Cour Administrative d'Appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 17 janvier 2011, 09NC01483, Inédit au recueil Lebon

  • Environnement·
  • Recherche agronomique·
  • Agriculture·
  • Organisme génétiquement modifié·
  • Associations·
  • Justice administrative·
  • Autorisation·
  • Principe de précaution·
  • Expérimentation·
  • Tribunaux administratifs

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 4e ch. - formation à 3, 17 janv. 2011, n° 09NC01483
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 09NC01483
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Strasbourg, 29 septembre 2009, N° 0503678
Identifiant Légifrance : CETATEXT000023603979

Sur les parties

Texte intégral

Vu I° sous le n° 09NC01483, la requête, enregistrée le 7 octobre 2009, complétée par des mémoires enregistrés les 25 mars 2010 et 26 mai 2010, présentée pour l’INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE, dont le siège est 147 rue de l’Université à Paris Cedex 07 (75338), par la SCP Alain Monod-Bertrand Colin, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ; l’INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n°0503678 du 30 septembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du ministre de l’agriculture et de la pêche en date du 28 juin 2005 autorisant la dissémination volontaire dans l’environnement de porte-greffes de vigne génétiquement modifiés dans le cadre d’un programme expérimental jusqu’à la fin de l’année 2009 ;

2°) de rejeter la demande présentée par l’association France Nature Environnement devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de mettre à la charge de l’association France Nature Environnement la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

L’INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE soutient que :

— le moyen retenu par le jugement pour annuler la décision attaquée a été relevé d’office alors qu’il n’était pas d’ordre public ;

— le jugement a méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure devant le tribunal administratif ;

— le moyen tiré de la méconnaissance de la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement n’est pas fondé, dès lors que les obligations relatives aux modalités de communication des résultats du suivi de la dissémination figurant dans le guide de la procédure d’autorisation d’expérimentation de plantes supérieures génétiquement modifiées, il n’était pas nécessaire que la décision d’autorisation les reprenne ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 7 avril 2010, complété par un mémoire enregistré le 28 mai 2010, présenté pour l’association France Nature Environnement par Me Le Briero, avocat, qui conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge respectivement de l’INRA et de l’Etat au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

L’association soutient que :

— les moyens invoqués en appel ne sont pas fondés ;

— le ministre de l’agriculture n’était pas compétent pour délivrer l’autorisation litigieuse ;

— la procédure d’autorisation n’a pas été respectée ;

— le dossier de demande d’autorisation n’était pas complet ;

— l’article 6-5 de la convention d’Aarhus relatif à l’information du public n’a pas été respecté ;

— le comité de biovigilance n’a pas été consulté ;

— l’avis de la commission du génie biomoléculaire est irrégulier ;

— il n’a été procédé à aucune évaluation environnementale préalable ;

— le principe de précaution a été méconnu ;

— le ministre de l’agriculture qui n’a pas pris en compte la protection de l’environnement a commis une erreur manifeste d’appréciation ;

— l’autorisation méconnait les articles 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire en intervention, enregistré le 7 mai 2010 présenté pour l’association Alsace Nature par Me Galland, avocat qui conclut au rejet de la requête au motif que les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

Vu les ordonnances du président de la 4e chambre de la cour fixant au 31 mars 2010 la clôture de l’instruction et reportant la date de clôture au 28 mai 2010 ;

Vu le mémoire enregistré le 1er décembre 2010, présenté pour L’INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE ;

Vu II° sous le n° 09NC01771, le recours, enregistré le 2 décembre 2009, présenté pour le MINISTRE DE L’ALIMENTATION, DE L’AGRICULTURE ET DE LA PÊCHE ; Le ministre demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0503678 du 30 septembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du ministre de l’agriculture et de la pêche en date du 28 juin 2005 autorisant la dissémination volontaire dans l’environnement de porte-greffes de vigne génétiquement modifiés dans le cadre d’un programme expérimental jusqu’à la fin de l’année 1989 ;

2°) de rejeter la demande présentée par l’association France Nature Environnement devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Le ministre soutient que :

— le moyen retenu par le jugement pour annuler la décision attaquée a été relevé d’office alors qu’il n’était pas d’ordre public ;

— le jugement est insuffisamment motivé ;

