Cour de cassation, Chambre criminelle, 15 janvier 2019, 17-87.431, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. crim., 15 janv. 2019, n° 17-87.431
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-87.431
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Colmar, 21 novembre 2017
Textes appliqués :
Articles 388-5 et 512 du code de procédure pénale.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000038060584
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:CR03435
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Sur les parties

Texte intégral

N° K 17-87.431 F-D

N° 3435

VD1

15 JANVIER 2019

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

— 

Mme Hanna X…,

contre l’arrêt de la cour d’appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 22 novembre 2017 qui, pour violences, l’a condamnée à 500 euros d’amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 4 décembre 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Y…, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Bray ;

Sur le rapport de M. le conseiller Y…, les observations de la société civile professionnelle GASCHIGNARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général Z… ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l’homme, préliminaire, 14, 388-5, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, défaut de motif, défaut de réponse à conclusions ;

« en ce que la cour d’appel a confirmé le jugement déclarant Mme X… divorcée A… coupable des faits reprochés, et confirmé également le jugement sur les intérêts civils ;

« aux motifs propres que, c’est par des motifs appropriés que les premiers juges ont rejeté les exceptions de nullité soulevées avant toute défense au fond par l’avocat de Mme A… ; qu’en effet, l’interpellation et le placement en garde-à-vue de cette dernière ont été justifiés par les traces de violences que présentaient Mme B… à l’arrivée des enquêteurs sur les lieux ainsi que par l’intervention de Mme C… pour séparer les deux femmes ; que ces éléments laissaient présumer la commission d’une infraction ; que de plus les mentions à inscrire sur le procès-verbal de garde à vue ne sauraient entraîner la nullité des actes de procédure s’il n’est pas rapporté la preuve que la recherche et l’établissement de la vérité s’en sont retrouvés fondamentalement viciés ; que bien que la mention du refus de signer le procès-verbal de son placement en garde à vue fasse défaut, de telles preuves ne sont pas rapportées et ne sauraient donc entraîner la nullité de l’ensemble des actes d’enquête réalisés comme il est soutenu par la défense ; qu’enfin, s’il est vrai que la COPJ vise des violences délictuelles alors que la qualification d’origine du parquet retenait des violences contraventionnelles, cet élément n’est pas de nature à rendre irrégulière la COPJ ; qu’en effet la COPJ n’a introduit aucun fait nouveau et le ministère public a abandonné à hauteur d’audience les circonstances aggravantes visées à tort ; que, sur le fond, si les versions diffèrent suivant les protagonistes, il n’en demeure pas moins que des actes de violences sont reconnus par Mme A… ; qu’ainsi, Mme A… admet tous les actes de violences reprochés à l’exception de l’étranglement ; que les actes de violences sont corroborés par un certificat médical et des photographies des traces présentes sur le corps de Mme A… ; que Mme A… disait avoir agi en état de légitime défense, imputant à Mme B… le premier coup porté ; que néanmoins, il ressort des éléments du dossier que les deux femmes se sont disputées et mutuellement portées des coups dans un climat de tension extrême sans que la cour ne puisse savoir si l’un ou l’autre s’est trouvé en position de légitime défense telle que définit par l’article 122-5 du code pénal ; que c’est à la partie qui se prévaut de cette cause d’exonération de responsabilité d’en rapporter la preuve ; que dès lors le jugement déféré sera confirmé sur la culpabilité ;

