Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 octobre 2018, 16-26.725, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 24 oct. 2018, n° 16-26.725
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 16-26.725
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 22 novembre 2016, N° 15/23593
Textes appliqués :
Article 627 du code de procédure civile, après avertissement délivré aux parties.

Article 4 du code de procédure civile.

Dispositif : Cassation partielle sans renvoi
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000037556275
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2018:CO00863
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Sur les parties

Texte intégral

COMM.

FB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 24 octobre 2018

Cassation partielle sans renvoi

Mme A…, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 863 F-D

Pourvoi n° E 16-26.725

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société My Love Affair Limited, dont le siège est […] ,

2°/ la société BMGC Services France, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

contre l’ordonnance rendue le 23 novembre 2016 par le premier président de la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 1), dans le litige les opposant au directeur général des finances publiques, représenté par le directeur des services fiscaux en charge de la Direction nationale d’enquêtes fiscales, domicilié […] ,

défendeur à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 11 septembre 2018, où étaient présents : Mme A…, conseiller doyen faisant fonction de président, M. X…, conseiller rapporteur, Mme Orsini, conseiller, M. Graveline, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. X…, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société My Love Affair Limited et de la société BMGC services France, de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques, l’avis de M. Debacq, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’ordonnance attaquée, rendue par le premier président d’une cour d’appel, qu’un juge des libertés et de la détention a, sur le fondement de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, autorisé des agents de l’administration des impôts à procéder à des visites avec saisies dans des locaux et dépendances sis […] , susceptibles d’être occupés par la société de droit anglais My Love Affair Limited et les sociétés BMGC Services France (la société BMGC) et Dayclic, afin de rechercher la preuve de la soustraction de la première à l’établissement et au paiement de l’impôt sur les bénéfices et des taxes sur le chiffre d’affaires ; que ces opérations ont été effectuées le 17 novembre 2015 ; que les sociétés My Love Affair et BMGC ont relevé appel de l’ordonnance d’autorisation ;

Sur les deuxième et troisième moyens, réunis, qui sont préalables :

Attendu que les sociétés My Love Affair et BMGC font grief à l’ordonnance de confirmer l’ordonnance du juge des libertés et de la détention alors, selon le moyen :

1°/ qu’en vertu des articles 6 de la Convention européenne et L. 16 B du livre des procédures fiscales, le juge qui autorise des visites et saisies à la requête de l’administration fiscale doit vérifier de manière concrète, par l’appréciation des éléments d’information que cette administration est tenue de lui fournir, que la demande d’autorisation qui lui est soumise est bien fondée ; qu’en refusant d’annuler l’ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention, sans vérifier, comme il y était invité, si le juge des libertés et de la détention avait bien examiné les pièces soumises au soutien de la requête – ce qui n’était pas le cas puisqu’il avait repris dans son ordonnance une erreur grossière de l’administration au sujet du nombre de sociétés dont le siège social se trouvait à la même adresse que la société My Love Affair, le premier président a méconnu l’étendue de ses pouvoirs et violé les textes susvisés ;

2°/ qu’en vertu de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, l’administration doit communiquer au juge des libertés et de la détention saisi de sa demande d’autorisation de procéder à des visites et saisies tous les éléments d’information en sa possession de nature à justifier la visite ; que, tout en constatant que l’administration fiscale n’avait pas communiqué au juge des tableaux de prestations de services effectuées hors de France, dont les sociétés My Love Affair et BMGC Services France faisaient valoir qu’ils auraient pu écarter les présomptions d’infractions en cause, le premier président de la cour d’appel a autorisé les visites et saisies contestées, au motif que d’autres éléments permettaient au juge des libertés et de la détention de présumer l’existence de ces infractions ; qu’en statuant ainsi par des motifs inopérants le premier président a violé le texte susvisé ;

