Cour d'appel de Versailles, 5ème chambre, 21 octobre 2010, n° 09/03408

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 5e ch., 21 oct. 2010, n° 09/03408
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 09/03408
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Nanterre, 29 juin 2009
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

H.L./H.L.

5e Chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 OCTOBRE 2010

R.G. N° 09/03408

AFFAIRE :

D Z épouse H I J

C/

S.A.R.L. LES PETITS CHAPERONS ROUGES (LPCR) en la personne de son représentant légal

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Juin 2009 par le Conseil de Prud’hommes de NANTERRE

Section : Activités diverses

N° RG : 07/00800

Copies exécutoires délivrées à :

Me Françoise OCHS

Me Ségolène VIAL

Copies certifiées conformes délivrées à :

D Z épouse H I J

S.A.R.L. LES PETITS CHAPERONS ROUGES (LPCR) en la personne de son représentant légal

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN OCTOBRE DEUX MILLE DIX,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame D Z épouse H I J

XXX

XXX

comparante en personne, assistée de Me Françoise OCHS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P76 substitué par Me Sofiane HAKIKI, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

S.A.R.L. LES PETITS CHAPERONS ROUGES (LPCR) agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié de droit au siège social sis :

XXX

XXX

représentée par Me Ségolène VIAL, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 341

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Septembre 2010, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Hubert LIFFRAN, conseiller chargé(e) d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé(e) de :

Madame Jeanne MININI, président,

Monsieur Hubert LIFFRAN, conseiller,

Madame Catherine ROUAUD-FOLLIARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Sabrina NIETRZEBA-CARLESSO,

FAITS ET PROCÉDURE,

Statuant sur l’appel formé le 22 juillet 2009 par Mme D Z à l’encontre d’un jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre, section activités diverses, rendu en départage le 30 juin 2009 et qui, dans un litige l’opposant à la SARL Les Petits Chaperons Rouges, a :

— Dit fondé le licenciement pour faute grave de Mme Z,

— Débouté Mme Z de toutes ses prétentions à ce titre,

— Débouté Mme Z de sa demande relative aux heures supplémentaires,

— Débouté les parties du surplus de leurs demandes,

— Mis les dépens à la charge de Mme Z.

Par contrat de travail à durée indéterminée du 2 novembre 2005, la SARL Les Petits Chaperons Rouges (LPCR Clichy) exploitant une crèche à Clichy (Hauts-de-Seine), a embauché Mme D Z en qualité de lingère à compter du 31 octobre 2005, moyennant une rémunération mensuelle brute de 1.350 € pour 36 heures hebdomadaires de travail.

Mme Z a été sanctionnée d’un avertissement par lettre du 2 octobre 2006 rédigée dans les termes suivants :

'A plusieurs reprises, je vous ai fait part des remarques concernant votre comportement incompatible avec le fonctionnement d’une structure d’accueil de jeunes enfants ;

'Je vous ai notamment surprise assise à la section des bébés avec les pieds sur la table, en présence d’une maman au sein de la section ;

'Lors de notre réunion, il était convenu que vous n’aidiez que dans les section des bébés pour les repas et goûters. Malheureusement, vous n’avez pas tenu compte de ces consignes et êtes allé dans les autres sections ;

'Enfin, à plusieurs reprises, vous n’avez pas respecté les décisions pédagogiques du personnel présent au sein des sections. Vous privilégiez certains enfants, sans garder une certaine distance, risquant de créer un lien de dépendance ;

'Vous comprendrez que nous ne puissions tolérer plus longtemps un tel manque de suivi des consignes qui vous sont données ;

'C’est pourquoi je vous notifie le présent avertissement et vous demande de vous reprendre rapidement et que nous n’ayons plus à évoquer ce genre de problème'.

Le 27 novembre 2006, à la suite d’une chute survenue ce même jour et dont il est constant qu’elle constitue un accident du travail, Mme Z s’est trouvée en arrêt de travail jusqu’au 4 décembre 2006.

