Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 27 mai 2015, n° 14/03610

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Poitiers, ch. soc., 27 mai 2015, n° 14/03610
Juridiction : Cour d'appel de Poitiers
Numéro(s) : 14/03610
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Poitiers, 14 septembre 2014
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

CK/KG

ARRET N° 388

R.G : 14/03610

Société MAINCARE

SOLUTIONS

C/

X

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRÊT DU 27 MAI 2015

Numéro d’inscription au répertoire général : 14/03610

Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 15 septembre 2014 rendu par le Conseil de Prud’hommes de POITIERS.

APPELANTE :

Société MAINCARE SOLUTIONS, venant aux droits de la SAS MC KESSON

N° SIRET : 414 876 177

XXX

XXX

XXX

Représentée par Me Philippe PACOTTE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

Appelante incidente partielle

Madame J X

née le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

XXX

Comparante

Assistée de Me François-Xavier GALLET, avocat au barreau de POITIERS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 01 Avril 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président

Madame Catherine KAMIANECKI, Conseiller

Monsieur Jean-Paul FUNCK-BRENTANO, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Annie FOUR

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— Signé par Monsieur Eric VEYSSIERE, Président, et par Madame Christine PERNEY, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Mme X, née en 1955, a été engagée par la société Mc Kesson, éditeur spécialisé dans le développement et le déploiement des systèmes d’information hospitaliers, aux termes d’un contrat à durée indéterminée du 20 mars 1979, remplacé par un contrat à durée indéterminée signé le 1er juillet 2000.

La société Mc Kesson, devenue la société Maincare solutions, emploie en France 320 personnes, réparties sur plusieurs sites et relève de la convention collective des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs conseils et sociétés de conseils (Syntec).

Dans ses dernières fonctions, Mme X occupait sur le site de Poitiers un emploi d’ingénieur projet, position 2-2, coefficient 130 et percevait un salaire mensuel de 2 875 euros brut outre un 13e mois.

Le site de Poitiers est spécialisé dans les logiciels de paie et de ressources humaines.

Mme X s’est trouvée placée en arrêt de travail, du 7 au 18 novembre 2011, du 30 janvier 2012 au 3 février 2012, du 21 au 24 février 2012, du 24 au 27 avril 2012, du 4 au 6 juillet 2012, du 20 au 21 septembre 2012, du 4 au 11 octobre 2012, puis à compter du 22 octobre 2012.

La société Mc Kesson a ponctuellement fait contrôler l’état de santé de Mme X les 24 février 2012, 27 avril 2012 et 2 novembre 2012.

A l’issue de la visite de pré-reprise tenue le 8 avril 2013 Mme X a été déclarée 'inapte à tout poste dans l’entreprise dans l’état actuel de l’organisation du travail'.

Après la visite de reprise tenue le 29 avril 2013 le médecin du travail a conclu à 'l’inaptitude à tout poste dans l’entreprise, au visa des articles R 4624-22 à 26 du code du travail'.

Dans l’intervalle la société Mc Kesson s’est rapprochée du médecin du travail pour rechercher un aménagement de poste ou une solution de reclassement.

Le 16 mai 2013 la société Mc Kesson a proposé à Mme X un poste de reclassement, ouvert pour la circonstance, en qualité d’ingénieur de test logiciel à Poitiers, et l’a interrogée sur sa mobilité géographique.

Par réponses du 22 et 27 mai 2013 Mme X a refusé le reclassement envisagé et a indiqué ne pas être mobile géographiquement.

Par courrier du 5 juin 2013 la société Mc Kesson a convoqué Mme X à un entretien préalable fixé le 13 juin 2013 en vue de son licenciement.

Le 10 juin 2013 Mme X a informé son employeur que son état de santé ne lui permettait pas d’assister à l’entretien préalable.

Il lui alors été demandé le 17 juin 2013 de faire valoir des observations écrites.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 juillet 2013 Mme X a seulement attiré l’attention de l’employeur sur l’obligation de reprendre le paiement des salaires, faute de licenciement ou de reclassement dans le délai d’un mois suivant l’avis d’inaptitude.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 juillet 2013 la société Mc Kesson a licencié Mme X en raison de son inaptitude et de l’impossibilité de reclassement.

