Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 1er juillet 2020, n° 18/03585

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 2e ch., 1er juill. 2020, n° 18/03585
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 18/03585
Décision précédente : Tribunal d'instance de Muret, 19 juillet 2018, N° 17-000429
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

01/07/2020

ARRÊT N°204

N° RG 18/03585

N° Portalis DBVI-V-B7C-MOYR

A.ARRIUDARRE

Décision déférée du 20 Juillet 2018

Tribunal d’Instance de MURET

(17-000429)

MME. A B

SA EOS CONTENTIA

C/

X-C Y

Association UDAF

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

R''PUBLIQUE FRAN’AISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN’AIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2e chambre

***

ARRÊT DU UN JUILLET DEUX MILLE VINGT

***

APPELANTE

SA EOS CONTENTIA anciennement CONTENTIA FRANCE venant aux droits de la société COFIDIS

[…]

[…]

R e p r é s e n t é e p a r M e C a t h e r i n e C A R R I E R E – P O N S A N d e l a S C P C A N D E L I E R CARRIERE-PONSAN, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIM''S

Monsieur Y X-C bénéficie de la protection de tutelle de l’UDAF 31, service mandataire judiciaire à la Protection des Majeurs et aux prestations Familiales de l’ARIEGE

[…]

[…]

Représenté par Me Magalie OBIS de la SCP OBIS- BAQUERO, avocat au barreau d’ARIEGE

Association UDAF

[…]

[…]

Représentée par Me Magalie OBIS de la SCP OBIS- BAQUERO, avocat au barreau d’ARIEGE

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 31555.2018.021255 du 24/09/2018 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de TOULOUSE)

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, modifié par l’article 6 de l’ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020, portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale en raison de l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 pour faire face à l’épidémie de Covid-19 modifié par l’article 1er I de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire, l’affaire a été traitée selon la procédure sans audience, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés.

La Cour était composée lors du délibéré de :

F. PENAVAYRE, président

A. ARRIUDARRE , Vice Président Placé

N.BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARR’T :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par F. PENAVAYRE, président, et par J. BARBANCE DURAND greffier de chambre

EXPOS'' DU LITIGE :

Par ordonnance en date du 11 juin 1992 rendue à la requête de la Sa Cofidis, M. X-C Y et Mme Z Y ont été enjoints de lui payer la somme de 30 219,23 francs outre intérêts au titre d’un contrat de prêt et celle de 24 francs au titre des frais accessoires.

La Sa Cofidis a cédé sa créance à la société Contentia France, aux droits de laquelle vient la Sa Eos Contentia, selon contrat cadre déposé le 17 janvier 2013 au rang des minutes de Me ROUSSEL notaire à Lille.

La Sa Eos Contentia a fait procéder à une saisie conservatoire de créances auprès de la banque Lcl le 6 septembre 2017 qui a été dénoncée le 13 septembre 2017 à l’Udaf 31 en qualité de tuteur de M. Y, Mme Y étant décédée le […].

Par courrier du 4 octobre 2017, M. Y, représenté par son tuteur, l’Udaf 31, a formé opposition à l’ordonnance d’injonction de payer.

Par jugement en date du 20 juillet 2018, le tribunal d’instance de Muret a :

— reçu l’opposition de M. X-C Y représenté par son tuteur l’Udaf 31,

— débouté la société Contentia de l’intégralité de ses autres demandes,

— condamné la société Contentia à payer à M. X-C Y représenté par l’Udaf 31 la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l’instance.

Après avoir considéré que la Sa Eos Contentia justifiait d’une signification de l’ordonnance portant injonction de payer à M. Y dans le délai de 6 mois par une remise à son épouse présente au domicile et que l’opposition de M. Y était recevable en l’absence de justification d’une signification faite à sa personne, le tribunal a relevé que la demande de crédit ne portait que le nom de Mme Z Y, que seul son nom était mentionné au titre de l’acceptation de l’offre de prêt, que la présence de deux signatures, dont une dans la case 'conjoint', était insuffisante à démontrer la connaissance du prêt par M. Y jusqu’à l’opposition faite par son tuteur et que faute de démontrer la réalité de sa créance, la Sa Eos Contentia devait être déboutée de ses demandes.

Par déclaration en date du 7 août 2018, la Sa Eos Contentia a interjeté appel de l’ensemble des dispositions du jugement.

L’affaire, initialement fixée à l’audience du 28 avril 2020, a été retenue sans audience avec l’accord des parties (17 avril 2020), en application des dispositions de l’article 8 de l’ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale, en raison de l’état d’urgence sanitaire déclarée par l’article 4 de la loi n°2020-290 du 25 mars 2020 pour faire face à l’épidémie de covid-19 modifié par l’article 1er de la loi n°2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire.

