CAA de BORDEAUX, 5ème chambre (formation à 3), 25 juin 2015, 13BX00621, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 5e ch. (formation à 3), 25 juin 2015, n° 13BX00621
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 13BX00621
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Saint-Martin, 20 décembre 2012, N° 0700971,1000048,1200070
Identifiant Légifrance : CETATEXT000030831976

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 26 février 2013, présentée pour la SELARL Christophe Mandon, liquidateur judiciaire de la SARL Boramar, dont le siège est situé 12 quai Louis XVIII à Bordeaux (33000), par Me Ruffié, avocat ;

La SELARL Christophe Mandon demande à la cour :

1°) d’annuler l’article 2 du jugement n° 0700971,1000048,1200070 du 21 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté ses demandes tendant à l’annulation, d’une part, de l’arrêté du 1er août 2007 du préfet de la Guadeloupe déclarant d’utilité publique l’acquisition par le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (Conservatoire du littoral) des parcelles situées dans le périmètre du projet de protection et de sécurisation de la Baie de l’embouchure située sur le territoire de Saint-Martin et les a déclarées cessibles, d’autre part, de l’arrêté du 6 juillet 2012 du représentant de l’Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et Saint-Martin prorogeant de cinq ans les effets de l’arrêt susmentionné du 1er août 2007 ;

2°) d’annuler les arrêtés contestés ;

3°) de mettre à la charge solidaire de l’Etat et du Conservatoire du littoral une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 modifiée ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu le décret n° 2007-1072 du 6 juillet 2007 relatif au représentant de l’Etat dans la collectivité de Saint-Martin ;

Vu le décret n° 2008-680 du 9 juillet 2008 portant organisation de l’administration centrale du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;

Vu le décret n° 2012-772 du 24 mai 2012 relatif aux attributions du ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie ;

Vu l’arrêté du 9 juillet 2008 portant organisation de l’administration centrale du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 2 juin 2015 :

— le rapport de Mme Molina-Andréo, premier conseiller ;

 – les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public ;

 – et les observations de Me Patet, avocat de la SELARL Christophe Mandon et de Me Cros, avocat du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres ;

1. Considérant que par un arrêté du 1er août 2007, le préfet de la Guadeloupe a déclaré d’utilité publique l’acquisition par le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (Conservatoire du littoral) de parcelles situées dans le périmètre du projet de protection et de sécurisation du site de la Baie de l’embouchure à Saint-Martin et les a déclarées cessibles ; que par un arrêté du 6 juillet 2012, le représentant de l’Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et Saint-Martin a prorogé de cinq ans les effets de l’arrêté du 1er août 2007 ; que la SELARL Christophe Mandon, désignée par le tribunal de commerce de Bordeaux en qualité de liquidateur judiciaire de la société Boramar, propriétaire des parcelles numérotées AW 46 à 49 au cadastre sur le territoire de la commune de Saint-Martin, devenue collectivité d’outre-mer de Saint-Martin, interjette appel du jugement du 21 décembre 2012 en tant que, par son article 2, le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté ses demandes tendant à l’annulation des arrêtés des 1er août 2007 et 6 juillet 2012 ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l’incompétence du signataire de l’arrêté du 1er août 2007 en se fondant notamment sur un arrêté du 13 juillet 2007 du préfet de la Guadeloupe donnant délégation spéciale au secrétaire général de la préfecture de la Guadeloupe, M. Yvon Alain, afin de suppléer, en cas d’absence ou d’empêchement, M. F…, qui était, en application d’un décret du 9 juillet 2007, représentant de l’Etat dans les collectivités de Saint-Barthélémy et Saint-Martin ; que si le tribunal n’a pas communiqué cet arrêté du 13 juillet 2007 à la société Christophe Mandon, cet acte réglementaire a été régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la Guadeloupe du 16 juillet 2007 et étaient librement consultable ; que, dès lors, l’appelante n’est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif de Saint-Martin aurait méconnu le principe du contradictoire ;

3. Considérant qu’il ressort de l’examen du jugement attaqué que le tribunal administratif de Saint-Martin a considéré « qu’il ne ressort (…) d’aucune disposition à caractère législatif ou réglementaire que la déclaration d’utilité publique tenant lieu (…) de déclaration de projet, doive respecter les prescriptions de forme prévues pour cette dernière par l’article L. 126-1 du code de l’environnement » ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d’une omission à statuer au motif qu’il ne répondrait pas au moyen tiré de ce que la déclaration d’utilité publique contestée tenant lieu de déclaration de projet ne contiendrait pas l’exposé des motifs et considérations justifiant le caractère d’intérêt général de l’opération, en méconnaissance de l’article L. 126-1 du code de l’environnement, doit être écarté comme manquant en fait ;

