Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 7 janvier 2022, n° 19/00523

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 8e ch prud'homale, 7 janv. 2022, n° 19/00523
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 19/00523
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

8ème Ch Prud’homale

ARRÊT N°11


N° RG 19/00523 -


N° Portalis DBVL-V-B7D-PPL4

SARL SAMFI SERVICES

C/

M. F G


Infirmation partielle


Copie exécutoire délivrée

le :

à :


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 JANVIER 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L’HENORET, Président de chambre,

Monsieur F BELLOIR, Conseiller,

Monsieur Emmanuel ROCHARD, Conseiller,

GREFFIER :

Monsieur F H, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :


A l’audience publique du 15 Octobre 2021

devant Monsieur Rémy LE DONGE L’HENORET, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial


En présence de Madame I J, Médiatrice judiciaire

ARRÊT :


Contradictoire, prononcé publiquement le 07 Janvier 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

La SARL SAMFI SERVICES prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[…]

[…]


Ayant Me Florianne PEIGNE de la SELARL SELARL LARZUL BUFFET LE ROUX PEIGNE MLEKUZ,Avocat au Barreau de RENNES, pour postulant et

représentée à l’audience par Me Q MORICE, Avocat plaidant du Barreau de CAEN

INTIMÉ :

Monsieur F G

né le […] à […]

demeurant […]

[…]


Présent à l’audience et représenté par Me Camille SUDRON substituant à l’audience Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Avocats postulants du Barreau de RENNES et par Me Jean-Edouard ROBIOU DU PONT de la SELARL CABINET D’AVOCATS PARROT – ROBIOU DU PONT, Avocat plaidant du Barreau de NANTES


Le contrat de travail de M. F G embauché par la société RDPP le 1er décembre 2001 en qualité de directeur régional a été transféré en application de l’article L.1224-1 du code du travail au sein de la société MEDIALINE, repreneuse du fonds de commerce de la société RDPP.

M. F G a fait valoir ses droits à la retraite au 30 juin 2015 et l’ensemble de ses droits, dont les congés payés, ont été soldés.


Le 1er juillet 2015, M. F G a été embauché par la SARL SAMFI SERVICES en qualité de Directeur d’agence dans le cadre d’un dispositif cumul emploi-retraite et percevait dans le dernier état des relations contractuelles régie par la convention collective SYNTEC, un salaire mensuel moyen de 7.091,57 € brut, de la mise à disposition d’un véhicule de type espace pour ses déplacements professionnels et privés et d’un téléphone portable.


Le 7 novembre 2016, M. F G a fait l’objet d’une convocation à un entretien préalable fixé au 16 novembre 2016, avant d’être licencié par lettre du 5 décembre 2016 pour cause réelle et sérieuse.


Le 25 avril 2017, M. F G a saisi le conseil de prud’hommes de Nantes aux fins de :

A titre principal, ' Constater que M. F G a été licencié par mail du 4 novembre 2016 sans aucun motif,

A titre subsidiaire,

' Constater que le réel motif du licenciement résultant de la lettre du 5 décembre 2016 est un motif économique,

En toute hypothèse,

' Dire, en conséquence, sans motif réel et sérieux et abusif le licenciement,

' Constater que l’ancienneté de M. F G ressort au 1er décembre 2001,

' Condamner la SARL SAMFI SERVICES au paiement des sommes suivantes :


- 36.114,47 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,


- 84.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,


- 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

' Exécution provisoire de la décision à intervenir.


