Cour de cassation, Chambre civile 3, 20 juin 2019, 18-13.242, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. 3e civ., 20 juin 2019, n° 18-13.242
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 18-13.242
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Fort-de-France, 4 décembre 2017
Textes appliqués :
Article 555 du code civil.
Dispositif : Cassation partielle
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000038734033
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:C300569
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Texte intégral

CIV.3

MY1

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 20 juin 2019

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 569 F-D

Pourvoi n° R 18-13.242

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Marleit, société civile immobilière, dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 5 décembre 2017 par la cour d’appel de Fort-de-France (chambre civile), dans le litige l’opposant :

1°/ à Mme J… R…, domiciliée […] ,

2°/ à Mme Y… T…, domiciliée […] ,

3°/ à Mme C… D…, épouse B…, domiciliée […] ,

4°/ à M. A… L…, domicilié […] ,

5°/ à la société M…-U… & associés, société civile professionnelle, dont le siège est […] , prise en la personne de Mme Q… U…, en qualité de liquidateur judiciaire de M. A… L…,

défendeurs à la cassation ;

Mmes R… et D… ont formé, chacune, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt;

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ;

Les demanderesses au pourvoi incident invoquent chacune, à l’appui de leur recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 21 mai 2019, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Marleit, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme T…, de la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat de Mme D…, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société M…-U… & associés, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme R…, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Met hors de cause Mme T… et M. L… ;

Sur le moyen relevé d’office, après avis donné aux parties en application de l’article 1015 du code de procédure civile :

Vu l’article 555 du code civil ;

Attendu que ce texte ne trouve pas application lorsqu’un propriétaire réalise une construction qui empiète sur la parcelle voisine ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Fort-de-France, 5 décembre 2017), que, par acte authentique dressé par Mme T…, notaire, du 10 juin 2005, la SCI Marleit (la société) a acquis de Mme D… une parcelle cadastrée […] issue, comme le terrain voisin appartenant à Mme R… ([…]), de la division, en 1994, d’un fonds en trois lots ; que la société a assigné Mme R… en démolition, pour cause d’empiétement, de la maison construite par celle-ci en 1994 et le notaire en garantie ; que Mme R… a mis en cause Mme D…, ainsi que M. L…, géomètre-expert ayant établi le plan des lieux à l’occasion de la division du fonds ;

Attendu que, pour rejeter la demande en démolition de la construction empiétant sur le tracé issu d’un précédent bornage, l’arrêt retient que Mme D… a consenti à la modification de la limite séparative entre son fonds et celui de Mme R…, acceptant ainsi la nouvelle configuration des lieux voulue par sa voisine, et que cet accord, en vertu duquel la construction litigieuse a été édifiée dans le respect du bornage modificatif, constitue une convention dérogeant aux dispositions supplétives de l’article 555 du code civil ;

Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a, par fausse application, violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les pourvois incidents de Mmes R… et D… :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il rejette la demande en démolition et condamne in solidum Mmes R… et D… à payer à SCI Marleit une somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts, l’arrêt rendu le 5 décembre 2017, entre les parties, par la cour d’appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Basse-Terre ;

Condamne Mme R… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne Mme R… à payer 3 000 euros à la SCI Marleit et rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Marleit.

L’arrêt attaqué encourt la censure

EN CE QU’il a, confirmant le jugement, débouté la SCI Marleit de sa demande de démolition de la maison construite par Mme R… sur la parcelle […] ;