— l’article 10 de la directive 2001/18/CE n’a pas été méconnu ;

Vu le mémoire en intervention enregistré le 25 mars 2010, présenté pour l’Institut national de la recherche agronomique par la SCP Alain Monod-Bertrand Colin, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ; l’I.N.R.A. conclut à l’annulation du jugement attaqué et au rejet de la demande présentée par l’association France Nature Environnement ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 7 avril 2010, complété par un mémoire enregistré le 28 mai 2010, présenté pour l’association France Nature Environnement par Me Le Briero, avocat qui conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge respectivement de l’INRA et de l’Etat au titre de l’article L. v761-1 du code de justice administrative ;

L’association soutient que :

— les moyens invoqués en appel ne sont pas fondés ;

— le ministre de l’agriculture n’était pas compétent pour délivrer l’autorisation litigieuse ;

— la procédure d’autorisation n’a pas été respectée ;

— le dossier de demande d’autorisation n’était pas complet ;

— l’article 6-5 de la convention d’Aarhus relatif à l’information du public n’a pas été respecté ;

— le comité de biovigilance n’a pas été consulté ;

— l’avis de la commission du génie biomoléculaire est irrégulier ;

— il n’a été procédé à aucune évaluation environnementale préalable ;

— le ministre de l’agriculture n’a pas pris en compte la protection de l’environnement ;

— l’autorisation méconnait les articles 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le principe de précaution a été méconnu ;

— la décision est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation ;

Vu le mémoire en intervention, enregistré le 7 mai 2010 présenté pour l’association Alsace Nature par Me Galland, avocat, qui conclut au rejet de la requête au motif que les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

Vu les ordonnances du président de la 4e chambre de la cour fixant au 31 mars 2010 la clôture de l’instruction et reportant la date de clôture au 28 mai 2010 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, faite à Aarhus le 2 juin 1998 ;

Vu la directive 90/220/CEE du Conseil du 23 avril 1990 relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement ;

Vu la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil ;

Vu le décret n° 93-1177 du 18 octobre 1993 pris pour l’application, s’agissant de plantes, semences et plants, du titre III de la loi n° 92-654 du 13 juillet 1992 relative au contrôle de l’utilisation et de la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés et modifiant la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l’environnement ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 6 décembre 2010 :

— le rapport de Mme Richer, président,

— les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,

— et les observations de Me Monot, avocat de L’INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE et de Mme Fauvelet représentant le MINISTRE DE L’AGRICULTURE, DE L’ALIMENTATION, DE LA PÊCHE, DE LA RURALITE ET DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 décembre 2010, présentée par le MINISTRE DE L’AGRICULTURE, DE L’ALIMENTATION, DE LA PÊCHE, DE LA RURALITE ET DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 décembre 2010, présentée pour L’INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE ;

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même jugement ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur l’intervention de l’association Alsace Nature :

Considérant que l’association Alsace Nature a intérêt au maintien du jugement attaqué ; que, par suite, son intervention est recevable ;

Sur le bien-fondé du jugement attaque :

Sans qu’il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu’aux termes de l’article 8 de la directive 90/220/CEE du Conseil en date du 23 avril 1990 : Lorsque la dissémination est terminée, le notifiant envoie à l’autorité compétente les résultats de cette dissémination en ce qui concerne les risques éventuels pour la santé humaine ou l’environnement, en indiquant en particulier les types de produits qu’il a l’intention de notifier par la suite  ; que la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil en date du 12 mars 2001 abrogeant à compter du 17 octobre 2002 la directive 90/220/CEE précitée dispose en son article 10 : lorsque la dissémination est terminée et, ensuite, en respectant les intervalles de temps indiqués dans l’autorisation sur la base de l’évaluation des risques pour l’environnement, le notifiant envoie à l’autorité compétente les résultats de cette dissémination en ce qui concerne les risques éventuels pour la santé humaine ou l’environnement, en indiquant, en particulier, s’il y a lieu, les types de produits qu’il a l’intention de notifier par la suite. La structure de présentation de ces résultats est fixée selon la procédure prévue à l’article 30, paragraphe 2  ; qu’aux termes de l’article 10 du décret n° 93-1177 du 18 octobre 1993 susvisé : Au terme de la dissémination autorisée, le responsable de celle-ci communique au ministre chargé de l’agriculture les résultats de cette dissémination en ce qui concerne les risques éventuels pour la santé publique et l’environnement. Il informe celui-ci des suites qu’il compte donner à ses recherches  ;