La cour est saisie de l’appel formé par la SARL SAMFI SERVICES le 24 janvier 2019, contre le jugement en date du 10 janvier 2019 notifié le 14 janvier 2019, par lequel le conseil de prud’hommes de Nantes a :

' Dit que M. F G n’a pas été licencié par un mail du 4 novembre 2016 et que la procédure de licenciement a bien été respectée,

' Dit que le licenciement de M. F G n’est pas dû à un motif économique,

' Dit que le licenciement de M. F G est abusif et dépourvu de cause réelle et sérieuse,

' En conséquence, condamné la SARL SAMFI SERVICES à verser à M. F G les sommes suivantes :


- 36.114, 47 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,


- 42.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,


- 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

' Limité l’exécution provisoire du présent jugement à l’exécution provisoire de droit définie à l’article R. 1454-28 du code du travail et, à cet effet, fixé à 7.091,57 € le salaire mensuel moyen de référence,

' Reçu la SARL SAMFI SERVICES en ses demandes reconventionnelles, mais l’en a déboutée,

' Condamné la SARL SAMFI SERVICES aux dépens éventuels.


Vu les écritures notifiées par voie électronique le 11 avril 2019, suivant lesquelles la SARL SAMFI SERVICES demande à la cour de :
' Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :


- Dit que le licenciement de M. F G est abusif et dépourvu de cause réelle et sérieuse,


- Condamné la SARL SAMFI SERVICES à verser à M. F G les sommes suivantes :


- 36.114, 47 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,


- 42.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,


- 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,


- Condamné la SARL SAMFI SERVICES aux dépens,

' Débouter en conséquence M. F G de l’intégralité de ses réclamations salariales et indemnitaires,

A titre subsidiaire,

' Réduire à de plus justes proportions le montant de dommages-intérêts alloués sur le fondement de l’article L.1235-5 du code du travail,

' Condamner M. F G à verser à la SARL SAMFI SERVICES une indemnité d’un montant de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.


Vu les écritures notifiées par voie électronique le 9 septembre 2021, suivant lesquelles M. F G demande à la cour de :

' Déclarer la SARL SAMFI SERVICES non fondée en son appel et en ses contestations et demandes, l’en débouter,

' Confirmer le jugement entrepris sauf en ce qui concerne l’article 700 du code de procédure civile,

' Infirmer le jugement entrepris au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamner la SARL SAMFI SERVICES à payer à M. F G la somme de 4.000 €, en application de l’article 700 du code de procédure civile, pour la première instance et 4.000 € en cause d’appel,

' Condamner la même aux entiers dépens d’appel, avec application de l’article 699 du code de procédure civile.


La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 30 septembre 2021.


Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées via le RPVA.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le bien-fondé du licenciement :


Pour infirmation et débouté du salarié, la SARL SAMFI SERVICES soutient que le licenciement de M. G est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse et ne présente aucun caractère abusif, qu’il lui est reproché de nombreux griefs mettant en évidence :
- son insubordination et les manquements à ses obligations de management,


- le non-respect par M. F G des objectifs et du budget alloué,

qu’à l’évidence, il a refusé de se conformer à la politique commerciale et de management de son nouvel employeur, préférant ne pas se remettre en cause, s’abstenant de remonter les éléments concernant la gestion de son personnel, de respecter les procédures concernant le paiement des loyers d’emplacement notamment en juillet 2016, sous couvert d’excuses inopérantes.


La SARL SAMFI SERVICES ajoute que le retard de paiement ayant perduré jusqu’en septembre 2016, la prescription des faits ne peut lui être opposée, qu’il en est de même pour la mise à jour de la base AFFIXE dont il avait connaissance, qu’il s’est affranchi de l’interdiction de faire intervenir M. X en dépit des rappels et de la procédure pour les demandes d’interventions ou de congés, qu’il n’a pas atteint les objectifs fixés pourtant accessibles, que sa responsabilité est entière concernant les mauvais résultats de l’agence de Nantes, compte tenu de l’autonomie dont il disposait, sans pouvoir se retrancher derrière l’impact du changement de réglementation, ainsi que concernant le dépassement du budget fixé.

M. F G rétorque que le principe de son licenciement était déjà définitivement acquis, sans aucun respect de la procédure et sans lettre de licenciement comprenant des motifs, qu’il en a pris acte, que le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse et partant abusif, que le licenciement en réalité fondé sur un motif économique, a par la suite été formalisé.