Après avoir été convoquée le 15 janvier 2007 à un entretien préalable pour le 23 janvier suivant et mise à pied à titre conservatoire, Mme Z a été licenciée pour faute grave par lettre du 29 janvier 2007, signée de Mme X, directrice de la crèche, et ainsi rédigée :

(…) Lors de (l’entretien préalable), je vous ai exposé les faits qui motivent ma décision, se résumant par votre indiscipline et votre insubordination;

'Je fais référence notamment :

— à votre refus de tenir compte de l’avertissement notifié le 2 octobre 2006. Suite à cet avertissement, un planning de travail a été établi pour vous aider à clarifier vos tâches et à définir les rôles respectifs de chaque membre de l’équipe. Malheureusement, vous ne respectez toujours pas les consignes de travail en prenant en charge les changes des bébés sans en aviser les référentes de sections. Vous ne respectez pas non plus les décisions pédagogiques en privilégiant certains enfants, sans garder une certaine distance, au risque de créer un lien de dépendance;

— à votre refus soudain d’effectuer les changes des draps de la section des grands alors que ce travail entrait dans vos attributions <> ;

— à votre insubordination à l’égard de votre supérieur hiérarchique, en haussant le ton et en claquant la porte de son bureau en présence d’un parent (sic) de la crèche ;

— à votre irrespect des décisions pédagogiques en gérant les transmissions à faire aux parents, alors que cette fonction est celle des référentes de sections ;

'De plus, votre comportement est totalement imprévisible car lors de l’entretien préalable, vous n’avez pas hésité à hausser le ton, à vous lever de votre chaise pour vous rafraîchir et à utiliser une paire de ciseaux pour vous nettoyer les ongles ;

'Votre indiscipline et votre insubordination mettent en danger la sécurité des enfants et perturbent la bonne marche de la structure ;

'Les arguments recueillis auprès de vous au cours de notre entretien du mardi 23 janvier 2007 ne m’ont pas permis de modifier mon appréciation des faits qui vous sont reprochés. Par conséquent, nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute ;

'Compte tenu de la gravité de celle-ci, votre maintien dans l’entreprise s’avère impossible. Le licenciement prend donc effet immédiatement à la date de présentation de cette lettre, sans indemnité de préavis ;

'La période non travaillée en raison de la mise à pied à titre conservatoire à compter du 16 janvier 2007 et jusqu’à la date de présentation de la présente, rendue nécessaire le temps de la procédure, ne sera pas rémunérée'.

Mme Z, née en 1948, a perçu, sur les douze derniers mois précédant son licenciement , compte tenu d’une prime annuelle de 1.140,91 € versée en décembre 2006, une rémunération mensuelle moyenne de 1.445 € bruts. Elle justifie avoir perçu des allocations de chômage jusqu’en février 2008.

Par conclusions écrites déposées et visées par le greffier, et soutenues oralement à l’audience, Mme Z demande à la cour de :

— Infirmer le jugement et, statuant à nouveau,

— Dire et juger que le licenciement de Mme Z est nul pour avoir été prononcé en violation des dispositions de l’article L 1226-9 du Code du travail,

— Condamner la SARL LPCR Clichy à verser à Mme Z les sommes de :

+ 822,44 € à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied à titre conservatoire du 16 au 31 janvier 2007, congés payés afférents inclus,

+ 1.445 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

+ 144,50 € au titre des congés payés afférents,

+ 12.000 € à titre d’indemnité réparant le préjudice résultant du caractère illicite du licenciement,

Subsidiairement,

— Dire et juger sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme Z,

— Condamner la SARL LPCR Clichy à verser à Mme Z les sommes de :

+ 822,44 € à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied à titre conservatoire du 16 au 31 janvier 2007, congés payés afférents inclus,

+ 1.445 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

+ 144,50 € au titre des congés payés afférents,

+ 12.000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, sur le fondement de l’article L 1235-5 du code du travail,

En tout état de cause,

— Condamner la SARL LPCR Clichy à verser à Mme Z les sommes de :

+ 861, 52 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, congés payés afférents inclus,

+ 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamner la SARL LPCR Clichy aux dépens.

Par conclusions écrites déposées et visées par le greffier, et soutenues oralement à l’audience, la SARL LPCR Clichy demande à la cour de :

— Recevoir la SARL LPCR Clichy en ses écritures et l’y déclarer bien fondée,

— Débouter Mme Z de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

— Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

— Condamner Mme Z à verser à la SARL LPCR Clichy la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamner Mme Z aux entiers dépens

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l’audience, ainsi qu’aux prétentions orales telles qu’elles sont rappelées ci-dessus.

