CJUE, n° C-669/19, Arrêt de la Cour, BP contre Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne (FRA), 16 septembre 2020

  • Dispositions institutionnelles·
  • Accès aux documents·
  • Courriel·
  • Document·
  • Accès·
  • Données·
  • Confidentiel·
  • Divulgation·
  • Preuve·
  • Règlement

Chronologie de l’affaire

Commentaires2

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Lexis Veille · 21 octobre 2021

225 octobre 2021Accès limité
Lexis Kiosque
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 16 sept. 2020, C-669/19
Numéro(s) : C-669/19
Arrêt de la Cour (huitième chambre) du 16 septembre 2020.#BP contre Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne (FRA).#Pourvoi – Responsabilité non contractuelle – Accès aux documents – Protection des données personnelles – Divulgation prétendument irrégulière de telles données – Règlements (CE) nos 1049/2001 et 45/2001 – Recevabilité des moyens et offres de preuves devant le Tribunal de l’Union européenne – Répartition des dépens ».#Affaire C-669/19 P.
Date de dépôt : 9 septembre 2019
Précédents jurisprudentiels : 14 avril 2005, Gaki-Kakouri/Cour de justice, C-243/04 P, non publié, EU:C:2005:238
29 juin 2010, Commission/Bavarian Lager ( C-28/08 P, EU:C:2010:378
3 juin 2015, BP/FRA ( T-658/13 P, EU:T:2015:356
arrêt du 14 avril 2005, Gaki-Kakouri/Cour de justice, C-243/04 P, non publié, EU:C:2005:238
arrêt du 28 février 2013, Inalca et Cremonini/Commission, C-460/09 P, EU:C:2013:111 point 104
arrêt du 2 octobre 2019, Crédit mutuel Arkéa/BCE, C-152/18 P et C-153/18 P, EU:C:2019:810
arrêt du 9 juin 2011, Comitato « Venezia vuole vivere » e.a./Commission, C-71/09 P, C-73/09 P et C-76/09 P, EU:C:2011:368
arrêts du 12 juillet 2001, Commission et France/TF1, C-302/99 P et C-308/99 P, EU:C:2001:408
arrêts du 29 octobre 2015, Commission/ANKO, C-78/14 P, EU:C:2015:732
arrêts du 3 avril 2014, France/Commission, C-559/12 P, EU:C:2014:217
Buono e.a./Commission, C-12/13 P et C-13/13 P, EU:C:2014:2284, points 58 et 60
CEPSA/Commission, C-608/13 P, EU:C:2016:414
Conseil, C-413/18 P, non publié, EU:C:2019:1044 point 28
Conseil, C-521/15, EU:C:2017:982
Cour ( ordonnance du 3 septembre 2013, Idromacchine e.a./Commission, C-34/12 P, non publiée, EU:C:2013:552
Ledra Advertising e.a./Commission et BCE, C-8/15 P à C-10/15 P, EU:C:2016:701
Mamoli Robinetteria/Commission, C-619/13 P, EU:C:2017:50
Timab Industries et CFPR/Commission, C-411/15 P, EU:C:2017:11
Tribunal ( arrêt du 29 octobre 2015, Commission/ANKO, C-78/14 P, EU:C:2015:732
Tribunal ( arrêt du 4 février 2020, Uniwersytet Wrocławski et Pologne/REA, C-515/17 P et C-561/17 P, EU:C:2020:73
Tribunal de l' Union européenne du 11 juillet 2019, BP/FRA ( T-838/16
Tribunal du 18 décembre 2019, BP/FRA ( T-838/16 REC-INTP
Solution : Pourvoi : rejet sur le fond, Recours en responsabilité, Pourvoi : rejet pour irrecevabilité
Identifiant CELEX : 62019CJ0669
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2020:713
Télécharger le PDF original fourni par la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

16 septembre 2020 (*)

« Pourvoi – Responsabilité non contractuelle – Accès aux documents –Protection des données personnelles – Divulgation prétendument irrégulière de telles données – Règlements (CE) nos 1049/2001 et 45/2001 – Recevabilité des moyens et offres de preuves devant le Tribunal de l’Union européenne – Répartition des dépens »

Dans l’affaire C-669/19 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 9 septembre 2019,

BP, représentée par Me E. Lazar, avocate,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA), représentée par M. M. O’Flaherty, en qualité d’agent, assisté de Mes D. Waelbroeck et A. Duron, avocats,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (huitième chambre),

composée de Mme L. S. Rossi, présidente de chambre, MM. F. Biltgen et N. Wahl (rapporteur), juges,

avocat général : M. P. Pikamäe,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par son pourvoi, BP demande l’annulation partielle de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 11 juillet 2019, BP/FRA (T-838/16, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2019:494), par lequel celui-ci a, d’une part, condamné l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) à lui payer une indemnité d’un montant de 5 000 euros (majorée d’intérêts moratoires) et, d’autre part, rejeté son recours en réparation introduit sur le fondement de l’article 268 TFUE pour le surplus.

Les antécédents du litige

2 Les antécédents du litige ont été exposés par le Tribunal, aux points 1 à 69 de l’arrêt attaqué, dans les termes suivants :

« 1 La requérante, BP, a été recrutée le 1er septembre 2007 par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA), en tant qu’agent contractuel pour une durée de deux ans, comme assistante au sein de l’équipe “Finances et marchés publics” du département “Administration”. Son contrat a été renouvelé pour une période de trois ans et expirait le 31 août 2012.

2 Par lettre du 27 février 2012, le directeur de la FRA en fonction à cette date a informé la requérante qu’il avait arrêté sa décision de ne pas renouveler son contrat à son terme (ci-après l’“ancien directeur de la FRA”). Cette décision de non-renouvellement a été contestée par la requérante dans les affaires F-38/12 et T-658/13 P, BP/FRA.

3 En 2013, la requérante a saisi la Cour de justice de l’Union européenne d’une plainte à l’encontre de M. T., par laquelle elle dénonçait un éventuel conflit d’intérêts de ce dernier en raison d’un cumul, en 2012 et en 2013, de ses fonctions de conseiller juridique de la FRA et de membre par intérim du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (ci-après la “plainte auprès de la Cour”).

4 En octobre 2013, la FRA a transmis à la Cour de justice de l’Union européenne les informations relatives aux activités réalisées par M. T.

5 Le 5 mars 2014, un ancien collègue de la requérante (ci-après l’“ancien collègue”) a transmis à cette dernière, depuis son adresse électronique privée, plusieurs courriels reçus d’un autre collègue.

6 Ces courriels faisaient état, d’une part, d’un échange entre cet autre collègue et M. T.

7 Lesdits courriels faisaient état, d’autre part, d’un échange entre le chef du département “Ressources humaines et planification” (ci-après le “chef du département des ressources humaines”) et cet autre collègue.

8 Par courriel du 7 avril 2014, la requérante a informé l’ancien directeur de la FRA du fait que certains courriels contenant des menaces de procédures pénales à son égard circulaient au sein de la FRA et a demandé l’accès à ces courriels sur le fondement de l’article 6 du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), lu en combinaison avec l’article 13 du règlement (CE) no 45/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2000, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires et à la libre circulation de ces données (JO 2001, L 8, p. 1).

9 Par courriel du 16 avril 2014, l’ancien directeur de la FRA a rejeté les allégations formulées par la requérante dans son courriel du 7 avril 2014 et a fourni des éclaircissements concernant le contexte des déclarations du chef du département des ressources humaines.

10 Par courriels séparés du même jour, la requérante a demandé à l’ancien directeur de la FRA et au chef du département des ressources humaines comment M. T. avait eu connaissance de son adresse privée et si la FRA avait donné, à lui ou à une autre personne, une copie de sa plainte auprès de la Cour de justice de l’Union européenne.

11 Par courriel du 18 avril 2014, le chef du département des ressources humaines a demandé à la requérante comment elle avait eu connaissance du fait que M. T. connaissait son adresse privée et pourquoi elle pensait que cette information émanait de la FRA.