M. F G réfute les griefs qui lui sont imputés qu’il s’agisse de l’insubordination ou du non-respect des objectifs et du budget, arguant de ce que le licenciement a été prononcé pour faute mais que le réel motif de la rupture est économique, qu’en toute hypothèse, la rupture de son contrat de travail était décidée dès avant sa convocation à l’entretien préalable, ce qui suffit à lui ôter tout caractère réel et sérieux.

M. F G entend préciser qu’il ne dirigeait pas l’agence MEDIA LINE Nantes, qu’il n’agissait que sur la base des consignes de M. Y qui engageait seul les dépenses, fut ce parfois sur sa proposition, qu’il ne disposait d’aucune autonomie pour gérer une société dont il n’était même pas salarié.


Selon l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.


Ainsi l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.


En application des dispositions de l’article L1332-4 du Code du travail, aucun fait fautif ne peut, à lui seul, donner lieu à l’engagement de poursuites disciplinaires au delà de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance ; lorsqu’un fait fautif a eu lieu plus de deux mois avant le déclenchement des poursuites disciplinaires, il appartient à l’employeur de rapporter lui-même la preuve qu’il n’en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l’engagement de la procédure disciplinaire ; l’existence de faits commis dans cette période permet l’examen de faits plus anciens relevant du même comportement, reproduits dans la période ;


Il résulte notamment de ces principes que seuls les faits dénoncés dans la lettre de licenciement doivent être pris en compte à condition qu’ils ne soient pas antérieurs de plus de deux mois à l’engagement de la procédure, exclusion faite de faits relevant éventuellement du même comportement s’ils n’ont pas été invoqués, exclusion faite plus encore de faits relevant d’un autre comportement, spécialement s’ils sont antérieurs de plus de deux mois.


L’insuffisance de résultats ne peut constituer, en soi, une cause de licenciement. Il appartient au juge de rechercher si les mauvais résultats allégués procèdent d’une insuffisance professionnelle ou d’une faute imputable au salarié ou de son incapacité à atteindre les objectifs fixés et de vérifier si les objectifs fixés au salarié lors de l’accomplissement de sa prestation de travail, qui peuvent être définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, étaient ni excessifs, ni irréalisables, mais au contraire réalistes.


Par ailleurs, les juges qui constatent que l’employeur s’est placé sur le terrain disciplinaire, doivent examiner l’ensemble des motifs mentionnés dans la lettre de licenciement, et doivent dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse s’ils retiennent qu’aucun d’entre eux, dont certains relèvent de l’ insuffisance professionnelle, ne présente de caractère fautif, ni ne résulte d’une mauvaise volonté délibérée du salarié ;


La lettre de licenciement qui circonscrit les limites du litige et qui lie le juge, est ainsi rédigée :

'(…)nous sommes au regret de vous notifier votre licenciement pour les motifs suivants :

Insubordination et manquement à vos obligations de management

En effet, plusieurs reproches vous ont été faits :

- Vous ne remontez pas systématiquement les différents éléments concernant la gestion administrative de votre personnel. Il nous arrive d’apprendre par hasard l’absence d’un membre de votre équipe alors que vous ne nous en avez pas averti avant.

- Vous nous avez envoyé un mail en date du 26 août 2016 pour nous informer que les bailleurs eux-mêmes se plaignent que leur loyer de juillet 2016 ne leur a pas été réglé alors qu’une procédure existe et que tous les loyers doivent être payés le 5 de chaque mois. Nous nous permettons de vous rappeler la procédure à suivre : la liste des bailleurs à régler doit être validée et envoyée tous les mois à la Direction pour mise en paiement. En tant que Directeur de l’agence de

Saint Herblain, vous êtes garant du bon fonctionnement des procédures à appliquer et de ce fait des règlements des bailleurs qui dépendent de votre agence.

- Non suivi des mises à jour informatique dans le logiciel AFFIXE. Force est de constater que la base de donnée n’est pas mise à jour et ce, malgré plusieurs relances de notre part à votre équipe.