Considérant que l’autorisation de dissémination volontaire dans l’environnement de porte-greffes génétiquement modifiés pour induire une résistance au grapevine fanleaf virus, agent principal de la maladie du court-noué a été accordée à titre expérimental à l’Institut national de la recherche agronomique (I.N.R.A.) jusqu’à la fin de l’année 2009 ; que les conditions de suivi des essais ont été précisées ; qu’il est notamment prescrit de détruire sans délai par incinération ou stérilisation les rejets éventuels ; qu’à l’issue de l’expérimentation, l’ensemble du matériel végétal génétiquement modifié doit être détruit par dévitalisation, arrachage et incinération ; que le sol de la parcelle doit être désinfecté afin de détruire les nématodes ; qu’enfin, l’essai doit faire l’objet d’un suivi régulier en vue d’identifier de façon précoce tout événement ou développement non souhaitable ; que, dans ces conditions, c’est à tort que le Tribunal administratif s’est fondé sur l’incompatibilité de la décision litigieuse avec les objectifs énoncés à l’article 10 de la directive 2001/18/CE faute de prescription relative à la transmission périodique à l’autorité compétente d’un rapport sur les résultats de la dissémination après l’achèvement de celle-ci ;

Considérant, toutefois, qu’il appartient à la cour administrative d’appel, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par l’association France Nature Environnement tant devant le tribunal administratif que devant la Cour ;

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

En ce qui concerne la compétence de l’auteur de la décision litigieuse :

Considérant qu’aux termes de l’article 1er du décret du 18 octobre 1993 pris pour l’application, s’agissant de plantes, semences et plants, du titre III de la loi n° 92-654 du 13 juillet 1992 relative au contrôle de l’utilisation et de la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés alors applicable : L’autorisation prévue par l’article 11 de la loi du 13 juillet 1992 susvisée est, s’agissant des plantes, semences ou plants génétiquement modifiés, délivrée par le ministre chargé de l’agriculture après accord du ministre chargé de l’environnement  ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que l’autorisation de dissémination volontaire dans l’environnement de porte-greffes génétiquement modifiés a été accordée par le ministre chargé de l’agriculture après un accord en date du 28 mai 2004 du ministre chargé de l’environnement ; que si l’association France Nature Environnement soutient que l’I.N.R.A., bénéficiaire de l’autorisation, étant un établissement de recherche, l’accord du ministre chargé de la recherche était nécessaire en application de l’article 2 du décret du 20 septembre 1996 alors applicable, il résulte des dispositions de l’article 1er du même décret et de son annexe que l’autorisation de dissémination volontaire dans l’environnement des plantes, semences et plants génétiquement modifiés n’est pas soumise à cet accord ; que le moyen tiré de l’incompétence du signataire de la décision attaquée manque en fait ;

En ce qui concerne la consultation du comité de biovigilance :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 251-1 du code rural : I. – Les végétaux, y compris les semences, les produits antiparasitaires à usage agricole et les produits assimilés, les matières fertilisantes et les supports de cultures composés en tout ou partie d’organismes génétiquement modifiés disséminés dans l’environnement ou mis sur le marché, font l’objet d’une surveillance renforcée effectuée par les agents chargés de la protection des végétaux habilités en vertu des lois et règlements applicables à ces produits (…) II. – Un comité de biovigilance est chargé de donner un avis sur les protocoles de suivi de l’apparition éventuelle d’événements indésirables et d’alerter le ministre chargé de l’agriculture et le ministre chargé de l’environnement lorsque de tels événements sont mis en évidence. Ce comité est placé sous la présidence conjointe du ministre chargé de l’agriculture et du ministre chargé de l’environnement. Il est composé de personnalités compétentes en matière scientifique, d’un député et d’un sénateur membres de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, et de représentants des associations de protection de l’environnement agréées au titre de l’article L. 141-1 du code de l’environnement, des associations de consommateurs et des groupements professionnels concernés. Ces représentants forment au moins la moitié des membres du comité. Un décret en Conseil d’Etat détermine les conditions d’organisation et de fonctionnement du comité de biovigilance (…)  ; qu’il est constant que le décret d’application prévu par le législateur n’était pas publié à la date de la décision attaquée ; que par suite, le moyen tiré de l’absence de consultation du comité de biovigilance est inopérant ;

