Cour d'appel de Versailles, 14e chambre, 15 octobre 2020, n° 19/05327

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 14e ch., 15 oct. 2020, n° 19/05327
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 19/05327
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 18 juin 2019, N° 19/00173
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 82B

14e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 OCTOBRE 2020

N° RG 19/05327 – N° Portalis DBV3-V-B7D-TLA5

AFFAIRE :

SAS ASTEK PROJETS ET OFFRES prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité

C/

Organisme CSE 'COMITÉ SOCIAL ET ÉCONOMIQUE’ DE L’UES ASTEK venant aux droits du CE 'Comité d’entreprise’de L’UES ASTEK, pris en la personne de son secrétaire en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendu le 19 Juin 2019 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 19/00173

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Christophe DEBRAY

Me Julie GOURION

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SAS ASTEK PROJETS ET OFFRES agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité

N° SIRET : 399 728 666

[…]

[…]

[…]

SA ASTEK agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité

N° SIRET: 347 989 808

[…]

[…]

[…]

SA (GROUPE) ASTEK agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité

N° SIRET : 489 800 805

[…]

[…]

[…]

SA ASTEK INDUSTRIE agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité

N° SIRET : 439 752 817

[…]

[…]

[…]

SAS SEMANTYS agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité

N° SIRET : 440 856 508

[…]

[…]

[…]

SAS CONSEIL ET ASSISTANCE TECHNIQUE AUX PROJETS (CATEP ) agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié audit siège en cette qualité

N° SIRET : 417 534 401

[…]

[…]

[…]

Représentées par Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 – N° du dossier 19336

Assistées par Me Sylvain MERCADIEL avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0511 -

APPELANTES

****************

COMITÉ SOCIAL ET ÉCONOMIQUE DE L’UNITE ECONOMIQUE ET SOCIALE ASTEK venant aux droits du COMITÉ D’ENTREPRISE DE L’UNITE ECONOMIQUE ET SOCIALE ASTEK, pris en la personne de son secrétaire en exercice, dûment mandaté, domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

[…]

Représenté par Me Julie GOURION, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 51 – N° du dossier 219830

Assisté de Me Thomas NOVALIC de la SELARL TN AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIME

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 02 Septembre 2020, Madame Nicolette GUILLAUME, présidente ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Nicolette GUILLAUME, Président,

Madame Marie LE BRAS, Conseiller,

Madame Marina IGELMAN, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sophie CHERCHEVE

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le groupe Astek est un acteur du service informatique réunissant environ 2 000 salariés et se

composant de la société Astek projets et offres, la société Astek, la société Astek Groupe, la société

Astek Industrie, la société Semantys et la société Conseils et Assistance technique aux Projets.

Ces sociétés ont fait l’objet de plusieurs redressements à l’initiative de l’Urssaf Ile-de-France et

Provence-Alpes-Côte d’Azur sur une période comprise entre 2007 et 2013, le litige portant sur

l’intégration des indemnités kilométriques versées aux salariés à l’assiette des cotisations sociales.

Des délais ont été accordés en décembre 2017 par l’Urssaf dans le cadre de protocoles d’accord ou de

la mise en place d’échéanciers de paiement.

Dénonçant un manquement au devoir d’information et de consultation sur les redressements opérés

par les Urssaf, les contentieux ayant suivi et les transactions finalement conclues, par acte d’huissier

de justice du 19 janvier 2019, le comité d’entreprise de l’UES Astek a fait assigner en référé la

société Astek projets et offres, la société Astek, la société Astek Groupe, la société Astek Industrie,

la société Semantys et la société Conseils et assistance technique aux projets (ci-après l’UES Astek).

Par ordonnance de référé contradictoire rendue le 19 juin 2019, le président du tribunal de grande

instance de Nanterre a :

— dit recevable l’action,

— ordonné aux sociétés défenderesses de communiquer au comité d’entreprise de l’UES Astek

l’ensemble des transactions conclues avec l’Urssaf dans un délai de 8 jours à compter de la

signification de l’ordonnance et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard,

— ordonné aux sociétés défenderesses de communiquer au comité d’entreprise de l’UES Astek le

montant exact de la masse salariale brute incluant les gains et rémunérations ayant fait l’objet des

redressements par les Urssaf Ile-de-France et Provence Alpes Côte d’Azur dans un délai de 8 jours à

compter de la signification de l’ordonnance et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard,