- Vous n’avez pas respecté les consignes qui vous ont été dictées par la Direction à savoir : en date du 16 septembre

2016, nous vous avions demandé de ne plus traiter avec Mr X. Par retour de mail le 20 septembre 2016, vous nous informez faire de nouveau appel à Mr. Z pour traiter une demande qui vous semble sans autre solution. Ce même jour, la Direction vous réitère l’ordre de ne pas travailler avec cette personne.

- Vous ne produisez pas les ordres de travail pour le service technique tels qu’ils vous sont demandés. Une procédure a été mise en place au sein de la société afin de simplifier et optimiser le travail pour tous. Vous continuez à déroger à cette procédure en envoyant vos demandes d’intervention par simples mails qui ne contiennent pas toujours l’ensemble des renseignements demandés dans l’ordre de travail. Cette remarque vous a été formulée à plusieurs reprises oralement et également par écrit dans un mail de la Direction en date du 22 septembre dernier.

Non-respect des objectifs et du budget alloué

- Au prorata mensuel du chiffre d’affaire annuel de vos objectifs qui vous ont été fixés d’un commun accord et selon les comptes arrêtés au 31/08/2016, vous deviez réaliser un chiffre d’affaire de 1 006 K€ alors que vous n’avez fait que 740

K€ soit un résultat négatif de 266 K€. - Au prorata mensuel du budget annuel attribué à l’agence de Saint Herblain et selon les comptes arrêtés au 31/08/2016, vous avez dépensé 599 K€ alors que le budget n’était que de 499 K€ soit un dépassement de 100 K€.

Ce comportement n’est pas en adéquation avec notre attente d’un poste de Directeur d’agence et tous ces manquements mettent l’agence de Saint Herblain et par conséquent la société MEDIALINE en péril. […]».


S’agissant de la décision de l’employeur de licencier M. F G, il ressort de l’échange de courriels produits par le salarié (pièce 10) que M. A lui a soumis trois propositions : 'soit la mise en place d’une rupture conventionnelle (…) soit l’enclenchement d’un licenciement pour faute (…) dernière solution : ta démission (…) Merci de revenir vers nous pour indiquer ton choix.


S’il ressort de ce courriel une volonté non équivoque de l’employeur de mettre un terme à la relation contractuelle entre la SARL SAMFI SERVICES et M. F G, il ne peut en être déduit comme l’affirme le salarié, 'que le principe de son licenciement était déjà définitivement acquis', le moyen tiré de cette circonstance étant par conséquent inopérant à remettre en cause le licenciement ultérieur du salarié qui de surcroît n’en indique pas le fondement précis.


S’agissant du premier grief, il est reproché au salarié de ne pas remonter systématiquement les différents éléments concernant la gestion administrative du personnel sans plus de précision, l’employeur produit à titre d’exemple un courriel (pièce 13) par lequel Mme B assistante de direction, informe Mme C et K Y qu’elle vient d’apprendre l’absence de L M le jour même et précise 'F G nous tiens (sic) au courant (si elle est arrêtée ou non)' duquel il ne peut être déduit que M. F G n’aurait pas informé sa direction de l’absence de la salariée, peu important que le courriel de Mme B ait été émis à 17h10, de sorte que le grief formulé à ce titre est dénué de caractère sérieux.


S’agissant de l’information par mail du 26 août 2016 du mécontentement des bailleurs concernant le non règlement du loyer de juillet 2016 en dépit de l’existence d’une procédure et de l’obligation du Directeur d’agence de s’assurer du règlement de tous les loyers le 5 de chaque mois, contrairement à ce que soutient l’employeur, il n’est produit aucun élément permettant d’être assuré que les bailleurs n’avaient pas perçu leur loyer avant le 6 septembre 2016 inclus, étant relevé qu’il résulte du courriel du 29 août 2016 de M. F G que la salariée n’avait pas été mesure du fait du décalage imposé de ses congés et de consignes de priorisation d’autres tâches dès le mois de juin par la direction, de procéder à la préparation de ces règlements selon une procédure très lourde sur une application informatique (base Affixe) comportant des erreurs.


