix unitaires pratiqués, les locaux délaissés étant situés à Bagnolet où d'après les références communiquées par l'expert judiciaire, le loyer unitaire des loyers conventionnels s'établit entre 100 et 200 euros le m², alors que les nouveaux locaux sont situés à Paris 20°, certes à un km de distance, mais de l'autre côté du périphérique, alors même que cette situation entraîne une forte variation du montant des loyers unitaires et ce pour un prix unitaire de 500 euros le m², que l'expert judiciaire estime de surcroît sensiblement supérieur à la valeur locative.

La société locataire n'établit pas par les pièces produites aux débats, déjà discutées devant le premier juge, que le prix de 500 euros le m² corresponde à la valeur locative des locaux nouvellement pris à bail. En toute hypothèse, il ne s'agit pas de locaux équivalents, car ils diffèrent trop quant à leur configuration et à leur emplacement.

Dès lors pour fixer l'indemnité principale, il n'y a donc pas lieu de prendre en compte le prix payé par la société locataire pour ces nouveaux locaux mais il convient de se référer à la valeur locative de marché des locaux délaissés situés à Bagnolet.

En l'espèce, le loyer en renouvellement, s'agissant de bureaux échappe à la règle du plafonnement et doit être fixé à la valeur locative en application des articles L145-36 et R145-11 du code de commerce. L'expert dont les conclusions ne sont pas sur ce point contestées par les parties a indiqué que la valeur locative des locaux, compte tenu des

références produites, s'établissait à la somme annuelle de 12.969 euros hors taxe et hors charge, sur la base d'un prix unitaire de 180 euros le m². Il convient de confirmer, par adoption de motifs, le jugement entrepris qui, reprenant les conclusions de l'expert judiciaire en a déduit que l'indemnité principale d'éviction, qui correspond à la valeur du droit au bail était nulle et a débouté la société locataire de ce chef de demande.

Sur les indemnités accessoires

Tout d'abord, il y a lieu de relever que la bailleresse demande à titre principal dans le dispositif de ses conclusions de confirmer le jugement entrepris et à titre subsidiaire "si le tribunal devait entrer en voie de condamnation que celle-ci soit conforme aux conclusions rendues par l'expert en première instance, à savoir que l'indemnité d'éviction sollicitée soit ramenée à la somme de 21.473 euros".

La cour n'étant saisie que par le dispositif des conclusions, il s'ensuit que la bailleresse demande à titre principal de confirmer le jugement .

Sur les frais d'agence et de conseil

La société locataire sollicite à ce titre une somme totale de 12.272,80 euros, correspondant d'une part aux frais de rédaction de l'acte locatif selon facture de 1600 euros HT ainsi qu'à la commission de l'agence correspondant à 30% du loyer annuel de 42.000 euros, soit 12.600 euros, rapporté au prorata de la surface équivalente, soit 10.672,20 euros. La bailleresse conclut à la confirmation du jugement entrepris.

Ainsi que l'a retenu le premier juge, la valeur locative des locaux de remplacement ne pouvant être retenue comme base de calcul pertinente, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a accordé à ce titre une somme de 5488 euros, proposée par l'expert, correspondant au remboursement de la facture acquittée et à 30% de la valeur locative des locaux délaissés.

Sur les frais de déménagement et de réinstallation

L'expert propose de chiffrer ces indemnisations à la somme de 10.451 euros HT.

Le premier juge a accordé à ce titre une somme totale de 14.121,59 euros HT.

La société locataire sollicite une somme totale de 36.389,55 euros HT, correspondant à hauteur de la somme 8550 euros HT aux frais de déménagement.

La bailleresse demande à titre principal dans le dispositif de ses conclusions de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé ce poste de préjudice à la somme de 14.121,59 euros.

Ainsi que l'a rappelé le premier juge, il y a lieu à indemnisation du preneur dès lors qu'est constatée l'existence d'un préjudice résultant directement de l'éviction qu'il a subie. Il s'ensuit que le défaut de justification du paiement effectif des factures produites est indifférent à la détermination de l'indemnité d'éviction dont le bailleur est légalement débiteur.

S'agissant des frais de déménagement, c'est de manière pertinente que le premier juge a accordé au preneur le remboursement de ses frais de déménagement pour une somme totale de 8550 euros HT, celui-ci justifiant de la nécessité de procéder en deux fois au transport de son matériel, compte tenu de sa spécificité.

En ce qui concerne les frais de réinstallation, il convient d'y inclure les dépenses effectuées par le preneur pour aménager ses nouveaux locaux, sous réserve que les aménagements en cause soient semblables à ceux perdus.

Dès lors, c'est à juste titre et selon une motivation pertinente que la cour adopte que le premier juge a écarté la facture de pose d'une vitrine, diminué les frais de réinstallation du réseau informatique et a fixé l'indemnisation de ce chef à 1311euros HT, les nouveaux locaux étant plus vastes que les locaux délaissés, réduit à la somme de 3.487 euros HT les frais d'installation électrique du nouveau local, accepté les frais de branchement électrique provisoire pour 216,05 euros et l'intervention du CONSUEL pour 57,54 euros, ainsi que les frais de modification du site internet pour 500 euros HT.