Sur la recevabilité du mémoire en défense présenté par le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie :

4. Considérant que le litige, relatif à une demande d’annulation d’une déclaration d’utilité publique et de la prorogation de cette déclaration, ne relève pas de l’une des matières, limitativement énumérées à l’article R. 811-10-1 du code de justice administrative, dans lesquelles le préfet présente devant la cour administrative d’appel, par dérogation à l’article R. 811-10, les mémoires et observations au nom de l’Etat ; que selon les dispositions de l’article 1er du décret du 24 mai 2012 susvisé, le ministre chargé de l’écologie est responsable des actions concernant la protection du littoral ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la société Christophe Mandon, tirée de l’incompétence du ministre chargé de l’écologie pour représenter l’Etat et conclure en cause d’appel dans un litige concernant une déclaration d’utilité publique prise par une autorité préfectorale doit être écartée ;

5. Considérant qu’en vertu de l’article 2 du décret du 9 juillet 2008 susvisé, la direction des affaires juridiques, d’une part, traite le contentieux de niveau central du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, d’autre part, représente le ministre devant les juridictions compétentes ; que l’objet de la présente contestation figure au nombre des instances pour lesquelles, en vertu de l’article 2-3-2 de l’arrêté du 9 juillet 2008, la sous-direction des affaires juridiques de l’environnement et de l’urbanisme est compétente pour représenter le ministre chargé de l’écologie ; que, par décision du 9 juillet 2012 du directeur des affaires juridiques, régulièrement publié le 11 juillet 2012 au Journal officiel de la République française, M. E… C…, attaché principal d’administration de l’équipement, adjoint à la sous-directrice des affaires juridiques de l’environnement et de l’urbanisme, a reçu délégation pour signer au nom de la ministre de l’égalité, des territoires et du logement et de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, tous actes, arrêtés et décisions, à l’exclusion des décrets, dans la limite des attributions de la sous-direction des affaires juridiques de l’environnement et de l’urbanisme ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la société Christophe Mandon, tirée de l’incompétence du signataire du mémoire en défense, doit être écartée ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

En ce qui concerne l’arrêté du 1er août 2007 :

6. Considérant, en premier lieu, que l’article 1er du décret du 6 juillet 2007 susvisé institue un représentant de l’Etat à Saint-Martin, assisté par un préfet délégué chargé des questions relatives à la collectivité de Saint-Martin ; que par un premier décret du 9 juillet 2007, M. A…, déjà préfet de la région Guadeloupe, a été nommé, en outre, représentant de l’Etat à Saint-Martin ; que par un second décret du même jour, M. F… a été nommé préfet délégué pour les îles de Saint-Barthélemy et Saint-Martin auprès du préfet de la Guadeloupe ; qu’enfin, par arrêté du 13 juillet 2007, régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture de la Guadeloupe du 16 juillet 2007, le préfet a donné délégation spéciale à M. Yvon Alain, secrétaire général de la préfecture de Guadeloupe, pour suppléer M. F… en cas d’absence ou d’empêchement de celui-ci ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet délégué n’aurait pas été absent ou empêché le 1er août 2007 ; que, par suite, le moyen tiré de l’incompétence du signataire de l’arrêté contesté doit être écarté comme manquant en fait ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que le délégué outre-mer du Conservatoire du littoral disposait, en vertu d’une décision du 27 janvier 2006 du directeur de cet établissement, d’un mandat spécial sur le fondement des articles L. 322-1 à L. 322-13 du code de l’environnement pour mettre en oeuvre et suivre la procédure relative à l’expropriation du site de la Baie de l’Embouchure à Saint-Martin ; qu’il ressort des pièces du dossier que, par une lettre datée du 20 décembre 2006, ce délégué a compétemment saisi le préfet de la Guadeloupe d’une demande d’ouverture d’enquête publique conjointe afin que le Conservatoire du littoral soit autorisé à acquérir les parcelles situées dans le périmètre du projet de protection et de sécurisation du site de la Baie de l’Embouchure ; que cette demande est visée dans l’arrêté du 13 mars 2007 du préfet de la Guadeloupe portant ouverture conjointe d’enquête publique ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de l’absence de saisine du préfet par le bénéficiaire de l’expropriation, qui est le conservatoire du littoral, doit être écarté ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article R. 11-4 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, alors en vigueur : " (…) / Un avis au public faisant connaitre l’ouverture de l’enquête est, par les soins du préfet, publié en caractères apparents huit jours au moins avant le début de l’enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans tout le département ou tous les départements intéressés Pour les opérations d’importance nationale, ledit avis est, en outre, publié dans deux journaux à diffusion nationale huit jours avant le début de l’enquête. / Huit jours au moins avant l’ouverture de l’enquête et durant toute la durée de celle-ci, cet avis est publié par voie d’affiches et, éventuellement, par tous autres procédés, dans chacune des communes désignées par le préfet ; cette désignation porte au minimum sur toutes les communes sur le territoire desquelles l’opération doit avoir lieu. L’accomplissement de cette mesure de publicité incombe au maire et est certifié par lui. / (…) » ;