En conséquence, c’est à juste titre que les premiers juges ont déclaré prescrit ce grief, par ailleurs infondé.


En ce qui concerne l’absence de suivi des mises à jour informatiques dans le logiciel AFFIXE, la société procède par affirmation quand elle soutient, sans produire d’autre pièce que la pièce 14 précitée dans laquelle M. F G indique qu’elle comporte encore trop d’erreurs, que M. F G n’aurait pas assuré ce suivi dès lors qu’il résulte également de cette pièce que les méthodes mises en place et suivies par Mme L M tendent à un résultat zéro défaut et par conséquent quand elle soutient sans autrement le démontrer que les mises à jour n’auraient pas été effectuées avant le mois de septembre.


Il doit être par ailleurs relevé que le courriel du 11 mai 2016, invoqué par l’employeur (pièce 18 salarié) comme comportant l’aveu de M. F G concernant l’important nombre d’erreurs du logiciel AFFIXE, supporte en interligne les réponses de M. F G avec une police différente de celle des sujets précédemment abordés dont l’affirmation qui lui est attribuée à tort.


Le grief imputé à M. F G à ce titre est non seulement prescrit mais également dénué de réalité.


Pour tenir pour établi le non respect des consignes de son employeur, ce dernier invoque un courriel du 22 septembre 2016 (Pièce 17) par lequel il enjoint à M. F G de ne plus faire intervenir M. X, sans aucune autre pièce permettant d’accréditer l’idée que M. F G aurait persisté à le solliciter, étant relevé à cet égard que dans le cadre d’un échange de courriels du 20 septembre 2016 (infra pièce 10 employeur) concernant la nécessité de recourir à un camion grue pour la pose ou la dépose de diverses installations, M. F G tout en rappelant les dates butoirs et le seul recours possible à M. X, précise attendre les instructions de son interlocuteur M. Y à ce titre.


Il résulte de la même pièce que le 9 décembre 2016, M. F G a adressé une liste d’ordres de travaux à M. D pour la semaine 50, avec M. N E en copie, mentionnant OT jointes, sans qu’aucun élément ne démontre que les pièces n’étaient pas jointes, d’autant plus que tant la réponse de M. E se borne à relever que le délai est trop court, l’absence d’OT évoquée dans le courriel du 13 décembre de M. K Y n’étant pas en soi établie dès lors qu’aucune information n’est produite sur la manière dont il avait été destinataire du courriel initial de M. F G, telle que par exemple la transmission en copie cachée de la seule réponse de M. E, exclusive de la transmission des pièces jointes.


En ce qui concerne les autres courriels produits (infra pièce 10) concernant les BAT validés pour le LIDL FONTENAY que le 13 décembre 2016, M. F G a adressé à M. E les 4 BAT signés, qu’il a restransmis son courriel à Technique CDP deux heures plus tard, que sous l’adresse PAO CDP, Sélim lui a adressé le 15 décembre à 14h52, les corrections sollicitées en mettant 'Technique CDP’ en copie, que dans la continuité de l’échange, M. F G a adressé au même Sélim le BAT Lidl Fontenay validé (sic) à 15h07 et a été destinataire le 16 décembre 2016 dès 8h59 d’un courriel de M. E, lui demandant de ne pas passer directement par Sélim pour l’envoi des BAT, faisant suite à une réaction du responsable technique Grand-Est, s’étonnant que M. F G adresse les BAT en direct à Sélim sans passer par lui.


Outre qu’il résulte de l’enchaînement des événements concernant l’exécution des BAT litigieux tel qu’il résulte des pièces produites, que M. F G n’avait aucune intention de s’affranchir de son obligation de passer par M. E qu’il avait saisi ab-initio, que les réalisations demandées avaient un caractère d’urgence pouvant justifier que les BAT validés après correction soient directement adressés au service PAO.


Dans les circonstances rapportées, le grief tenant au refus de se soumettre aux procédures en vigueur ne revêt aucun caractère sérieux.