Le 22 octobre 2013 Mme X a saisi le conseil de prud’hommes de Poitiers aux fins de se prévaloir d’un harcèlement moral à l’origine de son inaptitude, de contester son licenciement avec toutes conséquences de droit et de solliciter le paiement d’éléments de salaire.

Par jugement du 15 septembre 2014 le conseil de prud’hommes de Poitiers a notamment :

* condamné la société Mc Kesson à payer à Mme X les sommes de :

—  14 949,96 euros brut au titre de l’indemnité de non concurrence sur la période du 6 juillet 2013 au 5 juillet 2014, outre les congés payés y afférents 1 495 euros brut, et intérêts au taux légal à compter du 22 octobre 2013,

—  1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

—  35 euros au titre du remboursement du timbre fiscal,

* ordonné à la société Mc Kesson de remettre à Mme X un bulletin de salaire et une attestation Pôle emploi rectifiée,

* débouté Mme X de ses autres demandes,

* ordonné l’exécution provisoire,

* condamné la société Mc Kesson aux dépens.

Vu l’appel régulièrement interjeté par la société Mc Kesson et l’appel régulièrement interjeté par Mme X.

Vu l’ordonnance de jonction en date du 7 octobre 2014.

Vu les conclusions déposées le 3 février 2015 et développées oralement à l’audience de plaidoiries par lesquelles la société Maincare, venant aux droits de la société Mc Kesson, demande notamment à la cour :

* à titre principal, de réformer la décision déférée en ce qu’elle a fait droit à certaines demandes de Mme X, de l’en débouter, de la condamner à lui rembourser la somme de 17 944,96 euros versée au titre de l’exécution provisoire, et de confirmer la décision déférée pour le surplus,

* à titre subsidiaire, de constater que la demande de dommages intérêts en réparation de la nullité de la clause de non concurrence ne peut excéder 40% de la rémunération mensuelle moyenne des douze derniers mois de présence, de limiter les dommages intérêts à la somme de 1 224 euros, d’ordonner le remboursement de la somme de 15 220,96 euros, et de fixer le montant de l’indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse au minimum prévu par l’article L 1235-3 du code du travail,

* en tout état de cause de condamner Mme X à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions déposées le 12 février 2015 et développées oralement à l’audience de plaidoiries par lesquelles Mme X sollicite notamment :

* la confirmation de la décision déférée sur la nullité de la clause de non-concurrence et ses conséquences indemnitaires,

* la confirmation de la décision déférée sur les frais irrépétibles et les dépens,

* la réformation de la décision déférée pour le surplus, son inaptitude étant la conséquence d’un harcèlement moral rendant le licenciement nul, la cour devant condamner la société Maincare, venant aux droits de la société Mc Kesson, à lui payer les sommes, outre intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes, de :

—  2 913,64 euros brut au titre de la régularisation du salaire,

—  8 625,00 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents 862,50 euros brut,

—  718,75 euros brut au titre du pro-rata du 13e sur préavis,

—  112 500 euros au titre de l’indemnité pour licenciement nul,

ordonner la remise des documents de fin de contrat rectifiés, et condamner la société Maincare, venant aux droits de la société Mc Kesson, à lui payer une somme complémentaire de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées et oralement reprises.

SUR CE

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l’article L 1152-1 du code du travail le harcèlement moral d’un salarié se définit par des agissements répétés, ayant pour objet ou effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale, ou de compromettre son avenir professionnel. En application de l’article L 1152-2 du même code, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral, ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

En application de l’article L 1154-1 du même code il incombe au salarié d’établir des faits permettant de présumer l’existence d’un tel harcèlement, éléments au vu desquels la partie défenderesse doit prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

L’article L 1152-3 du code du travail ajoute que toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissances des dispositions des articles L 1152-1 et L 1152-2 est nulle.

En l’espèce Mme X considère que son inaptitude est consécutive à un harcèlement moral mis en oeuvre par son employeur, et plus particulièrement sa responsable hiérarchique, Mme G, dès lors qu’elle situe la dégradation de ses conditions de travail à octobre 2011, ce qui coïncide avec la date d’arrivée de l’intéressée dans l’entreprise.

