Cour d'appel de Versailles, 3ème chambre, 31 octobre 2013, n° 12/04367

  • Eaux·
  • Pompe·
  • Vendeur·
  • Vice caché·
  • Pluie·
  • Acheteur·
  • Drainage·
  • Prix·
  • Expertise·
  • Acquéreur

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 3e ch., 31 oct. 2013, n° 12/04367
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 12/04367
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Versailles, 27 mars 2012, N° 05/11311
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 50D

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 31 OCTOBRE 2013

R.G. N° 12/04367

AFFAIRE :

M Y

C/

G, T, O B

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Mars 2012 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 1

N° RG : 05/11311

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Anne-marie DOURY-DESTANG

Me Brigitte-anne PAULHAN-MAUSSE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TRENTE ET UN OCTOBRE DEUX MILLE TREIZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

1/ Monsieur M Y

né le XXX à XXX

de nationalité Marocaine

XXX

XXX

2/ Madame I D épouse Y

née le XXX à XXX

de nationalité Marocaine

XXX

XXX

Représentant : Me Anne-marie DOURY-DESTANG, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 252 – N° du dossier 1200058

APPELANTS AU PRINCIPAL-INTIMES INCIDEMMENT

****************

Monsieur G, T, O B

né le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

XXX

Représentant : Me Brigitte-anne PAULHAN-MAUSSE, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 229

INTIME AU PRINCIPAL -APPELANT INCIDEMMENT

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 19 Septembre 2013 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-José VALANTIN, Président chargé du rapport et Madame Annick DE MARTEL, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-José VALANTIN, Président,

Madame Annick DE MARTEL, Conseiller,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller, rédacteur

Greffier, lors des débats : Madame Lise BESSON,

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte notarié en date du 1er décembre 2004, Monsieur M Y et Madame I Y née D ont vendu à Monsieur G B une maison d’habitation comprenant notamment au sous-sol un garage et une cave sise à TRAPPES (Yvelines) XXX au prix de 221.000 € (immeuble 215.000 €, meubles 6.000 €).

Monsieur G B a fait dresser un constat par huissier le 16 février 2005 des infiltrations survenues dans le sous-sol de la maison et l’a dénoncé aux époux Y le 15 avril 2005 par exploit d’huissier en faisant valoir qu’il avait constaté ce phénomène dès son installation.

Les vendeurs n’y ayant pas donné suite, Monsieur G B a saisi le tribunal de grande instance de Versailles sur le fondement de l’article 1641 du Code civil pour obtenir notamment le paiement des travaux exposés pour remédier au vice caché et la réparation du préjudice subi.

Par jugement du 15 janvier 2008, le tribunal de grande instance de Versailles a désigné en qualité d’expert Monsieur O-V W avec mission, notamment :

d’examiner le procès-verbal de constat du 16 février 2005 dressé par Me GARCIA, huissier de justice,

de donner son avis motivé sur le caractère caché ou non du désordre dénoncé par Monsieur G B, en tenant compte notamment de la profession de ce dernier et de l’aspect du garage,

de vérifier dans quelle mesure le sous-sol est inondable, et si le système mis en place avant la vente du 1er décembre 2004 était suffisant pour empêcher la pénétration des eaux de pluie,

de répondre aux questions suivantes :

le système a t il été modifié depuis la vente, y avait-il un drain autour de l’immeuble et remplissait-il sa mission,

dans la négative :

dire si Monsieur et Madame Y pouvaient ignorer le vice tel qu’allégué ;

de donner son avis sur la question de l’impropriété ou non à son usage du sous-sol,

de préconiser les travaux nécessaires pour supprimer la pénétration des eaux de pluies et en chiffrer le coût.

L’expert judiciaire a déposé son rapport le 29 juillet 2010.

Il a notamment indiqué :

Le sous-sol de Monsieur B est susceptible d’être inondé à l’issue d’épisodes pluvieux importants et durables.

En revanche, des pluies occasionnelles de faible importance ne peuvent pas conduire à un sinistre important.

Il existait avant la prise de possession des lieux par M. B un dispositif de pompe de relevage des eaux dans un regard en bas de la rampe d’accès au garage (….) Mais cette pompe de relevage ne pouvait elle-même s’opposer aux écoulements et infiltrations dus à la perméabilité des murs extérieurs du sous-sol et à l’absence de conduite de drainage.

