Cour de cassation, Chambre civile 2, 12 avril 2018, 17-16.945, Publié au bulletin

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Etant chargé de veiller au bon déroulement de l’instance en application de l’article 3 du code de procédure civile, le juge dispose du pouvoir d’ordonner d’office un sursis à statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice

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Nicolas Hoffschir · Gazette du Palais · 31 juillet 2018

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Hebdo édition privée n°742 du 24 mai 2018 Réf. : Cass. civ. 2, 12 avril 2018, n° 17-16.945, F-P+B (N° Lexbase : A1616XLG) Par un arrêt du 12 avril 2018, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a retenu que la décision de sursis à statuer ne peut être attaquée par un pourvoi en cassation qu'en cas d'excès de pouvoir ou de violation de la règle de droit gouvernant le sursis à statuer. Il n'y a pas de violation de la règle de droit lorsque le juge ordonne d'office un sursis à statuer dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice. Une société a remis à l'encaissement …

 
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Sur la décision

Référence :
Cass. 2e civ., 12 avr. 2018, n° 17-16.945, Bull. 2018, II, n° 79
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-16945
Importance : Publié au bulletin
Publication : Bull. 2018, II, n° 79
Décision précédente : Cour d'appel de Lyon, 15 février 2017
Textes appliqués :
article 3 du code de procédure civile
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000036829588
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2018:C200533
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

CIV. 2

CF

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 12 avril 2018

Irrecevabilité et Rejet

Mme FLISE, président

Arrêt n° 533 F-P+B

Pourvoi n° V 17-16.945

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Sem, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 16 février 2017 par la cour d’appel de Lyon (6e chambre), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. Roger X…, domicilié […] ,

2°/ à la société Loc’invest équipement, société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,

3°/ à la société Banque populaire Bourgogne Franche-Comté, société anonyme, dont le siège est […] ,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 14 mars 2018, où étaient présents : Mme Flise, président, M. de Leiris, conseiller référendaire rapporteur, Mme Brouard-Gallet, conseiller doyen, Mme Mainardi, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. de Leiris, conseiller référendaire, les observations de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat de la société Sem, de la SCP Ghestin, avocat de M. X… et de la société Loc’invest équipement, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Banque populaire Bourgogne Franche-Comté, l’avis de Mme Y…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Lyon, 16 février 2017), que la société Sem ayant remis à l’encaissement un chèque de la société Loc’invest équipement (la société Loc’invest), dont M. X… est le dirigeant, tiré sur la société Banque populaire Bourgogne Franche-Comté (la banque), cette dernière a refusé le paiement, en l’état d’un compte insuffisamment provisionné et d’une opposition de M. X…, affirmant ne pas avoir signé le chèque ; que la société Sem a fait assigner M. X…, la société Loc’invest et la banque devant un tribunal de grande instance pour avoir paiement d’une somme correspondant au montant du chèque, puis interjeté appel du jugement rejetant cette demande et condamnant la société Sem à payer à la banque une certaine somme pour procédure abusive ;

Sur la recevabilité du pourvoi en tant qu’il est dirigé, en son premier moyen, contre M. X… et la société Loc’invest, contestée par la défense :

Vu les articles 380-1, 606, 607 et 608 du code de procédure civile ;

Attendu que, sauf excès de pouvoir, la décision de sursis à statuer, qui ne tranche pas le principal et ne met pas fin à l’instance, ne peut être frappée d’un pourvoi que pour violation de la règle de droit gouvernant le sursis à statuer ;

Sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche :

Attendu que la société Sem fait grief à l’arrêt de surseoir à statuer sur l’appel formé à l’encontre de M. X… et de la société Loc’invest par la société Sem jusqu’à l’arrivée d’une décision pénale définitive sur la constitution de partie civile déposée pour faux et usage de faux, alors, selon le moyen, que le sursis à statuer doit faire l’objet d’une demande des parties et ne peut être prononcé d’office ; qu’en l’espèce, ni M. X… et la société Loc’invest, ni la société Sem ne demandaient qu’il soit sursis à statuer sur la demande de condamnation de M. X… au paiement du chèque litigieux dans l’attente de l’issue de l’instance pénale initiée par M. X… pour faux et usage de faux ; qu’au contraire, M. X… et la société Loc’invest indiquaient expressément dans leurs conclusions d’appel qu’ils n’avaient jamais sollicité le sursis à statuer dans cette affaire ; qu’en prononçant d’office le sursis à statuer dans l’attente de l’issue de l’instance pénale, la cour d’appel a violé les articles 4 et 5, ensemble l’article 378 du code de procédure civile ;