« aux motifs éventuellement adoptés que Maître D… soulève dans ses conclusions écrites l’irrégularité de l’interpellation et du placement en garde à vue de Mme A… qui se sont déroulés selon elle sur la base d’infractions inexistantes et en l’absence d’indices ; que la décision de place en garde à vue une personne peut être prise lorsqu’il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction ; qu’en l’espèce, les déclarations de Mme B…, les marques de violences constatées par les services de police sur sa personne ainsi que l’intervention de la voisine pour séparer les deux femmes sont autant d’indices permettant de présumer l’existence d’une infraction et de nature à justifier l’interpellation par les officiers de police judiciaire de Mme A… et son placement en garde à vue ; que le placement en garde à vue est donc régulier ; que l’avocat relève par ailleurs une irrégularité formelle de procédure résultant de l’absence de mention du refus par Mme A… de signer le procès-verbal de notification de son placement en garde à vue, entraînant de ce fait la nullité de l’ensemble des actes réalisés ; que l’inobservation des règles énoncées à l’article 64 du code de procédure pénale concernant les mentions à inscrire sur le procès-verbal de garde à vue ne saurait en elle-même entraîner la nullité des actes de procédure lorsqu’il n’est pas démontré que la recherche et l’établissement de la vérité s’en sont trouvés fondamentalement viciés ; qu’il n’est pas démontré en l’espèce que l’absence de mention du refus de signature par la mise en cause, pour les raisons reprises par procès-verbal séparé de l’OPJ, ait vicié de façon effective la recherche et l’établissement de la vérité, la nullité de la procédure ne pouvant donc prospérer sur ce fondement ; que la défense invoque enfin la nullité de la citation délivrée à l’encontre de Mme A… pour des faits délictuels de violence volontaires n’ayant pas entraîné une ITT supérieure à huit jours sur la personne de Mme B…, avec cette circonstance que les faits ont été commis sur une victime pour l’influencer ou par représailles, alors que les instructions données par le parquet à l’OPJ ne faisaient mention que de violences contraventionnelles ; que s’il n’est pas contestable que la convocation délivrée par l’officier de police judicaire reprend une qualification délictuelle alors qu’à l’origine c’était une qualification contraventionnelle qui était préconisée par le ministère public ceci n’est pas pour autant de nature à la rendre irrégulière ; qu’en effet la juridiction de jugement étant saisie des faits et des circonstances des faits, si la prévention de violences volontaires avec ITT inférieur à huit jours retenue initialement a subi à tort une modification par l’officier de police judiciaire, celle-ci n’en a pas pour autant altéré la substance dans la mesure où, d’une part, la citation n’a introduit aucun fait nouveau distinct de lui sur lequel repose la poursuite et, d’autre part, le ministère public, fidèle à sa qualification initiale, a abandonné à hauteur d’audience les circonstances aggravantes visées à tort ; que les éléments matériel et moral de l’infraction de violences volontaires sont bien caractérisées en l’espèce ; que la violence se matérialise par un comportement, un résultat, et un lien de causalité du premier au second ; que les violences volontaires renvoient à des actes positifs ayant entraîné un contact direct entre l’auteur et la victime ; qu’il n’est pas contesté que les deux prévenues aient eu une altercation violente, au point qu’une voisine ait dû les séparer ; que leurs déclarations, corroborées par les examens médicaux auxquels elles se sont soumis le jour des faits permettent de mettre en évidence les résultats de violences subies, correspondant pour les deux prévenues à une ITT de 24 heures ; que la certitude de la causalité passe par l’absence de tout doute sur le fait que la violence dénoncée est bien à l’origine de l’atteinte physique subie par la victime, lien qui ne fait aucun doute en l’espèce ; que même s’agissant des traces d’étranglement constatées sur la personne de Mme B…, celles-ci ne pouvant résulter du simple port du foulard comme le prétendait Mme A… mais bien d’un geste de strangulation occasionné au moment des faits ; que la circonstance aggravante de violence avec préméditation ou guet-apens soulevée lors des débats par l’avocat de Mme A… implique pour Mme B… d’avoir attendu un certain temps sa voisine dans un lieu déterminé et pour commettre à son encontre une ou plusieurs infractions ; qu’aucun élément de la procédure ne fait apparaître l’existence d’une telle préparation et d’une telle détermination de la part de Mme B…, celle-ci ayant au contraire fait l’objet d’un mouvement d’attaque de la part de sa voisine ; qu’ainsi, la circonstance aggravante de préméditation ou guet-apens ne peut être retenue à son encontre ; qu’il ne ressort pas davantage des pièces de la procédure que la circonstance de violence sur une victime pour l’influencer ou par représailles retenue à l’encontre de Mme A… puisse être suffisamment caractérisée en l’espèce ; qu’en l’état de ces circonstances, il ne fait aucun doute que l’infraction de violences volontaires suivie d’incapacité n’excédant pas huit jours est constituée dans tous ses éléments, tant à l’égard de Mme A… que de Mme B… ; qu’aucune circonstance aggravante ne pouvant cependant être retenue à leur encontre ; que sur l’intention, l’infraction se trouve constituée dès lors qu’il existe un acte volontaire de violence ou une voie de fait, dirigée contre une ou plusieurs personnes, quel que soit le mobile qui l’a inspiré, et alors même que son sauteur n’a pas voulu causer le dommage qui en est résulté, caractère qui se déduit nécessairement, en présence de violences contraventionnelles, des circonstances dans lesquelles la scène s’est produite ; que les photos de Mme B… remises aux services de police par son amie et exposant ses blessures, corroborées par ses déclarations et les examens médicaux dont elle a fait l’objet permettent d’établir la gravité des violences commises par Mme A…, celle-ci apparaissant très clairement comme étant à l’origine de l’altercation ; que les dermabrasions constatées sur sa propre personne lors de l’examen médical semblent avoir été occasionnées par Mme B… alors qu’elle tentait de se défendre ; que l’ensemble de ces éléments et le comportement des deux prévenues rendent indispensable le prononcé d’une peine d’amende de 500 euros à l’encontre des deux prévenues, assortie du sursis en ce qui concerne Mme E… Jamila divorcée B… dans la mesure où celle-ci n’est pas à l’origine des violences ;