PR''TENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 31 octobre 2018, la Sa Eos Contentia, anciennement Contentia France, venant aux droits de la Sa Cofidis, demande à la cour de :

— réformer intégralement le jugement,

— rejeter l’opposition formée par l’Udaf 31 en qualité de tuteur de M. Y à l’ordonnance portant injonction de payer du 11 juin 1992,

— condamner M. X-C Y à lui payer la somme de 4 606,89 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er avril 1992,

— condamner M. X-C Y à lui payer la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont distraction au profit de la Scp Candelier Carriere-Ponsan.

Elle soutient principalement que :

— M. Y a bien signé, en qualité de conjoint, l’offre de prêt, qu’il ne peut pas prétendre en cause d’appel qu’il s’agirait d’un faux émanant de son épouse sans apporter le moindre commencement de preuve alors que la charge de la preuve pèse sur lui dès lors qu’il conteste sa signature,

— il ne peut pas lui être reproché d’avoir tardé dans l’exécution de l’ordonnance portant injonction de payer alors que M. Y a changé à plusieurs reprises d’adresse sans notification de ces modifications au prêteur initial,

— l’offre a nécessairement été acceptée avant l’expiration du délai d’acceptation prévu le 31 août 1989 puisque les fonds ont été débloqués le 28 février 1989 de sorte que l’absence de mention de la date d’acceptation n’a pas d’incidence sur la validité du prêt,

— l’ordonnance d’injonction de payer a bien été signifiée aux deux époux, à Mme Y en personne et à M. Y, par l’entremise de son épouse, conformément aux dispositions de l’article 655 du code de procédure civile et a ensuite été revêtue de la formule exécutoire,

— elle a qualité et intérêt à agir pour venir aux droits de la Sa Cofidis par l’effet de la cession de créance intervenue, que celle-ci est parfaitement établie par l’acte authentique du 17 janvier 2013 et a été portée à la connaissance du débiteur par l’acte de signification de la saisie-conservatoire du 13 septembre 2017,

— les intérêts légaux sont dus à compter du 1er avril 1992 et aucune prescription n’est encourue dès lors que l’ordonnance d’injonction de payer a été signifiée le 22 juin 1992 et a interrompu le délai de prescription.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 15 octobre 2018, M. Y représenté par l’Udaf 31 en qualité de tuteur, demande à la cour, au visa des articles 1405 et suivants du code de procédure civile, les articles 1690 et 1324 du code civil, de :

— confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

— déclarer, en conséquence, son opposition recevable, juger que la Sa Eos Contentia n’établit pas la réalité de sa créance et la débouter de l’intégralité de ses demandes,

A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour venait à accueillir l’argumentation de la Sa Eos Contentia :

— déclarer recevable son opposition,

— juger que la cession de créance intervenue entre les Sa Cofidis et Contentia lui est inopposable de sorte que la Sa Eos Contentia n’est pas fondée à se prévaloir d’une quelconque créance à son

encontre,

— la débouter de l’intégralité de ses demandes,

En tout état de cause :

— la débouter de sa demande visant à le voir condamné à lui payer la somme de 4 606,89 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 1er avril 1992,

— prononcer la déchéance du droit aux intérêts,

— à défaut, juger que les intérêts au taux légal ne courent qu’à compter de la signification de l’ordonnance portant injonction de payer à sa personne, c’est-à-dire à compter de la dénonciation de la saisie-attribution le 13 septembre 2017,

— condamner la Sa Eos Contentia en tous les dépens ainsi qu’au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir que :

— l’ordonnance d’injonction de payer n’a été signifiée à personne qu’à son épouse de sorte que son opposition, formée dans le délai d’un mois du premier acte d’huissier signifié à sa personne et constitué par la dénonciation de la saisie réalisée, est recevable,

— la demande de crédit a été complétée par une seule et même personne à l’examen de l’écriture, qu’aucune date d’acceptation de l’offre n’a été mentionnée de sorte qu’il est impossible de savoir si l’acceptation a été faite avant la date d’expiration de la validité de l’offre, qu’il n’est pas démontré qu’il a lui-même accepté l’offre de prêt, qu’il ne se souvient pas avoir signé l’offre et que la signature qui lui est attribuée a pu être réalisée par son épouse,

— il n’a jamais eu connaissance du prêt avant la saisie réalisée puisque l’accusé réception du courrier de mise en demeure produit par la société créancière a été signé par son épouse et que la lettre qui lui a été adressée a été retournée non réclamée,

— la cession de créance, qui ne lui a pas été signifiée et à laquelle il n’a pas donné son accord, ne lui est pas opposable,

— les intérêts ne courent qu’à compter de la signification à personne qui lui a été faite et les intérêts sont prescrits pour la période antérieure.

MOTIFS :

La recevabilité de l’opposition à l’ordonnance portant injonction de payer formée par M. Y, représenté par son tuteur, n’est pas remise en cause en appel même si ce chef du dispositif a été visé dans la déclaration d’appel. Les parties en discutent uniquement le bien-fondé de sorte que le jugement ayant reçu l’opposition de M. Y doit être confirmé sans examen au fond.

