CAA de NANTES, 2ème chambre, 1 juin 2022, 21NT01547, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nantes, 2e ch., 1er juin 2022, n° 21NT01547
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro : 21NT01547
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Nantes, 5 avril 2021, N° 1912846
Dispositif : Satisfaction partielle
Date de dernière mise à jour : 2 juin 2022
Identifiant Légifrance : CETATEXT000045853664

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A B a demandé au tribunal administratif de Nantes d’annuler l’arrêté du 7 juin 2019 par lequel le maire des Sables d’Olonne a refusé de lui délivrer l’autorisation de démolir la villa située 5 promenade du Maréchal Joffre et implantée sur la parcelle AY n° 214 et de construire, sur cette même parcelle, un immeuble d’habitat collectif comprenant neuf logements.

Par un jugement n° 1912846 du 6 avril 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 juin 2021, le 10 novembre 2021 et le 25 novembre 2021, M. B, représenté par Me Leraisnable, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 avril 2021 ;

2°) d’annuler l’arrêté contesté ;

3°) d’enjoindre au maire des Sables d’Olonne de lui délivrer l’autorisation sollicitée ou, à défaut, de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune des Sables d’Olonne une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— le jugement qui lui a été notifié ne comporte aucune signature ;

— son projet ne méconnaît pas les dispositions de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme, lesquelles ne permettent à l’administration de refuser une autorisation d’urbanisme pour des raisons de sécurité publique que lorsque des prescriptions spéciales ne suffiraient pas à prévenir le risque ;

— le règlement de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine n’était pas opposable à son projet dès lors qu’il n’était pas en vigueur à la date à laquelle un certificat d’urbanisme lui a été délivré ;

— les dispositions de la zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager n’instituaient aucune servitude sur sa parcelle ;

— l’avis du préfet des Pays de la Loire, qui a, à tort, fait application des dispositions du règlement de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine, est, en outre, entaché d’erreur dans l’appréciation de la valeur patrimoniale de la villa et de son jardin ;

— le projet de construction est conforme aux dispositions de l’article UAf 11 du règlement du plan local d’urbanisme ;

— le projet de construction est conforme aux dispositions de l’article UAf 12 du règlement du plan local d’urbanisme ;

— les demandes de substitution de motifs présentées par la commune des Sables d’Olonne ne sauraient être accueillies dès lors, d’une part, que le plan de prévention des risques qu’elle invoque est illégal et, d’autre part, que seul l’architecte des bâtiments de France est compétent pour opposer un refus sur le fondement de l’article L. 632-1 du code du patrimoine.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2021, la commune des Sables d’Olonne, représentée par Me Plateaux, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B d’une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

— les moyens soulevés par M. B ne sont pas fondés ;

— à titre subsidiaire, si aucun des motifs fondant l’arrêté en litige n’était regardé comme légal par la cour, celle-ci pourra constater que cet arrêté est légalement fondé sur deux autres motifs, l’un tenant à la non-conformité du projet au règlement du plan de prévention des risques littoraux, l’autre tenant à la méconnaissance de l’article L. 632-1 du code du patrimoine.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de procéder d’office à une substitution de base légale.

Par un mémoire, enregistré le 5 mai 2022, M. B a présenté des observations en réponse à cette information.

Il soutient que :

— il avait un droit acquis à voir sa demande examinée exclusivement au regard du règlement de la zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager ;

— à supposer les dispositions de l’article L. 421-6 du code de l’urbanisme applicables, la démolition de la villa n’est pas susceptible de compromettre la protection ou la mise en valeur du patrimoine bâti au sens de ces dispositions.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’environnement ;

— le code du patrimoine ;

— le code de l’urbanisme ;

— la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme C,

— les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

— les observations de Me Le Pallabre, substituant Me Leraisnable et représentant M. B et les observations de Me Delaunay, substituant Me Plateaux et représentant la commune des Sables d’Olonne.