12 Le même jour, la requérante a demandé au chef du département des ressources humaines de répondre à son courriel du 16 avril 2014.

13 Le 7 mai 2014, en réponse aux courriels de la requérante des 16 et 18 avril 2014, le chef du département des ressources humaines a déclaré que la FRA n’avait ni communiqué son adresse à M. T., ni reçu copie de la plainte auprès de la Cour.

14 Par courriel du 9 octobre 2014, l’ancien collègue a envoyé à la requérante, depuis son adresse électronique privée, une liste de tous les paiements effectués par la FRA à M. T., en sa qualité de conseil, de février à septembre 2013 (ci-après la “liste des paiements”).

15 La liste des paiements avait été transmise auparavant par un autre collègue à l’ancien collègue (ci-après la “première fuite”).

16 Le 26 novembre 2014, la requérante a introduit une demande d’accès aux documents, sur le fondement de l’article 6 du règlement no 1049/2001, visant, premièrement, les courriels et documents divulgués par la FRA à M. T. au cours de la période allant du 1er janvier 2014 jusqu’à la date de la demande, deuxièmement, les “procès-verbaux des réunions de la FRA organisées à cet effet en novembre 2014 (recueillir des courriels du personnel de la FRA afin de les remettre à M. T.)” et, troisièmement, les informations “indiquant si le demandeur a demandé l’accès aux courriels du personnel de la FRA en sa qualité de particulier, de juriste ou de juge du Tribunal administratif en matière d’emploi (ESMAT)”.

17 Par lettre du 17 décembre 2014, la FRA a répondu à la demande de la requérante en identifiant deux documents, à savoir un courriel et le procès-verbal d’une réunion interne. Le courriel, après concertation avec des tiers, a été divulgué en ayant été expurgé des données à caractère personnel. Le procès-verbal n’a toutefois pas été divulgué, conformément à l’exception visée à l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, du règlement no 1049/2001. Cette position a été confirmée en réponse à la demande confirmative introduite par la requérante.

18 Par courriel du 14 février 2015, adressé à l’ancien directeur, au chef de l’administration et au président du comité du personnel, la requérante a introduit une nouvelle demande d’accès aux documents, sur le fondement du règlement no 1049/2001, demandant, en particulier, l’accès à tous les paiements effectués par la FRA à M. T.

19 La requérante a annexé à sa demande le courriel que l’ancien collègue lui avait adressé le 9 octobre 2014 ainsi que la liste des paiements (ci-après les “documents annexés à la demande d’accès aux documents”).

20 Le 17 février 2015, la requérante a présenté une demande additionnelle d’accès aux documents concernant les bons de commande relatifs aux services fournis par M. T., en particulier ceux qui seraient liés à ses affaires, et la réponse de la FRA à la lettre du greffier de la Cour.

21 Le 24 mars 2015, la FRA a refusé à la requérante l’accès aux documents demandés, aux motifs, d’une part, que lesdits documents relevaient de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 et, d’autre part, que ces documents contenaient des données à caractère personnel et qu’une version expurgée serait dénuée de sens.

22 La FRA a également déclaré que M. T. n’avait jamais travaillé sur les affaires indiquées dans la demande de la requérante et que les versements reçus par M. T. n’étaient pas liés à ses affaires.

23 S’agissant de la demande additionnelle de la requérante, la FRA a justifié son refus d’accès aux documents par le fait qu’ils étaient afférents à une procédure en cours.

24 Le 13 avril 2015, la requérante a introduit une demande confirmative d’accès aux documents.

25 Le 13 mai 2015, le journal en ligne Politico a publié un article dans sa section “Brussels Influence”, dans lequel il était fait référence à la plainte auprès de la Cour de justice de l’Union européenne.

26 Le 29 mai 2015, la FRA a rejeté la demande confirmative de la requérante, tout en relevant que la requérante y soulevait de nouvelles demandes d’accès. Afin de pouvoir traiter ces autres demandes de manière appropriée, la FRA l’a invitée à un entretien.

27 Le 1er juin 2015, la requérante a adressé un courriel au directeur par intérim et au conseiller juridique principal de la FRA pour contester la réponse de cette dernière à sa demande confirmative.

28 Le 16 juillet 2015, le Médiateur européen a reçu une plainte de la requérante concernant le refus de la FRA de lui accorder un accès total à certains documents relatifs à M. T., à savoir la réponse de la FRA à la Cour de justice de l’Union européenne. Ladite réponse a finalement été divulguée par la FRA afin de parvenir à une solution amiable avec la requérante.

29 Par son arrêt du 3 juin 2015, BP/FRA (T-658/13 P, EU:T:2015:356), le Tribunal a annulé la décision du 27 février 2012 par laquelle le directeur de la FRA alors en poste avait décidé de ne pas renouveler le contrat d’agent contractuel de la requérante.

30 Le Tribunal a, en substance, considéré que, contrairement à ce qu’avait jugé le Tribunal de la fonction publique, le droit d’être entendu de la requérante n’avait pas été respecté et a rejeté le recours pour le surplus.

31 Par lettre du 28 juillet 2015, le conseiller juridique externe de la FRA a contacté la requérante en vue de l’exécution de l’arrêt du 3 juin 2015, BP/FRA (T-658/13 P, EU:T:2015:356).

32 Le 14 septembre 2015, la FRA a, conformément aux dispositions du règlement no 1049/2001, demandé à la requérante, dans le cadre d’une demande d’accès aux documents introduite par un tiers le 6 août 2015 (ci-après la “demande d’accès aux documents introduite par un tiers”), si elle consentait à la divulgation de ses données à caractère personnel et de documents dont elle était l’auteur.

33 La demande d’accès aux documents introduite par un tiers concernait, en substance, tout document reçu par la FRA, sous quelque forme que ce soit, mentionnant le nom du demandeur et ayant comme expéditeur les anciens employés de la FRA.

34 Cette demande couvrait, notamment, selon les documents identifiés par la FRA, les documents annexés à la demande d’accès aux documents et les réponses de la FRA aux courriels de la requérante.

35 Le 15 septembre 2015, la requérante a répondu en demandant que lui soit communiquée une copie de la demande ainsi que l’identité du demandeur.

36 Par courriel du 30 septembre 2015, la FRA a, d’une part, informé la requérante que le demandeur s’opposait à la divulgation tant de sa demande que de son identité et a, d’autre part, demandé à la requérante de donner ou non son consentement à la divulgation de ses données à caractère personnel et des documents émanant d’elle ainsi que, dans la négative, de motiver son refus dans un délai de cinq jours ouvrables.

37 Le 3 octobre 2015, la requérante s’est opposée à la divulgation de ses données à caractère personnel et des documents qu’elle avait fournis en motivant son refus.

38 Le 28 octobre 2015, la FRA a consulté à nouveau la requérante. La FRA l’a informée que, conformément à son refus du 3 octobre 2015, les documents n’avaient pas été divulgués. Toutefois, étant donné que la demande d’accès aux documents introduite par un tiers avait atteint un stade confirmatif, la FRA était tenue de réévaluer sa décision initiale.

39 La FRA a demandé des informations supplémentaires à la requérante. La FRA l’a également informée que quatre nouveaux documents avaient été identifiés et lui a demandé d’indiquer si elle acceptait ou si elle s’opposait à la divulgation de ces nouveaux documents. Dans la même lettre, la FRA, faisant référence à la demande confirmative, l’a priée de préciser davantage les raisons pour lesquelles elle s’opposait à la divulgation des courriels pour réévaluer la demande.

40 Le 2 novembre 2015, la requérante a une nouvelle fois demandé à être informée de l’identité du demandeur afin de réévaluer sa position et a demandé des éclaircissements quant aux raisons pour lesquelles, dans la demande confirmative, figuraient des documents supplémentaires. Le même jour, la requérante s’est opposée à la divulgation des documents.