Mme X justifie de la dégradation de son état de santé à partir de novembre 2011, plusieurs brefs arrêts de travail d’une durée de 3 jours lui ayant été prescrits à cette époque puis en janvier, février, avril, juillet, septembre et octobre 2012, avant qu’elle ne soit placée en arrêt de travail régulièrement prolongé du 22 octobre 2012 au 26 avril 2013.

A l’issue de la visite de reprise organisée le 8 avril 2013, le médecin du travail a conclu expressément à une 'inaptitude à tout poste dans l’entreprise, dans l’état actuel de l’organisation du travail', puis à l’issue de la visite de reprise tenue le 29 avril 2013, a conclu définitivement à 'une inaptitude à tout poste dans l’entreprise'.

Mme X produit le certificat médical du Dr Z, son médecin traitant prescripteur des arrêts de travail et confirmant leur nécessité, ainsi qu’un compte rendu détaillé en date du 11 octobre 2012 de la visite effectuée auprès du Dr F, intervenante à la consultation santé mentale et travail, vers laquelle le médecin du travail l’avait dirigée.

Ce dernier document expose les difficultés personnelles rencontrées par Mme X, depuis son enfance, et relate l’existence de difficultés professionnelles, apparues selon la salariée en 2007 à l’occasion 'd’une restructuration de l’entreprise avec taylorisation du travail', et aggravées en 2011, d’une part, après 'la mise en place d’une nouvelle organisation, une augmentation des niveaux hiérarchiques, l’arrivée de sa N+1 et d’une nouvelle collègue au même poste qu’elle', et, d’autre part, en raison de 'la mise en oeuvre de pressions, d’injonctions paradoxales, de techniques punitives, de refus de formations appropriées, de refus systématique de congés, de contrôle répétés de ses arrêts de travail, d’une mise à l’écart, d’insultes et de reproches téléphoniques émanant de sa N+1".

Le Dr F, qui certes a seulement recueilli les déclarations de Mme X sans les vérifier, a estimé que la salariée présentait un 'syndrome anxio-dépressif’ consécutif à 'la mise en place d’une organisation pathogène avec un changement de poste sans formation et isolement, ajoutée à un dysfonctionnement managérial, et la contestation injustifiée de ses arrêts de travail’ qu’elle devait faire face seule à la dégradation de ses conditions de travail, son seul soutien étant celui de son entourage familial, qu’elle avait conservé sa faculté d’agir puisqu’elle se présentait comme une 'battante', mais que sa santé se dégradait, l’entreprise cherchant à l’évincer à quelques trimestres de la retraite, que son inaptitude était néanmoins envisageable et qu’en tout état de cause le médecin du travail devait alerter l’employeur de la souffrance au travail de Mme X, lui rappeler ses obligations en matière de sécurité et santé au travail, et l’inviter à s’interroger sur les risques psycho-sociaux de cette organisation professionnelle pathogène.

Il est établi par ailleurs que Mme X, qui avait travaillé durant 30 ans sur un logiciel de 'paye Cash’ et qui jusqu’en mars 2008 était évaluée sur un poste de 'développeur paie', a été ensuite affectée sur un poste 'support Mckph niveau 1", qu’elle devait travailler en binôme avec une collègue, identifiée en octobre 2011 comme Mme Y et que son évaluation, effectuée par Mme G, pour la période d’activité avril 2011-mars 2012 était moins satisfaisante que celle réalisée par Mme A, pour la période d’activité avril 2010-mars 2011.

Mme X produit également un mail adressé le 17 octobre 2011 à Mme D, directrice des ressources humaines de l’entreprise, par lequel elle sollicite un entretien, 'dans un premier temps téléphonique, afin d’exposer sa situation professionnelle génératrice d’un stress difficilement supportable'.

Il s’en déduit suffisamment que Mme X caractérise une présomption de harcèlement moral.

Dans son argumentation, Mme X reprend, pour caractériser les faits de harcèlement moral, les griefs évoqués devant le Dr F et déjà rappelés dans les motifs précédents.

