Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 17 décembre 2019, n° 17/03911

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, 1re ch., 17 déc. 2019, n° 17/03911
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 17/03911
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

PC/SI

Numéro 19/05094

COUR D’APPEL DE PAU

1re Chambre

ARRET DU 17/12/2019

Dossier : N° RG 17/03911 – N° Portalis DBVV-V-B7B-GXLR

Nature affaire :

Demande en exécution ou en dommages-intérêts pour mauvaise exécution d’un contrat non qualifié

Affaire :

COMMUNE DE SIARROUY

C/

Association SOCIETE DE CHASSE DE SIARROUY TALAZAC DITE '[…]'

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 17 décembre 2019, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 17 Septembre 2019, devant :

Madame C, Président

Madame ROSA SCHALL, Conseiller

Monsieur CASTAGNE, Conseiller, magistrat chargé du rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile

assistés de Madame FITTES-PUCHEU, Greffière

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANT :

COMMUNE DE SIARROUY, représentée par son Maire, Monsieur X Y, domicilié en cette qualité à la […]

[…]

[…]

Représentée et assistée par Me Robert MALTERRE, avocat au barreau de PAU

Subsitué par Me Océane CAZENAVE, avocat au barreau de PAU, entendue en sa plaidoirie.

INTIMEE :

SOCIETE DE CHASSE DE SIARROUY TALAZAC DITE '[…]' agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice

[…]

[…]

Représentée et assistée par Me Julien SOULIE de la SELARL SOULIE MAUVEZIN, avocat au barreau de TARBES

sur appel de la décision

en date du 26 SEPTEMBRE 2017

rendue par le TRIBUNAL D’INSTANCE DE TARBES

RG numéro : 16/00713

Par délibération du 15 juillet 2013, la commune de Siarrouy a cédé son droit de chasse et de destruction sur les terrains communaux à la société de chasse de Siarrouy-Talazac pour une durée de 3 ans à compter du 1er août 2013, renouvelable par reconduction tacite pour une nouvelle période de trois ans, sauf dénonciation par l’une ou l’autre des parties, six mois au moins avant le terme de la période.

Exposant n’avoir été informée que par LRAR du 30 mai 2016 de l’existence d’une délibération du conseil municipal du 23 novembre 2015 ayant décidé le retrait de ses droits de chasse, la société de chasse de Siarrouy-Talazac, se prévalant du non-respect du préavis, a, par acte du 11 octobre 2016, fait assigner la commune de Siarrouy pour la voir condamner à lui restituer les droits irrégulièrement retirés.

Par jugement du 26 septembre 2017, le tribunal d’instance de Tarbes a:

— rejeté l’exception d’incompétence des juridictions judiciaires soulevée par la commune de Siarrouy,

— constaté la reconduction tacite, à compter du 1er août 2016, de la convention consacrée par la délibération du 15 juillet 2013,

— condamné, sous astreinte, la commune de Siarrouy à restituer les terrains communaux à la société de chasse de Siarrouy-Talazac dans les termes et conditions de la délibération du 15 juillet 2013,

— condamné la commune de Siarrouy à payer à la société de chasse Siarrouy-Talazac la somme de 800 € en réparation de son préjudice de jouissance,

— condamné la commune de Siarrouy à payer à la société de chasse Siarrouy-Talazac la somme de 1 000 € en application de l’article 700 du C.P.X, outre les entiers dépens.

Au soutien de sa décision, le tribunal a considéré en substance:

— sur la compétence: que le juge judiciaire est compétent pour connaître des litiges intéressant le domaine privé d’une personne morale de droit public, que la société de chasse Siarrouy-Tamazac n’est pas une ACCA, qu’aucune clause exorbitante de droit public ne figure dans la convention, la délibération la constatant ne confiant notamment aucune gestion cynégétique à la société de chasse qui ne conteste pas la légalité de la décision de retrait mais son absence de dénonciation dans le délai convenu,

— sur le fond: que la dénonciation du non-renouvellement aurait dû intervenir avant le 1er février 2016, qu’aucune dénonciation n’est intervenue avant cette date dans les formes convenues, en sorte que la convention a été valablement reconduite pour trois ans.