3°/ qu’en vertu des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et L. 16 B du livre des procédures fiscales, le juge ne peut autoriser des visites et saisie que si des mesures d’enquête constituant une ingérence moins importante dans le droit au respect de la vie privée et du domicile ne permettraient pas d’obtenir la preuve des faits recherchés ; que le juge saisi d’un recours contre une telle autorisation doit vérifier le caractère indispensable des visites et saisies ; qu’en confirmant l’autorisation de procéder aux visites et saisies contestée, au motif que le juge des libertés et de la détention aurait estimé que les autres moyens de recherche de preuve moins coercitifs dont disposait l’administration étaient insuffisants, alors qu’il lui appartenait de vérifier lui-même que tel était le cas, le premier président a violé les textes susvisés, ensemble l’article 561 du code de procédure civile ;

4°/ qu’en vertu des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, L.16 B du livre des procédures fiscales et 561 du code de procédure civile, le premier président saisi d’un appel contre une ordonnance ayant autorisé des visites et saisies doit rechercher et caractériser lui-même les éléments faisant présumer l’existence d’une infraction fiscale ; qu’en se bornant à retenir que le juge des libertés et de la détention avait rempli son office en examinant les pièces soumises et pouvait se fonder sur la méthode du faisceau d’indices, alors qu’il lui appartenait de statuer lui-même sur l’existence des présomptions contestées, le premier président a méconnu l’étendue de ses pouvoirs et violé les textes susvisés ;

Mais attendu, en premier lieu, que l’ordonnance constate, s’agissant de la domiciliation de la société My Love Affair, que son site internet indiquait, à la date du 21 octobre 2015, l’existence de bureaux à Londres et Paris tout en mentionnant comme seules coordonnées téléphoniques et de fax celles de la société BMGC à Paris ; qu’elle constate encore que son cabinet comptable, installé à la même adresse que son siège social, fournissait à sa clientèle des prestations de secrétariat et relève que le montant de ses immobilisations corporelles est insignifiant, eu égard au volume de son activité commerciale à Londres, tandis que les locaux mis à sa disposition à Soho Square, d’une superficie très réduite, laissent supposer qu’elle n’a pas les moyens d’exercer une activité professionnelle au Royaume-Uni ; qu’elle relève ensuite que le document incomplet produit par l’administration fiscale sous le numéro 1.13 relatif à ses prestations de services réalisées hors de France n’est qu’un document parmi les trente-neuf autres soumis au juge des libertés et de la détention ; qu’elle ajoute que les données chiffrées produites par l’administration fiscale établissent que les prestations de services intracommunautaires effectuées au profit de clients français portaient sur des sommes représentant 89,45 % de son activité en 2013, 99,97 % en 2014 et 97,79 % pour la période courant du 1er janvier au 31 août 2015 et, qu’à supposer qu’une erreur affecte ces données, elle ne pouvait être que minime ; qu’elle relève encore que celles-ci sont confortées par l’importance du chiffre d’affaires réalisé sur le territoire national résultant notamment de l’exécution de contrats conclus avec le GIE Paris Mutuel Urbain et les sociétés Barrilla France et G.H. Mumm et Cie ; qu’ayant ainsi procédé à un examen concret des éléments de preuve qui lui étaient soumis et écarté les pièces entachées d’erreur, le premier président, qui n’a pas méconnu l’étendue de ses pouvoirs, a considéré que la majeure partie du chiffre d’affaires de la société My Love Affair était réalisée avec des clients français, et caractérisé l’existence d’une présomption de fraude de nature à justifier l’autorisation accordée ;

Et attendu, en second lieu, qu’aucun texte ne subordonnant la saisine de l’autorité judiciaire pour l’application de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales au recours préalable à d’autres procédures, le premier président, qui a retenu que les conditions requises pour autoriser une visite domiciliaire étaient remplies, a nécessairement estimé, sans avoir à justifier autrement de la proportionnalité de la mesure qu’il confirmait, que les autres moyens de recherche de preuve étaient insuffisants ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l’article 4 du code de procédure civile ;