Les modifications apportées par M. B ont consisté selon les pièces versées au dossier à créer une cunette de récupération des eaux d’infiltration qui n’ont d’ailleurs rien à voir avec les eaux d’écoulement de la rampe du garage et à les collecter vers le regard de la pompe de relevage qui en finalité sert aujourd’hui à la fois à l’évacuation des eaux de ladite rampe et aux eaux d’infiltrations.

Si modification il y a eu, celle-ci s’est en tous cas réalisée environ un mois après le constat d’huissier de février 2005 où les écoulements par infiltrations au travers des murs étaient importants.

(….)

Les sondages réalisés pendant l’expertise ont mis en évidence l’absence totale de drain, l’absence totale de protection d’étanchéité des murs extérieurs enterrés et aussi les parpaings de maçonnerie dont certains joints ne sont pas cimentés’ .

Par jugement du 28 mars 2012, le tribunal de grande instance de Versailles a :

dit que le sous-sol du pavillon sis à XXX acquis le 1er décembre 2004 est affecté d’un vice caché tenant à son caractère inondable en raison de l’absence de drain des murs extérieurs enterrés,

condamné Monsieur et Madame Y à payer à Monsieur G B la somme de 19.191,51 € en réparation de son préjudice financier,

condamné Monsieur et Madame Y à payer à Monsieur B la somme de 5.000 € en réparation du trouble apporté à la jouissance du sous-sol de son pavillon,

débouté les parties de toute autre demande,

ordonné l’exécution provisoire,

condamné Monsieur et Madame Y à payer à Monsieur B la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

condamné Monsieur et Madame Y à supporter les dépens, en ce compris les frais d’expertise judiciaire.

Le 20 juin 2012, Monsieur et Madame Y ont interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées le 24 mai 2013, Monsieur et Madame Y, appelants au principal et intimés incidents, demandent à la cour, au visa des articles 1641, 1642, 1643, 1644 et 1645 du Code civil :

d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

de dire que les conditions d’application des dispositions des articles 1641 du Code civil relatives au vice caché, à savoir :

l’existence d’un défaut de la chose vendue d’une gravité suffisante,

le caractère caché de ce vice,

son antériorité au transfert de propriété,

le vice doit rendre la chose impropre à sa destination,

ne sont pas réunies,

de dire, par ailleurs, que les vendeurs ne sauraient être tenus des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même,

de dire, en tout état de cause, que les vendeurs ignoraient l’existence d’un vice caché,

Sur l’appel incident :

de dire que les vendeurs n’ont fait preuve d’aucune manoeuvre ou réticence tendant à cacher un quelconque vice et qu’ils ne peuvent en conséquence être tenus à une quelconque réparation,

de débouter Monsieur B de son appel incident et de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

reconventionnellement :

de condamner Monsieur B à leur payer la somme de 5.000 € en réparation du préjudice moral qu’ils ont subi du fait de toutes ces années de procédure,

de condamner Monsieur B à leur payer la somme de 6.000 € au titre des frais irrépétibles de première instance outre 4.000 € au titre de ceux exposés en d’appel,

de le condamner aux dépens en ce compris les frais d’expertise judiciaire.

Ils font notamment valoir que le vice invoqué n’est qu’un défaut éventuel et exceptionnel, non suffisamment grave pour justifier la mise en oeuvre de l’article 1641 du Code civil, que les taches d’humidité étaient visibles pour l’acquéreur et devaient attirer son attention sur l’humidité potentielle des lieux, la pompe de relevage étant parfaitement visible, que les conclusions de l’expert sont critiquables en ce qu’il a sans doute mal orienté ses recherches, ne tenant pas compte de la modification de la terrasse par Monsieur B pourtant qualifiée de 'point particulièrement complexe en terme de conséquence’ et en ce qu’il a, à tort, indiqué qu’il n’existait pas de drain ; ils ajoutent qu’ils ignoraient que la maison présentait un défaut de construction générateur d’humidité dans le sous-sol et sont donc de bonne foi, qu’en outre le sous-sol n’a pas été prévu à usage d’habitation ou d’entrepôt ni d’atelier et n’est donc pas impropre à sa destination.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 30 août 2013, Monsieur B demande à la cour, au visa des articles 1641, 1643 et 1645 du Code civil :

de débouter Monsieur et Madame Y de toutes leurs demandes,

de l’accueillir en son appel incident et le déclarer recevable et bien fondé,

de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

dit que le sous-sol du pavillon sis à XXX qu’il a acquis le 1er décembre 2004 était affecté d’un vice caché tenant à son caractère inondable en raison de l’absence de drain des murs extérieurs enterrés,