La commune de Siarrouy a interjeté appel de cette décision, selon déclaration transmise au greffe de la cour le 15 novembre 2017.

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 29 mai 2019.

Dans ses dernières conclusions du 27 mai 2019, la commune de Siarrouy demande à la cour:

— à titre principal, de se déclarer incompétente au profit du tribunal administratif de Pau,

— subsidiairement:

> de débouter la société de chasse Siarrouy-Talazac de ses demandes,

> de dire qu’elle a valablement retiré les droits de chasse et de destruction à celle-ci selon délibération du 23 novembre 2015,

> de dire que la demande de restitution ne peut concerner la période postérieure au 1er juillet 2019 au regard de la délibération prise le 26 septembre 2018 par le conseil municipal retirant les droits de chasse à la société de chasse Siarrouy-Talazac à compter du 1er août 2019,

— de condamner la société de chasse Siarrouy-Talazac à lui payer la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du C.P.C., outre les entiers dépens.

Elle soutient en substance :

Sur la compétence:

— qu’il n’est pas établi que les droits de chasse portent sur le domaine privé de la commune alors que la forêt communale est soumise à la gestion de l’ONF et fait partie du domaine public et que l’exercice du droit de chasse et de destruction relève de la notion de service public, décision TC du 4 novembre 1991,

— sur le fond:

> que la décision de retrait a été notifiée par courrier du 16 novembre 2017 et n’a fait l’objet d’aucun recours, en sorte qu’elle est définitive et que la société de chasse ne peut revendiquer le maintien du droit de chasse,

> que le préavis ne reçoit application que dans l’hypothèse où la cession vient normalement à son terme sans incident d’exécution, qu’en l’espèce, le retrait est motivé par des conflits internes à la société de chasse la dispensant du respect du délai de six mois,

> qu’en toute hypothèse, le conseil municipal, par délibération du 26 septembre 2018 valablement notifiée à l’intimée, a décidé de retirer à celle-ci les droits de chasse à compter du 1er août 2019, sous réserve de l’arrêt à intervenir, en sorte que le litige ne put porter que sur les années 2016-2019.

Dans ses dernières conclusions du 28 mai 2019, la société de chasse Siarrouy-Talazac demande à la cour:

— de rejeter l’exception d’incompétence soulevée par la commune de Siarrouy,

— De dire que la convention liant les parties a été reconduite tacitement à compter du 1er août 2016 et que le refus de la commune de la voir se poursuivre au-delà est infondé, au regard des articles 1103, 1217 et 1719 du Code Civil,

— de condamner la commune de Siarrouy:

> à lui restituer, sous astreinte, les terrains communaux pour l’exercice du droit de chasse et du droit de destruction,

> à lui payer la somme de 10 000 € en réparation de son préjudice de jouissance, outre la somme de 2 500 € en application de l’article 700 du C.P.C. et les entiers dépens.

Elle soutient pour l’essentiel:

— sur la compétence: que la contestation par une personne privée de l’acte par lequel une personne morale de droit public ou son représentant, gestionnaire du domaine privé, initie avec cette personne privée, conduit ou termine une relation contractuelle dont l’objet est la protection ou la valorisation de ce domaine et qui n’affecte ni son périmètre ni sa consistance, ne met en cause que des rapports de droit privé, relève à ce titre de la compétence du juge judiciaire, que les terrains relèvent du domaine privé communal (article L2212-1 du CGCT), que la société de chasse n’est pas une ACCA et ne participe pas directement à un service public,

— sur le fond: si une décision de retrait des droits a été prise, elle n’a pas été dénoncée dans le délai convenu en sorte qu’elle a été tacitement reconduite pour trois ans à compter de l’expiration de la période triennale en cours, l’affichage en mairie n’est pas prouvé,