MOTIFS DE LA DÉCISION,

Sur la demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires :

Attendu que Mme Z estimant avoir effectué un total de 80 heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées, en sollicite le paiement à hauteur de 861,52 € ;

Attendu que s’il résulte de l’article L 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties et que l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;

Attendu que Mme Z fournit un décompte de la somme de 861, 52 € qu’elle a elle-même établi pour les besoins de l’instance ; que, de ce fait, cette pièce n’apparaît pas de nature à étayer sa demande; qu’elle produit également un décompte faisant mention de 14 heures supplémentaires qu’elle prétend avoir effectuées au cours de la période de mars au 13 décembre 2006 et qu’elle a elle-même établi au cours de cette période; que, cependant, ce décompte ne contient aucune indication expliquant en quoi ces 14 heures sont susceptibles de constituer des heures supplémentaires; que comme la précédente, cette pièce n’apparaît pas de nature à étayer sa demande ;

Attendu qu’alors qu’il était stipulé au contrat de travail que Mme Z était employée à raison de 36 heures par semaine, soit 156 heures par mois, pour un salaire de base de 1.350 €, l’ensemble de ses bulletins de salaire mentionnent, tout au long de la relation de travail, un salaire mensuel de base de 1.350 € bruts pour 151, 67 heures par mois; qu’il n’est fait aucune mention sur aucun bulletin de salaire d’une rémunération au titre des 156 – 151, 67 = 4, 33 heures de travail non couvertes par le salaire de base de 1.350 € prévu au contrat ; qu’il s’agit là d’un éléments de nature à étayer la demande de la salariée; que la SARL LPCR Clichy ne formule aucune observation à cet égard; qu’il apparaît que tout au long de la relation de travail, Mme Z a effectué chaque mois 4, 33 heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées ;

Que sur la base d’un taux horaire de 8, 90 € et compte tenu des périodes de congés représentant un total de 226, 5 heures, soit 1, 493 mois, il est dès lors dû à Mme Z, au titre de ses 4,33 X (14, 5 – 1,493) = 56,33 heures supplémentaires, un rappel de salaire de 8, 90 € X [4, 33 X (14,5 – 1,493)] X 125 % = 627,02 €, ainsi que la somme de 62,70 € au titre des congés payés afférents ;

Sur le bien-fondé du licenciement de Mme Z :

Attendu que le licenciement de Mme Z ayant été prononcé pour faute grave présente, de ce fait, un caractère disciplinaire ; qu’il incombe à la cour de rechercher si les griefs formulés à l’encontre de l’intéressée dans la lettre de licenciement fixant les limites du litige sont établis, la charge de la preuve à cet égard appartenant à l’employeur, et, dans l’affirmative, s’ils ont rendu impossible le maintien de la salariée dans l’entreprise ou, à défaut, s’ils constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement ;

Attendu que l’attestation de Mme X produite par la SARL LPCR Clichy au soutien des différents griefs mentionnés dans la lettre de licenciement ne peut être retenue, dès lors que Mme X est la signataire de la lettre de licenciement ;

Attendu qu’à l’appui du premier grief reprochant à la salariée la prise en charge des changes des bébés sans en aviser les référentes de sections, l’employeur produit trois attestations en date des 30 janvier et 1er février 2007 de Mmes A et Y, auxiliaires de puériculture, et de Mme B, éducatrice de jeunes enfants ; que Mme A affirme avoir constaté que Mme Z intervenait dans les soins (couchers, changes, repas) auprès des enfants sans que cela lui fût demandé ; que, cependant, cette affirmation n’est accompagnée de la relation d’aucun fait précis et circonstancié; qu’elle n’apparaît dès lors pas pertinente ;

Que Mme B indique avoir vu le 11 janvier 2007, dans la section des moyens, Mme Z portant une petite fille dans ses bras signaler à l’auxiliaire de puériculture que cette enfant avait besoin d’être changée ; que sans attendre Mme Y qui lui avait déclaré qu’elle venait tout de suite pour s’en occuper, Mme Z avait commencé à installer l’enfant sur le plan de change et à la changer; que Mme B était alors intervenue pour lui rappeler que cette tâche incombait aux référentes de section; que prenant le relais, Mme Y avait fini de changer l’enfant; que pour sa part Mme Y, dans son attestation, affirme qu’alors qu’elle-même lui avait dit qu’elle arrivait tout de suite pour changer la petite fille, 'Mme Z était prête à faire le change’et que Mme B avait dû intervenir pour empêcher cette dernière d’effectuer cette tâche ; qu’il résulte de ces deux attestations que, contrairement aux énonciations de la lettre de licenciement, Mme Z a respecté les consignes de sa hiérarchie en laissant l’auxiliaire de puériculture, Mme Y, changer la petite fille, après en avoir avisé la référente de section ;

Qu’en conséquence, la réalité de ce premier grief n’apparaît pas établie ;