AUX MOTIFS QUE « dans le cadre de l’effet relatif des contrats et de la responsabilité du vendeur qui est tenu à une obligation de résultat concernant la délivrance d’une chose conforme à celle qui est décrite dans l’acte, la bonne foi qui est celle de Mme D… dans ses relations avec Mme R… et l’ignorance des fautes commises par cette dernière dans la mise en oeuvre de leur accord, est inopposable à la SCI Marleit acquéreur du terrain ;

que les premiers juges en ont parfaitement tenu compte d’une part en retenant la responsabilité contractuelle de Mme D… pour le déficit de surface de la parcelle vendue par rapport aux mentions de l’acte authentique, tout en faisant droit d’autre part à sa demande de garantie totale de cette condamnation par Mme R… responsable du préjudice subi par ricochet par la SCI ; que les arguments de Mme D… sont donc inopérants, puisque ses demandes tendent en réalité à la confirmation de la solution issue du jugement, qu’elle critique ; que la cour approuve l’analyse de la situation juridique créée par l’accord entre Mmes D… et R… pour la modification de l’emplacement des bornes responsables de l’implantation de la construction de Mme R… sur la parcelle voisine au regard de l’ancien tracé, et l’impossibilité qui en résulte de faire droit à la demande de démolition sur le fondement de l’article 555 du code civil, aux termes d’une motivation que la cour adopte » (arrêt, p. 5 à p. 6 alinéa 2) ;

AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE « concernant la contenance de la parcelle […] , il convient de se référer à la division initiale reçue par acte authentique du 20 novembre 1991, publiée au bureau des hypothèques de fort de France le 18 décembre 1996 volume 1996P, numéro 5217 ; que cet acte, rappelé dans le titre de propriété de la SCI Marleit du 10 juin 1995, fixait la surface de la parcelle à 74 a 43 ca (7 443 m²) ; qu’aucune modification conventionnelle postérieure au partage de 1991 n’est établie, l’expert indiquant que « seule Mme R…, demanderesse, avait connaissance de ce bornage modificatif » ; que toutefois, il ressort des propres écritures de C… D… que celle-ci avait expressément consenti à la modification de la limite séparative entre son fonds ([…]) et celui que J… R… ([…]) ; qu’elle indique ainsi qu’elle « avait donné son accord dès lors que la nouvelle configuration des lieux devait respecter les superficies initiales » ; que quoique non-écrit, cet accord constitue une convention au sens de l’article 1134 du code civil ; que certes, l’exécution de cette convention a manifestement posé difficulté dès lors qu’il est constant que les superficies respectives des fonds concernés ont en fait été modifiées ; que toutefois, cette circonstance importe peu concernant l’application des dispositions de l’article 555 du code civil, dont il est de principe constant qu’elles régissent exclusivement les cas où le constructeur n’est pas avec le propriétaire du sol dans les liens d’un contrat se référant aux ouvrages élevés ; que l’article 555 est ainsi inapplicable lorsque les travaux ont été effectués en vertu d’une convention ou de tout autre acte faisant la loi des parties, ce qui est le cas en l’espèce ; qu’il suit que la SCI Marleit, propriétaire actuel de la parcelle […] venant aux droits de C… D…, propriétaire initial, est mal fondée en sa demande de démolition, dont elle sera donc déboutée » (jugement, p. 6) ;

ALORS QUE, premièrement, seul un contrat se référant aux ouvrages élevés permet d’écarter les dispositions de l’article 555 du code civil ; qu’en décidant qu’il n’y avait pas lieu à appliquer l’article 555 du code civil, à raison d’un accord intervenu entre l’auteur de la société Marleit et Mme R… relatif « à la nouvelle configuration des lieux » (arrêt, p. 6 alinéa 6), les juges du fond ont violé l’article 555 du code civil ;

ALORS QUE, à tout le moins, les actes relatifs aux droits réels immobiliers doivent être publiés au service de publicité foncière pour être opposables ; qu’en faisant produire effet à l’accord de Mme D… donné à la nouvelle configuration des lieux et partant, à l’empiètement, alors qu’il s’agissait d’une simple convention verbale non-publiée, les juges du fond ont violé l’article 28 du décret n°55-22 du 4 janvier 1955 ;

ALORS QUE, troisièmement, la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu’en énonçant tout à la fois que « aucune modification conventionnelle postérieure au partage de 1991 n’est établie » (jugement, p. 6 alinéa 5) et que Mme R… avait donné son accord à une nouvelle configuration des lieux constituant une convention au sens de l’article 1134 ancien du code civil (jugement, p. 6 alinéa 6-7), les juges du fond se sont contredits, violant ainsi l’article 455 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme R….