41 Le 18 décembre 2015, le nouveau directeur de la FRA a entendu la requérante lors d’une réunion à Vienne (Autriche).

42 Le 26 février 2016, M. T. a [confidentiel] (1).

43 Au soutien de sa plainte, M. T. a produit comme élément de preuve à charge les documents annexés à la demande d’accès aux documents.

44 Le 4 avril 2016, le nouveau directeur de la FRA a adopté la décision de non-renouvellement du contrat de la requérante.

45 Le 19 avril 2016, un article a été publié par le journal Politico, à la suite d’un entretien mené avec le nouveau directeur de la FRA (ci-après l’“entretien”).

46 Le 11 mai 2016, la requérante a demandé au nouveau directeur de la FRA si les documents identifiés par la FRA dans le cadre des consultations des 14 septembre et 28 octobre 2015 avaient été divulgués et, le cas échéant, quelles étaient la base juridique et la finalité de cette divulgation. Elle a également demandé l’accès aux documents divulgués et, en particulier, aux documents contenant une évaluation des risques réalisée par la FRA avant la divulgation de ses données à caractère personnel ainsi que des informations concernant le traitement de ses données à caractère personnel.

47 Le même jour, la requérante a déposé une plainte auprès du Contrôleur européen de la protection des données (CEPD), alléguant que la FRA avait dévoilé des documents sans son accord et sans l’informer de son intention de les dévoiler.

48 Le 18 mai 2016, la requérante a introduit une réclamation, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne, pour, premièrement, obtenir le retrait de la décision de non-renouvellement, deuxièmement, être réintégrée dans sa position précédente et, troisièmement, être indemnisée pour les dommages immatériels.

49 Le 8 juin 2016, la requérante a été informée, dans un courriel provenant [confidentiel], que [confidentiel]. Le [confidentiel] ayant été informé que la requérante ne vivait plus en Espagne, il lui était demandé si elle acceptait que [confidentiel] lui envoie les documents par courriel.

50 Le 13 juin 2016, la requérante a envoyé un courriel au nouveau directeur de la FRA, dans lequel elle s’est opposée, sur la base de l’article 18 du règlement no 45/2001, à l’utilisation par la FRA de sa correspondance privée, auquel elle a joint des courriels de M. T. dans lesquels son nom figurait. Elle a également demandé à la FRA de bloquer immédiatement l’utilisation de ses données, de l’informer de l’identité des tiers qui avaient jusqu’alors eu accès à ses données, de lui accorder le droit de corriger les données inexactes ou incomplètes et d’effacer toutes ses données à caractère personnel qui n’étaient pas exactes ou qui étaient illégalement traitées.

51 Le même jour, la FRA lui a répondu en déclarant qu’elle n’avait pas divulgué ses documents et que, conformément au règlement no 1049/2001, seules les réponses de la FRA à ses courriels expurgées des données à caractère personnel avaient été divulguées (ci-après les “réponses de la FRA à la requérante”).

52 La FRA a également informé la requérante que les demandes relatives au traitement de ses données à caractère personnel seraient traitées séparément par le délégué à la protection des données de la FRA.

53 Le 20 juin 2016, la requérante a demandé à la FRA de bloquer l’utilisation de ses données à caractère personnel.

54 Par lettre du 24 juin 2016, la FRA a, premièrement, informé la requérante que ses données à caractère personnel étaient traitées dans le cadre de sa demande d’accès aux documents et dans le cadre de l’enquête administrative ouverte à la suite de la première fuite. La FRA a, deuxièmement, nié avoir divulgué ses données à caractère personnel ou son adresse privée à [confidentiel]. La FRA a, troisièmement, affirmé que, hormis les enquêteurs chargés de l’enquête administrative, elle n’avait transmis ses données à caractère personnel à aucune autre partie. La FRA l’a, quatrièmement, informée qu’il n’était pas possible de bloquer ses données à caractère personnel, car une enquête était en cours.

55 Le 4 juillet 2016, la requérante a envoyé une lettre au nouveau directeur de la FRA lui demandant, tout d’abord, pourquoi elle n’avait pas été informée de la transmission aux enquêteurs de ses données à caractère personnel, de quels documents la FRA avait extrait ses données à caractère personnel et à quelle fuite la FRA faisait référence.

56 Par cette même lettre, d’une part, la requérante a ensuite demandé que lui soient envoyés les notifications, informations et documents pertinents, conformément aux dispositions du règlement no 45/2001. D’autre part, elle a déclaré que son adresse électronique privée avait été divulguée par la FRA, puisque le courriel comportait une clause de non-responsabilité de la FRA.

57 Elle a par ailleurs demandé si la FRA avait transmis d’autres documents contenant ses données à caractère personnel et quelle base juridique permettait la divulgation de ces documents.

58 Elle a, enfin, demandé à quelles infractions pénales la FRA faisait référence lorsqu’elle invoquait l’article 20, paragraphe 1, sous a), du règlement no 45/2001.

59 Par lettre du 6 juillet 2016, le nouveau directeur de la FRA a répondu à la requérante que la FRA agissait dans le respect de la réglementation et qu’elle pouvait soumettre ses préoccupations au Médiateur, au CEPD et aux juridictions de l’Union européenne.

60 Le 10 juillet 2016, la requérante a envoyé un courriel au nouveau directeur de la FRA, dans lequel elle avançait que la réponse qu’elle avait reçue du délégué à la protection des données de la FRA n’était pas suffisante, étant donné qu’il était le seul qui pouvait engager la FRA. Elle déclarait également que la réponse était incomplète, car elle ne contenait aucune référence à la transmission par la FRA de sa demande d’accès aux documents à l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), comme ce dernier l’en a informée.

61 Par lettre du 15 juillet 2016, le nouveau directeur de la FRA a approuvé la réponse du délégué à la protection des données de la FRA et a déclaré, d’une part, qu’à la suite du courriel de la requérante, la FRA avait procédé à une double vérification, laquelle avait permis d’établir que ses données à caractère personnel avaient été transmises à l’OLAF le 17 mars 2015, conformément à l’article 2, paragraphe 2, de la décision du conseil exécutif 2013/01, du 22 mai 2013, et, d’autre part, que la divulgation portait sur son nom, son adresse électronique et les courriels relatifs à sa demande d’accès aux documents.

62 Par lettre du 22 août 2016, la FRA a répondu à une demande d’accès aux documents introduite par la requérante en date du 11 juillet 2016 en l’informant que la FRA refusait de divulguer les courriels demandés, étant donné qu’ils contenaient des informations d’intérêt commercial et faisaient partie de procédures juridictionnelles. Elle a toutefois donné à la requérante un accès à divers documents expurgés de données à caractère personnel, à savoir les décisions d’attribution, les bons de commande et les données relatives aux services juridiques.

63 Le 24 août 2016, la requérante a introduit une demande confirmative pour obtenir l’accès aux documents auxquels la FRA lui refusait l’accès.

64 Par courriel du 26 août 2016, la requérante a expliqué au nouveau directeur de la FRA l’intérêt d’une divulgation complète des documents.

65 Le 8 septembre 2016, la requérante a présenté une demande d’accès aux documents au service d’audit interne, demandant en particulier l’accès au rapport d’audit final sur la gestion des ressources humaines au sein de la FRA, au rapport final de l’examen limité de la gestion des contrats au sein de la FRA et aux suivis du service d’audit interne concernant les recommandations en suspens provenant de l’audit de la gestion des ressources humaines au sein de la FRA (2013) et concernant les recommandations en suspens provenant de l’examen limité de la gestion des contrats.

66 Le 12 septembre 2016, la requérante a envoyé un courriel au nouveau directeur de la FRA, se rapportant à l’entretien, lui demandant notamment si la FRA avait aidé [confidentiel].

67 Le 13 septembre 2016, la requérante a envoyé un courriel au nouveau directeur de la FRA, lui demandant des éclaircissements sur les infractions pénales ne permettant pas le blocage de ses données à caractère personnel.