Une note en délibéré présentée par M. B a été enregistrée le 10 mai 2022.

Considérant ce qui suit :

1. M. B, propriétaire indivis de la villa « Chimère », construite sur la parcelle cadastrée AY n° 214 et située 5 promenade du Maréchal Joffre sur le territoire de la commune des Sables d’Olonne, relève appel du jugement du 6 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 7 juin 2019 du maire de cette commune refusant de lui délivrer un permis de construire, valant permis de démolir, un immeuble collectif à usage d’habitation comprenant neuf logements sur cette parcelle.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort du dossier de la procédure que la minute du jugement attaqué a été, conformément aux prescriptions de l’article R. 741-7 du code de justice administrative, signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d’audience. Par suite, le moyen tiré de ce que ce jugement serait entaché d’irrégularité au regard de ces dispositions ne peut qu’être écarté.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

3. Aux termes du quatrième alinéa de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme : « Lorsqu’une demande d’autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d’un certificat d’urbanisme, les dispositions d’urbanisme, le régime des taxes et participations d’urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu’ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l’exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. ».

4. Ces dispositions ont pour effet de garantir à la personne à laquelle a été délivré un certificat d’urbanisme, quel que soit son contenu, un droit à voir sa demande de permis de construire déposée durant les dix-huit mois qui suivent examinée au regard des dispositions d’urbanisme applicables à la date de ce certificat, à la seule exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique.

5. Il ressort des pièces du dossier que le 30 août 2017, le maire des Sables d’Olonne a délivré à M. B un certificat d’urbanisme portant sur un projet de construction, après démolition, d’un immeuble collectif à usage d’habitation. M. B a déposé sa demande de permis de construire valant permis de démolir le 26 février 2019, soit dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance du certificat d’urbanisme. Par suite, cette demande devait être examinée au regard des dispositions d’urbanisme applicables à la date du 30 août 2017 et la légalité de l’arrêté contesté doit être appréciée au regard de ces mêmes dispositions.

En ce qui concerne le refus de permis de démolir :

6. D’une part, aux termes de l’article 112 de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine : « () Les secteurs sauvegardés, les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager et les aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine créés avant la publication de la présente loi deviennent de plein droit des sites patrimoniaux remarquables, au sens de l’article L. 631-1 du code du patrimoine, et sont soumis au titre III du livre VI du même code. Le plan de sauvegarde et de mise en valeur du secteur sauvegardé applicable à la date de publication de la présente loi est applicable après cette date dans le périmètre du site patrimonial remarquable. / III – Le règlement de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine ou de la zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager applicable avant la date de publication de la présente loi continue de produire ses effets de droit dans le périmètre du site patrimonial remarquable jusqu’à ce que s’y substitue un plan de sauvegarde et de mise en valeur ou un plan de valorisation de l’architecture et du patrimoine. / () ». Le II de l’article 114 de cette même loi dispose : « Les projets d’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine mis à l’étude avant la date de publication de la présente loi sont instruits puis approuvés conformément aux articles L. 642-1 à L. 642-10 du code du patrimoine, dans leur rédaction antérieure à la présente loi. / Au jour de leur création, les aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine deviennent des sites patrimoniaux remarquables, au sens de l’article L. 631-1 du code du patrimoine, et leur règlement est applicable dans les conditions prévues au III de l’article 112 de la présente loi. Ce règlement se substitue, le cas échéant, à celui de la zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager applicable antérieurement. ».

