CJCE, n° C-292/97, Arrêt de la Cour, Demande de décision préjudicielle: Regeringsrätten - Suède, 13 avril 2000

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Chronologie de l’affaire

Commentaires6

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Mots clés Agriculture – Organisation commune des marchés – Lait et produits laitiers – Prélèvement supplémentaire sur le lait – Attribution des quantités de référence exemptes du prélèvement – Attribution initiale dans un État membre ayant adhéré aux Communautés en 1995 – Détermination sur la base de la moyenne des livraisons effectuées pendant les années 1991 à 1993 – Application de coefficients de réduction aux nouveaux producteurs et à ceux ayant augmenté leur production – Exigence d'une période de production ininterrompue – Admissibilité au regard du règlement n_ 3950/92 et du …

 
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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 13 avr. 2000, Karlsson e.a., C-292/97
Numéro(s) : C-292/97
Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 13 avril 2000. # Kjell Karlsson e.a.. # Demande de décision préjudicielle: Regeringsrätten - Suède. # Prélèvement supplémentaire sur le lait - Régime des quotas laitiers en Suède - Attribution initiale des quotas laitiers - Régime national - Interprétation du règlement (CEE) nº 3950/92 - Principe d'égalité de traitement. # Affaire C-292/97.
Date de dépôt : 8 août 1997
Précédents jurisprudentiels : 24 mars 1994, Bostock, C-2/92
arrêt du 15 avril 1997, Irish Farmers Association e.a., C-22/94
arrêt du 23 novembre 1995, Dominikanerinnen-Kloster Altenhohenau, C-285/93
CIA Security International, C-194/94
Solution : Renvoi préjudiciel
Identifiant CELEX : 61997CJ0292
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2000:202
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Sur les parties

Texte intégral

Avis juridique important

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61997J0292

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 13 avril 2000. – Kjell Karlsson e.a.. – Demande de décision préjudicielle: Regeringsrätten – Suède. – Prélèvement supplémentaire sur le lait – Régime des quotas laitiers en Suède – Attribution initiale des quotas laitiers – Régime national – Interprétation du règlement (CEE) nº 3950/92 – Principe d’égalité de traitement. – Affaire C-292/97.


Recueil de jurisprudence 2000 page I-02737


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


Agriculture – Organisation commune des marchés – Lait et produits laitiers – Prélèvement supplémentaire sur le lait – Attribution des quantités de référence exemptes du prélèvement – Attribution initiale dans un État membre ayant adhéré aux Communautés en 1995 – Détermination sur la base de la moyenne des livraisons effectuées pendant les années 1991 à 1993 – Application de coefficients de réduction aux nouveaux producteurs et à ceux ayant augmenté leur production – Exigence d’une période de production ininterrompue – Admissibilité au regard du règlement n_ 3950/92 et du principe de non-discrimination

(Traité CE, art. 40, § 3, al. 2 (devenu, après modification, art. 34, § 2, al. 2, CE); Acte d’adhésion de 1994; règlement du Conseil n_ 3950/92)

Sommaire


$$Le règlement n_ 3950/92, établissant un prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers, tel que modifié par l’acte relatif aux conditions d’adhésion de la république d’Autriche, de la république de Finlande et du royaume de Suède, ainsi que le principe d’égalité de traitement, consacré plus spécifiquement à l’article 40, paragraphe 3, deuxième alinéa, du traité (devenu, après modification, article 34, paragraphe 2, deuxième alinéa, CE), doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale relative à l’attribution initiale des quantités de référence individuelles («quotas laitiers»), adoptée par un État membre ayant adhéré aux Communautés européennes le 1er janvier 1995, qui:

— détermine les quantités de référence individuelles des producteurs n’ayant pas modifié leur production entre le 1er janvier 1991 et le 31 décembre 1994 sur la base de la moyenne des livraisons effectuées au cours des années 1991 à 1993;

— à la différence des producteurs n’ayant pas modifié leur production entre le 1er janvier 1991 et le 31 décembre 1994 et des producteurs de lait écologiques, applique, pour le calcul des quantités de référence individuelles attribuées aux nouveaux producteurs ayant commencé leur production entre le 1er janvier 1991 et le 31 décembre 1994 et aux producteurs en croissance ayant augmenté pendant la même période une production déjà existante, des coefficients de réduction, de surcroît différents;

— n’octroie une quantité de référence individuelle qu’aux seuls producteurs justifiant d’une production ininterrompue entre le 1er mars 1994 et le 1er janvier 1995, à moins que le producteur ayant involontairement interrompu ses livraisons au cours de cette période puisse se prévaloir de motifs particuliers justifiant l’octroi d’une quantité de référence.

(voir points 41, 61 et disp.)

Parties


Dans l’affaire C-292/97,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l’article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par le Regeringsrätten (Suède) et tendant à obtenir, dans les procédures engagées devant cette juridiction par

Kjell Karlsson e.a.,

une décision à titre préjudiciel sur l’interprétation du règlement (CEE) n_ 3950/92 du Conseil, du 28 décembre 1992, établissant un prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 405, p. 1), des articles 5 du traité CE (devenu article 10 CE) et 40, paragraphe 3, du traité CE (devenu, après modification, article 34, paragraphe 2, CE), ainsi que du principe d’égalité de traitement,

LA COUR

(sixième chambre),

composée de MM. P. J. G. Kapteyn, faisant fonction de président de la sixième chambre, G. Hirsch (rapporteur) et H. Ragnemalm, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur,

considérant les observations écrites présentées:

— pour MM. Karlsson et Gustafsson, par MM. J. Borgström et C. M. von Quitzow, en qualité d’avocats à Jönköping,