En ce qui concerne l’imputabilité à M. F G du dépassement du budget alloué au 31 août 2016, il y a lieu de relever que le contrat de travail auquel les deux parties se réfèrent, a été conclu entre la SARL SAMFI SERVICES-Services et M. F G, ce dernier engagé en qualité de Directeur d’agence, ayant au terme de l’article 4 du contrat précité, pour attributions dans le cadre d’un contrat de sous-traitance auprès de sociétés présentes dans le secteur de l’affichage urbain de: 'Animer l’agence de Nantes, Développer les marchés de l’entreprise tant au niveau patrimonial qu’au niveau clientèle, Accompagner la Société dans des opérations de croissance externe', étant précisé que 'cette liste de mission (sic) peut être amenée à évoluer et n’est pas limitative', aucune disposition de ce contrat ne prévoyant expressément sa mise à disposition invoquée par l’employeur auprès de la société MEDIA LINE.


Pour autant, si M. F G ne s’explique pas clairement sur son positionnement au sein de la société MEDIA LINE dont il utilise l’adresse électronique et dans laquelle, il se trouve positionné dans une relation de subordination à l’égard de M. Y, l’ organigramme produit (pièce 18 employeur) ne peut à lui seul suffire à établir qu’il était placé sous la responsabilité de M. O P responsable commercial de cette société.


Le courriel du 30 septembre 2016 (pièce 19 employeur) de M. F G à destination de MM. E et Y constitue un relevé des travaux en attente, au terme duquel il précise qu’il reste à leur disposition pour échanger sur ces dossiers, ne permet aucune déduction quant aux prérogatives budgétaires de M. F G.


La délégation de pouvoirs (pièce 20 employeur) établie par M. Q A es-qualités de gérant de la société MEDIA LINE, donne pouvoir à M. F G de représenter la société MEDIA LINE et de signe les demandes de prélèvement bancaire relative au contrat REX ROTARY pour la location de matériel informatique, démontre contrairement à ce que soutient l’employeur que M. F G n’avait pas une délégation de pouvoirs générale pour engager la société au niveau de l’agence de Nantes.


Ni le courriel du 24 février 2016 adressé à M. Y (pièce 21) par lequel M. F G formule des propositions de modification de répartition de secteurs entre les différents commerciaux et émet son avis mais ne prend aucune décision, ni la transmission pour éventuel complément de la note relative aux demandes de travail, ne sont nature à caractériser l’autonomie alléguée par l’employeur dans la gestion de l’agence de Nantes.


Par ailleurs, ni la production d’une facture validée (pièce 23 employeur) pour une prestation réalisée ni la mise en place d’un logiciel (pièce 24 employeur) permettant à M. F G de valider les bons à payer ne sont suffisantes pour démontrer qu’il avait la capacité d’engager financièrement la société en toute autonomie.


De la même manière, l’envoi par la chargée de ressources humaines de la SARL SAMFI SERVICES à M. F G en qualité de responsable, d’une note sous forme de courriel (pièce 25) concernant le retour par les responsables des informations nécessaires à l’établissement de la paie, ne suffit pas à démontrer qu’il avait la responsabilité d’engager financièrement l’agence, ni plus que les tableaux concernant les différentes implantations (pièces 26 et 27) utiles à la gestion de l’agence.


Les éléments ainsi produits par l’employeur ne permettent pas de tenir pour acquis que M. F G disposait d’une autonomie dans l’engagement de l’ensemble des dépenses concernant l’agence, de sorte que le dépassement de budget au 31 août 2016 ne peut lui être imputé à faute.


Par ailleurs, s’agissant du non-respect des objectifs, il résulte des développements qui précèdent que l’employeur s’est placé sur le terrain disciplinaire et au delà du débat concernant le chiffre d’affaires à prendre en compte, tel que proratisé par l’employeur ou avancé par le salarié tel qu’arrêté sur le tableau de bord, il est d’autant moins établi que la non atteinte de l’objectif fixé revête un caractère fautif qu’en raison de la modification du cadre légal, de nombreuses déposes de panneaux publicitaires sont intervenues au cours de l’année 2015 et n’ont pas toutes été compensées par des réimplantations immédiates.