Attendu qu’après avoir rejeté le recours formé par les sociétés My Love Affair et BMGC contre l’ordonnance d’autorisation délivrée par le juge des libertés et de la détention le 16 novembre 2015, l’ordonnance déclare régulières les opérations de visite et de saisie auxquelles il a été procédé le 17 novembre suivant ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il était seulement saisi d’un appel contre l’ordonnance d’autorisation de visite, le premier président, qui a méconnu l’objet du litige, a violé le texte susvisé ;

Et vu l’article 627 du code de procédure civile, après avertissement délivré aux parties ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’elle déclare régulières les opérations de visite et de saisies du 17 novembre 2015, l’ordonnance rendue le 23 novembre 2016,entre les parties, par le premier président de la cour d’appel de Paris ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’ordonnance partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société My Love Affair Limited et la société BMGC Services France.

PREMER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’ordonnance attaquée d’avoir dit régulières les visites et saisies du 17 novembre 2015 ;

1°) ALORS QUE le juge doit se prononcer seulement sur ce qui est demandé par les parties ; que les sociétés My Love affair et BMGC Services France avaient uniquement saisi le premier président d’un recours contestant l’autorisation donnée le 16 novembre 2015 à l’administration fiscale de procéder à des visites et saisies ; qu’en statuant sur la régularité des visites et saisies du 17 novembre 2015, le premier président a violé l’article 4 du Code de procédure civile et excédé ses pouvoirs ;

2°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu’en déclarant régulières les visites et saisies de l’administration du 17 novembre 2015 sans aucune motivation, le premier président a violé les articles 455 et 458 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’ordonnance confirmative attaquée d’avoir refusé d’annuler l’ordonnance rendue le 16 novembre 2015 par le juge des libertés et de la détention de Paris, qui autorisait l’administration fiscale à procéder à des visites et saisies dans les locaux sis […] et susceptibles d’être occupés par les sociétés My Love Affair, BMGC Services France et Dayclic ;

AUX MOTIFS QUE « Les sociétés appelantes contestent l’argument selon lequel le siège de la société MY LOVE AFFAIR serait situé à une adresse de domiciliation et indiquent, par ailleurs, que cette société disposerait en plus de son siège social d’un bureau situé […] , et produisent un contrat de location et un constat de site internet en date du 28 janvier 2016.

Il y a lieu de relever que l’ordonnance querellée précisait que le site www.myloveaffair.com faisait apparaître à la date du 21 octobre 2015 que la société MY LOVE AFFAIR LIMITED disposait de bureaux à LONDRES et à PARIS et faisait état exclusivement des coordonnées téléphoniques et de fax de la société BMGC SERVICES France, […] .

S’il est constant que, s’agissant d’une société faisant appel aux nouvelles technologies, la valeur d’immobilisation ne pouvait être que faible, il n’en demeure pas moins que la somme de 5.015 € en valeur d’acquisition au 31/12/2014, de laquelle il convient de déduire les amortissements liés à ces achats, est insignifiante, eu égard au volume de l’activité commerciale de la société MY LOVE AFFAIR à LONDRES et laisse supposer que cette société n’a pas les moyens d’exercer une activité professionnelle au Royaume-Uni. En outre, s’il est produit un contrat de mise à disposition, celui-ci représente une superficie très réduite et enfin le contrat de travail de M. Alexander Z… est postérieur à la visite domiciliaire.

Eu égard à ces éléments, la pièce 1-4 produite par l’administration et qui aurait pu dénaturer volontairement l’information transmise au JLD n’a eu que peu d’incidence, le premier juge ayant pu légitimement présumer qu’il s’agissait d’une adresse de domiciliation, en retenant également qu’à la même adresse était installé le cabinet comptable de la société MY LOVE AFFAIR LIMITED, lequel fournit également à ses clients des prestations de secrétariat » (ordonnance attaquée, p. 18 § 9 à 12)

« Sur l’absence d’impartialité aux yeux de tous de la décision du JLD et sur le doute légitime quant à l’examen impartial effectif des éléments présentés par la DNEF

Sur ce point, il est constant que les dispositions de l’article L. 16 B du LPF n’exigent pas la production de pièces imprimées au JLD.