— pour le gouvernement suédois, par Mme L. Nordling, rättschef au ministère des Affaires étrangères, en qualité d’agent,

— pour la Commission des Communautés européennes, par Mme A. M. Alves Vieira et M. K. Simonsson, membres du service juridique, en qualité d’agents,

vu le rapport d’audience,

ayant entendu les observations orales de MM. Karlsson, Gustafsson et Torarp, représentés par MM. J. Borgström et C. M. von Quitzow ainsi que par M. P. Bentley, QC, du gouvernement suédois, représenté par Mme L. Nordling, et de la Commission, représentée par Mme A. M. Alves Vieira et M. K. Simonsson, à l’audience du 10 décembre 1998,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 janvier 1999,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


1 Par décision du 27 mai 1997, parvenue à la Cour le 8 août suivant, le Regeringsrätten (Cour administrative suprême) a posé, en application de l’article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), une question relative à l’interprétation du règlement (CEE) n_ 3950/92 du Conseil, du 28 décembre 1992, établissant un prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 405, p. 1), des articles 5 du traité CE (devenu article 10 CE) et 40, paragraphe 3, du traité CE (devenu, après modification, article 34, paragraphe 2, CE), ainsi que du principe d’égalité de traitement.

2 Cette question a été soulevée dans le cadre de trois procédures engagées respectivement par MM. Karlsson et Gustafsson, producteurs de lait, et Torarp, ancien producteur de lait, à l’encontre de décisions par lesquelles la Jordbruksverket (administration suédoise de l’agriculture) a, pour les premiers, soit attribué des quotas laitiers réduits, soit réduit des quotas laitiers déjà attribués et, pour le dernier, refusé de lui attribuer un quota laitier.

Cadre juridique

La réglementation communautaire

3 Afin de maîtriser les excédents structurels sur le marché du lait, les règlements du Conseil, du 31 mars 1984, (CEE) n_ 856/84, modifiant le règlement (CEE) n_ 804/68 portant organisation commune des marchés dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 90, p. 10), et (CEE) n_ 857/84, portant règles générales pour l’application du prélèvement visé à l’article 5 quater du règlement (CEE) n_ 804/68 (JO L 90, p. 13) ont institué un régime de prélèvements supplémentaires à la charge de tout producteur ou de tout acheteur de lait sur les quantités de lait dépassant une quantité annuelle de référence.

4 Selon l’article 5 quater du règlement (CEE) n_ 804/68 du Conseil, du 27 juin 1968, portant organisation commune des marchés dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 148, p. 13), tel qu’inséré par le règlement n_ 856/84, la somme des quotas laitiers attribués dans chaque État membre aux opérateurs concernés ne pouvait pas dépasser une quantité globale garantie égale à la somme des quantités de lait livrées à des entreprises traitant ou transformant du lait pendant une année de référence. En cas de dépassement du quota attribué, il incombait, soit au producteur, soit à l’acheteur, selon la formule choisie par l’État membre, de payer un prélèvement supplémentaire. Lorsque cette obligation incombait à l’acheteur, celui-ci était tenu, après avoir versé le prélèvement, de le récupérer sur les producteurs ayant dépassé leur quota laitier et ainsi contribué au dépassement du quota laitier de l’acheteur.

5 Les États membres déterminaient le quota laitier revenant à chaque producteur par référence à la quantité de lait ou d’équivalent lait produite par ledit producteur pendant une année de référence entre 1981, 1982 ou 1983, selon le choix de l’État.

6 Autorisés à créer des réserves nationales de quotas laitiers pour faire face aux situations particulières de certains de leurs producteurs, sans toutefois dépasser la quantité globale, les États membres devaient prendre en compte, conformément à l’article 3 du règlement n_ 857/84, pour la détermination des quotas laitiers, certaines situations particulières comme celles des producteurs ayant souscrit un plan de développement, des jeunes producteurs ou des producteurs dont la production avait été sensiblement affectée par des événements exceptionnels, limitativement énumérés, survenus au cours de l’année de référence.

7 Conformément à l’article 4 du règlement n_ 857/84, les États membres pouvaient également accorder une quantité de référence supplémentaire aux producteurs réalisant un plan de développement de la production laitière répondant à certains critères et aux producteurs exerçant l’activité agricole à titre principal.

8 Le régime de prélèvement supplémentaire, instauré initialement pour une période de cinq ans, du 1er avril 1984 au 31 mars 1989, prolongée ensuite jusqu’au 31 mars 1993, a été reconduit pour sept nouvelles périodes consécutives de douze mois par le règlement n_ 3950/92. Ce dernier règlement, qui a abrogé le règlement n_ 857/84, a établi les règles de base du régime prorogé en y introduisant diverses modifications en vue, notamment, de le simplifier.

9 Conformément à l’article 4, paragraphe 1, du règlement n_ 3950/92, la quantité de référence individuelle disponible sur l’exploitation (ci-après le «quota laitier») est, en principe, égale à celle disponible le 31 mars 1993 et adaptée, le cas échéant, pour chacune des périodes de douze mois concernées, afin que la quantité globale ne soit pas dépassée. Pour le royaume de Suède, qui a adhéré aux Communautés européennes le 1er janvier 1995, l’acte relatif aux conditions d’adhésion de la république d’Autriche, de la république de Finlande et du royaume de Suède et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne (JO 1994, C 241, p. 21, et JO 1995, L 1, p. 1, ci-après l'«acte d’adhésion») a complété cette disposition par un second alinéa, aux termes duquel la date du 31 mars 1993 est remplacée par celle du 31 mars 1996.