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir condamné Mme R…, in solidum avec Mme D…, à verser à la SCI Marleit la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts, et l’avoir condamnée à garantir Mme D… de sa propre condamnation,

AUX MOTIFS PROPRES QUE, dans le cadre de l’effet relatif des contrats et de la responsabilité du vendeur qui est tenu à une obligation de résultat concernant la délivrance d’une chose conforme à celle qui est décrite dans l’acte, la bonne foi qui est celle de Mme D… dans ses relations avec Mme R… et l’ignorance des fautes commises par cette dernière dans la mise en oeuvre de leur accord, est inopposable à la SCI Marleit, acquéreur du terrain ; que les juges en ont parfaitement tenu compte, d’une part, en retenant la responsabilité contractuelle de Mme D… pour le déficit de surface de la parcelle vendue par rapport aux mentions de l’acte authentique tout en faisant, d’autre part, droit à sa demande de garantie totale de cette condamnation par Mme R…, responsable du préjudice subi par ricochet par la SCI ; que la cour approuve l’analyse de la situation juridique créée par l’accord entre Mmes D… et R… pour la modification de l’emplacement des bornes, responsable de l’implantation de la construction de Mme R… sur la parcelle voisine au regard de l’ancien tracé et l’impossibilité qu’il en résulte de faire droit à la demande de démolition sur le fondement de l’article 555 du code civil, aux termes d’une motivation que la cour adopte ; qu’il doit être relevé que la SCI Marleit n’a pas critiqué la liquidation à la somme de 25 000 euros par le tribunal de son préjudice tiré du manquement à l’obligation de délivrance, au sens de l’article 1604 du code civil, dont elle demande confirmation, qui répare donc la perte pour elle de l’équivalent de 38 % de surface dont elle est privée de la jouissance par rapport à ce qu’elle a cru acquérir ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, concernant la contenance de la parcelle […], il convient de se référer à la division initiale reçue par acte authentique du 20 novembre 1991 publié le 18 décembre 1996 ; que cet acte, rappelé dans le titre de propriété de la SCI Marleit du 10 juin 2005, fixe la surface de la parcelle à 74 a 43 ca ; qu’aucune modification conventionnelle postérieure au partage de 1991 n’est établie, l’expert indiquant que « seule Mme R…, demanderesse, avait connaissance de ce partage modificatif » ; que toutefois, il ressort des propres écritures de Mme D… que celle-ci avait expressément consenti la modification des limites séparatives entre son fonds et celui de Mme R… ; qu’elle indique ainsi qu’elle avait « donné son accord dès lors que la nouvelle configuration des lieux devait respecter les surfaces initiales » ; que quoique non écrit, cet accord constitue une convention au sens de l’article 1134 du code civil ; que, certes, l’exécution de cette convention a manifestement posé difficulté dès lors qu’il est constant que les surfaces respectives des fonds concernés ont été en fait modifiées ; que toutefois, cette circonstance importe peu concernant l’application des dispositions de l’article 555 du Code civil, dont il est de principe constant qu’elles régissent exclusivement des cas où le constructeur n’est pas avec le propriétaire du sol dans les liens d’un contrat se référant aux ouvrages élevés ; que l’article 555 est ainsi inapplicable lorsque les travaux ont été effectués en vertu d’une convention ou de tout autre acte faisant la loi des parties, ce qui est le cas en l’espèce ; que le préjudice de la SCI Marleit est constitué par l’empiétement de la maison de Mme R… sur la parcelle de la demanderesse, d’une emprise de 117 m² ; que, dès lors par ailleurs, que cet empiétement était réalisé sur la seule partie constructible de la parcelle en cause, il obère, de fait, des possibilités de construction sur son fonds par la SCI Marleit ; qu’au regard de ses éléments, la réparation due à la SCI Marleit sera évaluée conformément à sa demande, soit la somme de 25.000 euros (