68 Le 28 septembre 2016, la requérante a introduit une demande d’accès aux documents auprès du service d’audit interne, sollicitant en particulier l’accès au rapport d’audit final sur la passation des marchés au sein de la FRA (2012), lequel lui a été accordé.

69 Le 12 octobre 2016, le Médiateur a reçu une plainte de la requérante concernant le refus de la FRA de divulguer complètement l’objet de plusieurs contrats concernant des prestations de services juridiques. »

La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

3 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 novembre 2016, la requérante a introduit un recours tendant à obtenir réparation des préjudices qu’elle aurait subis du fait de plusieurs comportements prétendument illicites de la FRA. Ces comportements auraient consisté, premièrement, en une divulgation irrégulière, à la suite de la demande d’accès aux documents introduite par un tiers, des réponses de la FRA à la requérante, deuxièmement, en une fuite des documents annexés à sa demande d’accès aux documents et des adresses de ses domiciles, troisièmement, en une absence d’adoption de mesures préventives et, quatrièmement, en un entretien irrégulier accordé par le nouveau directeur de la FRA au journal Politico. La requérante évaluait le montant des préjudices subis à 300 000 euros s’agissant du préjudice moral et à 60 000 euros s’agissant du préjudice matériel.

4 Dans le cadre de la procédure suivie devant le Tribunal, la requérante a présenté une demande d’audition de témoins le 30 novembre 2016, plusieurs offres de preuve les 15 juin, 4 et 28 septembre, 30 octobre 2017, 7 et 30 janvier, 5 février, 24 mai, 12 et 28 juin 2018, une demande d’adoption d’une mesure d’organisation de la procédure le 6 juillet 2017, une demande de production d’un moyen nouveau le 11 juillet 2017, ainsi qu’une demande d’adoption d’une mesure d’instruction conformément à l’article 88, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

5 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a condamné la FRA à payer à la requérante la somme de 5 000 euros et a rejeté le recours pour le surplus. Plus précisément, si le Tribunal a, par l’arrêt attaqué, partiellement fait droit aux conclusions de la requérante, en raison du préjudice moral que celle-ci a subi du fait de la divulgation de certaines données à caractère personnel, il a rejeté pour le reste la demande indemnitaire au motif, premièrement, qu’il n’existait pas de lien de causalité entre cette divulgation et le préjudice matériel allégué et, deuxièmement, qu’il n’avait pas été établi que les autres comportements reprochés étaient constitutifs d’une violation de nature à engager la responsabilité de la défenderesse.

Les conclusions des parties devant la Cour

6 Par son pourvoi, la requérante demande à la Cour :

– d’annuler partiellement l’arrêt attaqué et, en conséquence, de lui octroyer une réparation adéquate, en substance, de différents dommages matériels et immatériels causés par l’illégalité et l’irrégularité flagrantes résultant de la violation, par la FRA, de plusieurs règles visant à conférer des droits aux particuliers, et

– de condamner la FRA aux dépens afférents à la procédure de première instance et au pourvoi.

7 La FRA demande à la Cour :

– de rejeter le pourvoi et

– de condamner la requérante à supporter l’intégralité des frais et dépens de l’instance.

Sur le pourvoi

8 À l’appui de son pourvoi, la requérante invoque quatre moyens. Le premier moyen est pris, en substance, d’une erreur de droit et d’une erreur manifeste d’appréciation commises lors de l’examen de la recevabilité du moyen nouveau et des offres de preuves soumises au titre de l’article 85 du règlement de procédure du Tribunal, ainsi que d’une violation du droit d’être entendu, du droit à un procès équitable et du droit à une protection juridictionnelle effective consacré à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Le deuxième moyen est tiré, en substance, d’une erreur de droit et d’une erreur manifeste d’appréciation de la demande indemnitaire en ce que cette dernière était fondée sur une violation des dispositions du règlement no 1049/2001. Le troisième moyen est tiré, pour l’essentiel, de la violation des articles 134 et 135 du règlement de procédure du Tribunal et de l’obligation de motivation. Le quatrième moyen est tiré de la violation de l’article 66 de ce règlement de procédure et d’une composition irrégulière de la formation de jugement.

Sur le premier moyen

9 Le premier moyen se divise en deux branches. Par la première de ces branches, la requérante fait grief au Tribunal d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation en concluant à l’irrecevabilité de la demande de présentation d’un moyen nouveau. Par la seconde desdites branches, elle avance que c’est à tort que le Tribunal a conclu à l’irrecevabilité des preuves qu’elle avait produites au titre de l’article 85 du règlement de procédure du Tribunal.

Sur la première branche

Argumentation des parties

10 La requérante conteste tant les constats figurant aux points 114 et 117 de l’arrêt attaqué que la conclusion, reprise au point 118 de celui-ci, selon laquelle il y avait lieu de rejeter la demande de production d’un moyen nouveau comme étant irrecevable.

11 Premièrement, il ressortirait du dossier que, contrairement à ce que le Tribunal a affirmé au point 114 de l’arrêt attaqué, elle avait bien apporté la preuve que le « dossier [confidentiel] » lui avait été communiqué le 11 mai 2017. Elle indique, par ailleurs, qu’elle n’a pris conscience de l’ampleur des faits évoqués dans ce dossier que le 14 mai 2017, à la suite de l’analyse qui en avait été faite par son avocat. Deuxièmement, le Tribunal aurait méconnu le fait que, conformément à l’article 60 de son règlement de procédure, la requérante pouvait bénéficier d’un délai de distance de dix jours supplémentaires et que, partant, la date qui aurait dû être prise en considération dans l’examen de la recevabilité du moyen nouveau était, en tout état de cause, le 20 mai 2017. Troisièmement, l’appréciation contenue au point 117 de l’arrêt attaqué, selon laquelle la présentation d’un moyen nouveau plus de deux mois après la communication qui a motivé cette présentation était tardive, serait arbitraire, dans la mesure où rien ne permettrait de justifier la référence faite à un tel délai. Quatrièmement, la requérante souligne que, conformément à la jurisprudence, un moyen qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable. Or, le Tribunal aurait omis de qualifier la nature du moyen qui lui avait été présenté et, ainsi, méconnu le principe de bonne administration ainsi que le droit de la requérante à être entendue et celui à un procès équitable.

12 La FRA conteste l’argumentation soulevée par la requérante à l’appui de cette première branche.

Appréciation de la Cour

13 La requérante soutient, en substance, que, en rejetant comme irrecevable le moyen nouveau qu’elle avait présenté, le Tribunal a commis une erreur manifeste d’appréciation, une « dénaturation des faits et des preuves » ainsi qu’une violation de son droit d’être entendue, de son droit à un procès équitable et du principe de bonne administration.

14 En premier lieu, s’agissant de la question de savoir si le Tribunal a commis une erreur d’appréciation en rejetant comme étant irrecevable la demande de production d’un moyen nouveau, il ressort d’une jurisprudence constante que les indications de l’objet du litige et de l’exposé sommaire des moyens contenues dans toute requête introductive d’instance doivent être suffisamment claires et précises pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au juge de l’Union d’exercer son contrôle. De même, les conclusions d’une telle requête doivent être formulées de manière non équivoque, afin d’éviter que ce juge ne statue ultra petita ou bien n’omette de statuer sur un grief (arrêts du 3 avril 2014, France/Commission, C-559/12 P, EU:C:2014:217, point 39 et jurisprudence citée, ainsi que du 26 janvier 2017, Mamoli Robinetteria/Commission, C-619/13 P, EU:C:2017:50, point 31).

15 Il y a également lieu de rappeler que, aux termes de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Conformément à l’article 84, paragraphe 2, de ce règlement de procédure, s’il y a lieu, les moyens nouveaux sont produits lors du deuxième échange de mémoires et identifiés en tant que tels. Lorsque les éléments de droit et de fait qui justifient la production des moyens nouveaux sont connus après le deuxième échange de mémoires ou après qu’il a été décidé de ne pas autoriser un tel échange de mémoires, la partie principale concernée produit les moyens nouveaux dès qu’elle a connaissance de ces éléments.