10 L’acte d’adhésion a également établi la quantité globale garantie pour le royaume de Suède à 3,3 millions de tonnes pour les livraisons et à 3 000 tonnes pour la vente directe. Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, du règlement n_ 3950/92, tel que modifié par l’acte d’adhésion, cette quantité globale ne peut être dépassée.

11 Les États membres sont autorisés, par l’article 5, premier alinéa, du règlement n_ 3950/92, tel que modifié par l’acte d’adhésion, à alimenter la réserve nationale au moyen d’une réduction linéaire de l’ensemble des quantités de référence individuelles, en vue d’accorder des quantités supplémentaires ou spécifiques à des producteurs déterminés, selon des critères objectifs établis en accord avec la Commission.

La réglementation suédoise

12 En vue de l’attribution initiale de quotas laitiers aux producteurs suédois, le royaume de Suède a adopté le Förordning (1994:1714) om mjölkkvoter m.m., (règlement n_ 1714 de 1994 sur les quotas laitiers et autres), modifié à compter du 8 février 1995 par le règlement (1995:119) (ci-après le «règlement suédois n_ 1714»). Conformément à ce règlement, des quotas laitiers pour les livraisons ont été octroyés pour la période comprise entre le 1er avril 1995 et le 31 mars 1996.

13 Pour qu’un producteur de lait puisse prétendre à un quota laitier pour cette période, l’article 5, premier alinéa, du règlement suédois n_ 1714 exigeait qu’il ait livré du lait de manière effective et ininterrompue entre le 1er mars 1994 et le 1er janvier 1995 et qu’il respecte certaines exigences relatives à la protection de l’environnement.

14 Dans l’hypothèse d’une interruption des livraisons pendant cette période, la Jordbruksverket, chargée de veiller au respect de la réglementation en matière de quotas laitiers, pouvait accorder un quota laitier, en vertu de l’article 5, second alinéa, du règlement suédois n_ 1714, à condition que l’interruption soit le fait d’une circonstance extérieure à la volonté du producteur et qu’il existe des motifs particuliers de lui allouer un quota laitier en dépit de l’interruption.

15 Aux termes de l’article 6 du règlement suédois n_ 1714, le quota laitier de livraison était fixé en fonction de la quantité moyenne de lait livrée au cours des années de référence 1991, 1992 et 1993 (ci-après dénommé «méthode générale»). Toutefois, si cette méthode générale s’appliquait telle quelle aux producteurs n’ayant pas augmenté leur production entre le 1er janvier 1991 et le 31 décembre 1994 (ci-après les «producteurs réguliers»), des règles supplémentaires, voire dérogatoires, régissaient trois catégories particulières de producteurs, à savoir les nouveaux producteurs, les producteurs en croissance et les producteurs écologiques.

16 Les nouveaux producteurs étaient ceux qui n’avaient commencé à effectuer des livraisons qu’après le 1er janvier 1991. En vertu de l’article 10 du règlement suédois n_ 1714, leur quota laitier était déterminé sur la base de 7 398 kg de lait par vache et par an, volume ensuite affecté d’une réduction «pour risque propre» de 15 %. Toutefois, à la demande du producteur, son quota laitier pouvait être fixé sur la base des quantités moyennes de livraisons des années 1991 à 1993 en prenant en considération les quantités de lait livrées pendant les mois pendant lesquels il avait livré du lait.

17 Les producteurs en croissance étaient ceux qui, après le 1er janvier 1991, avaient effectué un investissement immobilier en vue d’augmenter la production de lait ou qui, sans un tel investissement, avaient accru le nombre de leurs vaches. Aux termes de l’article 10 bis du règlement suédois n_ 1714, ils avaient droit à un quota de base et à un quota additionnel. Le quota de base était calculé selon la méthode générale, compte non tenu des augmentations survenues pendant la période de référence. Ces augmentations, quant à elles, donnaient droit à un quota laitier additionnel calculé, au choix du producteur, soit sur la base de 7 398 kg de lait par nouvelle vache, volume ensuite réduit de 25 % «pour risque propre», soit sur la base d’une quantité de lait pour chaque nouvelle vache correspondant à la quantité moyenne de livraison annuelle par vache pendant la période de référence, quantité également diminuée de 25 % pour risque propre.

18 Les producteurs écologiques, au sens de l’article 7 du règlement suédois n_ 1714, pouvaient demander que leur quota laitier soit calculé sur la base de leur production moyenne de lait écologique au cours de l’année 1993 ou 1994. Au cas où un tel producteur souhaitait l’application des règles relatives aux nouveaux producteurs ou aux producteurs en croissance, le quota correspondant lui était attribué conformément aux articles 10 et 10 bis du règlement suédois n_ 1714, mais sans aucune réduction pour risque propre.

19 En janvier 1995, les autorités suédoises ont procédé à l’attribution provisoire des quotas laitiers aux producteurs réguliers. Elles ont fait de même, entre mars et mai 1995, à l’égard des nouveaux producteurs. Elles ont alors constaté que l’attribution des quotas laitiers aux producteurs en croissance aboutirait à un dépassement de la quantité globale garantie attribuée au royaume de Suède.

20 Par le règlement (1995:812) modifiant le règlement suédois n_ 1714, qui est entré en vigueur le 1er juillet 1995 (ci-après le «règlement suédois n_ 812»), les coefficients de réduction pour risque propre ont été augmentés, passant de 15 à 30 % pour les nouveaux producteurs et de 25 à 55 % pour les producteurs en croissance. De plus, pour ces derniers, le quota additionnel n’a plus été alloué que pour la partie de l’augmentation du nombre de vaches qui dépassait 10 % du nombre de vaches détenues avant l’accroissement. Par la suite, les quotas déjà attribués aux nouveaux producteurs à titre provisoire ont été corrigés en fonction de ces nouveaux coefficients et critères.

