CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 25 novembre 2021, 19BX02345, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 1re ch., 25 nov. 2021, n° 19BX02345
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 19BX02345
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Toulouse, 4 avril 2019, N° 1704103
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000044387141

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B… A… a demandé au tribunal administratif de Toulouse d’annuler la décision du 1er mars 2017 par laquelle le conseil médical de l’aéronautique civile l’a déclaré apte classe 2 aux fonctions de pilote privé d’avion avec restriction « OSL », en tant que cette décision lui impose la présence obligatoire aux commandes d’un second pilote qualifié, et de le déclarer apte à la pratique des vols de tourisme à titre privé sans restriction.

Par un jugement n° 1704103 du 5 avril 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2019, M. A…, représenté par Me Burg, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement ;

2°) d’annuler la décision du conseil médical de l’aéronautique civile ;

3°) de le déclarer apte à la pratique des vols de tourisme sans restriction « OSL » ;

4°) de mettre à la charge de la direction générale de l’aviation civile une somme de 4 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

 – cette décision est insuffisamment motivée ;

 – elle a été prise en méconnaissance du principe du contradictoire et est entachée d’un défaut d’examen, sur la base d’un dossier incomplet ;

 – elle est entachée d’erreur manifeste d’appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 mars 2020, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – l’annexe IV du règlement (UE) n° 1178/2011 de la Commission du 3 novembre 2011 ;

 – le code de l’aviation civile ;

 – le code des relations entre le public et l’administration ;

 – le code de la santé publique ;

 – le code des transports ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Christelle Brouard-Lucas,

 – et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A…, né en 1940, est titulaire d’une licence de pilote privé et d’aéronef léger. Par une décision du 20 octobre 2016, un évaluateur médical du pôle médical de la direction générale de l’aviation civile l’a déclaré apte avec restrictions, notamment la restriction « OSL » qui impose la présence obligatoire aux commandes d’un second pilote qualifié. M. A… a contesté cette décision auprès du conseil médical de l’aéronautique civile par un recours du 14 décembre 2016, qui a été examiné lors de la séance du 1er mars 2017, à l’issue de laquelle ce conseil a, par une décision du même jour, maintenu la restriction « OSL ». Par une lettre du 28 mars 2017, M. A… a communiqué de nouvelles pièces médicales et a sollicité la levée de cette restriction. Le 4 mai suivant, il a déposé un recours gracieux par le biais de son conseil. Ces demandes ont fait l’objet d’un rejet implicite. A l’issue d’un nouvel examen du 14 juin 2018, une décision d’aptitude avec restrictions, dont la restriction « OSL », a été prise le 12 juillet 2018 par un évaluateur médical. M. A… avait entre-temps demandé, le 3 septembre 2017, au tribunal administratif de Toulouse d’annuler la décision du 1er mars 2017 du conseil médical de l’aéronautique civile en tant qu’elle lui imposait une restriction « OSL ». Il relève appel du jugement du 5 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, la décision attaquée a été prise dans le cadre d’attributions imposant au conseil médical de l’aéronautique civile, en vertu des articles L. 1110-4, R. 4127-4 et R. 4127-104 du code de la santé publique, de ne fournir à l’administration ou à l’employeur, pour tenir compte du secret médical institué par la loi, que ses conclusions sur le plan administratif, sans indiquer les raisons médicales qui les motivent. Ainsi, et conformément au deuxième alinéa de l’article L. 211-6 du code des relations entre le public et l’administration aux termes duquel « Les dispositions du présent chapitre ne dérogent pas aux textes législatifs interdisant la divulgation ou la publication de faits couverts par le secret », cette décision ne pouvait comporter de motifs relatifs à des éléments couverts par le secret médical. Par suite, la décision attaquée, qui est exclusivement fondée sur des motifs d’ordre médical et qui est destinée à l’administration, n’avait pas à être motivée alors même qu’il s’agit de l’une des décisions administratives individuelles visées à l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration et que le secret médical n’est pas opposable à M. A… pour les informations le concernant en vertu des dispositions de l’article L. 1111-7 du code de la santé publique.