) que la SCI Marleit ne précise pas le fondement juridique de sa demande à l’égard de Yolande R… ; il est de principe constant que nonobstant l’effet relatif des contrats résultant des dispositions de l’article 1165 du code civil, le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel, dès lors que ce manquement lui a causé un dommage. Il ressort des débats et pièces versées au dossier que le préjudice de surface de la SCI Marleit a pour origine la modification de la limite séparative entre les parcelles […] et […] , intervenue en 1994. Il n’est pas contesté que la convention verbale intervenue entre J… R… et C… D… prévoyait que le déplacement de la limite séparative devrait être réalisé sans modification des surfaces respectives des parcelles concernées. En réalité, la parcelle […] appartenant à C… D… s’est trouvée amputée de 2865 m², soit 38% de sa surface ; surtout, la maison de J… R… a été érigée sur le fonds voisin, pour une emprise de 117 m². Cette faute contractuelle est imputable à J… R…, partie à l’origine de la convention, chargée de son exécution et par ailleurs bénéficiaire de la modification réalisée. Il suit qu’elle sera, d’une part, tenue in solidum avec C… D… à indemnisation envers la SCI Marleit du préjudice résultant du déficit de surface, et d’autre part qu’elle devra relever et garantir C… D… de toute condamnation prononcée contre elle.

1) ALORS QUE l’expert judiciaire a constaté que la maison de Mme R… avait été implantée dans les limites du bornage modificatif (E-G-H-l), et qu’elle n’empiète pas par rapport à cette limite nouvelle et il n’a retenu un empiétement de la construction, de 117 m², que par rapport au premier bornage (A-B) (expertise p. 12) ; que s’il a relevé une modification des surfaces résultant du bornage modificatif, de 2 865 m², ce chiffre correspond seulement au cumul de la surface de la parcelle de Mme D…, devenue celle de la SCI Marleit, située en zone orange (aléas de mouvements de terrain et zone boisée et classé) – 2 178 m² – et la surface située en zone jaune (aléas moyens) – 687 m² -, ce dont l’expert a déduit que la SCI Marleit ne pouvait envisager aucune construction sur le sol de ce terrain (p. 11 et 12) ; qu’ainsi, l’expert judiciaire n’a pas constaté que la superficie globale du terrain de Mme D… de 7 443 m², avait été réduite du fait du bornage modificatif ; qu’en affirmant néanmoins qu’il existait un déficit de surface de la parcelle vendue par rapport aux mentions de l’acte authentique, et que Mme D… n’avait délivré qu’un terrain d’une superficie de 4.578 m² au lieu de 7.443 m² tel que stipulé à l’acte de vente, la cour d’appel a dénaturé les termes du rapport d’expertise en violation de son obligation de ne pas dénaturer les documents qui lui sont soumis ;

2) ALORS QUE ne constitue pas une faute de quelque nature que ce soit le fait de modifier par contrat la ligne divisoire de son fonds avec celui de son voisin, en accord avec ce dernier ; qu’il résulte des constatations des juges du fond, que les nouvelles bornes ont été implantées en accord avec les deux parties, propriétaires des deux fonds limitrophes ; qu’en imputant une faute à Mme R…, la cour d’appel a violé les articles 1134 et 1382 ancien du Code civil, dans leur rédaction applicable à l’espèce et 544 du même Code ;

3) ALORS QU’il n’y a aucun lien de causalité entre le déplacement conventionnel de la limite divisoire de deux fonds, et le prétendu préjudice subi par l’acquéreur de l’un des fonds après ce déplacement, qui n’a pu acquérir plus de droits que n’en avait son vendeur après la modification ; que la cour d’appel a encore violé les textes précités ;

4) ALORS QUE la SCI Marleit n’ayant pu acquérir plus de droit que n’en avait son auteur, Mme D…, c’est-à-dire un terrain enfermé dans les limites définies par celle-ci après la modification, il ne pouvait être imputé à Mme R… aucun « empiètement » sur ses limites qu’elle a respectées, et que la SCI Marleit n’a subi aucun préjudice dit de « surface » ; que la cour d’appel a encore violé les textes précités. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocats aux Conseils, pour Mme D….