Faits et procédures au principal

21 M. Karlsson a obtenu, en janvier 1995, un quota laitier de 38 797 kg à titre provisoire représentant sa production moyenne au cours des années 1991 à 1993. Faisant valoir qu’il avait amélioré ses locaux et augmenté le nombre de ses vaches de 7 à 12, il a sollicité un quota additionnel en sa qualité de producteur en croissance. Par décision du 29 août 1995, il a été fait droit à sa demande et son quota laitier a été porté à 48 553 kg de lait, compte tenu de l’application d’un coefficient de réduction de 55 %, conformément à l’article 10 bis du règlement suédois n_ 1714, tel que modifié par le règlement suédois n_ 812.

22 M. Gustafsson a sollicité un quota laitier en sa qualité de nouveau producteur. Par décision du 23 mars 1995, il a obtenu un quota de 251 532 kg de lait, calculé sur la base de 40 vaches laitières avec application d’un coefficient de réduction de 15 %, conformément à l’article 10 du règlement suédois n_ 1714. Après la modification de cet article par le règlement suédois n_ 812, ladite décision a été retirée et remplacée par une nouvelle décision, datée du 3 juillet 1995, qui a fixé le quota laitier à 207 144 kg, compte tenu de l’application du nouveau coefficient de réduction de 30 %.

23 M. Torarp a effectué des livraisons de lait au cours des années 1991 à 1993. Par décision du 13 janvier 1995, un quota laitier lui a été attribué d’office. M. Torarp a alors fait savoir à l’administration compétente qu’il avait cessé la production de lait le 12 novembre 1994 parce qu’il avait eu un accident de travail lui interdisant de conserver des vaches laitières. Néanmoins, le 13 février 1995, il a sollicité un quota laitier calculé sur la base des livraisons effectivement réalisées au cours des années de référence. Par décision du 5 mars 1995, la Jordbruksverket lui a retiré, en application de l’article 5 du règlement suédois n_ 1714, le quota attribué d’office et a rejeté sa demande.

24 MM. Karlsson, Gustafsson et Torarp ont formé chacun un recours contre la décision le concernant devant le länsrätt compétent. Déboutés en première instance, puis en appel devant le Kammarrätten i Jönköping, ils se sont pourvus en cassation devant le Regeringsrätten.

25 Constatant, en l’état actuel de la réglementation communautaire, un manque de mesures d’application comparables à celles du règlement n_ 857/84 et éprouvant des doutes sur la conformité de la réglementation suédoise avec le règlement n_ 3950/92, les articles 5 et 40, paragraphe 3, du traité ainsi qu’avec le principe d’égalité de traitement, le Regeringsrätten a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Le règlement (CEE) n_ 3950/92 du Conseil établissant un prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers, ainsi que les articles 5 et 40, paragraphe 3, du traité de Rome et le principe fondamental du droit communautaire ayant trait à l’égalité de traitement autorisent-ils, dans le cas d’un État ayant adhéré à l’Union le 1er janvier 1995, des règles nationales impliquant:

a) que, pour les producteurs qui n’ont pas modifié leur production, les livraisons moyennes des années 1991, 1992 et 1993 servent de base à la distribution du quota laitier?

b) que les producteurs ayant entamé ou accru leur production de lait au cours de la période allant du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1994 doivent subir une réduction de leur quota laitier, contrairement aux producteurs de lait dont les conditions de production n’ont pas été modifiées durant cette période et aux producteurs de lait écologiques, et que cette réduction distingue entre les nouveaux producteurs et les producteurs en croissance?

c) que les producteurs ayant livré du lait au cours de la période ayant précédé l’adhésion de la Suède au régime communautaire des quotas laitiers, mais qui, pour des raisons indépendantes de leur volonté, n’ont pas livré de lait durant l’intégralité de la période de référence applicable à l’octroi du quota (1er mars 1994-1er janvier 1995), se voient refuser le quota?»

26 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si le règlement n_ 3950/92, l’article 5 du traité ainsi que le principe d’égalité de traitement, consacré plus particulièrement par l’article 40, paragraphe 3, du traité, s’opposent à une réglementation relative à l’attribution initiale des quotas laitiers, adoptée par un État membre ayant adhéré aux Communautés européennes le 1er janvier 1995, qui: détermine les quotas laitiers des producteurs réguliers sur la base de la moyenne des livraisons effectuées au cours des années 1991 à 1993; applique, pour le calcul des quotas attribués aux nouveaux producteurs et aux producteurs en croissance, à la différence des producteurs réguliers et des producteurs écologiques, des coefficients de réduction, de surcroît différents; n’octroie un quota laitier qu’aux seuls producteurs justifiant d’une production ininterrompue entre le 1er mars 1994 et le 1er janvier 1995.

Sur la réglementation communautaire applicable

27 Dans la mesure où la juridiction de renvoi estime que le régime de prélèvement supplémentaire sur le lait ne comprend plus, après l’abrogation du règlement n_ 857/84 par le règlement n_ 3950/92, de règles relatives à l’attribution initiale des quotas laitiers aux producteurs nationaux, il appartient, conformément aux principes généraux qui sont à la base de la Communauté et qui régissent les relations entre la Communauté et les États membres, aux États membres, en vertu de l’article 5 du traité, d’assurer sur leur territoire l’exécution des réglementations communautaires. Pour autant que le droit communautaire, y compris les principes généraux de celui-ci, ne comporte pas de règles communes à cet effet, les autorités nationales procèdent, lors de l’exécution de ces réglementations, en suivant les règles de forme et de fond de leur droit national (voir, notamment, arrêt du 23 novembre 1995, Dominikanerinnen-Kloster Altenhohenau, C-285/93, Rec. p. I-4069, point 26).