Mais attendu que chargé de veiller au bon déroulement de l’instance, le juge dispose du pouvoir d’ordonner d’office un sursis à statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les première, deuxième et troisième branches du premier moyen annexé, qui sont irrecevables ;

D’où il suit qu’en l’absence d’excès de pouvoir ou de violation des règles gouvernant le sursis à statuer, le pourvoi, en tant qu’il est dirigé contre une décision ayant sursis à statuer sur les demandes formées contre M. X… et la société Loc’invest, n’est pas recevable à l’encontre de ces derniers ;

Sur le second moyen, dirigé contre la banque, tel que reproduit en annexe :

Attendu que la société Sem fait grief à l’arrêt de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a alloué à la banque la somme de 1 500 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Mais attendu que l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la société Sem avait eu recours au droit du chèque pour obtenir un paiement indu, en particulier à l’égard du banquier qui avait reçu l’opposition de son client, dont le compte n’était pas approvisionné, de sorte que l’attitude du banquier n’avait en outre causé aucun préjudice effectif et que la réclamation à l’égard de la banque ne pouvait, à l’évidence, pas prospérer ;

Que de ces constatations et énonciations, la cour d’appel a pu déduire que l’action de la société Sem contre la banque était abusive ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi en tant qu’il est dirigé contre M. X… et la société Loc’invest équipement ;

REJETTE le pourvoi en tant qu’il est dirigé contre la Banque populaire Bourgogne Franche-Comté ;

Condamne la société Sem aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à M. X… et à la société Loc’invest équipement la somme globale de 3 000 euros, et à la Banque populaire Bourgogne Franche-Comté à la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Sem.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir sursis à statuer sur l’appel formé à l’encontre de Roger X… et de la société Loc’Invest Equipement par la société SEM jusqu’à l’arrivée d’une décision pénale définitive sur la constitution de partie civile déposée pour faux et usage de faux ;

Aux motifs que « la société Loc’Invest Equipement a ouvert le 5 novembre 2010 un compte à la SA Coopérative Banque Populaire Bourgogne-France Comté ; que ce compte n’a jamais fonctionné en étant crédité de sommes très importantes, le maximum du crédit de ce compte ayant atteint la somme de 30.086,59 euros, pour la période allant du 1er juin 2012 au 11 avril 2013 ; que le 5 février 2013, un chèque d’un montant de euros a été présenté à l’encaissement alors que le compte n’était pas provisionné d’une somme équivalente en permettant le paiement ; que la banque ayant pris contact avec le PDG de la société Loc’Invest Equipement, en l’espèce, Roger X…, ce dernier a remis à la banque une lettre d’opposition en expliquant que le chèque aurait été remis au titre d’une garantie pour une opération immobilière à venir, et sans avoir été signé par lui ; que la banque a alors refusé le paiement ; qu’il ressort du débat que Roger X… conteste avoir remis à la société SEM un chèque signé de sa main, et que le 7 février 2015 il a porté plainte auprès des services de police à l’encontre de la personne à laquelle il a remis le chèque sans le signer, Emile Z…, qu’il accuse de tentative d’escroquerie ; que si cette plainte a fait l’objet d’un classement sans suite le 18 novembre 2015, comme le soutient la société SEM Roger X… et la société Loc’Invest Equipement se sont constitués parties civiles devant le doyen des juges d’instruction du tribunal de grande instance de Lyon le 6 janvier 2016 pour que soit instruite la plainte contre X déposée pour faux et usage de faux, en se fondant sur des faits qui décrivent l’action de la société SEM et Emile Z… auquel le chèque a été remis alors qu’il n’était pas signé ; que dans cette plainte, Roger X… soutient bien que la signature du chèque n’est pas de sa main ; que dans le mesure où ce dernier demande une vérification d’écriture de la signature apposée sur le chèque, la cour se doit de surseoir à statuer sur cette question, dans la mesure où l’instruction pénale qui doit être faite peut avoir une influence sur la décision civile de la cour, tant que l’instance pénale initiée sur la plainte pour faux et usage de faux n’a pas trouvé une issue définitive ; qu’en conséquence, sur le point de la signature du chèque, il doit être sursis à statuer sur la demande de condamnation au paiement du chèque litigieux par Roger X… et la société Loc’Invest Equipement » (arrêt, p. 3-4) ;