— ordonné aux sociétés défenderesses de verser au comité d’entreprise de l’UES Astek le reliquat des

sommes dues au titre du budget de fonctionnement et du budget des activités sociales et culturelles

après avoir procédé au calcul de la masse salariale brute incluant les gains et rémunérations ayant fait

l’objet des redressements par les Urssaf Ile-de-France et Provence Alpes Côte d’Azur dans un délai

de 8 jours à compter de la signification de la’ordonnance et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour

de retard,

— débouté les parties du surplus de leurs demandes,

— condamné la société Astek projets et offres, la société Astek, la société Astek Groupe, la société

Astek Industrie, la société Semantys et la société Conseils et Assistance technique aux Projets à

verser au comité d’entreprise de l’UES Astek la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du

code de procédure civile,

— condamné la société Astek projets et offres, la société Astek, la société Astek Groupe, la société

Astek Industrie, la société Semantys et la société Conseils et Assistance technique aux Projets aux

entiers dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 18 juillet 2019, la société Astek projets et offres, la société Astek,

la société Astek Groupe, la société Astek Industrie, la société Semantys et la société Conseils et

Assistance technique aux Projets ont interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de

disposition.

Dans leurs dernières conclusions remises le 6 septembre 2019 auxquelles il convient de se reporter

pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, les sociétés Astek projets et offres, Astek, la

Astek Groupe, Astek Industrie, Semantys et Conseils et Assistance technique aux Projets

demandent à la cour, au visa des articles 809, 31 et 122 du code de procédure civile, de :

in limine litis,

— constater que le comité d’entreprise de l’UES Astek ne justifie pas d’un transfert de patrimoine

(emportant transfert des droits et actions des anciens comités d’établissement) lui permettant

d’engager une action judiciaire ayant pour objet de recouvrer un complément de subvention de

fonctionnement correspondant à une époque des anciennes instances ;

en conséquence,

— dire que le comité d’entreprise de l’UES Astek est irrecevable en ses demandes pour défaut de droit

d’agir ;

— infirmer l’ordonnance de référé du tribunal de grande instance de Nanterre rendue le 19 juin 2019 ;

— débouter le comité d’entreprise de l’UES Astek de l’intégralité de ses demandes ;

en tout état de cause :

— dire que le comité d’entreprise n’établit pas de trouble manifestement illicite en lien avec une

prétendue dissimulation d’informations sur des redressements Urssaf intervenus au sein de l’UES

Astek ;

— dire que la demande de versement du reliquat des sommes dues au titre du budget de

fonctionnement du comité d’entreprise se heurte à des contestations sérieuses ;

en conséquence,

— infirmer l’ordonnance de référé du tribunal de grande Instance de Nanterre rendue le 19 juin 2019 ;

— dire n’y avoir lieu à référé au visa de l’article 809 du code de procédure civile ;

— débouter le comité d’entreprise de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions contraires.

Dans ses dernières conclusions transmises le 10 octobre 2019 auxquelles il convient de se reporter

pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, le comité social et économique de l’UES Astek

demande à la cour, au visa des articles 809 du code de procédure civile, L. 2323-1, L. 2323-6, L.

2325-43, L. 2323-50 et L. 2323-86 du code du travail et L. 243-6-5 du code de la sécurité sociale, de

:

— dire qu’il vient aux droits du comité d’entreprise de l’UES Astek ;

— confirmer l’ordonnance de référé rendue le 19 juin 2019 par le tribunal de grande instance de

Nanterre en ce qu’elle a :

dit que l’action est recevable ;

ordonné aux sociétés défenderesses de lui communiquer l’ensemble des transactions conclues avec

l’Urssaf dans un délai de 8 jours à compter de la signification de l’ordonnance et ce, sous astreinte de

1 000 euros par jour de retard ;

ordonné aux sociétés défenderesses de lui communiquer le montant exact de la masse salariale brute

incluant les gains et rémunérations ayant fait l’objet des redressements par les Urssaf d’Ile de France

et Provence Alpes Côte d’Azur dans un délai de 8 jours à compter de la signification de l’ordonnance

et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

ordonné aux sociétés défenderesses de lui verser le reliquat des sommes dues au titre du budget de

fonctionnement et du budget des activités sociales et culturelles après avoir procédé au calcul de la

masse salariale brute incluant les gains et rémunérations ayant fait l’objet des redressements par les