28 Il convient de constater ensuite que, contrairement à ce que soutiennent les requérants au principal, les dispositions de l’article 5 quater du règlement n_ 804/68, tel qu’inséré par le règlement n_ 856/84, ne sauraient être considérées comme applicables et pertinentes.

29 Le règlement n_ 856/84, dont les dispositions ont, de fait, été abandonnées, avant même l’adhésion du royaume de Suède, par le règlement (CEE) n_ 2071/92 du Conseil, du 30 juin 1992, modifiant le règlement n_ 804/68 (JO L 215, p. 64), ne prévoyait pas, ainsi que le relève M. l’avocat général au point 32 de ses conclusions, les modalités d’attribution des quotas laitiers individuels, celles-ci figurant dans le règlement n_ 857/84, abrogé par le règlement n_ 3950/92, mais avait pour seul objet l’instauration d’un prélèvement supplémentaire sur le lait et la désignation des redevables de ce prélèvement.

30 Outre le fait que l’article 5 quater du règlement n_ 804/68 n’a jamais réglementé la première distribution des quotas laitiers, la thèse des requérants au principal selon laquelle le régime instauré par cet article relève de l’acquis communautaire et serait à ce titre toujours pertinent ne saurait non plus être accueillie.

31 Le régime a été initialement instauré pour une durée limitée à cinq périodes consécutives de douze mois, portée ensuite à huit puis neuf périodes consécutives de douze mois, et n’a été reconduit, par le règlement n_ 3950/92, que pour une période de nouveau limitée, cette fois, à sept nouvelles périodes de douze mois. Ces circonstances suffisent à elles seules pour exclure que le régime des quotas laitiers fasse partie de l’acquis communautaire.

32 Hormis les principes généraux du droit communautaire, la réglementation suédoise n’est dès lors subordonnée qu’aux exigences découlant du règlement n_ 3950/92 tel que modifié par l’acte d’adhésion. Or, il ressort des articles 3 à 5 de ce règlement modifié, que celui-ci ne comporte aucune règle ayant vocation à régler l’attribution initiale des quotas laitiers. Ledit règlement repose en effet, comme le fait notamment apparaître son article 4, dans sa version résultant de l’acte d’adhésion, sur la prémisse que les quotas laitiers ont déjà été attribués respectivement, pour l’ensemble des État membres, excepté la république d’Autriche, la république de Finlande et le royaume de Suède, avant l’entrée en vigueur du règlement, pour la république d’Autriche et la république de Finlande, avant le 1er avril 1995 et, pour le royaume de Suède, avant le 1er avril 1996.

33 Par voie de conséquence, pour les États membres ayant adhéré aux Communautés européennes le 1er janvier 1995, la seule obligation qui leur est imposée par le règlement n_ 3950/92, tel que modifié par l’acte d’adhésion, est de s’assurer que la somme des quotas laitiers ainsi attribués ne dépasse pas la quantité globale garantie qui est de 3 300 000 tonnes pour les livraisons et 3 000 tonnes pour les ventes directes pour le royaume de Suède. Cette obligation résulte de l’article 3, paragraphe 1, dudit règlement, modifié.

34 Dès lors qu’il incombe aux États membres qui ont adhéré aux Communautés européennes postérieurement à l’entrée en vigueur du règlement n_ 3950/92 de fixer, dans la seule limite énoncée à l’article 3, paragraphe 1, de ce règlement, modifié par l’acte d’adhésion, les critères de cette première attribution, ce règlement ne s’oppose pas à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui vise la distribution initiale des quotas laitiers.

Sur les principes du droit communautaire régissant l’attribution initiale des quotas laitiers

35 Même si un État membre dispose dans le cadre de cette première distribution d’une large marge d’appréciation pour assurer sur son territoire l’exécution de la réglementation communautaire, il est de jurisprudence constante que les règles nationales qu’il édicte doivent se concilier avec l’exigence d’une application uniforme du droit communautaire pour éviter un traitement inégal des opérateurs économiques (arrêt Dominikanerinnen-Kloster Altenhohenau, précité, point 26). De même, ainsi que le souligne M. l’avocat général au point 36 de ses conclusions, l’État membre doit s’inspirer des objectifs spécifiques de la politique agricole commune lorsque la réglementation communautaire dont il assure l’exécution sur son territoire national en relève.

36 En l’espèce, il suffit de constater que la réglementation en cause et les observations du gouvernement suédois à l’audience font apparaître que, dans la définition du régime national d’attribution des quotas laitiers, le royaume de Suède s’est laissé guider par les règles communautaires en vigueur à l’époque de l’instauration du régime de prélèvement supplémentaire sur le lait.

37 De plus, il y a lieu de rappeler que les exigences découlant de la protection des droits fondamentaux dans l’ordre juridique communautaire lient également les États membres lorsqu’ils mettent en oeuvre des réglementations communautaires. Par suite, les États membres sont tenus, dans toute la mesure du possible, d’appliquer ces réglementations dans des conditions qui ne méconnaissent pas lesdites exigences (arrêt du 24 mars 1994, Bostock, C-2/92, Rec. p. I-955, point 16).

38 Parmi ces droits fondamentaux figure le principe général d’égalité et de non-discrimination, dont la juridiction de renvoi se demande si la réglementation suédoise en cause le respecte.