condamné Monsieur et Madame Y à réparer son préjudice financier et à lui payer une indemnité de 2.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

d’infirmer le jugement entrepris pour le surplus,

de juger que la condamnation de Monsieur M Y et de Madame I Y née D à lui verser la somme de 19.191,51 € sera assortie des intérêts de droit à compter de mars 2010 date de valeur des devis approuvés par l’expert judiciaire,

de condamner Monsieur et Madame Y à lui verser :

la somme de 28.500 € au titre du trouble de jouissance du sous-sol sur la base de 500 € par mois depuis l’achat jusqu’au 1er août 2010,

la somme de 50.000 € u titre de moins value de la maison,

la somme de 5.000 € au titre du préjudice moral,

la somme de 5.000 € pour résistance abusive et injustifiée,

la somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

la somme de 6.000 € sur le fondement de article 700 du code de procédure civile.

Il soutient en substance que la réalité du vice a clairement été mise en évidence par l’expertise, qu’il ne pouvait en connaître l’existence, qu’en revanche, les vendeurs qui avaient déjà subi des inondations en avaient connaissance et que si le sous-sol ne constitue pas une surface habitable vendue comme telle, il n’en reste pas moins qu’il était en droit, comme l’a relevé l’expert, d’en attendre divers usages lesquels sont rendus impossibles par le vice affectant l’immeuble.

Il considère que son trouble de jouissance a été très sous-évalué par les premiers juges, considérant qu’il doit être réparé par l’allocation d’une somme de 500 € par mois, soit 28.500 €, qu’il a fait estimer par une agence la moins-value de l’immeuble liée à l’impossibilité d’utiliser normalement le sous-sol, que les époux Y n’ont pas exécuté le jugement et qu’en conséquence, s’il vendait sa maison maintenant il subirait une moins-value et que les vendeurs lui ont opposé une résistance abusive puisqu’ils ont affirmé en 2007 que la pavillon était entouré d’un drain et n’ont pas exécuté la décision du 28 mars 2012.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 5 septembre 2013.

MOTIFS

Il résulte des articles 1641 et 1644 du Code civil que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine ou qui en diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise ou à un moindre prix s’il les avait connus, et que l’acheteur peut, en ce cas, à son choix, rendre la chose et se faire restituer le prix ou garder la chose et se faire rendre une partie du prix, telle qu’elle sera arbitrée par experts.

Pendant ses opérations, lors d’une première visite, l’expert n’a pu observer que quelques traces sur l’enduit des murs du sous-sol, qui correspondaient à des zones d’humidité avec formation de salpêtre. Mais, le 29 mai 2008, après de fortes pluies, il a constaté la réalité du désordre, lequel se caractérisait par la présence de traces d’humidité assez marquées au pied de l’escalier formant liaison entre le sous-sol et le rez-de-chaussée et l’apparition de traces d’eau au pied de trois des quatre murs du sous-sol.

Il a indiqué que si les constatations faites par l’huissier le 16 février 2005 étaient beaucoup plus inquiétantes (il est fait état de la présence d’eau sur le sol, dépassant par endroit 1 cm, outre l’humidité sur les murs) cela pouvait s’expliquer de deux manières :

— l’importance des phénomènes pluvieux tant en volume qu’en durée,

— l’existence d’améliorations apportées par la création d’une cunette périphérique au plancher bas du sous-sol visant à drainer puis évacuer les eaux résiduelles (cunette réalisée par Monsieur B).

Il a conclu que le sous-sol de la maison était effectivement susceptible d’être inondé à l’issue d’épisodes pluvieux importants et durables, qu’il s’agissait d’un phénomène imputable à l’absence de drain, l’absence totale de protection d’étanchéité des murs extérieurs enterrés (type badigeonnage au goudron ou film protecteur, géotextile ou polyane) et au fait que certains joints des parpaings de maçonnerie n’étaient pas cimentés. La circonstance que Monsieur B ait habillé de bois la terrasse existante n’a strictement aucune incidence sur ce constat, en effet si l’expert a fait état de cette modification c’est uniquement pour justifier son choix de procéder aux sondages par la voie publique pour éviter de démolir la terrasse, et nullement pour expliquer une prétendue aggravation de la perméabilité des murs. Les époux Y ne sauraient utilement contester les conclusions de l’expertise en produisant, fort tardivement, le devis des travaux de construction du pavillon qui prévoyait bien un 'drainage à fond de cave pour cave avec garage sous-sol’ et un courriel de l’architecte de l’époque, Monsieur C, qui leur écrit que les sondages de l’expert auraient du être réalisés dans le sol de la cave et non pas le long d’un pignon, cet avis isolé d’un acteur de la construction (susceptible donc de voir remise en cause la qualité de sa prestation), qui n’aurait pu être utile que lors des opérations d’expertise, n’étant pas suffisant pour remettre en cause les conclusions de l’expert, lequel, en toute hypothèse, a relevé d’autres défauts comme l’absence de protection d’étanchéité sur les murs et le fait que certains joints n’étaient pas cimentés.