Urssaf Ile de France et Provence Alpes Côte d’Azur dans un délai de 8 jours à compter de la

signification de l’ordonnance et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

condamné les sociétés Astek projets et offres, Astek, la Astek Groupe, Astek Industrie, Semantys et

Conseils et Assistance technique aux Projets à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article

700 du code de procédure civile ;

condamné les sociétés Astek projets et offres, Astek, la Astek Groupe, Astek Industrie, Semantys et

Conseils et Assistance technique aux Projets aux projets aux entiers dépens.

y ajoutant,

— débouter les sociétés Astek projets et offres, Astek, la Astek Groupe, Astek Industrie, Semantys et

Conseils et Assistance technique aux Projets en toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

— condamner solidairement les sociétés Astek projets et offres, Astek, la Astek Groupe, Astek

Industrie, Semantys et Conseils et Assistance technique aux Projets à lui payer la somme de 5 000

euros sur le fondement des articles 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles

d’appel ;

— condamner solidairement les sociétés Astek projets et offres, Astek, la Astek Groupe, Astek

Industrie, Semantys et Conseils et Assistance technique aux Projets aux entiers dépens ;

— dire qu’ils pourront être directement recouvrés par Maître Julie Gourion, avocat au barreau de

Versailles, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 février 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION

. sur la recevabilité des demandes du CSE

L’UES Astek estime que le comité d’entreprise de l’UES Astek ne justifie pas d’un transfert de

patrimoine emportant celui des droits et actions des anciens comités d’établissement existant avant

2014, lui permettant de poursuivre l’action judiciaire engagée pour recouvrer un complément de

subventions à leur budget, et venir aux droits de ces derniers et soulève l’irrecevabilité de ses

demandes, pour défaut d’intérêt et de qualité à agir.

Le CSE soutient qu’il vient aux droits du CE.

Sur la mise en place d’un CE unique seulement en 2014, par fusion de deux CE, le CSE se prévaut

d’un protocole d’accord préélectoral signé le 14 novembre 2014 prévoyant le transfert des biens et du

patrimoine des anciens CE au CE de l’UES Astek.

Il précise qu’aucune cessation définitive de l’activité n’est intervenue et que ce n’est que lors de la

réunion du comité d’entreprise de l’UES Astek du 15 février 2018, que les transactions conclues avec

l’Urssaf conformément à la possibilité offerte par l’article L. 243-6-5 du code de la sécurité sociale

concernant un rappel de cotisations sociales de 12 millions d’euros ont été portées à sa connaissance.

Sur ce,

Aux termes de l’article 31 du code de procédure civile : « L’action est ouverte à tous ceux qui ont un

intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi

attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention,

ou pour défendre un intérêt déterminé ».

Il est constant que les redressements portant sur la période comprise entre 2007 et 2013, les

manquements reprochés ont d’abord concerné les instances représentatives alors en place au cours de

cette période, c’est-à-dire les comités d’établissements « Nord Est » et « Ile de France – Ouest ». Il

n’est pas discuté que le comité d’entreprise unique auquel aurait succédé le CSE actuel n’a été mis en

place qu’à compter de l’année 2014.

Mais il ressort du protocole d’accord préélectoral signé le 14 novembre 2014 par un représentant de

la direction de l’UES Astek (Mme X) et les organisations syndicales que le périmètre du CE pour

l’ensemble des sociétés de l’UES Astek est redéfini à l’article 4 et qu’il doit remplacer les deux

comités d’établissement et le comité central d’entreprise existant à l’issue des élections

professionnelles qui suivent.

En son article 13 intitulé « Dévolution des biens du Comité d’Entreprise », il est indiqué :

« L’ensemble des biens matériels et/ou immatériels des comités d’établissement Nord Est IDF et

Province, ainsi que du comité central d’entreprise est transféré au Comité d’Entreprise, issu des

élections professionnelles régies par le présent accord.

Les ressources financières restantes des budgets de fonctionnement des mandatures précédentes des

dits comités alimenteront donc le budget de fonctionnement du comité d’entreprise unique prévu

dans ce protocole.

Les ressources financières restantes des budgets d’ASC des mandatures précédentes des dits comités

alimenteront donc le budget ASC du comité d’entreprise unique.

Les contrats, notamment les abonnements des 3 comités seront transférés au comité d’entreprise.

Les procédures juridiques entamées par l’un des comités seront également transférées au comité

d’entreprise, afin d’en assurer la continuité ou non.