3. En deuxième lieu, la décision attaquée, qui est intervenue sur demande de M. A… dans le cadre de la validation de sa licence de pilote, a été prise au vu des pièces médicales qu’il a produites et après qu’il ait été convoqué et entendu lors de la séance du conseil médical de l’aéronautique du 1er mars 2017. Ainsi, il n’est pas fondé à soutenir que cette décision serait intervenue en méconnaissance du principe du contradictoire. En outre, la circonstance que le conseil ait pris sa décision le jour même de son audition, sans attendre les résultats des examens de contrôles programmés durant le mois de mars 2017, n’est pas de nature à faire regarder cette décision comme entachée d’un défaut d’examen dès lors qu’elle a été prise au vu de son entier dossier à cette date et qu’il était toujours loisible à l’intéressé de déposer ultérieurement une demande de réexamen s’il estimait que son état de santé avait évolué favorablement.

4. En troisième lieu, aux termes de l’article L. 6511-11 du code des transports : « Le personnel navigant est soumis au présent titre et aux dispositions du règlement (CE) n° 216/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 20 février 2008, concernant des règles communes dans le domaine de l’aviation civile et instituant une Agence européenne de la sécurité aérienne, et abrogeant la directive 91/670/CEE du Conseil, le règlement (CE) n° 1592/2002 et la directive 2004/36/CE, ainsi qu’aux dispositions des règlements pris pour son application par la Commission européenne ». Aux termes de l’article L. 6511-2 de ce code : « Les titres aéronautiques désignés sous l’appellation de brevets, licences ou certificats attestent l’acquisition de connaissances générales théoriques et pratiques et ouvrent à leurs titulaires le droit de remplir les fonctions correspondantes, sous réserve, le cas échéant : (…) 2° De l’aptitude médicale requise correspondante ». Les exigences médicales requises pour la délivrance du certificat médical nécessaire à l’exercice des privilèges d’une licence de pilote ou d’élève-pilote sont fixées par l’annexe IV du règlement (UE) n° 1178/2011 de la Commission du 3 novembre 2011 déterminant les exigences techniques et les procédures administratives applicables au personnel navigant de l’aviation civile conformément au règlement (CE) n° 216/2008 du Parlement européen et du Conseil.

