Cour administrative d'appel de Marseille, 2e chambre, 1er juillet 2021, n° 19MA04546

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 2e ch., 1er juill. 2021, n° 19MA04546
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 19MA04546
Sur renvoi de : Conseil d'État, 13 octobre 2019, N° 417886
Dispositif : Rejet

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A B a demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler la décision du préfet des Hautes-Alpes du 17 mai 2013 portant réduction du montant de l’aide que lui ont accordé l’Etat et le Fonds européen agricole pour le développement rural au titre du plan de modernisation des bâtiments d’élevage (FEADER-PMBE).

Par un jugement n° 1306598 du 3 décembre 2015, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision préfectorale du 17 mai 2013.

Par un arrêt n° 16MA00695 du 4 décembre 2017, la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté l’appel formé par le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt contre ce jugement.

Par une décision n° 417886 du 14 octobre 2019, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux a, saisi d’un pourvoi du ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, annulé l’arrêt de la cour en tant qu’il annule la décision du 17 mai 2013 du préfet des Hautes-Alpes à hauteur de la fraction de restitution correspondant à la reprise de la presse agricole et, dans la mesure de la cassation prononcée, renvoyé l’affaire, devant la même cour, où elle a été de nouveau enregistrée le 15 octobre 2019 sous le n° 19MA04546.

Procédure devant la Cour :

Par un mémoire, enregistré le 24 janvier 2020, M. B, représenté par la SELARL Rouanet, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l’Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— l’arrêté est insuffisamment motivé en droit ;

— la subvention a été exactement calculée dès lors que le tracteur a été acquis pour la somme de 50 952 euros ;

— la reprise de la presse agricole constitue un paiement en nature.

Par un mémoire, enregistré le 4 mars 2020, le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 3 décembre 2015 en tant qu’il a annulé la décision du 17 mai 2013 du préfet des Hautes-Alpes à hauteur de la fraction de restitution correspondant à la reprise de la presse agricole ;

2°) de rejeter la demande d’annulation présentée par M. B en première instance.

Il soutient que :

— la reprise d’une pièce de l’engin agricole ne peut pas être prise en compte pour le calcul de l’aide ;

— M. B ne conteste pas ce motif de la décision.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le règlement (CE) n° 1290/2005 du Conseil du 21 juin 2005 ;

— le règlement (CE) n° 1698/2005 du Conseil du 20 septembre 2005 ;

— le règlement (CE) n° 65/2011 de la Commission du 27 janvier 2011 ;

— la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

— le décret n° 99-1060 du 16 décembre 1999 ;

— le décret n° 2009-1452 du 24 novembre 2009 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme C,

— et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté préfectoral du 19 octobre 2011, M. B a bénéficié d’une subvention de 15 285,60 euros pour l’achat d’un tracteur d’un prix hors taxes de 50 952 euros, au titre de l’aide à la modernisation-mécanisation en zone de montagne prévue par le Programme de développement rural 2007-2013. A la suite d’un contrôle sur place réalisé le 28 mars 2013, le préfet des Hautes Alpes a, par lettre du 17 mai 2013, prononcé la déchéance partielle de cette aide et exigé la restitution de 9 097,38 euros, au motif, d’une part, que M. B ne s’était pas personnellement acquitté d’une partie du prix du tracteur, à hauteur de 25 000 euros, réglée directement au fournisseur par ses oncles et, d’autre part, que le fournisseur avait réduit les versements demandés du montant de la reprise d’une presse agricole, soit 5 325 euros. A la suite du rejet implicite de son recours hiérarchique, M. B a saisi le tribunal administratif de Marseille qui, par un jugement du 3 décembre 2015, a annulé la décision du préfet. Par un arrêt du 4 décembre 2017, la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté l’appel formé par le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt contre ce jugement. Par une décision du 14 octobre 2019, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux a, saisi d’un pourvoi de ce ministre, annulé l’arrêt de la cour en tant qu’il annule la décision du 17 mai 2013 du préfet des Hautes-Alpes à hauteur de la fraction de restitution correspondant à la reprise de la presse agricole. Par la même décision, le Conseil d’Etat a, dans cette mesure, renvoyé l’affaire devant la cour administrative de Marseille.

2. Aux termes de l’article 26 du règlement (CE) n°1698/2005 du Conseil du 20 septembre 2005 concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), alors en vigueur : « 1. L’aide prévue à l’article 20, point b) i), est accordée pour les investissements matériels et/ou immatériels qui : / a) améliorent le niveau global des résultats de l’exploitation, et / b) respectent les normes communautaires applicables à l’investissement concerné. () / 2. L’aide est limitée au taux maximal fixé en annexe ». Aux termes de l’article 71 du même règlement " () 3. Les règles d’éligibilité des dépenses sont fixées au niveau national, sous réserve des conditions particulières établies au titre du présent règlement pour certaines mesures de développement rural. []. « . Aux termes de l’article 72 de ce règlement : » 1. Sans préjudice des règles relatives à la liberté d’établissement et à la libre prestation de services au sens des articles 43 à 49 du traité, l’État membre veille à ce que la participation du Feader ne reste acquise à une opération d’investissement cofinancée que si cette opération ne connaît pas, dans un délai de cinq ans à compter de la décision de financement par l’autorité de gestion, de modification importante: / a) affectant sa nature ou ses conditions de mise en oeuvre ou procurant un avantage indu à une entreprise ou à une collectivité publique; / b) résultant soit d’un changement dans la nature de la propriété d’une infrastructure, soit de l’arrêt ou d’une délocalisation d’une activité productive. « / 2. Les sommes indûment versées sont recouvrées conformément à l’article 33 du règlement (CE) n° 1290/2005 ».