16 Un évènement doit être considéré comme étant un élément permettant la production d’un moyen nouveau, dès lors que celui-ci est de nature à modifier la situation de droit existant lors du dépôt de la requête. Ne constitue pas, en revanche, un élément nouveau de nature à justifier la présentation d’un nouveau moyen un évènement qui ne fait que confirmer une situation de droit que le requérant de première instance connaissait au moment où il a introduit son recours (voir, en ce sens, arrêt du 14 octobre 2014, Buono e.a./Commission, C-12/13 P et C-13/13 P, EU:C:2014:2284, points 58 et 60).

17 En l’occurrence, la requérante a, par acte déposé au greffe du Tribunal le 11 juillet 2017, introduit une demande, sur le fondement de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, aux fins d’invoquer un « moyen nouveau ». Par ce moyen, la requérante faisait grief à la FRA de « son implication supposée […] dans [confidentiel] », en violation de l’article 54 de la charte des droits fondamentaux, du traité FUE ainsi que des règlements nos 45/2001 et 1049/2001.

18 Il ressort des points 108 à 118 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a considéré que, en raison de sa présentation tardive et en l’absence de justification convaincante apportée par la requérante, le moyen nouveau présenté le 11 juillet 2017 devait être rejeté comme irrecevable.

19 Aucun des arguments avancés par la requérante n’est de nature à invalider ces appréciations.

20 Tout d’abord, il convient de relever que, ainsi que cela ressort du point 117 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé que, même en retenant la date du 11 mai 2017 comme date de prise de connaissance effective par la requérante de [confidentiel], il devait être considéré que ledit moyen nouveau avait été présenté tardivement.

21 Ensuite, s’agissant des arguments dirigés contre la considération figurant au même point, selon laquelle « le dépôt d’une demande aux fins d’invoquer un moyen nouveau n’est intervenu que tardivement, à savoir le 11 juillet 2017, soit plus de deux mois après [la] communication » du dossier en cause, ils reposent sur la prémisse erronée selon laquelle le Tribunal aurait entendu dégager une règle précise quant au délai dans lequel un moyen nouveau doit être présenté pour être déclaré recevable.

22 Or, il apparaît que le Tribunal, en relevant que la requérante avait invoqué un moyen nouveau plus de deux mois après la survenance de l’évènement qui avait justifié sa production, a simplement entendu souligner que celui-ci avait été produit très tardivement. Il importe, à cet égard, de rappeler que, ainsi que cela ressort de l’article 84, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, il appartient à la partie concernée de produire les nouveaux moyens après le deuxième échange de mémoires, dès qu’elle a connaissance de ces éléments.

23 Dans la mesure où l’article 84 du règlement de procédure du Tribunal ne contient aucune indication quant au délai devant être respecté dans la production d’un moyen nouveau, l’argumentation développée par la requérante quant à l’application, en l’occurrence, d’un délai de distance supplémentaire de dix jours ne saurait davantage prospérer.

24 Enfin, s’agissant de l’argument selon lequel le Tribunal aurait dû requalifier le moyen présenté le 11 juillet 2017 comme étant un moyen constituant l’ampliation d’un moyen énoncé précédemment, à savoir le premier moyen avancé à l’appui de sa demande en réparation, qui, conformément à la jurisprudence (voir, notamment, arrêts du 20 décembre 2017, Espagne/Conseil, C-521/15, EU:C:2017:982, point 141 et jurisprudence citée, ainsi que du 4 décembre 2019, H/Conseil, C-413/18 P, non publié, EU:C:2019:1044 point 28), aurait dû être déclaré recevable, il ne saurait davantage être retenu.

25 En effet, eu égard tant à l’énoncé du moyen présenté le 11 juillet 2017, rappelé au point 17 du présent arrêt, qu’à la substance de l’argumentation qui le sous-tend, celui-ci est sans rapport avec ceux avancés à l’appui du recours introduit le 30 novembre 2016. En l’occurrence, la requérante n’avait nullement invoqué à l’appui de son recours un moyen tendant à mettre en cause, de façon plus ou moins directe, l’implication supposée de la FRA dans [confidentiel] et, à ce titre, à obtenir réparation du préjudice subi en raison de cette implication.

26 En second lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel l’arrêt attaqué serait entaché d’une violation de son droit d’être entendue, de son droit à un procès équitable et du principe de bonne administration, il découle de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande (arrêt du 20 septembre 2016, Ledra Advertising e.a./Commission et BCE, C-8/15 P à C-10/15 P, EU:C:2016:701, point 35 ainsi que jurisprudence citée).

27 Or, en l’occurrence, il convient de constater que la requérante se borne, par cet argument, à faire une énonciation abstraite et très générale des normes du droit de l’Union que le Tribunal aurait méconnues, sans fournir de motivation juridique spécifique à cet égard. Dès lors, ledit argument doit être écarté comme étant irrecevable.

28 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter la première branche du premier moyen comme étant, en partie, non fondée et, en partie, irrecevable.

Sur la seconde branche

Argumentation des parties

29 La requérante fait grief au Tribunal d’avoir, en violation de l’article 85 de son règlement de procédure, rejeté illégalement les offres de preuves qu’elle avait présentées. Elle estime que le Tribunal a commis des erreurs de droit et des erreurs manifestes d’appréciation dans l’examen de la recevabilité de ces offres de preuves.

30 Premièrement, s’agissant des preuves présentées le 15 juin 2017, à savoir des documents prétendument issus du [confidentiel], la requérante conteste les conclusions figurant aux points 139, 140 et 143 de l’arrêt attaqué, quant à la recevabilité de ces preuves.

31 Deuxièmement, quant au rejet des preuves produites le 6 juillet 2017, relatives à [confidentiel], la requérante avance que le Tribunal a commis une erreur de droit en concluant, aux points 148 et 149 de l’arrêt attaqué, sur la base des constats figurant aux points 145 et 147 de cet arrêt, que ces preuves ont été produites tardivement et devaient, dès lors, être rejetées comme étant tardives. Elle fait valoir, notamment, qu’elle avait présenté les documents en question dans un délai de deux mois et que le Tribunal, en se prononçant tardivement sur les documents qu’elle avait déjà déposés, a contribué au prétendu dépôt tardif des éléments de preuve en cause.

32 Troisièmement, s’agissant des preuves produites le 4 septembre 2017, à savoir la lettre de l’OLAF du 30 août 2017, la requérante conteste les conclusions figurant aux points 133, 154 et 155 de l’arrêt attaqué. Ce serait à tort que le Tribunal a, d’une part, omis de tenir compte de ces éléments de preuve dans l’examen de la demande en réparation présentée par la requérante et, d’autre part, considéré que cette dernière n’avait pas étayé ses conclusions indemnitaires.

33 Quatrièmement, ce serait également à tort que le Tribunal a rejeté, au point 157 de l’arrêt attaqué, la deuxième preuve mentionnée au point 156 de cet arrêt et présentée le 28 septembre 2017, à savoir le contrat de la FRA 2013-68 portant sur les « stratégies en cas de diffamation ». Cette preuve serait directement liée aux troisième et quatrième preuves mentionnées à ce point 156 et aurait donc dû être déclarée recevable sur le fondement des conclusions figurant au point 159 dudit arrêt.

34 Cinquièmement, la requérante soutient que c’est également à tort que le Tribunal a écarté les preuves présentées le 7 janvier 2018, à savoir [confidentiel], qui seraient en lien direct avec sa demande en réparation pour violation de ses droits en matière de protection de ses données personnelles et avec le moyen nouveau qu’elle avait invoqué le 11 juillet 2017. La requérante critique tant les constatations figurant aux points 165 et 166 de l’arrêt attaqué que la conclusion que le Tribunal en a tirée, reprise au point 168 de cet arrêt. Elle fait valoir que le Tribunal a procédé à une appréciation incomplète des éléments de preuve fournis au titre de cette offre de preuves, a dénaturé les faits et ces éléments de preuve et a, ainsi, commis une erreur de droit en rejetant l’ensemble desdits éléments.