Toutefois la société Maincare, venant aux droits de la société Mc Kesson, démontre que :

— la mission du service 'supports clients’ consiste à fournir aux utilisateurs des logiciels édités par la société une assistance lorsqu’ils rencontrent une difficulté dans leur utilisation au quotidien, cette activité étant encadrée par un contrat de maintenance passé avec le client concerné, et se trouvant définie par de bonnes pratiques intitulées Itil, et rassemblant des recommandations et un processus de réponses (ses pièces 1 et 2), l’employeur étant fondé, dans l’exécution normale du lien de subordination, à exiger le respect de ces schémas de réponse, ce qu’a fait de manière normale, par des mails pondérés et pédagogiques Mme G, notamment en mars et septembre 2012,

— le support Mckph concerne la 'hot line du logiciel gestion de paye’ et était confié à deux salariées, travaillant en binôme, soit, en octobre 2011, Mme X au niveau 1 et Mme Y au niveau 2, les pièces 3, 3 bis et 3 ter de l’employeur confirmant la répartition des prestations en résultant, Mme X devant seulement identifier et résoudre les problématiques les plus simples et Mme Y devant, compte tenu de compétences techniques supérieures et complémentaires, analyser les incident plus complexes et y remédier, voire transmettre à une autre équipe plus spécialisée, Mme X critiquant ainsi sans pertinence la comparaison de ses compétences avec celles de Mme Y, correctement et légitimement mises en oeuvre par sa hiérarchie,

— la notion de binôme impliquait qu’en cas d’absence de Mme Y, Mme X pouvait être amenée à intervenir à sa place, dans la limite de l’urgence et de ses compétences, le but étant seulement de ne pas laisser le client sans réponse immédiate, ainsi que régulièrement rappelé par mail à Mme X,

— l’attestation de M. B, qui reprend le contenu d’un mail daté du 25 avril 2012, par lequel il critiquait le travail en binôme et refusait d’assurer le service support client durant les congés de Mme Y coïncidant avec l’absence de Mme X en arrêt de travail, permet seulement de retenir que ce salarié n’appréciait pas la nouvelle réorganisation mise en place, car selon lui, 'les mini-équipes de 2 personnes étaient fragilisées en cas de cumul d’absences imprévues et les salariés se trouvaient cantonnés dans des fonctions très spécialisées n’apportant aucun épanouissement personnel', sans qu’il se déduise de ce commentaire isolé une réorganisation fautive mise en oeuvre par l’employeur, celui ci ayant seulement exercé son pouvoir de direction, sans générer une souffrance au travail par cette distribution des tâches,

— en effet, Mme E, déléguée du personnel, M. C, son suppléant, et M. I, membre du Chsct, attestent ne pas avoir été saisis de cas de souffrance au travail dans l’entreprise, et plus particulièrement ne pas avoir été sollicités par Mme X à ce titre, ni même par d’autres salariés dans son intérêt, alors même que l’intéressée leur adressait des mails professionnels, auxquels ils apportaient des réponses, Mme X alléguant ainsi sans pertinence d’un éloignement géographique entre le siège de la société, où se trouvaient les représentants du personnel et son lieu de travail,

— l’expérience antérieure de Mme X lui permettait d’exercer les fonctions du support Mckph, puisqu’elle les occupait quelques jours par mois dès octobre 2007, avait reçu la documentation nécessaire à la même date et bénéficié au surplus de la formation interne, ainsi que mentionné sur son évaluation avril 2007-mars 2008, à l’occasion de laquelle elle a seulement insisté sur l’organisation de formations Oracle et Unix de base, un mail de l’ancien directeur des ressources humaines en date du 12 février 2010 confirmant qu’elle avait reçu ces formations,

— dans son évaluation avril 2010-mars 2011, Mme X a mentionné qu’elle occupait le poste support Mckph niveau 1 depuis 3,5 ans, ce qui confirme une expérience installée depuis 2007 dans cette mission,

— contrairement à ce que soutient Mme X, elle n’a pas demandé de formation complémentaire sur le support Mckph, puisqu’elle a seulement réclamé, d’une part, une formation théorique Sql/ Oracle, lors de l’évaluation avril 2010-mars 2011, signée le 10 juin 2011, tout en estimant, dans son auto-évaluation 'assurer le support Mckph’ et 'd’effectuer du support 2 à titre exceptionnel’ de manière satisfaisante en remplissant les objectifs fixés, appréciation validée par Mme A, ancienne responsable du service support clients, et, d’autre part, une formation Sql et un vernis technique pour assurer le niveau 2 du support Mckph, lors de l’évaluation avril 2011-mars 2012, menée par Mme G, nouvelle responsable de ce service. L’employeur a effectivement répondu à Mme X que les formations sollicitées répondaient surtout aux exigences du niveau 2, ce que confirme l’offre d’emploi passée par la société Maincare, venant aux droits de la société Mc Kesson, le 17 avril 2013, et les reproches notés dans l’évaluation de Mme X ont concerné l’exécution de missions niveau 1, le défaut d’organisation des formations demandées n’ayant donc pas eu d’impact sur l’appréciation annuelle de la salariée et ne l’ayant pas mise systématiquement en difficulté,