En ce qui concerne l’avis rendu par la commission du génie biomoléculaire :

Considérant, d’une part, que l’article 3 du décret n° 93-235 du 23 février 1993 portant création de la commission d’étude de la dissémination des produits issus du génie biomoléculaire dispose que cette dernière est composée de dix-huit membres ; que l’article 5 du même décret précise que le président de cette commission est nommé par arrêté conjoint des ministres chargés de l’agriculture et de l’environnement ; que, par suite, l’association intimée n’est pas fondée à soutenir que la commission du génie biomoléculaire serait irrégulièrement composée de dix-neuf membres ;

Considérant, d’autre part, qu’il ressort des pièces du dossier que les risques présentés par l’expérimentation projetée ont fait l’objet d’une évaluation ; qu’ainsi, le moyen tiré de l’irrégularité de l’avis rendu par la commission du génie biomoléculaire doit être écarté ;

En ce qui concerne l’étude d’impact :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 122-1 du code de l’environnement dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : Les travaux et projets d’aménagement qui sont entrepris par une collectivité publique ou qui nécessitent une autorisation ou une décision d’approbation, ainsi que les documents d’urbanisme, doivent respecter les préoccupations d’environnement. Les études préalables à la réalisation d’aménagements ou d’ouvrages qui, par l’importance de leurs dimensions ou leurs incidences sur le milieu naturel, peuvent porter atteinte à ce dernier, doivent comporter une étude d’impact permettant d’en apprécier les conséquences (…)  ; que les opérations de dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés, par nature soumises à un régime de police administrative spéciale défini aux articles L. 531-1 et suivants du code de l’environnement, ne constituent pas des travaux ou projets d’aménagement au sens de l’article L. 122-1 du code précité, appelant la réalisation d’une étude d’impact dans le cadre du décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 modifié pris pour l’application de l’article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d’étude d’impact est inopérant ;

En ce qui concerne la consultation préalable de la population concernée :

Au regard des normes de droit international et de droit communautaire :

Considérant, d’une part, que le paragraphe 11 de l’article 6 de la convention d’Aarhus du 25 juin 1998 stipule que chaque Partie applique dans le cadre de son droit interne, dans la mesure où cela est possible et approprié, des dispositions de cet article lorsqu’il s’agit de décider s’il y a lieu d’autoriser la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement ; que, par suite, l’association intimée ne peut pas, en tout état de cause, utilement faire valoir que le paragraphe 5 de l’article 6 de la convention, a été méconnu ;

Considérant, d’autre part, que les articles 9 et 31 de la directive 2001/18/CE du 12 mars 2001 susvisée imposent aux autorités nationales de consulter le public et de rendre accessibles les informations sur toutes les opérations de dissémination d’organismes génétiquement modifiés visées dans la partie B et effectuées sur leur territoire ; qu’une consultation publique a été assurée par l’intermédiaire du réseau Internet sur lequel l’intégralité du dossier de demande d’autorisation a été mis en ligne ; que ce dossier comportait notamment l’indication de la parcelle cadastrale sur laquelle était effectuée l’expérimentation ; qu’ainsi les objectifs assignés par la directive n° 2001/18/CE aux autorités nationales ont été respectés ;

Au regard de l’ordre juridique interne :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 125-3 du code de l’environnement : Toute personne a le droit d’être informée sur les effets que la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés au sens du titre III du livre V peut avoir pour la santé publique ou l’environnement, dans le respect de la confidentialité des informations protégées par la loi.  ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’outre la mise en ligne sur le réseau Internet des informations nécessaires, un comité local de suivi de l’essai a été mis en place dès mars 2003 ; que la fiche d’information du public, a été affichée dans les mairies concernées et une consultation du public annoncée par un communiqué de presse a été organisée du 27 juillet au 10 août 2004 ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d’information et de consultation du public manque en fait ;

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

En ce qui concerne la violation du principe de précaution :