C’est par conséquent à juste titre que les premiers juges n’ont pas retenu ce grief à l’encontre du salarié.


Il doit non seulement être constaté qu’aucun des griefs invoqués par l’employeur n’est fondé mais il résulte du courriel du 28 juin 2016 de M. Y (pièce 16 employeur) adressé à M. A mais écrit comme étant adressé à M. F G, que la situation comptable de l’agence de Nantes le conduisait à attirer 'son attention sur le fait que sans inversion complète de la tendance', il serait dans 'l’obligation de prendre des mesures de réduction des charges plus douloureuses', étant 'belle et bien dans le maintien de notre agence du Grand Ouest', que le licenciement n’est pas exempt d’un motif économique.
Il y a lieu en conséquence de confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a déclaré le licenciement prononcé à l’encontre de M. F G dénué de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences de la rupture :

* Quant à la détermination de l’ancienneté de M. F G :


En l’espèce, il est constant que dans leur ensemble les bulletins de salaire de M. F G qui a été embauché dans le cadre d’un cumul emploi-retraite, portent d’une part la mention d’une entrée dans la société au 1er janvier 2015 et celle d’un début d’ancienneté au 1er janvier 2001, permettant seule de présumer que les parties avaient convenu d’une reprise d’ancienneté.


Cependant, non seulement il est établi que le contrat de travail de M. F G ne comporte aucune mention relative à une reprise d’ancienneté, que M. F G a fait valoir ses droits à la retraite à effet au 30 juin 2015 et perçu une indemnité de départ de 25.134,97 € à ce titre, mais il appert que les bulletins de salaire sur lesquels il se fonde pour se prévaloir de la reprise d’ancienneté litigieuse, portent également dans le pavé relatif à l’identification de l’employeur 'SARL MEDIA LINE’ alors qu’il est salarié de la SARL SAMFI SERVICES, ce qui suffit à accréditer l’affirmation selon laquelle, l’employeur aurait repris tel quel le profil de M. F G chez son ancien employeur pour établir les nouveaux bulletins de salaire et reproduit sur toute la durée de la relation contractuelle cette mention erronée.


Il y a lieu par conséquent d’infirmer le jugement de ce chef et de juger qu’à la date de son licenciement, M. F G ne pouvait justifier que d’un an et demi d’ancienneté au sein de la SARL SAMFI SERVICES.

* Quant à la demande de dommages et intérêts :


Compte tenu de l’effectif du personnel de l’entreprise, de la perte d’une ancienneté d’un an et demi pour un salarié âgé de 65 ans qui ne produit aucun élément et ne développe aucune argumentation portant sur l’étendue de son préjudice, la cour n’est en mesure que d’évaluer le préjudice moral résultant de la rupture intervenue. Il lui sera par conséquent alloué, en application de l’article L. 1235-5 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 une somme de 10.000 € net à titre de dommages-intérêts, la décision entreprise étant réformée dans cette limite ;

Sur l’article 700 du Code de procédure civile :


Les éléments de la cause et la situation économique respective des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ; la société appelante qui succombe partiellement en appel, doit être déboutée de la demande formulée à ce titre et condamnée à indemniser le salarié intimé des frais irrépétibles qu’il a pu exposer pour assurer sa défense en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,


INFIRME partiellement le jugement entrepris,

et statuant à nouveau,
JUGE qu’à la date du licenciement, M. F G avait une ancienneté d’un an et demi,


CONDAMNE la SARL SAMFI SERVICES à payer à M. F G la somme de 10.000

€ net à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,


CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus,

et y ajoutant,


CONDAMNE la SARL SAMFI SERVICES à payer 1.500 € à M. F G sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,


DEBOUTE la SARL SAMFI SERVICES de sa demande sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,


CONDAMNE la SARL SAMFI SERVICES aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.
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Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 7 janvier 2022, n° 19/00523