— qu’il ne s’agit pas d’une résiliation mais d’un non-renouvellement,

MOTIFS

I – Sur l’exception d’incompétence au profit des juridictions de l’ordre administratif:

Il y a lieu de considérer:

— que le domaine public est constitué des biens appartenant aux personnes morales de droit public qui sont, soit affectés à l’usage direct du public, soit affectés à un service public, pourvu que, dans ce cas, ils fassent l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public (article L2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques ),

— que des aménagements ne suffisent pas à faire entrer une parcelle dans le domaine public dès lors qu’elle

n’est affectée ni à l’usage direct du public ni à un service public,

— que l’affectation d’un bien à l’usage du public suppose une manifestation de volonté de la part de la personne publique et que le fait que le public utilise le bien ne suffit pas à considérer que ce bien relève du domaine public,

— qu’en l’espèce, les 'terrains communaux’ sur lesquels ont été concédés les droits de chasse et de destruction dépendent du domaine privé de la commune.

Or, la contestation par une personne privée (telle que la société de chasse intercommunale de Siarrouy-Talazac, association de droit privé ne constituant pas une association communale de chasse agréée), de l’acte, délibération ou décision du maire par lequel une commune ou son représentant gestionnaire du domaine privé, initie avec cette personne, conduit ou termine une relation contractuelle, quelle qu’en soit la forme, dont l’objet est la valorisation ou la protection de ce domaine et qui n’affecte ni son périmètre ni sa consistance, ne met en cause que des rapports de droit privé et relève à ce titre de la compétence du juge judiciaire, .

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la commune au profit des juridictions de l’ordre administratif, le premier juge ayant exactement considéré d’une part, que les terrains objets de la convention litigieuse relevaient du domaine privé communal et, d’autre part, qu’aucune clause exorbitante de droit public ne figure dans cette convention, la délibération ne confiant notamment aucune gestion cynégétique à la société de chasse intimée dont les statuts n’interdisaient pourtant pas de faire référence à ce type de mission.

II – Sur le fond:

La délibération du 15 juillet 2013 dispose que les droits de chasse et de destruction sont cédés à la société de chasse de Siarrouy-Talazac pour une période de trois ans, à compter du 1er août 2013, renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation par l’une ou l’autre des parties six mois au moins avant le terme de la période (soit avant le 1er février 2016).

Par délibération du 23 novembre 2015 (pièce 4 de l’appelante), déposée en préfecture le 21 décembre 2015, le conseil municipal de Siarrouy décidé le retrait des droits de chasse sur les terrains communaux cédés à l’association de chasse Siarrouy-Talazac à compter du 1er août 2015.

Or, la commune de Siarrouy ne justifie pas de la notification de la délibération du 23 novembre 2015 au représentant légal de l’association de chasse Siarrouy-Talazac avant le 1er février 2016, dans les conditions prévues par la délibération du 15 juillet 2013 pour la résiliation de la cession des droits de chasse.

Par ailleurs, la réalisation d’un affichage en mairie (au demeurant contestée par l’intimée et non établie formellement) n’aurait pas pour effet de rendre opposable à la société de chasse intimée la délibération litigieuse qui doit être qualifiée de décision individuelle (ainsi que l’admet la commune elle-même en page 5 de ses conclusions) et non réglementaire, dont l’opposabilité est subordonnée à sa notification à la personne concernée.

La décision déférée sera donc confirmée en ce qu’elle a jugé qu’à défaut de justification de la notification à l’intimée de la délibération du 23 novembre 2015 avant le 1er février 2016, la cession des droits de chasse à la société de chasse Siarrouy-Talazac a été tacitement reconduite pour une durée de 3 ans à compter du 1er août 2016, le premier juge ayant exactement retenu que la motivation alléguée de la décision de retrait (tenant à des considérations d’intérêt général au regard de dissensions existant entre divers clans de chasseurs) ne pouvait faire échec à cette absence de dénonciation.