7. D’autre part, aux termes de l’article L. 631-1 du code du patrimoine : « Sont classés au titre des sites patrimoniaux remarquables les villes, villages ou quartiers dont la conservation, la restauration, la réhabilitation ou la mise en valeur présente, au point de vue historique, architectural, archéologique, artistique ou paysager, un intérêt public. / () / Le classement au titre des sites patrimoniaux remarquables a le caractère de servitude d’utilité publique affectant l’utilisation des sols dans un but de protection, de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel. () ». Aux termes de l’article L. 632-1 du même code : « Dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable, sont soumis à une autorisation préalable les travaux susceptibles de modifier l’état des parties extérieures des immeubles bâtis, y compris du second œuvre, ou des immeubles non bâtis. / Sont également soumis à une autorisation préalable les travaux susceptibles de modifier l’état des éléments d’architecture et de décoration, immeubles par nature ou effets mobiliers attachés à perpétuelle demeure, au sens des articles 524 et 525 du code civil, lorsque ces éléments, situés à l’extérieur ou à l’intérieur d’un immeuble, sont protégés par le plan de sauvegarde et de mise en valeur. Pendant la phase de mise à l’étude du plan de sauvegarde et de mise en valeur, sont soumis à une autorisation préalable les travaux susceptibles de modifier l’état des parties intérieures du bâti. / L’autorisation peut être refusée ou assortie de prescriptions lorsque les travaux sont susceptibles de porter atteinte à la conservation ou à la mise en valeur du site patrimonial remarquable. ». Le I de l’article L. 632-2 de ce code dispose, dans sa version applicable au litige : « Le permis de construire, le permis de démolir, () tient lieu de l’autorisation prévue à l’article L. 632-1 du présent code si l’architecte des Bâtiments de France a donné son accord, le cas échéant assorti de prescriptions motivées. () ». Enfin, aux termes de l’article R. 425-2 du code de l’urbanisme : « Lorsque le projet est situé dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable, le permis de construire, le permis d’aménager, le permis de démolir ou la décision prise sur la déclaration préalable tient lieu de l’autorisation prévue à l’article L. 632-1 du code du patrimoine si l’architecte des Bâtiments de France a donné son accord, le cas échéant assorti de prescriptions motivées. ».

8. Par un arrêté du 15 février 2007, le préfet de la région des Pays de la Loire a créé sur une partie du territoire de la commune des Sables d’Olonne une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager et approuvé le règlement relatif à cette zone. Par une délibération du 3 novembre 2014, le conseil municipal des Sables d’Olonne a prescrit la mise à l’étude de la création d’une aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine. Par une délibération du 28 décembre 2018, il a approuvé le projet d’aire, laquelle est devenue dès sa création, un site patrimonial remarquable, en application des dispositions, citées au point 6, du II de l’article 114 de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine.

9. Il ressort des pièces du dossier que le 26 mars 2019, l’architecte des bâtiments de France a émis un avis défavorable au projet de M. B au motif que « La parcelle du projet est occupée par une villa dont la démolition est interdite en application de l’article 4-1 du Titre 1 du site patrimonial remarquable : Les immeubles repérés en couleur violette au plan réglementaire sont dotés d’une servitude de conservation. ». Le préfet de la région des Pays de la Loire, après avoir relevé que la villa « Chimère » « figure au document graphique du SPR approuvé le 28 décembre 2018, comme » bâtiment d’intérêt architectural " [] repéré[e] en couleur violette sur le plan, [et] doté[e] d’une servitude de conservation « , a confirmé l’avis défavorable de l’architecte des bâtiments de France en » application du règlement du SPR interdisant toute démolition « . L’arrêté contesté, qui vise notamment le » site patrimonial remarquable approuvé le 28 décembre 2018 ", est motivé par le sens de l’avis de l’architecte des bâtiments de France et fondé sur le règlement de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine devenue site patrimonial remarquable.

10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 5 du présent arrêt, que le projet de M. B devait être examiné au regard des dispositions d’urbanisme applicables à la date du 30 août 2017. Il s’ensuit qu’en se fondant sur le règlement de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine approuvée par la délibération du 28 décembre 2018, tant l’architecte des bâtiments de France, dont l’avis défavorable a été confirmé par le préfet de région, que le maire de la commune des Sables d’Olonne ont commis une erreur de droit.