— en effet, en tout état de cause, Mme X considérait qu’elle n’avait pas la compétence suffisante pour satisfaire aux demandes de niveau 2, en l’absence de Mme Y et refusait donc de les traiter et Mme G lui a seulement demandé d’enregistrer la demande des clients et d’en garder la trace, l’intérêt de l’entreprise étant de maintenir la réalité d’un accueil en cas d’urgence, ainsi que déjà relevé,

— contrairement aussi à l’argumentation de Mme X, le curriculum vitae de Mme G, produit aux débats, révèle une expérience professionnelle certaine, acquise depuis au moins mai 2001, dans la maintenance et le support produits, puisqu’elle était depuis cette date, déjà responsable d’un tel service, chez un éditeur de progiciel bancaire, les motifs précédents ayant déjà noté qu’aucun autre salarié ne s’était plaint de ses méthodes de management,

— par mail valant note de service daté du 13 septembre 2011, Mme A a informé l’ensemble de salariés de la société Mc Kesson France, que Mme G, sa remplaçante, étendait son champ d’intervention, dans le cadre d’un projet d’homogénéisation et de modernisation du support clients, la nouvelle supérieure hiérarchique de Mme X disposant ainsi des prérogatives l’autorisant, d’une part, à lui demander, lors de l’entretien de mi-évaluation, tenu le 25 novembre 2011, puis dans l’évaluation définitive d’avril 2012, de s’adapter aux processus mis en place et à l’organisation du travail, en soulignant que les schémas définis (et déjà discutés) n’étaient pas respectés et que les comptes rendus n’étaient pas tous rédigés, ce qui méconnaissait l’exigence de traçabilité et compliquait le travail en équipe, et, d’autre part, à souligner qu’elle n’atteignait pas les objectifs fixés, le bien fondé de ces remarques étant établi notamment par les pièces 32,33, 34, 35, 37, 44 et 45 de la société Maincare, venant aux droits de la société Mc Kesson,

— contrairement également à ce que soutient Mme X, ses évaluations antérieures ont retenu un manque de 'productivité’ et une 'dispersion', le manager 2007-2008 lui demandant de 'mieux se concentrer sur son travail’ et de 'mettre à profit ses instants de répit sur la hot line, pour être active dans l’amélioration de ses compétences sur le produit', et les appréciations données par ses managers successifs comportant, de manière constante, une majorité de 3 ou 4, correspondant aux critères de 'réponse aux attentes’ (3) et 'd’amélioration nécessaire’ (4) à l’exclusion de 'au delà des attentes dans quelques domaines’ (2) et de 'exemplaire, au delà des attentes dans tous les domaines’ (1),

— l’entretien de mi-évaluation de la salariée s’est tenu le 25 novembre 2011 par L-M, dès lors que Mme X avait été convoquée initialement pour le 8 novembre 2011, avec d’autres salariés, Mme G envisageant de se déplacer de Bordeaux à Poitiers à cette date, mais avait été placée en arrêt de travail, sa supérieure hiérarchique proposant alors une L-M acceptée par la salariée, ce mode d’entretien, conforme aux moyens modernes de communication, ne s’analysant pas comme la mise en oeuvre d’une méthode vexatoire,

— Mme G a, en tout état de cause, reçu ensuite Mme X le 11 avril 2012, avant de lui notifier son évaluation définitive, que la salariée a refusé de signer, au motif qu’elle ne la comprenait pas, sa supérieure hiérarchique lui adressant un mail explicatif détaillé, le 18 avril 2012, et le désaccord de la salariée avec l’appréciation de son travail ne la dispensant pas de signer le document concerné, ainsi qu’exactement et sans excès rappelé par la responsable du service,