Il en résulte que l’immeuble est bien atteint d’un vice caractérisé par une insuffisance d’imperméabilité des murs du sous-sol.

S’agissant des caractéristiques de ce vice, il convient de relever que l’expert a bien expliqué que des pluies occasionnelles de faible importance ne pouvaient pas entraîner un sinistre important et que hors périodes pluvieuses, il n’était pas évident de déceler l’importance des anomalies, lui-même s’étant heurté à cette difficulté pendant ses opérations.

La connaissance du vice par l’acquéreur s’entend notamment de celle de son ampleur. La présence d’une pompe de relevage destinée à permettre l’évacuation des eaux pluviales (puisqu’elles se situent en-dessous du seuil de l’égout public), n’était pas de nature à permettre à l’acquéreur d’envisager que le sous-sol était inondable, la présence de cette pompe n’ayant aucun rapport avec les infiltrations d’eau litigieuses, l’expert précisant à cet égard que cette pompe ne pouvait elle-même empêcher les écoulements et infiltrations dus à la perméabilité des murs extérieurs du sous-sol et à l’absence de conduite de drainage.

Les vendeurs invoquent également la présence de traces sur les murs pour faire juger que le vice était apparent.

Cependant, si l’expert, qui a lui-même constaté dès sa première visite des traces de salpétre sur les murs du sous-sol, a précisé que des traces de spectres blanchâtres sur les murs de la cave, conséquence du drainage des sels calciques au travers du ciment et des parpaings, subsistent même après assèchement (argument qu’il utilise en réponse à la question relative à la connaissance du vice par les vendeurs), il n’est pas établi que de telles traces étaient apparentes lorsque Monsieur B a visité la maison, l’agent immobilier ayant établi une attestation selon laquelle en juillet 2004, 'aucune nappe d’eau ni trace n’était alors visible'. A ce titre, les époux X ne peuvent, sans se contredire, prétendre n’avoir jamais connu d’épisodes d’infiltrations importants (comme ils le rappellent dans leurs écritures, Monsieur Y a déclaré à l’expert n’avoir connu qu’une infiltration d’eau à l’occasion d’un orage alors que la pompe de relevage dysfonctionnait) et écrire 'la présence de la pompe de relevage, la pente de garage très inclinée et le niveau de récupération des eaux révélaient le caractère potentiellement inondable du sous-sol'.

En toute hypothèse, quand bien même quelques traces d’humidité sur les murs du sous-sol auraient été apparentes au moment de la vente, celles-ci ne permettaient pas d’appréhender l’ampleur du vice, l’hypothèse d’une fuite accidentelle liée à un dysfonctionnement ponctuel de la pompe de relevage ne pouvant être exclue par l’acquéreur.

Il résulte à l’évidence des constatations de l’expert que ce vice caché existait avant la vente dès lors qu’il est imputable à des insuffisances de la construction.

Enfin, l’anormale perméabilité des murs du sous-sol en cas de fortes pluies ou de pluies durables est de nature à diminuer l’usage du bien vendu au point que l’acheteur l’aurait acquise à un moindre prix s’il l’avait connu comme l’ont justement relevé les premiers juges.

En effet, le sous-sol étant muni d’une dalle cimentée, un acquéreur est fondé à en attendre une utilisation pour des usages courants tels que : bricolage sur établi, stockage de biens, utilisation d’appareils tels que congélateur, lave-linge, sèche-linge, or, en l’espèce, le caractère inondable de cet espace compromet significativement cette utilisation.

Il est donc acquis que le bien en cause est atteint d’un vice caché de nature à justifier la mise en oeuvre des dispositions de l’article 1641 du Code civil.

Cependant, l’article 1643 du Code civil prévoit que le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n’ait stipulé qu’il ne sera obligé à aucune garantie.

Or, aux termes de l’acte de vente du bien immobilier à Monsieur B, il est indiqué que l’acquéreur 'prendra le bien vendu dans l’état où il se trouvera le jour de l’entrée en jouissance sans aucune garantie de la part du vendeur pour raison : soit de l’état des constructions, de leurs vices, même cachés'.