En application de l’article 1353 du code civil, il appartient à la Sa Eos Contentia qui réclame l’exécution d’une obligation de paiement par M. Y de la prouver.

Elle verse aux débats une demande de prêt, rédigée à la première personne du singulier ('OUI, je souhaite profiter de la formule LIBRAVOU…') , complétée par Mme Z Y mentionnant sa situation personnelle (identité, adresse, date de naissance), sa situation professionnelle ainsi que celles de son conjoint M. X-C Y, leur situation de famille, de logement et les éléments de leur budget. Elle produit également une offre préalable de crédit utilisable par fraction, émise le 3 janvier 1989 par le prêteur, valable jusqu’au 31 août 1989. L’encadré devant mentionner la personne à laquelle cette offre est adressée n’est pas renseigné. L’acceptation de l’offre est ainsi complétée : ' Je soussigné(e) Y Z déclare accepter la présente offre de crédit' suivie d’une case cochée relative à l’assurance, d’une signature dans l’encadré situé sous la mention ' signature du titulaire' et d’une autre située dans l’encadré sous l’indication ' signature du conjoint'.

M. Y indique dans ses conclusions n’avoir 'aucun souvenir d’avoir vu ni signé cette offre' ce qui ne peut pas s’analyser comme une dénégation de sa signature et ne permet pas de procéder à une vérification d’écritures sur le fondement de l’article 287 du code civil que ce dernier ne sollicite d’ailleurs pas.

L’examen des mentions et signatures contenues dans l’offre de prêt n’établissent pas que M. Y s’est engagé en qualité d’emprunteur et s’il a signé ce contrat de prêt, ce n’est qu’en qualité de conjoint de l’emprunteuse.

Sa seule signature ne suffit donc pas à considérer qu’il est tenu à une obligation de paiement en qualité de débiteur comme soutenu par la Sa Eos Contentia.

Pour fonder sa demande en paiement, la Sa Eos Contentia se prévaut d’une clause du prêt ainsi libellée : 'L’emprunteur et son conjoint signataire reconnaissent qu’ils sont solidairement responsables des obligations respectivement contractées par chacun d’eux dans le cadre du présent contrat'. Cette clause recoupe deux situations différentes qui rendent sa rédaction ambigüe et nécessite de l’interpréter en fonction des circonstances qu’elle vise.

La référence faite aux 'obligations respectivement contractées par chacun d’eux' permet une application de cette clause à l’hypothèse où

chacun des conjoints s’est engagé en qualité d’emprunteur, débiteur principal, à l’égard du prêteur. Le créancier peut alors se prévaloir d’une solidarité conventionnelle qui l’autorise à solliciter paiement de l’intégralité des sommes dues à l’un quelconque des conjoints, sans avoir à diviser son action en paiement. Pour autant, elle ne trouve pas à s’appliquer en l’espèce puisque seule Mme Y s’est engagée en qualité d’emprunteuse et que M. Y n’a signé cette offre qu’en qualité de conjoint, sans souscrire d’obligation à titre principal en qualité d’emprunteur. A défaut d’obligations respectivement contractées par chacun des époux Y, la Sas Eos Contentia venant aux droits de Sa Cofidis ne peut pas se fonder sur cette stipulation pour obtenir condamnation de M. Y à régler les sommes prêtées à son épouse.

La mention de 'l’emprunteur et son conjoint signataire' peut trouver son explication par référence à la solidarité légale prévue à l’article 220 du code civil pour les contrats qui ont pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants et qui dispose, en son alinéa 3, dans sa rédaction antérieure à la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, que la solidarité n’a pas lieu non plus, s’ils (les contrats) n’ont été conclus du consentement des deux époux, pour les achats à tempérament ni pour les emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante. Pour autant, la Sa Eos Contentia, venant aux droits du prêteur, la Sa Cofidis, ne se prévaut pas de ces dispositions et s’abstient de toute éventuelle démonstration du caractère ménager du prêt contracté de sorte qu’elle n’établit pas l’obligation de paiement de M. Y.

Le jugement ayant débouté la Sa Eos Contentia de l’intégralité de ses demandes doit être confirmé.

La Sa Eos Contentia, partie perdante, supportera la charge des dépens d’appel, le jugement devant être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

M. Y est en droit de réclamer l’indemnisation des frais non compris dans les dépens qu’il a

dû exposer à l’occasion de cette procédure. La Sa Eos Contentia sera donc tenue de lui payer la somme globale de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 alinéa 1er 1° du code de procédure civile en complément de la somme déjà allouée à ce titre par le premier juge sans pouvoir bénéficier des mêmes dispositions.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la Sa Eos Contentia à verser à M. X-C Y représenté par son tuteur, l’Udaf 31, la somme supplémentaire de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

La déboute de sa propre demande à ce titre,

La condamne aux dépens d’appel.

Le Greffier Le Président

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