Qu’à l’appui du grief reprochant à Mme Z de 'privilégier certains enfants sans garder une certaine distance, au risque de créer un lien de dépendance', la SARL LPCR Clichy ne produit aucun élément; qu’il ne peut donc être retenu ;

Qu’au soutien des griefs reprochant à Mme Z son insubordination à l’égard de sa supérieur hiérarchique 'en haussant le ton et en claquant la porte de son bureau en présence d’un parent d’un enfant de la crèche', son absence de respect des décisions pédagogiques 'en gérant les transmissions à faire aux parents', la SARL LPCR Clichy invoque les attestations susvisées de Mme Y et de Mme A qui se bornent, sans faire état d’aucun élément précis et circonstancié, à affirmer, l’une, que 'Mme Z a élevé la voix dans la section des bébés', l’autre, que 'dans le courant du mois de décembre 2006, Mme Z s’est permise de s’immiscer dans les transmissions faites à une maman (sic) en contredisant cette dernière'; que, dans ces conditions, la réalité de ces griefs n’apparaît pas établie ;

Que le grief reprochant à Mme Z son comportement au cours de l’entretien préalable, ne peut être retenu, dès lors que l’attitude et les propos d’un salarié au cours de l’entretien préalable ne peuvent, sauf abus non constitué en l’espèce, constituer une cause de licenciement ;

Qu’au soutien du grief reprochant à Mme Z de mettre en danger la sécurité des enfants, la SARL LPCR Clichy invoque un passage de l’attestation susvisée de Mme Y ainsi rédigé :

'Un jour, dans la section des bébés, Mme Z a déposé un enfant sur un coussin; je lui ai fait remarquer que cet enfant remuait beaucoup et qu’il risquait de tomber; à cela Mme Z a élevé la voix dans la section';

Que cette attestation n’est étayée par aucun élément précis et circonstancié permettant de situer dans le temps et dans l’espace les faits qui y sont relatés et d’apprécier si l’enfant se trouvait, comme l’affirme Mme Y, dans une situation de danger ;

Qu’un tel grief ne peut donc être retenu ;

Attendu qu’à l’appui du grief reprochant à Mme Z d’avoir refusé de changer les draps des enfants de la section des grands, la SARL LPCR Clichy invoque le passage de l’attestation susvisé de Mme B, ainsi rédigé :

'En fin d’après-midi ce jeudi 11 janvier, j’ai vu Mme Z en entretien individuel pour faire le point sur la mise en place de son planning de travail. Mme Z ayant fait part de ses problèmes de dos , une partie de son planning a alors été redéfinie. Ainsi, il a été convenu que Mme Z ne se chargerait pas des changements de draps dans la section des bébés et des moyens, cette tâche restant à la charge des auxiliaires. En revanche, Mme Z a été chargée de remettre les draps propres sur les lits dans la section des grands le vendredi, chaque semaine, et d’installer tous les jours les lits des enfants pendant leur repas. Mme Z a alors affirmé que cela allait peut-être être difficile pour elle, mais qu’elle allait essayer de le faire ;

'Le lendemain matin, l’équipe de la section des grands m’a fait part du refus de Mme Z d’installer les draps propres sur les lits. Le midi, pendant le repas des enfants, Mme Z n’est pas venue installer les lits pendant que les enfants mangeaient ; une aide-auxiliaire l’a finalement fait elle-même';

Que cette attestation, sur ce point précise et circonstanciée, établit la réalité de ce grief ;

Que, cependant, pour apprécier le caractère sérieux d’un tel grief, il importe de tenir compte du fait que Mme Z, victime d’un accident du travail le 27 novembre 2006, s’était trouvée en arrêt de travail jusqu’au 4 décembre 2006; que si elle a repris le travail le 5 décembre 2006, elle n’a jamais bénéficié de la visite de reprise du médecin du travail prescrite par l’article R 4624-21.3° en cas d’arrêt de travail d’au moins huit jours pour cause d’accident du travail ; que le manquement qui lui est ainsi reproché est donc survenu alors que son contrat de travail était demeuré suspendu ;