1) Alors, d’une part, que l’objet du litige est fixé par les prétentions des parties ; qu’en l’espèce, devant la cour d’appel, M. X… ne demandait pas de vérification d’écriture ; qu’il énonçait au contraire que cette vérification était en réalité inutile (conclusions d’appel de M. X… p. 6) ; qu’en énonçant qu’elle devait surseoir à statuer dans l’attente de l’issue de l’instance pénale dès lors que M. X… demandait une vérification d’écriture, la cour d’appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2) Alors, d’autre part, que la mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile que celle tendant à la réparation du dommage causé par l’infraction, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil ; qu’en considérant qu’elle devait surseoir à statuer sur la demande formée par la société SEM à l’encontre de M. X… tendant à le voir condamner au paiement du chèque litigieux, en l’état de la plainte déposée par M. X… avec constitution de partie civile pour faux et usage de faux, en raison de l’influence potentielle de l’instruction pénale sur la décision civile de la cour cependant qu’une telle suspension ne s’imposait nullement à elle, la cour d’appel a méconnu l’étendue de ses pouvoirs, en violation de l’article 4 alinéa 3 du code de procédure pénale et de l’article 380-1 du code de procédure civile ;

3) Alors, encore, que la mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile que celle tendant à la réparation du dommage causé par l’infraction, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil ; qu’en considérant qu’elle devait surseoir à statuer sur la demande formée par la société SEM à l’encontre de M. X… tendant à le voir condamner au paiement du chèque litigieux, en l’état de la plainte déposée par M. X… avec constitution de partie civile pour faux et usage de faux, cependant que la demande dont elle était saisie ne tendait aucunement à la réparation du dommage causé par l’infraction objet de la plainte déposée par M. X…, la cour d’appel a derechef méconnu l’étendue de ses pouvoirs, en violation de l’article 4 alinéa 3 du code de procédure pénale et de l’article 380-1 du code de procédure civile ;

4) Alors, en tout état de cause, que le sursis à statuer doit faire l’objet d’une demande des parties et ne peut être prononcé d’office ; qu’en l’espèce, ni M. X… et la société Loc’Invest Equipement, ni la société SEM ne demandaient qu’il soit sursis à statuer sur la demande de condamnation de M. X… au paiement du chèque litigieux dans l’attente de l’issue de l’instance pénale initiée par M. X… pour faux et usage de faux ; qu’au contraire, M. X… et la société Loc’Invest Equipement indiquaient expressément dans leurs conclusions d’appel qu’ils n’avaient jamais sollicité le sursis à statuer dans cette affaire (p. 5) ; qu’en prononçant d’office le sursis à statuer dans l’attente de l’issue de l’instance pénale, la cour d’appel a violé les articles 4 et 5, ensemble l’article 378 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu’il a alloué à la banque la somme de 1.500 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Aux motifs propres que « La décision entreprise doit aussi être confirmée en ce qu’elle alloue des dommages-intérêts pour procédure abusive au profit de la banque et la somme de 2000 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile, dans la mesure où la réclamation ne pouvait pas, à l’évidence, prospérer puisque le compte bancaire n’avait pas la provision nécessaire au paiement, de sorte que l’attitude du banquier n’a causé aucun préjudice effectif » (arrêt p. 4) ;

Et aux motifs des premiers juges que « Sur l’abus de procédure : l’exercice d’une action en justice, de même que la défense à cette action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1382 du code civil que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol ; qu’en l’espèce, il y a abus de procédure de la part de la société SEM d’avoir eu recours au droit du chèque pour obtenir un paiement indu, en particulier à l’égard du banquier qui avait reçu l’opposition de son client, dont le compte n’était en outre pas approvisionné ; que la société SEM devra l’indemniser par le paiement de la somme de 1.500 euros » (jugement, p. 4) ;

Alors que le juge ne peut prononcer une condamnation pour procédure abusive sans caractériser une faute de nature à faire dégénérer le droit d’ester en justice en abus ; qu’une telle faute suppose que l’auteur de l’action ait conscience du caractère infondé de ses prétentions ; qu’en l’espèce, en retenant, pour condamner la société SEM à verser la somme de 1500 euros à la Banque Populaire Bourgogne Franche-Comté pour procédure abusive que la demande de la société SEM ne pouvait à l’évidence pas prospérer dans la mesure où le compte de M. X… n’était pas suffisamment provisionné, de sorte que l’attitude de la banque n’a causé aucun préjudice effectif, et que la banque avait reçu une opposition de la part de M. X…, la cour d’appel, qui s’est déterminée par des motifs impropres à caractériser une faute de nature à faire dégénérer en abus le droit d’ester en justice, a violé l’article 1382, devenu l’article 1240 du code civil.

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