Cour d'appel de Versailles, 14e chambre, 22 décembre 2016, n° 16/04738

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 14e ch., 22 déc. 2016, n° 16/04738
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 16/04738
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 9 juin 2016, N° 16/01211
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 82B

14e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 22 DECEMBRE 2016

R.G. N° 16/04738

AFFAIRE :

COMITÉ D’ENTREPRISE DE LA SOCIÉTÉ HENKEL FRANCE pris en la personne de son secrétaire en exercice domicilié en cette qualité audit siège

C/

SAS HENKEL FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux

domiciliés en cette qualité audit siège

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 10 Juin 2016 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° RG : 16/01211

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à:

Me Stéphane CHOUTEAU

Me Patricia MINAULT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT-DEUX DÉCEMBRE DEUX MILLE SEIZE, La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

COMITÉ D’ENTREPRISE DE LA SOCIÉTÉ HENKEL FRANCE pris en la personne de son secrétaire en exercice domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

Représenté par Me Stéphane CHOUTEAU de l’ASSOCIATION AVOCALYS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 – N° du dossier 002856

assisté de Me Dimitri MONFORTE, avocat substituant Me Emmanuel GAYAT de la SCP BAUMGARTEN – JDS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0028

APPELANTE

****************

SAS HENKEL FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux

domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 552 117 590

XXX

XXX

Représentée par Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 – N° du dossier 20160289

assistée de Me Marine CHARPENTIER et de Me Philippe CHAPUIS de la SELARL ACTANCE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : K0168

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 09 Novembre 2016, Madame Véronique CATRY, conseiller, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Michel SOMMER, président,

Madame Véronique CATRY, conseiller,

Madame Maïté GRISON-PASCAIL, conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Agnès MARIE FAITS ET PROCÉDURE,

Le groupe international Henkel opère sur plusieurs domaines divisés en trois grandes divisions, les détergents et produits d’entretien, la cosmétique grand public et coiffure professionnelle, les adhésifs grand public, professionnels et industries.

La société Henkel France a pour activité la fabrication et la commercialisation des produits de la division détergents, la société Henkel Technologies France est spécialisée dans le domaine de la fabrication des colles.

Le 27 janvier 2016, Henkel a remis aux comités centraux d’entreprise de Henkel France et Henkel Technologies France ainsi qu’aux comités d’établissement, une note d’information portant sur le projet ONE!GSC destiné à mettre en place une organisation de la « Supply Chain» (chaîne d’approvisionnement et de logistique) intégrée, centralisée et commune aux trois divisions du groupe, qui serait pilotée par une nouvelle société, la société Henkel Global Supply Chain B.V, le projet devant démarrer le 1er janvier 2017.

Il y était précisé que l’hébergement des activités de Supply Chain au sein de la nouvelle entité juridique entraînera des transferts d’entités économiques autonomes au sens de l’article L. 1224-1 du code du travail, que 159 postes en CDI seront transférés vers la nouvelle société, dont 14 de la société Henkel France, le reste de la société Henkel Technologies France, ce qui conduira à un transfert automatique et obligatoire des contrats de travail au sein de la nouvelle société créée.

Le 18 février 2016, lors de sa réunion, le CCE a estimé que la procédure d’information et de consultation portant sur le projet et ses conséquences n’avait pas été régulièrement engagée.

Le 7 mars 2016, un accord est intervenu entre la société Henkel France et les organisations syndicales représentatives. Aux termes de cet accord, qui contient le calendrier de la procédure d’information et ses modalités, la durée de la procédure de consultation a été fixée du 27 janvier au 10 mai 2016, il a été pris acte de ce que la direction acceptait de désigner un expert (le cabinet Syndex) dont elle prendrait en charge les honoraires, afin d’assister le CCE, le CE et le CHSCT en leur donnant tout éclairage sur le projet, il a été indiqué que le rapport sera restitué le 15 avril 2016 au CHSCT et le 25 avril suivant au CCE et au CE, enfin il a été décidé que ces instances rendront leur avis le 10 mai 2016.