9. Considérant, d’une part, que la société Christophe Mandon reprend en appel le moyen déjà soulevé en première instance et tiré du caractère insuffisant des formalités de publication de l’avis d’enquête publique, réalisées les 23 et 24 mars 2007 dans deux organes de presse, Le Pélican et St Martin’s Week ; qu’elle ne se prévaut d’aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l’argumentation développée devant le tribunal administratif ; qu’il y a lieu d’écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges ;

10. Considérant, d’autre part, que l’article 5 de l’arrêté du 13 mars 2007 du préfet de la Guadeloupe portant ouverture conjointe d’une enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique du projet en cause et d’une enquête parcellaire en vue de l’acquisition par le Conservatoire du littoral des parcelles de terre situées dans le périmètre du projet prévoyait que l’avis au public serait affiché à la mairie de Saint-Martin et dans tous les lieux publics de la commune ; qu’en vertu de cet article, le même affichage devait en outre être assuré par le Conservatoire du littoral sur les lieux et en un lieu situé au voisinage de l’aménagement projeté et visible de la voie publique ; que contrairement à ce que soutient la requérante, il ressort du certificat d’affichage émis par le maire de Saint-Martin le 23 mars 2007 et d’un procès-verbal de constat de gendarmerie daté du 24 mars 2007, que l’avis au public était, à ces dates, affiché tant à la mairie, qu’à la gendarmerie et à quatre points du site en cause ; qu’en se bornant à soutenir que la durée de l’affichage de l’avis d’enquête ne serait pas justifiée, la société Christophe Mandon n’apporte aucun élément de nature à établir que ledit affichage n’aurait pas été réalisé conformément aux dispositions précitées de l’article R. 11-4 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;

11. Considérant, en quatrième lieu, qu’aux termes de l’article R. 11-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique : " L’expropriant adresse au préfet pour être soumis à l’enquête un dossier qui comprend obligatoirement : / I.- Lorsque la déclaration d’utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d’ouvrages : / 1° Une notice explicative ; / 2° Le plan de situation ; / 3° Le plan général des travaux ; / 4° Les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants ; / 5° L’appréciation sommaire des dépenses ; / 6° L’étude d’impact définie à l’article R. 122-3 du code de l’environnement, lorsque les ouvrages ou travaux n’en sont pas dispensés ou, s’il y a lieu, la notice exigée en vertu de l’article R. 122-9 du même code ; / 7° L’évaluation mentionnée à l’article 5 du décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 pris pour l’application de l’article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs, lorsque les travaux constituent un grand projet d’infrastructures tels que défini à l’article 3 du même décret. / II.- Lorsque la déclaration d’utilité publique est demandée en vue de l’acquisition d’immeubles, ou lorsqu’elle est demandée en vue de la réalisation d’une opération d’aménagement ou d’urbanisme importante et qu’il est nécessaire de procéder à l’acquisition des immeubles avant que le projet n’ait pu être établi : / 1° Une notice explicative ; / 2° Le plan de situation ; / 3° Le périmètre délimitant les immeubles à exproprier ; / 4° L’estimation sommaire des acquisitions à réaliser. / (…) » ;