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir condamné Mme D…, in solidum avec Mme R…, à verser à la SCI Marleit la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour méconnaissance de son obligation de délivrance ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, dans le cadre de l’effet relatif des contrats et de la responsabilité du vendeur qui est tenu à une obligation de résultat concernant la délivrance d’une chose conforme à celle qui est décrite dans l’acte, la bonne foi qui est celle de Mme D… dans ses relations avec Mme R… et l’ignorance des fautes commises par cette dernière dans la mise en oeuvre de leur accord, est inopposable à la SCI Marleit, acquéreur du terrain ; que les juges en ont parfaitement tenu compte, d’une part, en retenant la responsabilité contractuelle de Mme D… pour le déficit de surface de la parcelle vendue par rapport aux mentions de l’acte authentique tout en faisant, d’autre part, droit à sa demande de garantie totale de cette condamnation par Mme R…, responsable du préjudice subi par ricochet par la SCI ; que la cour approuve l’analyse de la situation juridique créée par l’accord entre Mmes D… et R… pour la modification de l’emplacement des bornes, responsable de l’implantation de la construction de Mme R… sur la parcelle voisine au regard de l’ancien tracé et l’impossibilité qu’il en résulte de faire droit à la demande de démolition sur le fondement de l’article 555 du code civil, aux termes d’une motivation que la cour adopte ; qu’il doit être relevé que la SCI Marleit n’a pas critiqué la liquidation à la somme de 25 000 euros par le tribunal de son préjudice tiré du manquement à l’obligation de délivrance, au sens de l’article 1604 du code civil, dont elle demande confirmation, qui répare donc la perte pour elle de l’équivalent de 38 % de surface dont elle est privée de la jouissance par rapport à ce qu’elle a cru acquérir ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, concernant la contenance de la parcelle […], il convient de se référer à la division initiale reçue par acte authentique du 20 novembre 1991 publié le 18 décembre 1996 ; que cet acte, rappelé dans le titre de propriété de la SCI Marleit du 10 juin 2005, fixé la surface de la parcelle à 74 a 43 ca ; qu’aucune modification conventionnelle postérieure au partage de 1991 n’est établie, l’expert indiquant que « seule Mme R…, demanderesse, avait connaissance de ce partage modificatif » ; que toutefois, il ressort des propres écritures de Mme D… que celle-ci avait expressément consenti la modification des limites séparatives entre son fonds et celui de Mme R… ; qu’elle indique ainsi qu’elle avait « donné son accord dès lors que la nouvelle configuration des lieux devait respecter les surfaces initiales » ; que quoique non écrit, cet accord constitue une convention au sens de l’article 1134 du code civil ; que, certes, l’exécution de cette convention a manifestement posé difficulté dès lors qu’il est constant que les surfaces respectives des fonds concernés ont été en fait modifiées ; que toutefois, cette circonstance importe peu concernant l’application des dispositions de l’article 555 du code civil, dont il est de principe constant qu’elles régissent exclusivement des cas où le constructeur n’est pas avec le propriétaire du sol dans les liens d’un contrat se référant aux ouvrages élevés ; que l’article 555 est ainsi inapplicable lorsque les travaux ont été effectués en vertu d’une convention ou de tout autre acte faisant la loi des parties, ce qui est le cas en l’espèce ; que le préjudice de la SCI Marleit est constitué par l’empiétement de la maison de Mme R… sur la parcelle de la demanderesse, d’une emprise de 117 m² ; que, dès lors par ailleurs, que cet empiétement était réalisé sur la seule partie constructible de la parcelle en cause, il obère, de fait, des possibilités de construction sur son fonds par la SCI Marleit ; qu’au regard de ses éléments, la réparation due à la SCI Marleit serait évaluée conformément à sa demande, soit la somme de 25 000 euros ; que la SCI Marleit ne précise pas le fondement juridique de sa demande à l’égard de Mme D… ; que, toutefois, ce fondement ne peut être que de nature contractuelle, à raison des mentions erronées portées dans l’acte de vente du 10 juin 2005 quant à la surface du bien vendu ; qu’il n’est pas contestable que Mme D…, qui n’a livré qu’un terrain d’une contenance de 4 178 m² au lieu d’un terrain de 7 443 m² tel que stipulé à l’acte de vente, a manqué à son obligation de délivrance selon l’article 1604 du code civil ;