Suivant procès-verbal de réunion du 10 mai 2016, le comité d’entreprise de la société Henkel France, estimant que les informations communiquées au cours de la procédure d’information consultation étaient insuffisantes, que l’application de l’article L. 1224.1 du code du travail était abusive et que la société devait ouvrir une procédure d’information consultation conformément aux articles L. 1233-28 et suivants du même code, a mandaté son secrétaire pour engager des actions judiciaires pour :

. la première résolution, faire injonction à l’employeur de fournir les informations demandées, obtenir le report de l’échéance à laquelle le CE sera réputé avoir émis un avis et faire interdiction à l’employeur de mettre en 'uvre le projet tant que l’information consultation n’aura pas été régulièrement menée à son terme ;

. la seconde résolution, ordonner à la société de mener la procédure d’information consultation prévue aux articles L. 1233-28 et suivants du code du travail avec présentation d’un plan de sauvegarde de l’emploi, et lui faire interdiction de mettre en 'uvre le projet tant que l’autorité administrative n’aura pas rendu sa décision d’homologation ou de validation conformément à la procédure prévue aux articles L. 1233-57-1 et suivants.

C’est dans ces conditions que le comité d’entreprise de la société a fait délivrer le 9 février 2016 deux assignations à la société Henkel France.

La présente instance porte sur la première résolution.

Par ordonnance rendue le 10 juin 2016 (n° 16-1348) en la forme des référés, le magistrat délégataire du président du tribunal de grande instance de Nanterre a dit l’action irrecevable comme engagée tardivement, dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile et condamné le comité d’entreprise aux dépens.

***

Vu l’appel relevé par le comité d’entreprise de la société Henkel France le 23 juin 2016 et ses conclusions du 25 juillet 2016 suivant lesquelles il demande à la cour de :

. infirmer l’ordonnance ;

. dire que la procédure d’information et de consultation était toujours en cours à la date de délivrance de l’assignation introductive d’instance et que l’information communiquée au comité d’entreprise est gravement insuffisante ;

. dire que I’avis du comité d’entreprise sur le projet de réorganisation ne pourra valablement être sollicité que lorsque l’employeur lui aura transmis un dossier complémentaire d’information comprenant les informations complémentaires sollicitées ;

. ordonner la communication d’un dossier complémentaire d’information prévoyant un mécanisme licite de transfert des contrats de travail des salariés dont le poste est supprimé, précisant le montant de la valorisation des actifs apportés par la société Henkel France, décrivant la nature des relations contractuelles qui doivent nécessairement s’établir entre la société Henkel France et la nouvelle société filiale, indiquant le coût de la prestation qui sera fournie par la nouvelle société filiale à la société Henkel France qui seront réalisées du fait de la suppression programmée de 14 emplois au sein de la société Henkel France ;

. ordonner la prolongation du délai d’information et de consultation sur le projet de trois mois à compter de la communication par l’employeur des informations manquantes ;

. condamner la société Henkel France à lui verser la somme de 4 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions de la société Henkel France du 19 octobre 2016 qui demande à la cour de :

. confirmer l’ordonnance ;

. dire que les demandes du comité d’entreprise relatives à la communication d’informations et à la prolongation du délai de consultation sont irrecevables en raison de leur

caractère tardif et dilatoire et de l’effet du délai préfix prescrit par l’article L. 2323- 4 du code du travail ; . dire qu’il n’est pas recevable à agir en contestation de l’article L. 1224-1 du Code du travail faute de disposer d’un intérêt à agir et qu’il ne peut utiliser l’action visée à l’article L. 2323-4 pour tenter de contester de façon détournée l’application de l’article L. 1224-1 ;

. constater que la procédure d’information et consultation des instances représentatives du personnel a été valablement menée, qu’elle était close à la date du 10 mai 2016 et que le comité d’entreprise est réputé avoir rendu un avis négatif conformément à l’article L. 2323-1 du code du travail rappelé à l’article 1 de accord précité ;

A titre subsidiaire,

. constater que la demande du comité d’entreprise n’est pas fondée dès lors que celui-ci avait parfaitement connaissance de l’effet du délai préfixé, a bénéficié d’un délai plus favorable que le délai réglementaire prévu à l’article R. 2323-1-1 pour rendre un avis lui permettant d’exercer pleinement sa compétence, a bénéficié du support d’un expert pris en charge par l’entreprise et de l’éclairage du CHSCT, a reçu l’ensemble des informations disponibles et nécessaires à la compréhension du projet et qu’il ne démontre pas en quoi l’obtention de ces informations est nécessaire pour formuler son avis ;