— Mme A, par mail du 19 octobre 2011, avait rappelé à Mme X mais aussi à Mme Y, qu’en raison de la continuité du service de maintenance, elles devaient s’organiser pour leurs congés, afin que la moitié des effectifs, soit une personne, soit toujours présente, et, qu’à défaut de consensus, une alternance serait décidée pour les congés d’été et de fin d’année, cette directive répondant aux besoins et nécessités du service et ne caractérisant pas un excès de pouvoir hiérarchique, les récriminations de Mme X, adressées à ses supérieurs hiérarchiques étant ainsi dénuées de pertinence,

— plus particulièrement Mme X a invoqué le 10 avril 2012 un motif personnel, dont elle n’a pas précisé la nature, pour estimer devoir bénéficier de congés incluant la journée du 27 avril 2012, ce qui lui a été refusé, Mme Y devant être en congés à cette date, l’employeur étant ainsi en droit de s’interroger sur la sincérité d’un arrêt de travail prescrit du 24 au 27 avril 2012 et de décider de faire contrôler l’état de santé de la salariée,

— le contrôleur médical a estimé expressément, à l’issue de la visite réalisée le 27 avril 2012 à 15h, que l’arrêt de travail n’était plus justifié pour raisons médicales ce jour, Mme X ne pouvant donc considérer que la société Mc Kesson a 'interprété’ cet avis en la privant à tort de rémunération pour la journée du 27 avril 2012, l’organisme de contrôle ayant rectifié son appréciation seulement le 14 juin 2012, après intervention de Mme X puis de son conseil, et dépôt d’une plainte pour dénonciation calomnieuse,

— par mail du 21 septembre 2012 Mme G s’est étonnée auprès de Mme X qu’elle soit en arrêt de travail pour maladie précisément les jours où elle avait annoncé se déplacer à Poitiers pour rencontrer les équipes, en novembre 2011, janvier, février et septembre 2012, cette remarque sur les coïncidences de date étant objectivement exacte et légitimant les contrôles de l’état de santé de la salariée décidés par l’employeur, les 24 février 2012, 27 avril 2012 et le 2 novembre 2012, alors que les arrêts de travail prescrits étaient d’une durée limitée à 3 jours, ce qui suffisait à les rendre suspects, en raison de la coïncidence de date, sans qu’il s’en déduise un acharnement mis en oeuvre par la société Mc Kesson, peu important que le médecin contrôle ait estimé les arrêts de travail médicalement fondés, les contrôles mis en oeuvre n’étant pas, compte tenu de leur contexte, abusifs,

— Mme X devait suivre une formation intitulée 'éthique et déontologique', obligatoire et annuelle, ainsi que rappelé par mail du 5 janvier 2011, elle y a été convoquée à plusieurs reprises, les mails du 2 juillet 2012 et du 3 juillet 2012 fixant la formation au 2 août 2012, sans qu’elle s’y conforme. A plusieurs mails de rappel envoyés notamment par Mme G les 7 et 10 septembre 2012, puis par M. H, directeur et directeur qualité et relations clients, les 11 et 12 septembre 2012, la salariée a répondu tout d’abord, qu’elle avait déjà suivi cette formation le 8 février 2011, puis, qu’elle était surchargée. Or ses supérieurs hiérarchiques ont, de manière récurrente, insisté sur le caractère annuel et obligatoire de cette formation, dont la durée était limitée à une heure, vérifié que son emploi du temps n’était pas surchargé et Mme G a même organisé le remplacement de Mme X pour lui permettre de suivre cette formation, la salariée soutenant à tort avoir reçu des ordres contradictoires, sauf à omettre de prendre en compte la teneur des échanges de mails successifs et leur nécessaire décalage dans le temps, son supérieur hiérarchique apportant à chaque fois des réponses à ses commentaires. Enfin Mme X a accepté de suivre la formation concernée le 13 septembre 2012, entre 15h et 16h, sur demande insistante de Mme G, cette exécution tardive ne l’exonérant du comportement d’insubordination caractérisé et persistant, sanctionné à juste titre par un blâme remis le 17 octobre 2012, cet exercice de son pouvoir disciplinaire par l’employeur n’étant pas disproportionné,