12. Considérant que la déclaration d’utilité publique contestée porte sur l’acquisition par le Conservatoire du littoral de terrains s’étendant entre les salines de l’orient et l’embouchure de l’étang aux poissons, situé à la pointe sud du cordon de sable de la Baie de l’Embouchure à Saint-Martin ; que l’opération en cause est seulement destinée à assurer la protection de cette zone dotée d’un fort intérêt écologique, et jusque-là affectée par des ruines de constructions et l’absence de toute mesure venant limiter les effets de la fréquentation publique sur la végétation et les écosystèmes ; que s’il ressort des mentions portées dans la notice explicative jointe au dossier d’enquête publique que l’acquisition des terrains devrait être accompagnée de divers aménagements dans la perspective d’une éventuelle ouverture du site au public, ces travaux sont distincts de l’opération d’acquisition foncière projetée ; qu’ainsi, la déclaration d’utilité publique en cause doit être regardée comme n’ayant été demandée qu’en vue de l’acquisition d’immeubles ; que, dès lors, le dossier devait être composé des seules pièces prévues au II précité de l’article R. 11-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, et n’avait à comprendre ni un plan général des travaux, ni les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants, ni l’appréciation sommaire des dépenses, qui ne sont exigés que lorsque la déclaration d’utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d’ouvrages ;

13. Considérant, en cinquième lieu, qu’aux termes de l’article L. 126-1 du code de l’environnement : « Lorsqu’un projet public de travaux, d’aménagements ou d’ouvrages a fait l’objet d’une enquête publique en application du chapitre III du présent titre, l’autorité de l’Etat ou l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’établissement public responsable du projet se prononce, par une déclaration de projet, sur l’intérêt général de l’opération projetée. (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 11-1-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique : « Lorsqu’un projet public de travaux, d’aménagements ou d’ouvrages constitue une des opérations mentionnées à l’article L. 123-1 du code de l’environnement et que sa réalisation rend nécessaire l’expropriation d’immeubles ou de droits réels immobiliers, la déclaration de projet prévue à l’article L. 126-1 du code de l’environnement intervient, au vu des résultats de l’enquête prévue à l’article L. 11-1 du présent code, selon les modalités et dans les conditions suivantes : / (…) 2. Si l’expropriation est poursuivie au profit de l’Etat ou de l’un de ses établissements publics, la déclaration d’utilité publique tient lieu de déclaration de projet. / 3. L’acte déclarant l’utilité publique est accompagné d’un document qui expose les motifs et considérations justifiant le caractère d’utilité publique de l’opération. » ;

14. Considérant qu’il résulte de ce qui a été dit au point 12 que l’opération d’acquisition foncière en cause menée par le Conservatoire du littoral, qui est conforme à sa mission, énoncée à l’article L. 322-1 du code de l’environnement, de mener une politique foncière de sauvegarde de l’espace littoral et de respect des sites naturels et de l’équilibre écologique, n’appartient pas à la catégorie des opérations susceptibles d’affectées l’environnement, visées au chapitre mentionné par l’article L. 126-1 précité du code de l’environnement, ainsi qu’à l’article L. 123-1 également précité du même code et dont la liste est fixée en annexe à l’article R. 123-1 ; qu’ainsi, l’opération en cause n’entrant pas dans le champ d’application des dispositions précitées des articles L. 126-1 du code de l’environnement et L. 11-1-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, le moyen tiré de ce que la déclaration d’utilité publique contestée ne contiendrait pas les motifs et considérations justifiant le caractère d’utilité publique de l’opération, en méconnaissance de ces dispositions, est inopérant ;

15. Considérant, en sixième lieu, que si, à la suite de la modification introduite par l’article 1er, point 11, de la directive du 3 mars 1997, le 1 de l’article 9 de la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 dispose : « Lorsqu’une décision d’octroi ou de refus d’autorisation a été prise, la ou les autorités compétentes en informent le public selon les modalités appropriées et mettent à sa disposition les informations suivantes : (…) – les motifs et considérations principaux qui ont fondé la décision », ces dispositions, qui exigent que l’auteur de la décision, une fois cette dernière prise, porte à la connaissance du public une information supplémentaire explicitant les motifs et les considérations qui l’ont fondée, ne sauraient être interprétées comme imposant une motivation en la forme de la décision qui serait une condition de légalité de cette dernière ; que le moyen tiré de ce que, faute d’avoir été modifié dans le délai de transposition de la directive qui expirait le 14 mars 1999, pour prévoir une telle obligation de motivation des actes déclaratifs d’utilité publique entrant dans le champ de cette directive, le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, sur le fondement duquel a été pris l’arrêté attaqué, serait devenu incompatible avec les objectifs de la directive précitée, ne peut, par suite, être accueilli ;

16. Considérant, en septième lieu, qu’aux termes de l’article L. 322-1 du code de l’environnement : « I. – Le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres est un établissement public de l’Etat à caractère administratif qui a pour mission de mener, après avis des conseils municipaux et en partenariat avec les collectivités territoriales intéressés, une politique foncière de sauvegarde de l’espace littoral et de respect des sites naturels et de l’équilibre écologique (…). » ;

17. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que par délibération du 12 juin 2003 le conseil municipal de Saint-Martin s’est prononcé sur le projet d’acquisition de parcelles dans la baie du Galion et de l’embouchure ; que cette délibération constitue l’avis prévue à l’article L. 322-1 du code de l’environnement ; qu’à la suite de cet avis, le Conservatoire du littoral, en tant qu’entité expropriante, a, par la lettre susmentionnée du 20 décembre 2006, saisi le préfet de la Guadeloupe d’une demande d’ouverture d’enquête publique conjointe en vue d’être autorisé à acquérir les parcelles en cause ; qu’à supposer que ladite délibération du 12 juin 2003 ait été adoptée en méconnaissance des règles de convocation et de quorum, une telle circonstance n’a pas été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de l’arrêté pris ni de priver le public intéressé d’une garantie ; que, par suite, le moyen tiré de l’illégalité de la délibération du conseil municipal de Saint-Martin du 12 juin 2003 doit être écarté ;

18. Considérant, en huitième lieu, qu’une opération ne peut être légalement déclarée d’utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d’ordre social ou l’atteinte à d’autres intérêts publics qu’elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’elle présente ;

19. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la notice explicative du dossier d’enquête publique conjointe, que le site de la Baie de l’Embouchure, à Saint-Martin, constitue l’une des dernières fenêtres naturelles ouvertes sur le littoral de l’île, qui a déjà été fortement urbanisé ; que le projet vise à protéger et à mettre en valeur ce site dont les écosystèmes, bien que divers et présentant un fort intérêt écologique, apparaissent comme fragiles et dégradés compte tenu tant de la fréquentation de la zone, notamment de la plage, par la population, que de l’état d’abandon du secteur qui comporte des ruines de propriétés ; que, dans ces conditions, et compte tenu des objectifs assignés au Conservatoire du littoral, l’acquisition des parcelles en cause situées dans le site de la Baie de l’Embouchure et leur gestion par un opérateur unique présente un caractère d’utilité publique ; que l’atteinte à la propriété privée que comporte l’opération pour les propriétaires à exproprier n’est pas, en l’espèce, excessive par rapport à l’utilité publique qu’elle présente ; que la double circonstance que le conseil d’administration du Conservatoire du littoral ait approuvé depuis le 26 avril 1995 l’acquisition de ces parcelles et qu’elles fassent déjà l’objet d’une protection en raison de leur classement par le plan local d’urbanisme en zone naturelle, n’est pas de nature à ôter son caractère d’intérêt général à l’acquisition projetée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le projet comporterait un bilan coûts-avantages négatif doit être écarté ;

20. Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n’est pas établi ;

En ce qui concerne l’arrêté du 6 juillet 2012 :

21. Considérant qu’il résulte de ce qui a été dit aux points 6 à 20, qu’aucun des moyens dirigés contre l’arrêté du 1er août 2007 portant déclaration d’utilité publique n’est fondé ; que, dès lors, la société Christophe Mandon ne peut exciper de l’illégalité de cet arrêté pour contester celui du 6 juillet 2012 prorogeant de cinq ans les effets de la déclaration d’utilité publique susmentionnée ;

22. Considérant que par un arrêté du 28 mars 2012, publié le 24 avril 2012 au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Guadeloupe, le représentant de l’Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et Saint-Martin a accordé à M. G… B…, préfet délégué auprès du représentant de l’Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, délégation générale de signature dans le cadre de l’exercice de ses missions, à l’exception d’un matière qui ne concerne pas les déclarations d’utilité publique ; que par ce même arrêté, il a été donné délégation à M. D…, attaché principal, secrétaire général des services, chargé des questions relatives aux collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, à l’effet de signer, en l’absence de M. B…, tous arrêtés, actes, décisions, circulaires, rapports, correspondances relevant des attributions de l’Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B… n’aurait pas été absent ou empêché à la date de signature de l’arrêté contesté ; que, par suite, le moyen tiré de l’incompétence du signataire de cet arrêté doit être écarté comme manquant en fait ;

23. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la société Christophe Mandon n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par l’article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté ses demandes tendant à l’annulation des arrêtés du 1er août 2007 et 6 juillet 2012 ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat et du Conservatoire du littoral, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que la société Christophe Mandon demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société requérante une somme de 2 500 euros à verser au Conservatoire du littoral sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :


Article 1er : La requête de la société Christophe Mandon est rejetée.

Article 2 : La société Christophe Mandon versera au Conservatoire du littoral la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 13BX00621

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