35 Sixièmement, la requérante reproche au Tribunal d’avoir rejeté comme irrecevables les preuves présentées le 30 janvier 2018, à savoir le rapport de l’OLAF dans les affaires jointes OF/2014/0192 et OF/2015/0167 et la facture d’un montant de 13 600 lei roumains (RON). Elle conteste tant les constatations reprises aux points 175 et 176 de l’arrêt attaqué que la conclusion figurant au point 177 de cet arrêt. Elle souligne notamment que la production tardive de ce rapport de l’OLAF était parfaitement justifiée dans les circonstances de l’espèce et au regard des critères dégagés par la jurisprudence. De plus, le Tribunal aurait omis de répondre à sa demande, évoquée au point 172 de l’arrêt attaqué, d’évaluation des conséquences des prétendues déclarations diffamatoires de la FRA à son égard et d’une prétendue atteinte à sa réputation. De même, contrairement à ce qu’il a conclu au point 179 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait dû déclarer recevable la facture de 13 600 RON qu’elle avait présentée à l’appui de sa demande en réparation, en vue d’établir le montant des frais qu’elle avait engagés dans le cadre de la procédure précontentieuse suivie devant la FRA.

36 Septièmement, ce serait également à tort que le Tribunal a écarté le dossier complet de l’OLAF qu’elle avait présenté afin de permettre à celui-ci de vérifier l’exactitude et la véracité de ses allégations antérieures liées à ses droits à la protection de ses données personnelles. La requérante fait valoir que tous les moyens de preuve doivent être déclarés recevables, à l’exception de ceux obtenus illégalement et des documents internes.

37 La FRA considère que l’ensemble des arguments de la requérante sont non fondés et doivent être rejetés.

Appréciation de la Cour

38 D’emblée, il convient de rappeler que, conformément à l’article 76, sous f), du règlement de procédure du Tribunal, toute requête doit contenir les preuves et offres de preuve, s’il y a lieu.

39 Dans le cadre d’un recours en responsabilité non contractuelle, il incombe à la partie requérante d’apporter des éléments de preuve au juge de l’Union, afin d’établir la réalité et l’ampleur du dommage qu’elle prétend avoir subi. Si le juge de l’Union a reconnu que, dans certains cas, notamment lorsqu’il est difficile de chiffrer le dommage allégué, il n’est pas indispensable de préciser, dans la requête, son étendue exacte ni de chiffrer le montant de la réparation demandée (arrêt du 28 février 2013, Inalca et Cremonini/Commission, C-460/09 P, EU:C:2013:111 point 104 et jurisprudence citée), la partie requérante ne devrait pas être autorisée, en l’absence de précisions quant à l’éventuelle existence de circonstances particulières justifiant l’omission de préciser les chefs de préjudice figurant dans la requête, à étendre la portée de sa demande en réparation en invoquant, au cours de la procédure, de nouveaux chefs de préjudice et offres de preuve sans rapport avec la demande telle que formulée dans la requête.

40 Le paragraphe 1 de l’article 85 du règlement de procédure du Tribunal précise, ainsi, que les preuves et offres de preuves sont présentées dans le cadre du premier échange de mémoires. Le paragraphe 2 de cet article ajoute que les parties peuvent encore produire des preuves ou faire des offres de preuves dans la réplique et la duplique à l’appui de leur argumentation, à condition que le retard dans la présentation de celles-ci soit justifié. Dans ce dernier cas, conformément au paragraphe 4 dudit article, le Tribunal statue sur la recevabilité des preuves produites ou des offres de preuves qui ont été faites après que les autres parties ont été mises en mesure de prendre position sur celles-ci.

41 Si, conformément à la règle de forclusion prévue à l’article 85, paragraphe 1, dudit règlement de procédure, les parties doivent motiver le retard apporté à la présentation de leurs preuves ou offres de preuves nouvelles, le juge de l’Union a le pouvoir de contrôler le bien-fondé du motif du retard apporté à la production de ces preuves ou de ces offres de preuves et, selon le cas, le contenu de ces dernières ainsi que, si cette production tardive n’est pas justifiée à suffisance de droit ou fondée, le pouvoir de les écarter. La présentation tardive, par une partie, de preuves ou d’offres de preuves peut, notamment, être justifiée par le fait que cette partie ne pouvait pas disposer antérieurement des preuves en question ou si les productions tardives de la partie adverse justifient que le dossier soit complété, de façon à ce que soit assuré le respect du principe du contradictoire (voir, en ce sens, arrêt du 14 avril 2005, Gaki-Kakouri/Cour de justice, C-243/04 P, non publié, EU:C:2005:238, points 32 et 33).

42 Il ressort de la jurisprudence que, si l’appréciation, par le Tribunal, du contenu des éléments de preuve qui lui sont soumis ne constitue pas, sous réserve du cas de la dénaturation de ces éléments, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (ordonnance du 3 septembre 2013, Idromacchine e.a./Commission, C-34/12 P, non publiée, EU:C:2013:552, point 64 et jurisprudence citée), l’examen par le Tribunal de la recevabilité des offres de preuves qui lui ont été présentées est constitutive d’une telle question soumise au contrôle de la Cour (voir, en ce sens, arrêt du 14 avril 2005, Gaki-Kakouri/Cour de justice, C-243/04 P, non publié, EU:C:2005:238, points 33 et 34).

43 En l’espèce, s’agissant, en premier lieu, des éléments produits le 15 juin 2017, c’est sans commettre d’erreur que le Tribunal a conclu à leur irrecevabilité.

44 Tout d’abord, il est fait observer que la requérante n’a pas avancé d’éléments indiquant qu’elle n’avait eu connaissance de [confidentiel] qu’au mois de mai 2017. Il s’ensuit qu’elle n’est pas fondée à contester la conclusion du Tribunal, relative à la lettre du 16 avril 2015 et aux courriels des 16 avril 2014 et 2 décembre 2013, figurant aux points 139 et 140 de l’arrêt attaqué.

45 Ensuite, le fait que les documents produits le 15 juin 2017 seraient, en réalité, quasi identiques à ceux produits un mois auparavant, à savoir par mémoire présenté le 16 mai 2017, que le Tribunal aurait erronément décidé d’écarter en omettant de demander à la requérante une régularisation de ce mémoire, il suffit de relever que, à supposer que la requérante ait dû bénéficier d’une possibilité de régularisation, cette circonstance n’est pas de nature à invalider la constatation selon laquelle elle n’a pas été en mesure de justifier la production tardive des documents déposés le 15 juin 2017. En tout état de cause, si le mémoire présenté à cette date a effectivement été régularisé à la demande du greffe du Tribunal, il est apparu que, en dépit de cette régularisation, les documents produits soit étaient illisibles, soit divergeaient de ceux initialement transmis.

46 Enfin, s’agissant des considérations relatives à la recevabilité du courriel du 29 novembre 2013, figurant aux points 141 à 143 de l’arrêt attaqué, force est également de relever que la requérante n’a pas même avancé un début d’explication des motifs pour lesquels celui-ci a été produit tardivement.

47 En deuxième lieu, quant aux éléments produits le 6 juillet 2017, il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, ce n’est qu’à titre exceptionnel que les parties peuvent encore produire des preuves ou faire de offres de preuves. Il ressort de cette disposition que tout retard dans la production de celles-ci doit être justifié. Or, dans la mesure où la requérante ne conteste pas la constatation selon laquelle elle n’avait pas justifié le retard en cause, c’est sans commettre d’erreur que le Tribunal a rejeté les documents contenus dans la deuxième demande d’offre de preuves.