— par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 octobre 2011 adressée à Mme D, Mme X a contesté cette sanction, en alléguant d’une 'réunion surprise’ le 17 octobre 2012, en rappelant les motifs du refus de suivi de la formation concernée, en ajoutant que 'son éthique personnelle’ était contraire à celle développée dans la formation, et en dénonçant 'des pressions subies depuis plusieurs mois dans le cadre professionnel'. Mme D lui a répondu, par des motifs pertinents, vérifiables au vu des pièces communiquées et exacts, le 22 novembre 2012, que l’entretien du 17 octobre 2012, destiné à remplacer celui fixé le 20 septembre 2012 pour lequel elle avait été en arrêt de travail, avait été annoncé par plusieurs messages mails ou téléphoniques auxquels elle n’avait pas estimé opportun de réagir, que les motifs allégués pour se dispenser d’assister à la formation étaient inopérants, que son insubordination était caractérisée, que la sanction était maintenue, et que, s’agissant des pressions subies, un entretien était fixé le 13 décembre 2012 au siège social, l’argumentation de l’employeur étant appropriée et sa réaction ne méconnaissant pas, dans un temps rapide, les doléances exprimées par Mme X sur ses conditions de travail, la salariée ne pouvant ainsi arguer d’une méconnaissance de sa souffrance,

— par lettre du 12 décembre 2012, Mme X a indiqué à Mme D se trouver en arrêt de travail, ne pouvoir ainsi se rendre à l’entretien fixé, a énoncé les griefs déjà discutés dans les motifs précédents, a estimé que son employeur niait l’existence des pressions subies, et a prétendu que M. H avait usé de violences verbales à son encontre, le 17 octobre 2012, ce qu’elle n’établit pas, même par un commencement de preuve,

— à cette occasion Mme X a rappelé avoir adressé un mail le 17 octobre 2011 signalant sa situation de stress, avoir eu un entretien téléphonique avec Mme D le 20 octobre 2011 entre 9h30 et 10h, celle ci lui ayant alors indiqué, au sujet de la nouvelle organisation induisant de nouvelles contraintes sur les congés, 'c’est le pouvoir de l’employeur'. Or Mme D atteste que Mme X a évoqué, à l’occasion de cet entretien téléphonique, son état de stress lié au refus de sa hiérarchie de lui accorder les congés qu’elle souhaitait, alors qu’elle ne parvenait pas à trouver un consensus avec sa collègue, la situation étant ainsi bloquée. La directeur des ressources humaines a alors informé Mme X qu’elle envisageait une prise de congés en alternance, ce qui a été concrétisé par le mail du 19 octobre 2011 de Mme A, déjà discuté, les motifs précédents ayant également répondu sur l’organisation des congés et les réactions de la salariée à ce sujet,

— au 17 octobre 2011, Mme G, récemment arrivée dans l’entreprise en qualité de responsable du service supports, n’avait pas encore évalué Mme X, la salariée soulignant qu’elle était appréciée de l’ancienne responsable Mme A, ce qui suffit pour retenir que le stress allégué dans le mail précité concernait effectivement et seulement l’organisation des congés, Mme X n’appréciant pas, ainsi que déjà observé, le travail en binôme, sans qu’il s’en déduise des faits de harcèlement moral consécutifs à un management agressif, ni un défaut de réaction de l’employeur face à ces faits,

— enfin Mme X procède par affirmation pour soutenir avoir été mises à l’écart, la photographie de son bureau, dont elle a changé une fois, en septembre 2011, et non à plusieurs reprises comme elle le prétend, étant communiquée par l’employeur, et ne démontre pas plus avoir été victime de propos insultants et de reproches incessants et infondés de la part de Mme G.

Il se déduit de ces motifs, que les faits reprochés à la société Mc Kesson, pris dans leur ensemble, ne caractérisent pas l’existence d’un harcèlement moral répondant à la définition légale et qu’en tout état de cause, l’employeur n’a pas commis des faits répétés ayant dégradé les conditions de travail et l’état de santé de Mme X mais seulement pris des décisions légitimes, normales et justifiées, désapprouvées par la salariée.

Par ailleurs Mme X a régulièrement reçu des réponses détaillées et explicatives à ses demandes.