« 1°) alors que le défaut d’impartialité des enquêteurs peut constituer une cause de nullité de la procédure s’il a eu pour effet de porter atteinte au caractère équitable et contradictoire de la procédure ou de compromettre l’équilibre des droits des parties ; que Mme A… soutenait dans ses conclusions régulièrement déposées que l’enquête avait été menée en violation de son droit à un procès équitable du fait de la partialité des agents du bureau de police de Schiltigheim ; qu’elle faisait notamment valoir que Mme B… était intimement liée avec un agent de ce bureau, que les services de police avaient refusé d’enquêter sur de précédentes plaintes qu’elle avait déposées, que lorsqu’ils étaient intervenus le 1er juillet, ne pouvant rien constater d’autres que des traces de coups réciproques, ils avaient d’emblée décidé de la placer en garde à vue cependant que Mme B… était invitée à faire constater ses lésions à l’hôpital, qu’ils avaient orienté l’enquête de telle sorte qu’aucune charge ne soit retenue contre Mme B… et fabriqué artificiellement une circonstance aggravante de violence par représailles, qu’ils l’avaient convoquée devant le tribunal correctionnel sur cette qualification, bien que celle-ci ait été écartée par le ministère public qui avait donné instruction de poursuivre devant le tribunal de police, qu’avant toute condamnation, ils avaient transmis au conseil départemental le procès-verbal d’interpellation et un procès-verbal d’audition, en vue de provoquer le retrait de son agrément ; qu’en statuant par les motifs ci-dessus, qui ne répondent nullement au moyen pris de la nullité de la procédure à raison de la partialité des enquêteurs, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision ;

« 2°) alors que, lorsque les poursuites ont été engagées par citation ou par convocation par procès-verbal, il appartient à la juridiction de jugement saisie d’une demande d’acte d’y répondre par une décision spécialement motivée ; qu’en s’abstenant de répondre aux conclusions par lesquelles Mme A… sollicitait que soient ordonnées des mesures d’expertise sur les échanges téléphoniques du 1er juillet 2015 et quant à la compatibilité des traces présentes sur le cou de Mme B… avec l’étranglement allégué par celle-ci, la cour a violé les textes susvisés" ;

Vu les articles 388-5 et 512 du code de procédure pénale ;

Attendu que selon ces textes, si dans le cadre d’une saisine initiale par citation ou par convocation par procès-verbal, la juridiction refuse d’ordonner un supplément d’information régulièrement sollicité au cours des débats par des conclusions écrites, elle doit spécialement motiver sa décision ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du jugement qu’il confirme et des pièces de procédure que Mme X… a été poursuivie devant le tribunal correctionnel, du chef de violences ; que les juges du premier degré l’ont déclaré coupable ; que le prévenu et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision ;

Attendu que, pour confirmer le jugement, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions écrites, régulièrement déposées devant elle, qui sollicitaient des investigations complémentaires, la cour d’appel, qui ne s’est pas expliquée sur son refus d’y faire droit, a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et du principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs, et sans qu’il soit besoin de statuer sur le second moyen de cassation proposé :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Colmar, en date du 22 novembre 2017, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Metz, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Colmar et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze janvier deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

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Textes cités dans la décision

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