48 En troisième lieu, s’agissant des éléments de preuve produits le 4 septembre 2017, la requérante n’a pas davantage établi que les considérations figurant aux points 154 et 155 de l’arrêt attaqué sont entachées d’une erreur d’appréciation quelconque ou d’une dénaturation des éléments du dossier. Elle a, en particulier, omis d’expliquer pour quels motifs ces documents étaient de nature à étayer sa demande indemnitaire, telle qu’elle avait été formulée dans l’acte introductif d’instance.

49 En quatrième lieu, en ce qui concerne le rejet du deuxième document mentionné dans la quatrième offre de preuves présentée le 28 septembre 2017, à savoir « la facture pour des services juridiques rendus à la suite du bon de commande 2013-68 “Stratégies en cas de diffamation” », la requérante n’a pas davantage démontré en quoi le Tribunal s’est mépris ou a dénaturé les éléments de preuve soumis en considérant que ce document ne présentait pas de lien suffisamment direct avec les conclusions indemnitaires formulées dans la requête.

50 En cinquième lieu, s’agissant de la sixième offre de preuves, présentée le 7 janvier 2018, la même conclusion s’impose. À cet égard et ainsi que la requérante l’a admis, cette offre de preuves se rattachait, pour l’essentiel, au moyen nouveau présenté par acte du 11 juillet 2017, moyen que le Tribunal a, à bon droit, déclaré irrecevable. C’est donc sans commettre d’erreur que le Tribunal a jugé que les éléments de preuve avancés au soutien de ce moyen devaient être écartés.

51 En sixième lieu, en ce qui concerne le rejet de la septième offre de preuves, déposée le 30 janvier 2018 et mentionnée aux points 175 et 176 de l’arrêt attaqué, consistant dans le rapport de l’OLAF du 16 décembre 2016 ainsi que dans une sélection d’annexes de ce rapport, il y a lieu de relever, tout d’abord, que la requérante n’a pas été à même de fournir devant le Tribunal des explications convaincantes sur les raisons qui l’avaient conduite à produire ces documents très tardivement. Contrairement à ce que la requérante avance, il incombait à elle seule de fournir les documents qu’elle estimait pertinents pour étayer des conclusions indemnitaires. En l’occurrence, il ne saurait donc être fait grief à la FRA de ne pas avoir produit lesdits documents. Il ne saurait davantage être reproché au Tribunal d’avoir demandé la production de ces mêmes documents eu égard au devoir d’instruction des faits qui lui incombe.

52 Ensuite, quant à l’argument selon lequel le Tribunal a omis de répondre à sa demande d’évaluation des conséquences des déclarations diffamatoires de la FRA à son égard, évoquée au point 172 de l’arrêt attaqué, il ne saurait être retenu. En effet, le Tribunal a explicitement répondu à cette demande au point 181 de l’arrêt attaqué en indiquant qu’« il y a[vait] lieu de rejeter les conclusions ampliatives en réparation de la requérante, reproduites au point 172 [de cet] arrêt, qui sont étroitement liées à la septième offre de preuves, en particulier au rapport de l’OLAF ». Le Tribunal a ajouté, au point 182 dudit arrêt, que, « même à considérer que lesdites conclusions [étaient] détachables et autonomes desdites offres de preuves, elles ne se fond[ai]ent sur aucun argument ou moyen additionnel à ceux déjà avancés au soutien des conclusions déjà formulées dans la requête ». Eu égard à ces considérations, il ne peut être soutenu que le Tribunal a omis de statuer sur la demande décrite au point 172 de l’arrêt attaqué.

53 Enfin, s’agissant de la facture datée du 23 mai 2016, mentionnée au point 179 de l’arrêt attaqué, il ressort du dossier soumis à la Cour que la requérante n’a pas indiqué pour quel motif elle n’avait pas été en mesure de la produire au stade de l’introduction du recours. Il ne saurait donc être reproché au Tribunal d’avoir, au point 180 de l’arrêt attaqué, jugé qu’il convenait de rejeter la demande de production de cette dernière facture comme étant irrecevable.

54 En septième et dernier lieu, il ne saurait davantage être reproché au Tribunal d’avoir écarté la huitième offre de preuves, produite par la requérante le 5 février 2018 et consistant dans l’intégralité des annexes du rapport de l’OLAF précité, auquel la requérante a, de façon globale, effectué un renvoi, sans expliquer de manière précise en quoi lesdites annexes étaient de nature à étayer les conclusions indemnitaires qu’elle avait formulées. Dans ce contexte, c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a rappelé, au point 186 de l’arrêt attaqué, qu’il n’appartenait pas au juge de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (voir, en ce sens, arrêt du 2 octobre 2019, Crédit mutuel Arkéa/BCE, C-152/18 P et C-153/18 P, EU:C:2019:810, point 39 ainsi que jurisprudence citée).

55 Il résulte de l’ensemble de ces considérations que le rejet des offres de preuves susmentionnées n’apparaît pas entaché d’une quelconque erreur et que, partant, la seconde branche du premier moyen doit être écartée.

56 Dans ces conditions, le premier moyen du pourvoi doit être rejeté.

Sur le deuxième moyen

Argumentation des parties

57 Par son deuxième moyen, qui vise l’appréciation faite par le Tribunal de l’argument tiré d’une divulgation irrégulière des réponses de la FRA à la requérante dans le cadre d’une demande d’accès à des documents, introduite par un tiers, la requérante critique les constatations effectuées aux points 233 à 236 de l’arrêt attaqué ainsi que la conclusion que le Tribunal en a tirée au point 237 de cet arrêt.

58 Premièrement, la requérante fait valoir que les trois courriels divulgués par la FRA à [confidentiel] dans le cadre d’une demande d’accès à des documents, introduite sur le fondement du règlement no 1049/2001, ont été utilisés dans le cadre de [confidentiel]. Elle soutient que, dans les faits, la FRA l’a traitée comme une personne « identifiable ».

59 Deuxièmement, la requérante soutient que le Tribunal a commis une erreur d’appréciation de sa demande en réparation, en omettant d’examiner la portée et la nature des documents contenant certaines de ses données confidentielles que la FRA a, de manière fautive, divulguées. Elle fait valoir, en particulier, que le Tribunal n’a pas convenablement apprécié la réponse de la FRA à sa mesure d’organisation de la procédure et ses annexes, ce qui inclurait les lettres des 12 novembre et 9 décembre 2015. La requérante ajoute que la FRA lui a illégalement caché des informations et n’a pas respecté, au regard des articles 11, 13, 15 et 17 du règlement no 45/2001, la procédure engagée par elle au mois de juin 2016, alors qu’elle n’avait pas eu connaissance des [confidentiel].

60 Troisièmement, la requérante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en méconnaissant la portée de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001 et, en définitive, l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001, telle que cette portée a notamment été précisée par la Cour dans son arrêt du 29 juin 2010, Commission/Bavarian Lager (C-28/08 P, EU:C:2010:378). Elle critique l’examen qui a été fait, aux points 221 à 260 de l’arrêt attaqué, de l’argument tiré d’une divulgation irrégulière des réponses de la FRA. Le Tribunal aurait notamment omis de tenir compte de la circonstance que, premièrement, les courriels divulgués contenaient des données exclusivement personnelles de la requérante, ne présentant pas de rapport avec les activités de la FRA, et, deuxièmement, que celle-ci avait invité la FRA à établir qu’elle avait effectivement mis en balance les intérêts en présence préalablement à la divulgation litigieuse.

61 La FRA conteste l’argumentation soulevée par la requérante à l’appui de son deuxième moyen.

Appréciation de la Cour

62 Par son deuxième moyen, la requérante entend, en substance, critiquer l’examen qui a été fait, aux points 233 et 234 de l’arrêt attaqué, de la portée et du contenu des réponses de la FRA fournies en réponse à une demande d’accès aux documents introduite par un tiers. La requérante soutient que la FRA a divulgué ses « données personnelles », ce qui constituerait une violation de nature à engager la responsabilité de la FRA. En attesterait notamment la circonstance que son nom aurait été mentionné dans le cadre [confidentiel].