En conséquence la cour confirmera la décision déférée en ce qu’elle a débouté Mme X de ses demandes afférentes à l’existence d’un harcèlement moral rendant nul le licenciement pour inaptitude.

Sur la clause de non concurrence

Les premiers juges ont expressément et exactement rappelé les termes de la clause de non concurrence énoncée à l’article 5 du contrat de travail du 1er juillet 2000, la cour se référant sur ce point à la décision déférée.

Ils ont à bon droit retenu qu’elle contenait une condition potestative, dès lors qu’il n’était pas prévu une application automatique de la clause de non concurrence, la société Mc Kesson devant en revanche informer la salariée de son intention 'de faire jouer cette clause, par écrit, dans les 30 jours calendaires suivant la notification du licenciement'.

Il s’en déduit que la clause de non concurrence est nulle, ainsi que retenu par les premiers juges.

Les premiers juges ont considéré que l’indemnité devant être versée à Mme X correspondait à la contrepartie financière définie dans la clause de non concurrence, soit 40% de la moyenne mensuelle de la rémunération brute perçue par Mme X au cours des douze derniers mois de présence dans l’entreprise, sur une durée de 12 mois, compte tenu d’une présence dans l’entreprise de plus de 6 ans, ce qui caractérise l’application de la clause de non concurrence dont la nullité a pourtant été prononcée.

La société Maincare, venant aux droits de la société Mc Kesson, est donc fondée à critiquer cette appréciation.

Mme X a ainsi seulement droit à l’indemnisation du préjudice résultant d’une clause de non concurrence la plaçant dans l’incertitude, faute de connaître l’intention de l’employeur sur son exécution, la cour s’estimant suffisamment informée, compte tenu du contexte, pour limiter à la somme de 5 000 euros sa réparation intégrale.

Sur la régularisation du salaire

Par lettre du 4 juillet 2013 Mme X a exactement rappelé à la société Mc Kesson que, l’avis d’inaptitude étant intervenu le 29 avril 2013 et son licenciement n’ayant pas été prononcé, l’employeur devait reprendre le paiement de son salaire intégral, en application notamment de l’article L 1226-4 du code du travail.

Il s’en déduit que Mme X devait à nouveau être rémunérée à partir du 29 mai 2013, ce que ne conteste pas l’employeur, ce, jusqu’au 5 juillet 2013.

Les premiers juges ont considéré, à partir des bulletins de salaire, que Mme X avait été remplie de ses droits, et l’ont déboutée de sa demande de paiement d’une somme de 2 913,64. euros brut.

Les parties admettent que la société Mc Kesson régularisait les paies sur le mois suivant, le bulletin de paie du mois M faisant ainsi état des absences du mois M-1.

Toutefois, ce raisonnement implique que la reprise du paiement du salaire du 29 mai au 5 juillet 2013 devait figurer sur les bulletins de salaire de juin et juillet 2013, aucun autre bulletin de salaire n’ayant ensuite été délivré à Mme X.

Or Mme X soutient exactement que les sommes correspondant à la reprise de son salaire ont été mentionnées, sur ces deux derniers bulletins de salaire, tout à la fois en montant à ajouter et à déduire, et qu’elles ne lui ont donc pas été versées.

En conséquence la cour réformera la décision déférée et condamnera la société Maincare, venant aux droits de la société Mc Kesson, à payer la somme de 2 913,64 euros brut.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société Maincare, venant aux droits de la société Mc Kesson, qui succombe, même partiellement, sera condamnée aux dépens.

L’issue de l’appel, l’équité et les circonstances économiques commandent de ne pas faire droit à l’indemnité prévue par l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Réforme la décision déférée en ce qu’elle a statué sur l’indemnisation de la clause de non concurrence nulle et en ce qu’elle a débouté Mme X de sa demande de régularisation de salaire et statuant à nouveau de ces chefs :

Condamne la société Maincare, venant aux droits de la société Mc Kesson, à payer à Mme X, outre intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes, les sommes de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour clause de non concurrence nulle et de 2 913,64 euros brut au titre de la régularisation de salaire ;

Confirme pour le surplus la décision déférée ;

Y ajoutant :

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions ;

Condamne la société Maincare, venant aux droits de la société Mc Kesson, aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 27 mai 2015, n° 14/03610