Les sociétés appelantes ne sont pas autorisées à affirmer que le premier juge s’est affranchi de son obligation d’examiner le CD-ROM qui lui avait été transmis et ce d’autant plus qu’il s’agit d’un mode de plus en plus répandu, eu égard au développement des nouvelles technologies évoquées par les sociétés appelantes, de transmission de l’information. A titre illustratif, il y a lieu d’indiquer que les dossiers d’instruction sont également numérisés et qu’il n’y avait, en l’espèce, aucune obligation pour les services d’instruction d’en remettre un exemplaire papier au JLD, de même qu’il n’y avait aucune obligation pour ce dernier de tirer sur format papier le CD-ROM transmis.

L’apparence d’impartialité du premier juge aux yeux de tous ne peut être retenue » (ordonnance attaquée, p. 19 § 3 à 5).

ALORS QU’en vertu des articles 6 de la Convention européenne et L. 16 B du Livre des procédures fiscales, le juge qui autorise des visites et saisies à la requête de l’administration fiscale doit vérifier de manière concrète, par l’appréciation des éléments d’information que cette administration est tenue de lui fournir, que la demande d’autorisation qui lui est soumise est bien fondée ; qu’en refusant d’annuler l’ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention, sans vérifier, comme il y était invité, si le juge des libertés et de la détention avait bien examiné les pièces soumises au soutien de la requête – ce qui n’était pas le cas puisqu’il avait repris dans son ordonnance une erreur grossière de l’administration au sujet du nombre de sociétés dont le siège social se trouvait à la même adresse que la société My Love Affair, le premier président a méconnu l’étendue de ses pouvoirs et violé les textes susvisés.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’ordonnance confirmative attaquée d’avoir autorisé l’administration fiscale à procéder à des visites et saisies dans les locaux sis […] et susceptibles d’être occupés par les sociétés My Love Affair, BMGC Services France et Dayclic ;

AUX MOTIFS QUE « L’obligation pour la DNEF de porter à la connaissance du JLD tous les éléments d’information en possession de l’administration de nature à justifier la visite

a) Sur la présentation tronquée des éléments soumis au JLD

— Sur les tableaux récapitulatifs des prestations intracommunautaires déclarées par MY LOVE AFFAIR LIMITED (pièce DNEF 1-13)

Les sociétés appelantes font valoir que les tableaux récapitulatifs des prestations intracommunautaires, et notamment la pièce 1.13 de la DNEF, seraient erronés, voire tronqués et de nature à induire en erreur le premier juge, lors de sa prise de décision.

L’article L. 16 B du LPF dispose en son paragraphe II « (

) le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d’autorisation est fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d’information en possession de l’administration de nature à justifier la visite ».

Il y a lieu de relever que la pièce 1.13 contestée n’est qu’un document parmi les 39 autres transmis par l’administration fiscale et ne saurait, à elle seule, emporter la conviction du JLD dans sa prise de décision.

Par ailleurs, les chiffres produits par l’administration fiscale faisant apparaître des montants de prestations de services intracommunautaires à destination de clients français pour des sommes conséquentes (pourcentages de 89,45% en 2013, 99,97% en 2014 et de 97,79% du 01/01 au 31/08/2015), à supposer qu’ils soient erronés comme le soutiennent les sociétés appelantes ne pourraient l’être que de manière minime.

Ces pourcentages contestés sont cependant confortés par d’autres éléments relevés dans l’ordonnance, à savoir la réalisation d’un chiffre d’affaires conséquent sur le territoire national par les contrats conclus entre la société MY LOVE AFFAIR et les sociétés GIE Paris Mutuel Urbain (PMU), la SAS BARILLA France, la société SA G.H. Mumm et CIE (pour un montant de 2.054.018 € en 2014 et 2.307.252 € en 2015.