1) ALORS QUE l’expert judiciaire a constaté que la maison de Mme R… avait été implantée dans les limites du bornage modificatif (E-G-H-I) et il n’a retenu un empiétement de la construction, de 117 m², que par rapport au premier bornage (A-B) ; que s’il a relevé une modification des surfaces résultant du bornage modificatif, de 2 865 m², ce chiffre correspond seulement au cumul de la surface de la parcelle de Mme D…, devenue celle de la SCI Marleit, située en zone orange (aléas de mouvements de terrain et zone boisée et classé) – 2 178 m² – et la surface située en zone jaune (aléas moyens) – 687 m² -, ce dont l’expert a déduit que la SCI Marleit ne pouvait envisager aucune construction sur le sol de ce terrain (p. 11 et 12) ; qu’ainsi, l’expert judiciaire n’a pas constaté que la superficie globale du terrain de Mme D… de 7 443 m², avait été réduite du fait du bornage modificatif ; que, d’ailleurs, la cour d’appel a admis que constituait une convention opposable à la SCI Marleit l’accord passé entre Mme D… et Mme R…, Mme D… ayant donné son accord dès lors que la nouvelle configuration des lieux devait respecter les superficies initiales (jugement confirmé, p. 6) ; qu’en affirmant néanmoins qu’il existait un déficit de surface de la parcelle vendue par rapport aux mentions de l’acte authentique et que Mme D… n’avait délivré qu’un terrain d’une superficie de 4 578 m² au lieu de 7 443 m² tel que stipulé à l’acte de vente, ce qui caractérisait une méconnaissance de son obligation de délivrance, la cour d’appel a dénaturé les termes du rapport d’expertise en violation de son obligation de ne pas dénaturer les documents qui lui sont soumis ;

2) ALORS QUE le bornage n’entraîne pas transfert de propriété ; qu’il n’y a pas méconnaissance de l’obligation de délivrance lorsque l’immeuble vendu a été délivré avec un bornage modifié par rapport à un précédent bornage mais que la superficie du terrain est demeurée inchangée, sauf à ce que les parties à la vente aient spécifiquement fait référence au bornage antérieur dans la description du bien, faisant des limites de la propriété une condition de leur consentement ; que la cour d’appel a admis l’opposabilité à la SCI Marleit de la convention par laquelle Mme D… acceptait la modification du bornage initial à condition que la surface de sa parcelle n’en soit pas modifiée et que, à supposer que l’accord intervenu entre Mme D… et Mme R… n’ait pas été respecté et que la surface de la parcelle de Mme D… ait été diminuée à la faveur du bornage modificatif, cela n’a pas pu entraîner un transfert de propriété à Mme R… de la partie de la parcelle constituant l’assiette de l’empiétement ; que la cour d’appel a, d’ailleurs, débouté cette dernière de sa demande tendant à se voir reconnaître propriétaire par prescription acquisitive ; qu’ainsi, en retenant un manquement de Mme D… à son obligation de délivrance sans constater que l’acte de vente du 10 juin 2005 se référait exclusivement au bornage antérieur à celui dont étaient convenues Mme D… et Mme R…, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 646, 1604 et 1605 du code civil ;

3) ALORS QU’en tout état de cause, si le pourvoi de la SCI Marleit est accueilli et que l’arrêt attaqué est cassé en ce qu’il a rejeté la demande de démolition de la maison de Mme R…, cette cassation entraînera, par voie de conséquence, en application de l’article 625 du code de procédure civile, l’annulation de la condamnation de Mme D… à verser à la SCI Marleit une somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts.

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