L’ensemble des décisions prises par l’un des 3 comités sera également versé au patrimoine du comité

d’entreprise unique. »

En conséquence de cet accord parfaitement formalisé, contrairement aux allégations de l’appelante,

le CE pour l’ensemble des sociétés de l’UES Astek venait aux droits des deux comités

d’établissement et du comité central d’entreprise.

Par la suite, le 26 juin 2019 est intervenu le renouvellement des instances représentatives du

personnel conformément à l’ordonnance du 22 septembre 2017 par l’élection d’un CSE en lieu et

place du CE au sein de l’UES Astek. Le CSE de l’UES Astek vient donc aux droits de l’ancien CE

dans le cadre de la présente procédure.

En raison de cet accord préélectoral signé le 14 novembre 2014 dont il résulte un accord effectif sur

le transfert des biens de l’ensemble des comités précédemment existants au CE pour l’ensemble des

sociétés de l’UES Astek et de la réforme introduite le 22 septembre 2017, l’ordonnance qui a déclaré

recevables les demandes du CE devenu CSE sera donc confirmée.

. sur les demandes du CSE

L’UES Astek plaide l’absence de dissimulation et la transmission des informations litigieuses à

l’expert comptable des CE. Elle en veut pour preuve la demande de l’expert-cabinet Boisseau- et le

procès-verbal de la réunion du 15 février 2018.

Sur le versement du reliquat des sommes dues au titre du budget de fonctionnement du comité

d’entreprise, elle soutient que cette demande de provision se heurte à des contestations sérieuses. Elle

soutient que le réajustement des budgets en raison d’un redressement opéré par l’Urssaf n’est pas

automatique. Elle prétend que le CSE dispose de toutes les informations utiles pour calculer

l’éventuel reliquat litigieux.

En réponse, le CSE sollicite la confirmation de l’ordonnance entreprise et évoque une dissimulation

d’information sur l’assiette des cotisations augmentée de 12 millions d’euros. Il prétend que ce n’est

pas seulement une information mais une consultation qui était nécessaire. Il précise qu’il a reçu une

information très insuffisante y compris lors de la réunion du 15 février 2018.

Sur ce,

— sur l’existence d’un trouble manifestement illicite en lien avec une prétendue dissimulation

d’informations sur des redressements Urssaf intervenus au sein de l’UES Astek

Selon l’alinéa 1 de l’article 835 qui remplace l’article 809 du code de procédure civile, 'le président

peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures

conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit

pour faire cesser un trouble manifestement illicite'.

Le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d’un fait qui directement ou

indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

Il incombe à celui qui s’en prétend victime de le démontrer.

La dissimulation d’information au CE devenu CSE sur le calcul de la masse salariale brute peut

caractériser un trouble manifestement illicite dans la mesure où ce dernier doit en connaître le

montant exact qui sert notamment de base au calcul de ses budgets.

En effet, selon l’article L. 2325-43 du code du travail, « l’employeur verse au comité d’entreprise une

subvention de fonctionnement d’un montant annuel équivalent à 0,2 % de la masse salariale brute. Ce

montant s’ajoute à la subvention destinée aux activités sociales et culturelles, sauf si l’employeur fait

déjà bénéficier le comité d’une somme ou de moyens en personnel équivalents à 0,2 % de la masse

salariale brute ». Et selon l’article L. 2323-50 3° du même code : «Chaque trimestre, dans les

entreprises de trois cents salariés et plus, l’employeur communique au comité d’entreprise des

informations sur … les retards éventuels dans le paiement, par l’entreprise, des cotisations de sécurité

sociale ou des cotisations dues aux institutions de retraite complémentaire régies par le chapitre II du

titre II du livre IX du code de la sécurité sociale et l’article L. 727-2 du code rural et de la pêche

maritime ou des cotisations ou primes dues aux organismes assureurs mentionnés à l’article premier

de la loi n°89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées

contre certains risques au titre des garanties collectives complémentaires mentionnées à l’article L.

911-2 du code de la sécurité sociale. »

Il est observé qu’aucune demande de mesures conservatoires ou de remise en état ne correspond au

besoin de consultation qui est aussi allégué par le CSE et que seul les manquements de la direction

de l’entreprise à son devoir d’information des représentants du personnel sont documentés et donc

susceptibles de caractériser le trouble manifestement illicite invoqué.