Sur le principe d’égalité de traitement

39 L’article 40, paragraphe 3, deuxième alinéa, du traité, qui énonce l’interdiction de toute discrimination dans le cadre de la politique agricole commune, n’est que l’expression spécifique du principe général d’égalité, lequel exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale à moins qu’une différenciation ne soit objectivement justifiée (arrêts du 20 septembre 1988, Espagne/Conseil, 203/86, Rec. p. 4563, point 25, et du 17 avril 1997, EARL de Kerlast, C-15/95, Rec. p. I-1961, point 35).

Sur le choix, comme base de calcul, de la moyenne des livraisons effectuées pendant les années 1991 à 1993

40 Aucun élément du dossier ne permet de conclure que la législation suédoise a violé le principe d’égalité de traitement en choisissant comme période de référence les années 1991 à 1993 et en se fondant, pour le calcul des quotas laitiers attribués aux producteurs réguliers, sur la moyenne des livraisons de lait qu’ils ont effectuées pendant cette période. En effet, en appliquant, en vue de la fixation des quotas laitiers, les mêmes règles à tous les producteurs se trouvant dans la même situation, la législation suédoise traite de manière égale des situations comparables.

41 Par conséquent, le principe d’égalité de traitement ne s’oppose pas à une réglementation nationale relative à l’attribution initiale des quotas laitiers, adoptée par un État membre ayant adhéré aux Communautés européennes le 1er janvier 1995, qui détermine les quotas laitiers des producteurs n’ayant pas modifié leur production entre le 1er janvier 1991 et le 31 décembre 1994 sur la base de la moyenne des livraisons effectuées au cours des années 1991 à 1993.

Sur le traitement des nouveaux producteurs et des producteurs en croissance par rapport aux producteurs réguliers

42 Le gouvernement suédois ne méconnaît pas que les nouveaux producteurs et les producteurs en croissance sont désavantagés par rapport aux producteurs réguliers lorsque, selon leur propre choix, leur quota laitier ou la partie de celui-ci représentant l’accroissement de la production est déterminé sur la base des quantités moyennes de livraisons pendant les années 1991 à 1993, conformément à l’article 10 du règlement suédois n_ 1714. Ainsi, à la différence des producteurs réguliers, il leur est impossible d’obtenir, au titre de leur quota laitier, un volume équivalant à la totalité des quantités de lait qu’ils sont à même de produire avec le nombre de vaches qu’ils possèdent.

43 Le gouvernement suédois est également conscient du fait que l’autre mode de calcul proposé, qui se fonde sur une quantité forfaitaire de 7 398 kg de lait par vache et par an et vise à tenir compte de la situation spécifique de ces deux catégories de producteurs, n’est pas non plus de nature à pallier cette inégalité de traitement dans la mesure où, dans ce mode de calcul, les quotas laitiers des nouveaux producteurs et les quotas laitiers additionnels des producteurs en croissance sont fixés après application d’un coefficient de réduction de, respectivement, 30 % et 55 %. Aussi, abstraction faite de la différence de traitement entre ces deux groupes de producteurs en raison de la disparité des taux, les nouveaux producteurs et les producteurs en croissance sont désavantagés par rapport aux producteurs réguliers et le sont également par rapport aux producteurs écologiques qui, même lorsqu’ils se trouvent dans une situation analogue à la leur, ne sont soumis à aucune réduction.

44 Ainsi, la charge résultant de la fixation des quotas laitiers à un niveau inférieur aux capacités de production est supportée unilatéralement par les nouveaux producteurs et les producteurs en croissance. Une telle limitation des volumes admis au titre des quotas laitiers constitue une restriction au principe de non-discrimination dont lesdits producteurs peuvent se prévaloir.

45 Toutefois, selon une jurisprudence bien établie, des restrictions peuvent être apportées à l’exercice de ces droits, notamment dans le cadre d’une organisation commune de marché, à condition que ces restrictions répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général poursuivis par la Communauté et ne constituent pas, compte tenu du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable, qui porterait atteinte à la substance même de ces droits (voir arrêt du 13 juillet 1989, Wachauf, 5/88, Rec. p. 2609, point 18).

46 Dans l’affaire au principal, la fixation des quotas laitiers à un niveau inférieur aux capacités de production répond à l’objectif principal que poursuit la Communauté à travers l’établissement d’un prélèvement supplémentaire sur le lait, qui est de réduire les excédents structurels et de parvenir à un meilleur équilibre du marché, comme il ressort notamment du premier considérant du règlement n_ 3950/92.

47 Plus particulièrement, les réductions qui frappent unilatéralement les nouveaux producteurs et les producteurs en croissance apparaissent objectivement justifiées, eu égard à la responsabilité spécifique que portent ces producteurs dans le risque de dépassement de la quantité globale garantie, constatée par les autorités suédoises lors de l’attribution provisoire des quotas laitiers. En effet, la quantité globale garantie accordée au royaume de Suède lors de son adhésion, qui est égale à la quantité de lait produite dans cet État en 1992, a été essentiellement établie sur la base des quantités produites par les producteurs réguliers. Le risque de dépassement de cette quantité globale résulte donc principalement de l’augmentation de la production dans les dernières années, qui est surtout imputable aux producteurs en croissance et aux nouveaux producteurs.

Sur le traitement des producteurs en croissance par rapport aux nouveaux producteurs

48 Au sein du groupe des producteurs frappés par une réduction de leurs quotas laitiers, les nouveaux producteurs bénéficient d’un traitement plus favorable que les producteurs en croissance, dans la mesure où ils se voient appliquer un taux de réduction moins élevé sur les quantités dont la production a débuté après le 1er janvier 1991 et avant le 1er janvier 1995.