En conséquence,

. débouter le comité d’entreprise de l’ensemble de ses demandes ;

. acter du fait qu’il est réputé avoir rendu un avis négatif à la date du 10 mai 2016 ;

. acter de la possibilité pour la société de mettre en 'uvre son projet ;

. condamner le comité d’entreprise à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

MOTIFS DE L’ARRET

Sur la recevabilité de l’action engagée par le comité d’entreprise, contestée par la société Henkel France en raison de la tardiveté de l’action engagée

L’accord signé le 7 mars 2016 fixait le terme de la procédure d’information consultation au 10 mai 2016. Le comité d’entreprise devait rendre son avis sur le projet avant l’expiration de ce délai, ce qu’il n’a pas fait, sollicitant sa prolongation par assignation du 9 mai 2016.

Selon l’article L. 2323-4 du code du travail, 'Pour lui permettre de formuler un avis motivé, le comité d’entreprise dispose d’informations précises et écrites transmises par l’employeur ou, le cas échéant, mises à disposition (') et de la réponse motivée de l’employeur à ses propres observations.'.

Les membres élus du comité peuvent, s’ils estiment ne pas disposer d’éléments suffisants, saisir le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés, pour qu’iI ordonne la communication par l’employeur des éléments manquants. Le juge statue dans un délai de huit jours.

Cette saisine n’a pas pour effet de prolonger le délai dont dispose le comité pour rendre son avis. Toutefois, en cas de difficultés particulières d’accès aux informations nécessaires à la formulation de l’avis motivé du comité d’entreprise, le juge peut décider la prolongation du délai. Il résulte de ce texte que pour être recevable, la demande de prolongation de délai doit être formée avant l’expiration du délai légalement ou contractuellement fixé, qu’il s’agit de la seule condition et que la décision du juge peut ne pas être rendue à l’intérieur du même délai.

La demande de prolongation ayant été formée avant l’expiration du délai conventionnement fixé, l’action n’est pas tardive. La fin de non-recevoir invoquée en raison de l’expiration du délai n’est pas fondée.

Sur la recevabilité de l’action, contestée par la société Henkel France en raison d’un défaut d’intérêt à agir du comité d’entreprise

L’action du comité d’entreprise vise à obtenir des informations supplémentaires, par rapport à celles déjà obtenues de la société outre celles contenues dans le rapport du cabinet Syndex (160 pages) déposé en avril 2016, sur le projet de transfert automatique des contrats de travail de 14 salariés, alors que l’action en contestation du transfert d’un contrat de travail est un droit exclusivement attaché à la personne du salarié qui seul peut porter la contestation du transfert de son contrat et ce devant le conseil de prud’hommes.

Le comité d’entreprise, qui n’a qualité à agir que lorsque ses intérêts propres sont en cause, n’établit pas que ce soit le cas en l’espèce.

De plus, le transfert projeté de ces 14 salariés ne constitue pas des suppressions d’emploi de ces 14 salariés, puisqu’il s’agit d’un transfert d’emploi.

L’action du comité d’entreprise, qui est sans intérêt à agir, est irrecevable.

Sur les autres demandes

Il y a lieu de constater, conformément à l’article L. 2323-3 du code du travail, que le comité d’entreprise est réputé avoir été consulté sur le projet et avoir donné un avis négatif.

Il n’y a pas lieu d’accueillir toutes autres demandes.

Il sera fait application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société Henkel France.

PAR CES MOTIFS :

Statuant contradictoirement et en dernier ressort,

DIT l’action engagée par le comité d’entreprise de la société Henkel France irrecevable pour défaut d’intérêt ;

En conséquence,

CONFIRME l’ordonnance ;

DIT que le comité d’entreprise est réputé avoir été consulté sur le projet et avoir rendu un avis négatif ; REJETTE toutes autres demandes ;

CONDAMNE le comité d’entreprise de la société Henkel France à payer à la société Henkel France la somme de 1 200 euros (mille deux cent euros) en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT que le comité d’entreprise de la société Henkel France supportera les dépens d’appel qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Monsieur Jean-Michel SOMMER, président et par Madame Agnès MARIE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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Cour d'appel de Versailles, 14e chambre, 22 décembre 2016, n° 16/04738