3. Aux termes de l’article 5 du règlement (UE) n° 65/2011 de la Commission du 27 juillet 2011 portant modalités d’application du règlement (CE) n° 1698/2005 du Conseil, alors en vigueur : « 1. En cas de paiement indu, le bénéficiaire concerné a l’obligation de rembourser les montants en cause majorés d’intérêts calculés conformément au paragraphe 2. () ». Aux termes de l’article 18 du même règlement : « L’État membre recouvre le montant de l’aide et/ou refuse cette dernière ou détermine le montant de la réduction de l’aide, en particulier en fonction de la gravité, de l’étendue et du caractère persistant du manquement constaté ». Aux termes de l’article 24 de ce règlement : « Les paiements effectués par les bénéficiaires sont attestés par des factures et des preuves de paiement. Lorsque cela n’est pas possible, les paiements sont accompagnés de pièces de valeur probante équivalente ». Aux termes du 1° de l’article 26 de ce règlement : " En effectuant les contrôles sur place, les États membres s’attachent à vérifier : a) que les demandes de paiement introduites par le bénéficiaire sont justifiées par des pièces comptables ou d’autres documents, y compris, le cas échéant, une vérification de l’exactitude des données de la demande de paiement sur la base de données ou de documents commerciaux détenus par des tiers ; [] c) que la destination effective ou prévue de l’opération correspond aux objectifs décrits dans la demande d’aide ".

4. Enfin, aux termes de l’article 5 du décret du 24 novembre 2009 fixant les règles d’éligibilité des dépenses des programmes de développement rural : « I. – Sont regardées comme des dépenses réelles justifiées par les bénéficiaires les paiements justifiés soit par des factures acquittées, soit par des factures auxquelles sont jointes des pièces permettant de vérifier le paiement effectif aux créanciers, soit par des pièces comptables de valeur probante équivalente () ». Aux termes de l’article 7 du même décret : « Les recettes réalisées avant la date d’achèvement d’une opération () résultant directement de ventes, de locations, de services, de droits d’inscription ou d’autres ressources équivalentes figurent dans le plan de financement de l’acte attributif de l’aide comme ressources rattachables, dans leur intégralité ou au prorata, selon qu’elles sont générées entièrement ou partiellement par l’opération./ Lorsque le maître d’ouvrage exerce une activité économique, les recettes générées par l’opération et directement liées à cette activité économique ne sont pas prises en compte pour l’application du présent article. / Les dépenses éligibles ne dépassent pas la valeur de l’investissement ou du projet, déduction faite des recettes. / En début d’opération, une estimation des recettes susceptibles d’être générées est réalisée par l’autorité de gestion. En cas de modification des recettes attendues ou perçues au cours de la réalisation du projet, l’autorité de gestion modifie en conséquence le montant des dépenses éligibles ».

5. Il résulte de ces dispositions que l’octroi d’une aide au titre des programmes de développement rural, et notamment de l’aide à la modernisation-mécanisation en zone de montagne, est subordonné à l’existence d’une dépense éligible et que le montant de l’aide est calculé en déduisant de la dépense les recettes provenant notamment de la cession de biens réalisée avant la date d’achèvement de l’opération.

6. Ainsi qu’indiqué précédemment, l’achat du tracteur pour lequel la subvention a été sollicitée a été pour partie financé par la reprise par le fournisseur, pour un montant de 5 325 euros, d’une ancienne presse agricole. Il ressort des pièces du dossier que cette recette procurée par la reprise de la presse ne figurait pas dans le plan de financement de l’acte attributif de l’aide comme ressources rattachables. Il suit de là qu’en considérant dans la décision en litige de déchéance partielle de la subvention octroyée à M. B que la dépense réelle de celui-ci était inférieure à la dépense initialement présentée à raison de la reprise, par le fournisseur, d’une presse agricole, le préfet des Hautes-Alpes n’a pas commis d’erreur de droit. Le ministre de l’agriculture et de l’alimentation est ainsi fondé à soutenir que c’est à tort que les premiers juges ont annulé la décision contestée en tant que par celle-ci le préfet des Hautes-Alpes a fixé le montant de la déchéance partielle du droit à l’aide à la modernisation-mécanisation en zone de montagne à hauteur de la fraction de restitution correspondant à la reprise de la presse agricole.

7. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner l’autre moyen invoqué par M. B devant le tribunal administratif de Marseille à l’encontre de la décision du 17 mai 2013.

8. La décision contestée comporte l’énoncé des considérations de droit qui la fondent. Elle est, dès lors, suffisamment motivée.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l’agriculture et de l’alimentation est fondé à demander l’annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 17 mai 2013 du préfet des Hautes-Alpes à hauteur de la fraction de restitution correspondant à la reprise de la presse agricole et le rejet des conclusions à fin d’annulation présentées par M. B devant ce tribunal. Par ailleurs, les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B demande au titre des frais non compris dans les dépens qu’il a exposés.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 3 décembre 2015 du tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu’il a annulé la décision du 17 mai 2013 du préfet des Hautes-Alpes à hauteur de la fraction de restitution correspondant à la reprise de la presse agricole.

Article 2 : Les conclusions à fin d’annulation de la décision du préfet des Hautes-Alpes à hauteur de la fraction de restitution correspondant à la reprise de la presse agricole du 17 mai 2013 présentées par M. B devant le tribunal administratif de Marseille et les conclusions qu’il a présentées devant la cour sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’agriculture et de l’alimentation et à M. A B.

Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Alpes.

Délibéré après l’audience du 17 juin 2021 où siégeaient :

— M. Alfonsi, président de chambre,

— Mme C, première conseillère,

— M. Sanson, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er juillet 2021.

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