49 Toutefois, cette différence de traitement se justifie par des objectifs de politique agricole poursuivis, selon les indications données par le gouvernement suédois lors de la procédure, par le royaume de Suède dans le secteur du lait et qui ne dépassent pas les limites du pouvoir discrétionnaire dont il dispose.

50 En effet, la légitimité de tels objectifs est reconnue en droit communautaire. D’une part, dans le cadre du régime de prélèvement supplémentaire initial, l’article 3, point 1, du règlement n_ 857/84 permettait déjà aux États membres de faire bénéficier les jeunes producteurs d’un traitement préférentiel. D’autre part, dans le cadre du régime de prélèvement supplémentaire actuel, l’article 5 du règlement n_ 3950/92 autorise les États membres à accorder des quantités supplémentaires ou spécifiques à des producteurs déterminés selon des critères objectifs.

Sur le traitement des producteurs écologiques

51 Dans le cadre de la poursuite d’objectifs de politique agricole, un État membre peut être en droit d’exempter certains producteurs de l’application des coefficients de réduction pour des raisons tenant à l’écologie et notamment à certains modes de production écologique, même lorsque ceux-ci se trouvent dans des situations analogues à celles des nouveaux producteurs et des producteurs en croissance. Toutefois, il y a lieu de constater que ni les motifs du renvoi préjudiciel ni les observations des intervenants au sens de l’article 20 du statut CE de la Cour de justice ne sont suffisamment circonstanciés pour permettre à la Cour de prendre plus amplement position.

Sur la prétendue discrimination des producteurs suédois par rapport aux producteurs des autres États membres

52 Les requérants au principal font valoir que les exigences relatives à la protection de l’environnement auxquelles chaque producteur suédois doit satisfaire en vertu de l’article 5 du règlement suédois n_ 1714 constituent une discrimination de ces producteurs par rapport aux producteurs des autres États membres.

53 Mais une éventuelle inégalité de traitement des producteurs d’un État membre par rapport à ceux d’autres États membres qui, comme en l’espèce, résulte simplement des divergences existant entre les législations de ces États membres ne comporte pas de discrimination visée par l’article 40, paragraphe 3, du traité, dès lors que la législation nationale en cause affecte tous les producteurs concernés selon des critères objectifs (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 1988, Lambert, 308/86, Rec. p. 4369, points 21 et 22).

Sur l’exigence d’une production ininterrompue

54 En ce qui concerne le refus d’octroyer un quota laitier à M. Torarp au motif qu’il avait interrompu ses livraisons, il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, qu’il appartient au seul juge national d’apprécier la portée des dispositions nationales et la manière dont elles doivent être appliquées (voir, par exemple, arrêt du 30 avril 1996, CIA Security International, C-194/94, Rec. p. I-2201, point 20). Aussi, l’application de la disposition nationale en cause au cas de M. Torarp et plus précisément les motifs qui ont amené l’administration suédoise à lui refuser l’octroi d’un quota laitier ne sauraient faire l’objet d’un examen dans le cadre de l’article 177 du traité.

55 Conformément au point de vue exprimé par M. l’avocat général aux points 60 et 61 de ses conclusions, il ressort de l’arrêt du 17 mai 1988, Erpelding (84/87, Rec. p. 2647, points 15 à 21), que n’est pas contraire au principe de non-discrimination – ni d’ailleurs à celui du respect de la confiance légitime – une réglementation nationale relative à l’attribution initiale des quotas laitiers qui exclut de tenir compte de certains types de sinistres, de sorte qu’un producteur qui a été frappé par l’un de ces sinistres réduisant sensiblement sa production laitière pendant la période de référence obtient un quota laitier inférieur à celui qui lui aurait été attribué si le sinistre ne s’était pas produit.

56 Ce constat s’impose a fortiori dans le cas d’une réglementation qui permet aux producteurs de lait d’obtenir un quota laitier alors même qu’ils ont été contraints, par des événements étrangers à leur volonté, d’interrompre leur production laitière pendant la période de référence ou une partie de celle-ci, à la condition qu’ils puissent justifier leur demande de reprise de production par des motifs particuliers. En effet, cette solution s’inscrit dans la ligne directrice du régime de prélèvement supplémentaire sur le lait, qui permet à un producteur de reprendre la production après certains cas d’interruptions, comme c’était notamment le cas des producteurs ayant souscrit un engagement de non-commercialisation au titre du règlement (CEE) n_ 1078/77 du Conseil, du 17 mai 1977, instituant un régime de primes de non-commercialisation du lait et des produits laitiers et de reconversion de troupeaux bovins à orientation laitière (JO L 131, p. 1), à condition qu’il ait l’intention de continuer la production et soit à même, le cas échéant, de démontrer qu’il lui est possible de commercialiser les quantités de lait qu’il réclame.

57 En revanche, il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’est justifié le refus d’attribuer un quota laitier à un producteur qui en fait la demande dans le but non pas de reprendre la commercialisation de lait de façon durable, mais de retirer de cette attribution un avantage purement financier, en se prévalant de la valeur marchande que le quota laitier a entre-temps acquise (voir, notamment, arrêt du 22 octobre 1991, Von Deetzen II, C-44/89, Rec. p. I-5119, point 24). Aussi, afin d’éviter des manoeuvres spéculatives consistant à réclamer un quota laitier dans le seul but de le commercialiser, en le vendant à autrui, l’exigence des motifs spéciaux permet à l’administration nationale de contrôler le sérieux de la volonté et la capacité réelle d’un producteur de reprendre effectivement les livraisons de lait.