Il convient cependant de constater:

— que par délibération du 26 septembre 2018, le conseil municipal de Siarrouy a décidé de retirer les droits de chasse sur les terrains communaux à l’association de chasse Siarrouy-Talazac à compter du 1er août 2019,

— que cette délibération, déposée en préfecture le 30 octobre 2018, a été notifiée par LRAR du 22 novembre 2018 au président de cette société de chasse et à celle-ci (pièces 23 et 24), soit antérieurement à l’expiration du délai de préavis applicable pour la période triennale 2016-2019.

Il s’en déduit que:

— si le jugement déféré doit être confirmé en son principe en ce qu’il a constaté la reconduction tacite à compter du 1er août 2016 de la convention consacrée par la délibération du 15 juillet 2013 et condamné la commune à restituer à la société de chasse Siarrouy-Talazac les terrains communaux dans les termes et conditions de la délibération du 15 juillet 2013 pour l’exercice par celle-ci du droit de chasse et de destruction,

— cette condamnation ne peut avoir d’effet que pour la période comprise entre le 1er août 2016 et le 1er août 2019, la convention de cession des droits de chasse ayant été régulièrement résiliée par la commune, à effet du 1er août 2019.

L’existence d’un préjudice moral et de jouissance subi par la collectivité des membres de la société de chasse Siarrouy-Talazac, privée pendant trois saisons consécutives de l’exercice de son droit de chasse est certaine et il sera allouée de ce chef à l’intimée la somme de 3 000 € à titre de dommages-intérêts, laquelle produira intérêts au taux légal à compter de la date de la présente décision, avec capitalisation dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du Code Civil.

Sur les demandes accessoires:

L’équité commande d’allouer à la société de chasse Siarrouy-Talazac, en application de l’article 700 du C.P.C., la somme globale de 1 500 € au titre des frais irrépétibles par elle exposés tant en première instance qu’en cause d’appel.

La commune de Siarrouy sera condamnée aux entiers dépens d’appel et de première instance, avec bénéfice de distraction au profit de la SELARL Soulie-Mauvezin.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:

Vu le jugement du tribunal d’instance de Tarbes en date du 26 septembre 2017,

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a:

— rejeté l’exception d’incompétence des juridictions de l’ordre judiciaire soulevée par la commune de Siarrouy,

- constaté la reconduction tacite à compter du 1er août 2016 de la convention consacrée par la délibération du 15 juillet 2013 et condamné sous astreinte la commune de Siarrouy à restituer les terrains communaux à la société de chasse de Siarrouy-Talazac dite 'les Tartarins Siarrouy-Talazac réunis, dans les termes et conditions de la délibération du 15 juillet 2013, pour l’exercice par cette société des droits de chasse et de destruction,

Réformant le jugement entrepris pour le surplus et y ajoutant, au vu de l’évolution du litige:

- Constate que la cession des droits de chasse et de destruction issue de la délibération du 15 juillet 2013 a été régulièrement résiliée par la commune de Siarrouy à effet du 1er août 2019, date depuis laquelle la société de

chasse intimée est privée de tous droits au titre de la délibération précitée,

- Condamne la commune de Siarrouy à payer à la société de chasse Siarrouy-Talazac la somme de 3 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice de jouissance pour la période comprise entre le 1er août 2016 et le 1er août 2019, augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt et avec capitalisation dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du Code Civil,

- Condamne la commune de Siarrouy à payer à la société de chasse Siarrouy-Talazac, en application de l’article 700 du C.P.C., la somme globale de 1 500 € au titre des frais irrépétibles par elle exposés tant en première instance qu’en cause d’appel,

- Condamne la commune de Siarrouy aux entiers dépens d’appel et de première instance, avec bénéfice de distraction au profit de la SELARL Soulie-Mauvezin

.

Le présent arrêt a été signé par Mme C, Président, et par M. A, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Z A B C

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