11. La commune des Sables d’Olonne fait valoir devant le juge que le règlement de la zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager applicable à la demande de M. B faisait également obstacle à la délivrance du permis de démolir sollicité. Alors qu’il ressort du cahier des détails réglementaires produit par M. B que le terrain d’assiette du projet litigieux était répertorié comme accueillant un « volume constructible hors toiture », les dispositions du règlement de la zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager dont se prévaut la commune des Sables d’Olonne ne font pas obstacle à la démolition de la villa « Chimère », laquelle n’est, d’ailleurs, pas identifiée comme une construction isolée représentative de l’architecture balnéaire devant être protégée ou restaurée. Il s’ensuit que la demande de la commune des Sables d’Olonne tendant à ce que soit substitué au motif de refus tenant à la non-conformité du projet de démolition au règlement de l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine le motif tiré de sa non-conformité au règlement de la zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager ne peut être accueillie.

12. Pour l’application de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme, aucun autre moyen n’est susceptible d’entraîner, en l’état du dossier, l’annulation de l’arrêté contesté en tant qu’il porte refus de permis de démolir.

13. Il résulte de ce qui précède que M. B est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 7 juin 2019 en tant que celui-ci rejette sa demande de permis de démolir.

En ce qui concerne le refus de permis de construire :

14. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 3 à 11 du présent arrêt, le motif tiré du classement par l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine, devenue site patrimonial remarquable, du jardin de la Villa « Chimère » au sein des « espaces, jardins publics ou privés à conserver, à mettre en valeur ou à restituer » ne saurait légalement justifier le refus de permis de construire en litige.

15. En revanche, aux termes de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme : « Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales s’il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d’autres installations. ».

16. Il appartient à l’autorité d’urbanisme compétente et au juge de l’excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d’atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement des dispositions précitées de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s’ils se réalisent. Pour l’application de cet article en matière de risque de submersion marine, il appartient à l’autorité administrative d’apprécier, en l’état des données scientifiques disponibles, ce risque de submersion en prenant en compte notamment la situation de la zone du projet au regard du niveau de la mer, sa situation à l’arrière d’un ouvrage de défense contre la mer, le cas échéant, le risque de rupture ou de submersion de cet ouvrage en tenant compte notamment de son état, de sa solidité et des précédents connus de rupture ou de submersion.

17. Le projet de M. B porte sur la construction d’un immeuble en R + 7 d’une superficie de 922 mètres carrés de surface de plancher, destiné à accueillir neuf logements sur un terrain situé à une quinzaine de mètres du remblai et, d’ailleurs, classé par le plan de prévention des risques littoraux du Pays d’Olonne en zone réglementaire rouge régie par le principe d’inconstructibilité.

18. Il ressort des pièces du dossier que le risque de submersion marine auquel est exposé le terrain d’assiette du projet est lié aux effets de dissipation d’énergie des phénomènes induisant des « chocs mécaniques » et le franchissement de « paquets de mer ». Tant la carte des aléas actuels que la carte aléa 2100, annexées au plan de prévention des risques littoraux du Pays d’Olonne, intègrent ce terrain dans la zone concernée par les chocs mécaniques. M. B verse aux débats une « étude de vulnérabilité de la villa Chimère face au risque de choc mécanique », réalisée en novembre 2021 selon laquelle le risque considéré serait actuellement faible mais « indéniable » à l’horizon 2100. Si cette étude évalue, à cette échéance, le risque pour le bâtiment et ses occupants comme « faible / nul », elle qualifie néanmoins le risque pour les personnes de « très fort » aux abords du remblai et de « fort » au niveau du trottoir qui borde la propriété de M. B. En outre, il est constant que le projet ne prévoit aucun dispositif d’évacuation ni de mise en sécurité des biens. Par ailleurs, alors que l’arrêté contesté fait également état de ce que le projet aurait « une incidence sur la sécurité des constructions avoisinantes » en relevant que " les niveaux des sous-sol et de rez-de-chaussée [du projet] facilit[e]nt le passage de l’eau ", M. B n’apporte aucun élément de nature à infirmer cette appréciation. Partant, le projet litigieux doit être regardé comme portant atteinte à la sécurité publique.