Considérant qu’aux termes de l’article 5 de la charte de l’environnement de 2004, à laquelle le Préambule de la Constitution fait référence en vertu de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005  : Lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d’attribution, à la mise en oeuvre de procédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage  ; qu’aux termes de l’article L. 110-1 du code de l’environnement : (…) Elles s’inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : 1ºLe principe de précaution, selon lequel l’absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l’environnement à un coût économiquement acceptable (…)  ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la décision par laquelle le ministre de l’agriculture a autorisé l’I.N.R.A. à procéder à une opération de dissémination volontaire dans l’environnement de porte-greffes de vigne génétiquement modifiés à toute autre fin que la mise sur le marché, dans le cadre d’un programme expérimental limité à un seul site d’une superficie de 35 ares a été précédée d’un avis favorable émis le 11 mai 2004 par la commission d’étude de la dissémination des produits issus du génie biomoléculaire et concluant, sur la base des données figurant dans la demande et dans l’état actuel des connaissances, à l’absence de risque pour l’environnement et la santé publique ainsi que de l’accord du ministre de l’environnement ; que l’association intimée ne fait état d’aucun fait ou donnée scientifique de nature à remettre en cause, au regard du principe de précaution, l’appréciation portée par la commission précitée et les autorités ministérielles sur les risques liés à l’opération de dissémination volontaire litigieuse ; que par suite, le moyen tiré de ce que le ministre de l’agriculture aurait méconnu le principe de précaution et commis une erreur manifeste dans l’appréciation des risques inhérents à l’opération litigieuse ne peut qu’être écarté ;

En ce qui concerne la violation des articles 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :

Considérant, d’une part, que la décision litigieuse n’émanant pas d’un tribunal au sens de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le moyen tiré de la violation de cet article est, en tout état de cause, inopérant ;

Considérant, d’autre part, que si un individu subissant gravement et directement la dégradation de son environnement est recevable à invoquer la violation de l’article 8 de ladite convention qui protège le droit au respect de la vie privée et familiale, il ne ressort cependant pas des pièces du dossier que, ainsi qu’il vient d’être précisé, l’opération de dissémination volontaire en cause génère une atteinte grave à l’environnement de nature à nuire à l’état de santé des individus ;

En ce qui concerne l’intérêt de l’expérimentation :

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le programme expérimental autorisé par la décision attaquée doit permettre d’induire une résistance au grapevine fanleaf virus, agent responsable de la maladie du court-noué qui affecte le rendement et la longévité de la vigne ; que lorsqu’une vigne est atteinte de cette maladie, la production de raisin est rendue impossible et le seul remède est l’arrachage des pieds infectés ; que l’expérimentation qui a pour objectif la préservation d’une ressource naturelle et l’amélioration de la compétitivité de la filière agricole présente un intérêt public certain ; que, comme il a été dit ci-dessus, cette expérimentation ne présente pas de risque pour l’environnement ; que, dès lors, la décision attaquée, eu égard aux conditions dans lesquelles elle a été prise et aux mesures de suivi qui l’entourent, ne porte pas une atteinte excessive aux autres intérêts en présence ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que L’INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE et le MINISTRE DE L’ALIMENTATION, DE L’AGRICULTURE ET DE LA PÊCHE sont fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision en date du 28 juin 2005 autorisant la dissémination volontaire dans l’environnement de porte-greffes de vigne génétiquement modifiés ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat et de l’I.N.R.A., qui ne sont pas dans la présente instance, la partie perdante, la somme que l’association France Nature Environnement réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’association France Nature Environnement le versement à L’INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE d’une somme de 2 000 euros au titre des mêmes frais ;


D E C I D E :

Article 1er : L’intervention de l’association Alsace Nature est admise.

Article 2 : Le jugement n° 0503678 du Tribunal administratif de Strasbourg du 2 juin 2009 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par l’association France Nature Environnement devant le Tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 4 : L’association France Nature Environnement versera à l’INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE la somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de l’association France Nature Environnement tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l’institut national de la recherche agronomique, au ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire, à l’association France Nature Environnement et à l’association Alsace Nature.

''

''

''

''

2

09NC01483 – 09NC01771

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour Administrative d'Appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 17 janvier 2011, 09NC01483, Inédit au recueil Lebon