5. En vertu du point MED.B.001 de l’annexe IV du règlement UE n° 1178/2011 du 3 novembre 2011 : " a) Limitations des certificats médicaux de classes 1 et 2 / 1) Si le demandeur ne satisfait pas entièrement aux exigences applicables à la classe de certificat médical en question mais qu’il n’est pas considéré comme susceptible de mettre en danger la sécurité des vols, le AeMC ou l’AME procède comme suit : (…) / iii) dans le cas d’un demandeur de certificat médical de classe 2, il détermine si le demandeur est capable d’exécuter ses tâches en tout sécurité en observant une ou plusieurs limitations portées sur le certificat médical, et délivre le certificat médical, si nécessaire assorti de la ou les limitations, en concertation avec l’autorité de délivrance des licences ; (…) c) En évaluant si une limitation est nécessaire, il faut en particulier tenir compte de ceci : 1) le cas où une conclusion médicale accréditée indique que, dans des circonstances spéciales, le fait qu’un demandeur ne satisfasse pas à l’une ou l’autre exigence, d’un point de vue quantitatif ou autre, est tel que l’exercice des privilèges de la licence demandée n’est pas susceptible de menacer la sécurité des vols 2) le fait que le demandeur ait la capacité, la compétence et l’expérience adéquates pour l’activité à accomplir. / d) codes des limitations opérationnelles (…) / 2) Le titulaire d’un certificat médical assorti d’une limitation « OSL » « ne peut piloter un aéronef que si un autre pilote entièrement qualifié pour agir en tant que commandant de bord sur la classe ou le type d’aéronef utilisé se trouve à bord, si l’aéronef est équipé de doubles commandes et si cet autre pilote occupe un siège aux commandes ». Aux termes du point MED.B.005 de la section 2 relative aux exigences médicales afférentes aux certificats médicaux de classes 1 et 2 : " a) Le demandeur de certificat médical doit être exempt : (…) 2) de toute affection ou invalidité à caractère actif, latent, aigu ou chronique ; 3) de toute blessure, lésion ou séquelle d’opération ; (…) susceptibles d’entraîner un degré d’incapacité fonctionnelle de nature à influer sur la sécurité de l’exercice des privilèges de la licence en question ou à rendre le demandeur brusquement incapable d’exercer en toute sécurité les privilèges de ladite licence. « . Le point MED.B.010 de cette même section relatif à l’appareil cardiovasculaire prévoit dans le point a) relatif aux généralités que : » 1) Le demandeur ne doit souffrir d’aucun trouble cardiovasculaire susceptible d’influer sur l’exercice en toute sécurité des privilèges de la ou des licences en question « et dans le point d) relatif aux coronaropathies que : » (…) 5) Le demandeur d’un certificat de classe 2 qui est asymptomatique à la suite d’un infarctus du myocarde ou d’une intervention chirurgicale pour coronaropathie doit subir un examen cardiologique dont le résultat est satisfaisant avant qu’une évaluation de l’aptitude puisse être envisagée en concertation avec l’autorité de délivrance des certificats. ".

6. Pour contester la décision du conseil médical de l’aéronautique civile du 1er mars 2017 confirmant la restriction « OSL » émise par l’examinateur aéromédical au vu d’un examen médical et de son dossier médical, M. A… se prévaut du certificat médical établi le 14 juin 2016 par le chef du service de cardiologie du centre hospitalier universitaire de Toulouse qui conclut que son état de santé n’implique « aucune contre-indication à ce qu’il pratique les activités physiques et sportives de son choix et notamment la pratique des vols de tourisme à titre privé ». Toutefois, ce praticien n’est pas habilité à évaluer l’aptitude médicale à piloter un avion dans le cadre d’un certificat médical de classe 2 qui relève, en application du point MED.A.040 de l’annexe IV au règlement n° 1178/2011, de la seule compétence d’un centre aéromédical (AeMC) ou d’un examinateur aéromédical (AME). Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que si l’état de santé de M. A… est stabilisé et qu’il n’a pas de manifestation clinique ni de plainte fonctionnelle, il souffre toutefois d’une cardiopathie ischémique qui se caractérise par des lésions tritronculaires, qu’il est toujours sous traitement et porteur de facteurs de risques cardio-vasculaires, et que son appareil cardio-vasculaire est fragilisé par les cinq revascularisations qu’il a dû subir. Ainsi, au regard des exigences règlementaires de sécurité rappelées au points 4 et 5 et alors que l’activité aéronautique comporte des contraintes fortes pour le système cardio-vasculaire, le conseil médical de l’aéronautique n’a pas commis d’erreur d’appréciation en limitant l’aptitude de M. A… par une restriction « OSL » lui imposant la présence d’un second pilote qualifié. Si M. A… se prévaut des résultats médicaux obtenus à l’issue d’examens complémentaires menés les 14, 20 et 27 mars 2017, ces documents, au demeurant postérieurs à la décision attaquée, ne sont pas de nature à remettre en cause les constats qui ont justifié cette décision.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions à fin d’annulation.

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A… demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B… A… et à la ministre de la transition écologique.

Délibéré après l’audience du 28 octobre 2021, à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,
Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 novembre 2021.


La rapporteure,

Christelle Brouard-LucasLa présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

N° 19BX02345 2

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