Ces éléments pris dans leur ensemble pouvaient permettre au JLD de retenir, à titre de présomption simple, le fait que la majeure partie du chiffre d’affaires de la société MY LOVE AFFAIR LIMITED était susceptible d’être réalisée à destination de clients français.

Ainsi, l’incidence de chiffres erronés non significatifs émanant d’une seule pièce produite par l’administration ne saurait entraîner l’annulation d’une ordonnance de visite et de saisie et, par voie de conséquence, celle du procès-verbal subséquent » (ordonnance attaquée, p. 16)

1°) ALORS QU’en vertu de l’article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, l’administration doit communiquer au juge des libertés et de la détention saisi de sa demande d’autorisation de procéder à des visites et saisies tous les éléments d’information en sa possession de nature à justifier la visite ; que, tout en constatant que l’administration fiscale n’avait pas communiqué au juge des tableaux de prestations de services effectuées hors de France, dont les sociétés My Love Affair et BMGC Services France faisaient valoir qu’ils auraient pu écarter les présomptions d’infractions en cause, le premier Président de la Cour d’appel a autorisé les visites et saisies contestées, au motif que d’autres éléments permettaient au juge des libertés et de la détention de présumer l’existence de ces infractions ; qu’en statuant ainsi par des motifs inopérants le premier Président a violé le texte susvisé ;

ET AUX MOTIFS QUE « Sur l’absence de vérification par le JLD de la proportionnalité d’une visite domiciliaire eu égard aux moyens d’investigations disponibles et au moins aussi efficaces

Il est rappelé que l’administration n’a pas à rendre compte de son choix de recourir à la procédure, dite lourde, de l’article L. 16 B du LPF, laquelle n’a pas un caractère subsidiaire par rapport aux autres procédures pouvant être utilisées.

En décidant de rendre une ordonnance de visite et saisie, le JLD a de ce fait, en examinant les documents qui lui étaient soumis, estimé que les autres moyens de recherche de preuve moins coercitifs, dont dispose l’administration, étaient insuffisants et a exercé de fait un contrôle de proportionnalité entre l’atteinte portée aux libertés et les objectifs poursuivis par l’administration, étant rappelé également que le JLD n’est pas le juge de l’impôt et ne doit pas porter d’appréciation sur les conventions fiscales bilatérales » (ordonnance attaquée, p. 19 § 7 à 9)

2°) ALORS QU’en vertu des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et L. 16 B du Livre des Procédures fiscales, le juge ne peut autoriser des visites et saisie que si des mesures d’enquête constituant une ingérence moins importante dans le droit au respect de la vie privée et du domicile ne permettraient pas d’obtenir la preuve des faits recherchés ; que le juge saisi d’un recours contre une telle autorisation doit vérifier le caractère indispensable des visites et saisies ; qu’en confirmant l’autorisation de procéder aux visites et saisies contestée, au motif que le juge des libertés et de la détention aurait estimé que les autres moyens de recherche de preuve moins coercitifs dont disposait l’administration étaient insuffisants, alors qu’il lui appartenait de vérifier lui-même que tel était le cas, le premier président a violé les textes susvisés, ensemble l’article 561 du Code de procédure civile ;

3°) ET ALORS QUE, en toute hypothèse, en vertu des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, L.16 B du Livre des procédures fiscales et 561 du Code de procédure civile, le premier président saisi d’un appel contre une ordonnance ayant autorisé des visites et saisies doit rechercher et caractériser lui-même les éléments faisant présumer l’existence d’une infraction fiscale ; qu’en se bornant à retenir que le juge des libertés et de la détention avait rempli son office en examinant les pièces soumises et pouvait se fonder sur la méthode du faisceau d’indices, alors qu’il lui appartenait de statuer lui-même sur l’existence des présomptions contestées, le premier président a méconnu l’étendue de ses pouvoirs et violé les textes susvisés.

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