19. En vertu de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme, lorsqu’un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l’autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu’il n’est pas légalement possible, au vu du dossier et de l’instruction de la demande de permis, d’accorder le permis en l’assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d’une nouvelle demande, permettraient d’assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l’administration est chargée d’assurer le respect.

20. En l’espèce, M. B soutient que des prescriptions spéciales auraient suffi à prévenir les risques d’atteinte à la sécurité publique que présente son projet. Il évoque à cet égard la possibilité de prescrire la réalisation d'« une structure d’immeuble résistante à ce type de chocs », la suppression des ouvertures du rez-de-chaussée, la création de « niveaux refuges ». Il se réfère également à l’étude de vulnérabilité évoquée au point 18, laquelle préconise la surélévation du rez-de-chaussée, la création d’une zone refuge, la suppression du sous-sol. De telles modifications revêtent un caractère substantiel qui auraient nécessité la présentation d’un nouveau projet.

21. Il suit de là qu’en se fondant sur les dispositions de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme pour refuser l’autorisation de construire sollicitée par M. B, le maire des Sables d’Olonne, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu’il se serait mépris sur la nature et l’ampleur du risque que présente le projet pour la sécurité publique, n’a pas fait une inexacte application de ces dispositions. Il résulte de l’instruction que le maire des Sables d’Olonne aurait pris la même décision de refus de permis de construire en se fondant sur ce seul motif.

22. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les moyens dirigés contre les deux autres motifs de refus du permis de construire ni sur la substitution de motifs sollicitée par la commune des Sables d’Olonne, que M. B n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du maire des Sables d’Olonne du 7 juin 2019 en tant que celui-ci rejette sa demande de permis de construire.

Sur les conclusions aux fins d’injonction et d’astreinte :

23. Le présent arrêt qui annule l’arrêté du maire des Sables d’Olonne du 7 juin 2019 seulement en tant qu’il refuse la délivrance du permis de démolir et au seul motif qu’il est entaché d’une erreur de droit n’implique pas nécessairement la délivrance à M. B de l’autorisation qu’il sollicite. Les conclusions de ce dernier tendant à ce qu’il soit enjoint, sous astreinte, au maire des Sables d’Olonne de lui délivrer cette autorisation doivent, dès lors, être rejetées. Il y a lieu, en revanche, d’enjoindre à cette autorité de réexaminer la demande de M. B en tant qu’elle porte sur le refus de démolir, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu’il soit besoin d’assortir cette injonction d’une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

24. Il n’apparaît pas inéquitable, dans les circonstances de l’espèce, de laisser à la charge de chacune des parties les frais d’instance qu’elles ont exposés.

D E C I D E:

Article 1er : L’arrêté du maire des Sables d’Olonne du 7 juin 2019 est annulé en tant qu’il refuse le permis de démolir la Villa « Chimère ».

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 avril 2021 est annulé en tant qu’il rejette la demande de M. B tendant à l’annulation de l’arrêté du maire des Sables d’Olonne du 7 juin 2019 du 7 juin 2019 en ce que cet arrêté refuse la délivrance du permis de démolir la Villa « Chimère ».

Article 3 : Il est enjoint au maire des Sables d’Olonne de réexaminer la demande de permis de démolir de M. B dans le délai de deux mois, à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B et les conclusions de la commune des Sables d’Olonne présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A B et à la commune des Sables d’Olonne.

Une copie sera adressée pour information à la ministre de la culture et au directeur régional des affaires culturelles des Pays de la Loire.

Délibéré après l’audience du 10 mai 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pérez, président de chambre,

Mme Douet, présidente-assesseure,

Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er juin 2022.

La rapporteure,

K. C

Le président,

A. PEREZ

La greffière,

A. LEMEE

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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