Les clauses exonératoires ou limitatives de garantie ne peuvent avoir de valeur qu’à supposer le vendeur de bonne foi, c’est-à-dire s’il ignorait le vice de la chose.

En l’espèce, l’expertise a clairement mis en évidence le fait que les murs du sous-sol présentaient des défauts d’étanchéité qui existent depuis l’origine de la construction et qu’il est donc tout à fait impossible, après 8 années d’occupation de la maison, que les vendeurs n’aient jamais subi d’inondations. Monsieur B verse d’ailleurs aux débats les attestations de Messieurs E F et Z et de Madame A qui témoignent de ce qu’ils ont vu à plusieurs reprises Monsieur Y racler le sol de son garage pour en évacuer l’eau après qu’il ait plu.

En conséquence, c’est à juste titre que les premiers juges ont considéré que les époux Y ne pouvaient se prévaloir de la clause de non garantie figurant dans l’acte de vente, puisqu’ils savaient que leur sous-sol était inondable, peu important qu’ils aient ignoré les causes de ce vice.

Il résulte de l’article 1644 du Code civil que l’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu’elle sera arbitrée par experts.

La demande principale formée par Monsieur B d’une somme correspondant au coût des travaux de remise en état s’analyse donc comme une demande de restitution d’une partie du prix de vente.

L’expert a chiffré les travaux de réparation (incluant le coût des mesures d’investigation en cours d’expertise, celui de la réparation faite par Monsieur B et celui des travaux d’amélioration de l’étanchéité des murs) à la somme de 19.191,51 €, et il convient d’allouer ladite somme à Monsieur B, laquelle produira intérêts au taux légal à compter du jugement du 28 mars 2012 conformément aux dispositions de l’article 1153-1 alinéa 2 du Code civil.

Aux termes de l’article 1645 du Code civil, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages-intérêts envers l’acheteur.

Il apparaît que c’est par des motifs pertinents que les premiers juges ont considéré que depuis mars 2005 (création d’une cunette par Monsieur B) le trouble apporté à la jouissance du sous-sol était devenu résiduel, que d’ailleurs Monsieur B ne produisait aucun élément relatif à la fréquence des épisodes d’inondation et qu’en l’absence de la moindre pièce justifiant de l’indemnité mensuelle réclamée par Monsieur B, ils lui ont alloué la somme de 5.000 € en réparation de son préjudice de jouissance.

Le jugement sera également confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur B :

de sa demande au titre d’une moins-value qu’il estime à la somme de 50.000 €, par ailleurs tout à fait excessive au regard de la valeur de l’immeuble, puisque la réalisation des travaux de reprise de l’étanchéité des murs du sous-sol a précisément pour but de mettre un terme aux désordres, de sorte que l’immeuble ne supportera aucune dépréciation,

de sa demande au titre d’un préjudice moral qui n’est nullement démontré sachant que le préjudice de jouissance, seul concevable au cas d’espèce, a donné lieu à indemnisation,

de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive alors que la recherche de l’origine du vice a nécessité des opérations d’expertise longues et complexes.

A ces motifs pertinents, il sera ajouté sur la demande d’indemnisation pour résistance abusive, que Monsieur B (qui sollicitait déjà 5.000 € en première instance) ne justifie pas avoir subi un préjudice distinct de celui d’ores et déjà réparé par l’allocation de dommages-intérêts moratoires du fait que Monsieur et Madame Y n’aient pas spontanément exécuté le jugement de première instance, étant en outre observé qu’il ne justifie pas de la moindre démarche tendant à en obtenir l’exécution et n’a pas entendu faire usage des dispositions de l’article 526 du Code de procédure civile.

La décision de première instance sera confirmée s’agissant de la condamnation des époux Y aux dépens et au paiement d’une somme de 2.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Compte tenu du sens de la présente décision, la demande de Monsieur et Madame Y en réparation d’un préjudice moral sera rejetée.

Monsieur et Madame Y, qui succombent, seront condamnés aux dépens de la procédure d’appel et au paiement d’une indemnité de 2.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en appel par Monsieur B.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Condamne Monsieur K Y et Madame I D épouse Y à payer à Monsieur G B la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

Condamne Monsieur et Madame Y aux dépens d’appel,

Autorise le recouvrement des dépens dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile.

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Marie-José VALANTIN, Président et par Madame Lise BESSON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Versailles, 3ème chambre, 31 octobre 2013, n° 12/04367