Attendu qu’il résulte du passage susvisé de l’attestation de Mme B que c’est après que Mme Z lui a fait part de ses 'problèmes de dos’ que sa supérieure hiérarchique, Mme B, a modifié son emploi du temps en lui demandant de limiter son activité de changement des draps à la section des grands; que tout en acquiesçant à cette demande, Mme Z a cependant indiqué que cela lui serait peut-être difficile mais qu’elle s’efforcerait de le faire; qu’il apparaît ainsi que l’employeur avait été informé par la salariée de ses problèmes de santé risquant de compromettre la réalisation de ses tâches ; qu’au lieu d’effectuer les diligences nécessaires pour permettre à Mme Z de bénéficier dans les meilleurs délais de la visite de reprise du médecin du travail et de connaître ainsi si l’intéressée était apte à son poste de travail ou, le cas échéant, quelles étaient les propositions de reclassement préconisées par ce praticien, la SARL LPCR Clichy a entendu déterminer elle-même, au mépris de son obligation de sécurité de résultat, les tâches devant être confiées à la salariée;

Que, dans ces conditions, Mme Z ne peut se voir reprocher d’avoir refusé de changer les draps des enfants de la section des grands ;

Qu’au surplus, et à titre surabondant, un tel refus, en toute hypothèse, ne rendait pas impossible le maintien de la salariée dans l’entreprise ; qu’il ne pouvait donc constituer une faute grave ;

Attendu qu’aux termes de l’article L 122-32-2 du code du travail est nulle la résiliation d’un contrat de travail à durée indéterminée prononcée au cours d’une suspension résultant d’un arrêt de travail provoqué par un accident du travail ou une maladie professionnelle, sauf dans les cas où l’employeur justifie soit d’une faute grave du salarié, soit de l’impossibilité pour un motif non lié à l’accident ou à la maladie de maintenir le contrat ;

Qu’en conséquence, le licenciement de Mme Z est nul ;

Sur la demande de rappel de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire :

Attendu que son licenciement étant nul, Mme Z est en droit de prétendre au paiement de son salaire pour la période correspondant à sa mise à pied à titre conservatoire, soit aux sommes de 747,68 € à titre de rappel de salaire et de 74,76 € au titre des congés payés afférents ;

Sur les demandes de Mme Z tendant au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis et d’une indemnité au titre du caractère illicite du licenciement :

Attendu que le salarié, dont le licenciement est nul et qui ne demande pas sa réintégration, a droit, d’une part, aux indemnités de rupture, d’autre part, à une indemnité réparant intégralement le préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, dont le montant est au moins égal à celui prévu par l’article L 1235-3, alinéa 2, du code du travail ;

Que son licenciement étant nul, Mme Z est dès lors en droit de prétendre au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis augmentée des congés payés afférents, ainsi que d’une indemnité au titre du caractère illicite de son licenciement ;

Que Mme Z ayant été licenciée alors que son ancienneté dans l’entreprise était comprise entre six mois et deux ans, l’indemnité compensatrice de préavis qui lui est due est d’un mois de salaire ;

Qu’il convient, en conséquence, de condamner la SARL LPCR Clichy à verser à Mme Z les sommes de 1.445 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis et de 144, 50 € au titre des congés payés afférents ;

Attendu que la cour dispose des éléments d’appréciation suffisants pour évaluer le préjudice subi par Mme Z résultant du caractère illicite de son licenciement à la somme de 9.000 € au paiement de laquelle il convient, à titre d’indemnité, de condamner la SARL LPCR Clichy ;

Sur la demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile :

Attendu que l’équité commande d’accorder à Mme Z la somme de 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel ;

PAR CES MOTIFS,

La COUR,

Statuant publiquement et par arrêt CONTRADICTOIRE,

Infirme le jugement et, statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de Mme Z est nul ;

Condamne la SARL LPCR Clichy à verser à Mme Z les sommes suivantes :

+ 627, 02 € à titre de paiement d’heures supplémentaires,

+ 62, 70 € au titre des congés payés afférents,

+ 747, 68 € à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire,

+ 74, 76 € au titre des congés payés afférents,

+ 1.445 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

+ 144, 50 € au titre des congés payés afférents,

+ 9.000 € à titre d’indemnité en réparation du préjudice subi par Mme Z résultant du caractère illicite de son licenciement ;

Ordonne la remise à Mme Z par la SARL LPCR Clichy d’un bulletin de salaire, d’un certificat de travail et d’une attestation destinée au Pôle emploi conformes à la présente décision ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la SARL LPCR Clichy à verser à Mme Z la somme de 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel ;

Condamne la SARL LPCR Clichy aux dépens et aux frais d’exécution de la présente décision.

Arrêt prononcé par Mme Jeanne MININI, président, et signé par Mme Jeanne MININI, président et par Mme Sabrina NIETRZEBA-CARLESSO, Greffier présent lors du prononcé.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,

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