L’existence des protocoles transactionnels avec l’Urssaf est un fait constant et la réintégration des

indemnités kilométriques versées dans l’assiette des cotisations et donc dans la masse salariale brute

servant de base de calcul aux budgets des anciens CE n’est pas contredite.

Or à aucun moment ne figure dans les pièces visées par l’appelante ne serait-ce que le montant exact

des redressements opérés par l’Urssaf, seules des sommes approximatives sont évoquées, les

protocoles n’étant pas communiqués, la direction insistant sur la nécessaire confidentialité du dossier

qui serait imposée par l’Urssaf, reconnaissant cependant que cette dernière considère qu’il s’agit

d’éléments de salaire (page 20 du procès-verbal de réunion du 15 février 2018). Il est même indiqué

par M. Y en page 22 : 'je ne communique pas la masse salariale aux salariés'.

La pièce 3 de l’appelante intitulée 'état des demandes du Cabinet Boisseau -examen des comptes

2012, 2013 et 2014" qui n’est pas datée mais sur laquelle figurent des commentaires de 2015 au plus

tard et qui est donc antérieure aux transactions litigieuses (décembre 2017), n’apporte pas davantage

de preuve d’une communication efficace de la direction au CE sur la masse salariale brute. Ce n’est

pas parce que l’expert n’a pas sollicité un complément d’information que celle-ci est complète, de

sorte qu’elle apparaît bien lacunaire et que le trouble manifestement illicite est caractérisé ; les

mesures ordonnées sont donc justifiées.

La décision entreprise sera en conséquence confirmée en ce qu’elle a ordonné la communication des

informations litigieuses sur les transactions conclues avec l’Urssaf et sur le montant de la masse

salariale brute, sous astreinte, cette dernière mesure de contrainte n’étant pas critiquée ; il y sera

ajouté que les astreintes ne courront que pendant un délai de 3 mois.

— sur le versement d’une provision

Le CSE demande le versement du reliquat des sommes dues au titre du budget de fonctionnement et

du budget des activités sociales et culturelles après avoir procédé au calcul de la masse salariale

brute incluant les gains et rémunérations ayant fait l’objet des redressements par les Urssaf

Ile-de-France et Provence-Alpes-Côte d’Azur et ce, dans un délai de 8 jours à compter de la

signification de l’ordonnance et sous astreinte.

Selon l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile,'le président peut dans les cas où l’existence

de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner

l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire'.

La demande non chiffrée ainsi faite de façon indéterminée quant à son montant par le CSE, ne vise

qu’à consacrer un principe de créance, ce qui dépasse le pouvoir du juge statuant en référé qui n’est

autorisé qu’à accorder une provision d’un montant établi avec évidence. Cette prétention ne peut donc

pas prospérer et l’ordonnance sera réformée en ce sens.

. sur les demandes accessoires

L’ordonnance sera confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première

instance.

Partie perdante pour au moins une partie de ses demandes, l’UES Astek devra supporter les dépens

d’appel.

L’équité et la solution finalement adoptée à l’issue de la réformation partielle de l’ordonnance

entreprise justifient de laisser au CSE la charge des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme l’ordonnance rendue le 19 juin 2029 sauf en ce qu’elle a ordonné aux sociétés

défenderesses de verser au comité d’entreprise de l’UES Astek le reliquat des sommes dues au titre

du budget de fonctionnement et du budget des activités sociales et culturelles après avoir procédé au

calcul de la masse salariale brute incluant les gains et rémunérations ayant fait l’objet des

redressements par les Urssaf Ile-de-France et Provence Alpes Côte d’Azur dans un délai de 8 jours à

compter de la signification de la’ordonnance et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard,

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande du versement du reliquat des sommes dues au titre du

budget de fonctionnement et du budget des activités sociales et culturelles après avoir procédé au

calcul de la masse salariale brute incluant les gains et rémunérations ayant fait l’objet des

redressements par les Urssaf Ile-de-France et Provence Alpes Côte d’Azur,

Y ajoutant,

Dit que les astreintes prononcées courront pendant un délai de 3 mois,

Rejette toute autre demande,

Dit que l’UES Astek supportera la charge des dépens d’appel qui pourront être recouvrés

conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile par les avocats qui en ont

fait la demande.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en

ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du

code de procédure civile et signé par Madame Nicolette GUILLAUME, Président et par Madame

CHERCHEVE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

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