S'agissant de la demande de remboursement de la facture de la société CLIMEX du 21 octobre 2015 pour 431,70 euros, la cour ne peut que constater que la société locataire qui n'employait que ses deux co-gérants, dans des locaux à usage de bureaux, ne démontre pas la nécessité où elle se trouvait de faire procéder à des 'prestations de sécurité incendie' dans ses nouveaux locaux, dès lors c'est à juste titre que le premier juge a écarté cette facture.

De même la facture EDF de 761,93 euros HT dont elle demande la prise en charge, au motif qu'il s'agirait d'une facture de clôture du compte EDF dans les anciens locaux, a été à juste titre écartée par le premier juge, le libellé de cette facture en date du 10 août 2015 intitulée 'facture de régularisation', ne permettant pas d'établir qu'il s'agit de frais de clôture comme le soutient la société locataire ou de consommation d'électricité, laquelle n'est pas en lien avec son éviction des locaux.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé cette indemnisation à la somme de totale de 14.121,59 euros.

Frais de double loyer pendant les opérations de réinstallation

La société locataire ayant fait le choix, de prendre à bail de nouveaux locaux, bruts de béton, alors que s'agissant de bureaux elle aurait pu se réinstaller plus rapidement, c'est à juste titre que le premier juge, suivant l'expert judiciaire a limité à un mois et à la somme de 1200 euros, l'indemnité pour double loyer.

Frais administratifs

L'expert judiciaire a proposé de ne retenir que les frais de publicité légale pour transfert de siège, les frais de greffe du tribunal de commerce de Paris et les frais de transfert de téléphonie pour une somme totale de 573 euros.

Le premier juge a retenu ces frais et à juste titre, a également retenu une facture COLOR PRINT du 30 septembre 2015 de 511euros HT correspondant à l'impression de nouvelles cartes de visite et de papier à en-tête. En revanche, il a écarté la facture établie par la société JCOMM' GRAPHIQUE et VISUELLE d'un montant total de 5100 euros (réalisation d'un plaquette comprenant mise en page de textes et images ; conception des cartes de visites ; conception des en-tête de lettres ; création d'un flyer informatif / changement d'adresse postale), ce qui est contesté par la société locataire.

La cour relève que si la totalité du coût de cette prestation de service n'est pas en lien avec l'éviction, le bailleur n'ayant pas à supporter les frais d'élaboration d'une nouvelle charte graphique ou de réalisation d'une plaquette promotionnelle, en revanche, la création d'un 'flyer informatif /

changement d'adresse' est bien en lien avec l'éviction. Il sera en conséquence accordé à ce titre une somme de 1000 euros.

Sur le trouble commercial

La société locataire soutient que l'indemnisation de ce poste de préjudice doit être évaluée à la somme de 7.883,50 euros, correspondant à deux mois de son bénéfice net, compte tenu de la désorganisation de son activité pendant la période de déménagement et de réinstallation d'une part et d'autre part pour obtenir réparation de son préjudice lié au refus de renouvellement et qu'il importe peu que la société se soit réinstallée dans des locaux acquis par une SCI que ses associés ont constituée.

La cour relève que le premier juge a correctement apprécié selon les usages, s'agissant d'un transfert de bureaux, que l'indemnité pour trouble commercial, devait être fixée à hauteur de la somme de 3.781 euros, correspondant à trois semaines de salaires et charges de la dernière année connue, aucun élément du dossier ne permettant de fixer cette indemnisation à un montant supérieur.

Travaux non amortis

Ainsi que l'a constaté le premier juge, le bail liant les parties contient en page 6 une clause d'accession, aux termes de laquelle les travaux une fois exécutés, resteront à la sortie du preneur, propriété du bailleur. Il en résulte, que c'est à juste titre qu'il a refusé d'indemniser les amortissements non amortis pour leur valeur résiduelle au bilan. Le jugement entrepris devra également être confirmé sur ce point.

Sur le montant total de l'indemnité d'éviction

Celle-ci s'élève à la somme totale de 26.674,59 euros, calculée ainsi qu'il suit :

indemnité principale :0 euro

indemnités accessoires :

-frais de remploi : 5488 euros

-frais de déménagement et de réinstallation :14.121,59 euros

-double loyer : 1200 euros

-frais administratifs: 2084 euros

-trouble commercial : 3.781 euros

-travaux non amortis :0 euro

Sur les demandes accessoires,

Le jugement entrepris étant principalement confirmé, il le sera également en ce qui concerne le sort des dépens et celui de l'application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance.

En cause d'appel, il ne sera pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'UNSA qui succombe sera condamnée aux dépens de l'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité d'éviction l'infirme sur ce point,

statuant de nouveau et y ajoutant,

Condamne l'UNSA à payer à la société IV'I une somme 26.674,59 euros à titre d'indemnité d'éviction totale ;

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne L'UNSA aux dépens de l'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE



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