Sur le respect du principe de proportionnalité

58 Dans la mesure où la fixation des quotas laitiers notamment des nouveaux producteurs et des producteurs en croissance à un niveau inférieur à leur capacité de production constitue une restriction à l’exercice de leurs droits fondamentaux, il y a lieu de rappeler que, lorsqu’il apporte des restrictions à l’exercice des droits fondamentaux, un État membre est tenu de respecter le principe de proportionnalité. Celui-ci exige qu’une telle restriction ne constitue pas, compte tenu du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable, qui porterait atteinte à la substance même des droits (voir arrêt Wachauf, précité, point 18).

59 Or, d’une part, aucun élément du dossier ne permet de douter que la fixation des quotas laitiers des nouveaux producteurs et des producteurs en croissance à un niveau inférieur à leur capacité de production soit appropriée et nécessaire pour éviter le dépassement de la quantité globale garantie. Selon les observations du gouvernement suédois, la prise en compte limitée de leur capacité de production que ces opérateurs ont supportée a précisément été calculée en raison de l’excédent prévisible au regard de la quantité globale.

60 D’autre part, le gouvernement suédois a démontré, par la production de chiffres à l’audience, que, pour la campagne 1995/1996, 1 % uniquement de la quantité globale garantie n’a pas été distribué et que ce chiffre est ensuite tombé à 0,2 % pour la campagne 1997/1998. Compte tenu de la possibilité prévue par la réglementation communautaire de constituer une réserve nationale et au vu de la très faible importance des quantités retenues par les autorités suédoises, un État membre ne saurait dépasser sa marge d’appréciation lorsque les quantités qu’il ne distribue pas sont aussi modestes.

61 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent et qui portent sur une éventuelle violation du principe d’égalité de traitement que ce principe ne s’oppose pas à une réglementation nationale relative à l’attribution initiale des quotas laitiers, adoptée par un État membre ayant adhéré aux Communautés européennes le 1er janvier 1995, qui: à la différence des producteurs n’ayant pas modifié leur production entre le 1er janvier 1991 et le 31 décembre 1994 et des producteurs de lait écologiques, applique, pour le calcul des quotas laitiers attribués aux nouveaux producteurs ayant commencé leur production entre le 1er janvier 1991 et le 31 décembre 1994 et aux producteurs en croissance ayant augmenté pendant la même période une production déjà existante, des coefficients de réduction, de surcroît différents; n’octroie une quantité de référence individuelle qu’aux seuls producteurs justifiant d’une production ininterrompue entre le 1er mars 1994 et le 1er janvier 1995, à moins que le producteur ayant involontairement interrompu ses livraisons au cours de cette période puisse se prévaloir de motifs particuliers justifiant l’octroi d’une quantité de référence.

Sur le principe du respect de la confiance légitime

62 Les requérants au principal soutiennent que le principe de la confiance légitime est violé par la réglementation suédoise aux motifs que le régime national de distribution des quotas laitiers ne reflète pas fidèlement le régime communautaire découlant du règlement n_ 856/84 et, plus particulièrement, que l’allocation d’un quota laitier est soumis à des exigences relatives à la protection de l’environnement et à l’exigence d’une production ininterrompue entre le 1er mars 1994 et le 1er janvier 1995.

63 Ces griefs ne sauraient être retenus. Le principe de la confiance légitime ne peut être invoqué à l’encontre d’une réglementation communautaire que dans la mesure où la Communauté elle-même a créé au préalable une situation susceptible d’engendrer une confiance légitime (arrêt du 15 avril 1997, Irish Farmers Association e.a., C-22/94, Rec. p. I-1809, point 19). Or, l’examen de la réglementation nationale en cause au principal a déjà fait apparaître que la réglementation communautaire en cause n’a pas pu avoir un tel effet.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

64 Les frais exposés par le gouvernement suédois et par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement. La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

(sixième chambre),

statuant sur la question à elle soumise par le Regeringsrätten, par décision du 27 mai 1997, dit pour droit:

Le règlement (CEE) n_ 3950/92 du Conseil, du 28 décembre 1992, établissant un prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers, tel que modifié par l’acte relatif aux conditions d’adhésion de la république d’Autriche, de la république de Finlande et du royaume de Suède et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne, ainsi que le principe d’égalité de traitement, consacré plus spécifiquement à l’article 40, paragraphe 3, deuxième alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 34, paragraphe 2, deuxième alinéa, CE), doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale relative à l’attribution initiale des quantités de référence individuelles, adoptée par un État membre ayant adhéré aux Communautés européennes le 1er janvier 1995, qui:

— détermine les quantités de référence individuelles des producteurs n’ayant pas modifié leur production entre le 1er janvier 1991 et le 31 décembre 1994 sur la base de la moyenne des livraisons effectuées au cours des années 1991 à 1993;

— à la différence des producteurs n’ayant pas modifié leur production entre le 1er janvier 1991 et le 31 décembre 1994 et des producteurs de lait écologiques, applique, pour le calcul des quantités de référence individuelles attribuées aux nouveaux producteurs ayant commencé leur production entre le 1er janvier 1991 et le 31 décembre 1994 et aux producteurs en croissance ayant augmenté pendant la même période une production déjà existante, des coefficients de réduction, de surcroît différents;

— n’octroie une quantité de référence individuelle qu’aux seuls producteurs justifiant d’une production ininterrompue entre le 1er mars 1994 et le 1er janvier 1995, à moins que le producteur ayant involontairement interrompu ses livraisons au cours de cette période puisse se prévaloir de motifs particuliers justifiant l’octroi d’une quantité de référence.

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CJCE, n° C-292/97, Arrêt de la Cour, Demande de décision préjudicielle: Regeringsrätten - Suède, 13 avril 2000