63 Or, il importe de rappeler qu’il résulte de l’article 256 TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le Tribunal est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. Cette appréciation ne constitue pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant le Tribunal, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour. Lorsque le Tribunal a constaté ou apprécié les faits, la Cour est compétente pour exercer, en vertu de l’article 256 TFUE, un contrôle sur la qualification juridique de ces faits et les conséquences de droit qui en ont été tirées par le Tribunal (arrêt du 4 février 2020, Uniwersytet Wrocławski et Pologne/REA, C-515/17 P et C-561/17 P, EU:C:2020:73, point 47).

64 Lorsqu’il allègue une dénaturation d’éléments de preuve par le Tribunal, un requérant doit indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés et démontrer les erreurs d’analyse qui auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation (arrêt du 9 juin 2011, Comitato « Venezia vuole vivere » e.a./Commission, C-71/09 P, C-73/09 P et C-76/09 P, EU:C:2011:368, point 152 ainsi que jurisprudence citée). Cette dernière doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêts du 29 octobre 2015, Commission/ANKO, C-78/14 P, EU:C:2015:732, point 54 et jurisprudence citée, ainsi que du 12 janvier 2017, Timab Industries et CFPR/Commission, C-411/15 P, EU:C:2017:11, point 89 et jurisprudence citée). Dès lors, il ne suffit pas, afin de démontrer l’existence d’une telle dénaturation, de proposer une lecture desdits éléments de preuve différente de celle retenue par le Tribunal (arrêt du 29 octobre 2015, Commission/ANKO, C-78/14 P, EU:C:2015:732, point 55 et jurisprudence citée).

65 Or, en l’occurrence, d’une part, la requérante n’a pas établi que le Tribunal a dénaturé les éléments de preuve qui lui ont été soumis. Il apparaît que, par son argumentation, la requérante vise, en réalité, à demander à la Cour de procéder à une nouvelle appréciation des éléments de preuve, laquelle échappe au contrôle de la Cour, en réitérant, au demeurant, pour l’essentiel, les arguments présentés devant le Tribunal.

66 D’autre part, il n’a pas été démontré que les appréciations auxquelles s’est livré le Tribunal sont entachées d’une quelconque erreur de qualification juridique des faits. Il n’est ainsi nullement contesté par la requérante que les réponses de la FRA ont été transmises à la requérante à la suite de l’introduction, par cette dernière, d’une demande d’accès aux documents, à savoir dans le cadre de l’exercice, par la FRA, de sa compétence pour statuer sur une telle demande, ainsi que le Tribunal l’a constaté au point 236 de l’arrêt attaqué. Partant, c’est sans commettre d’erreur que le Tribunal a pu conclure, au point 237 de l’arrêt attaqué, qu’« il ne saurait être fait grief à la FRA d’avoir, s’agissant de ses réponses, divulgué des données à caractère personnel de la requérante ».

67 Quant à l’argumentation selon laquelle le Tribunal aurait commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’examen de sa demande indemnitaire, en raison, notamment, d’une appréciation incorrecte de la réponse de la FRA à une mesure d’organisation de la procédure, d’une divulgation illégale par la FRA de certaines informations et du non-respect par la FRA, au regard des articles 11, 13, 15 et 17 du règlement no 45/2001, de la procédure engagée par la requérante au mois de juin 2016, il suffit de constater que les arguments contenus dans la requête en pourvoi n’identifient pas de manière précise le raisonnement du Tribunal qu’elle estime entaché d’erreurs de droit.

68 S’agissant de l’allégation selon laquelle le Tribunal aurait méconnu les principes dégagés dans l’arrêt du 29 juin 2010, Commission/Bavarian Lager (C-28/08 P, EU:C:2010:378), elle repose sur la prémisse selon laquelle les trois courriels en cause contiendraient des données personnelles de la requérante, ce qui, selon elle, aurait pu justifier l’application de l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001 et de l’article 8, sous b), du règlement no 45/2001.

69 Or, une telle prémisse est erronée, dans la mesure où lesdits courriels, qui contenaient initialement des données à caractère personnel, à savoir le nom de la requérante et son adresse électronique, ont été expurgés avant leur divulgation à un tiers dans le cadre d’une demande d’accès à des documents, ce dont la requérante avait été dûment informée par un courriel daté du 13 juin 2016.

70 À la lumière des considérations qui précèdent, il y a lieu d’écarter le deuxième moyen comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.

Sur le quatrième moyen

Argumentation des parties

71 Par son quatrième moyen, qu’il y a lieu d’examiner avant le troisième moyen, la requérante fait grief au Tribunal, premièrement, d’avoir violé la lettre et l’esprit de l’article 66 de son règlement de procédure, d’une part, en mentionnant dans l’arrêt attaqué, notamment aux points 113 et 138 de celui-ci, certaines données sensibles qui pourraient être utilisées contre elle et, d’autre part, d’avoir, par la suite, expurgé ce texte de telle manière qu’il serait devenu difficile à comprendre, ainsi qu’en attesterait la circonstance que le CEPD lui a demandé de fournir la version intégrale (confidentielle) non expurgée de cet arrêt. Ces erreurs seraient de nature à lui causer du tort et à porter atteinte à sa réputation.

72 Deuxièmement, la requérante considère que, à la suite de la récusation du président de chambre et d’un membre de la formation de jugement, le Tribunal aurait dû renvoyer l’affaire à une formation de jugement élargie, en application de l’article 28, paragraphe 1, de son règlement de procédure, a fortiori dès lors que l’affaire était, selon elle, suffisamment complexe et sensible. La requérante ajoute que, selon sa lecture de l’article 21, paragraphe 4, de ce règlement de procédure, le fait que le juge rapporteur avait également été désigné comme président de chambre par intérim pouvait signifier que, en cas de vote, ce juge était habilité à voter à deux reprises.

73 La FRA conteste l’argumentation soulevée par la requérante à l’appui du quatrième moyen et conclut au rejet de celui-ci comme non fondé.

Appréciation de la Cour

74 Le quatrième moyen, qui est, en substance, composé de deux branches, vise, d’une part, les données prétendument sensibles qui figureraient dans l’arrêt attaqué, dont certaines ont été omises par la suite, et, d’autre part, la composition de la formation de jugement du Tribunal.

75 En premier lieu, s’agissant de la question de savoir si le Tribunal a, de manière fautive, fait mention, dans l’arrêt attaqué, de certaines données qui pourraient se révéler préjudiciables à la requérante, il convient de rappeler que l’article 66 du règlement de procédure du Tribunal, dont la requérante invoque la violation, dispose que, « [s]aisi d’une demande motivée d’une partie présentée par acte séparé ou d’office, le Tribunal peut omettre le nom d’une partie au litige ou celui d’autres personnes mentionnées dans le cadre de la procédure, ou encore certaines données dans les documents afférents à l’affaire auxquels le public a accès, si des raisons légitimes justifient que l’identité d’une personne ou le contenu de ces données soient tenus confidentiels ».

76 Ainsi que la requérante l’a reconnu dans ses écritures, le Tribunal a, le 10 février 2017, fait droit à sa demande d’anonymat introduite concomitamment à sa requête le 30 novembre 2016. Outre le fait que l’identité exacte de la requérante, désignée par « BP », ne figure pas dans la version publique de l’arrêt attaqué, celle-ci n’a pas établi que cet arrêt comporte des éléments qui pourraient être utilisés contre elle. S’agissant, en particulier, des points 113 et 138 de la version publique (non-confidentielle) dudit arrêt, tel que rectifié par l’ordonnance du Tribunal du 18 décembre 2019, BP/FRA (T-838/16 REC-INTP), qui sont les seuls spécifiquement visés par la requérante, ils sont libellés de la manière suivante :

« 113 En l’espèce, la requérante soutient, afin de justifier le retard dans la production de ce moyen nouveau, que l’élément factuel qu’elle estime à l’origine de sa demande ne s’est révélé que les 11 mai et 30 juin 2017, lorsqu’elle a, respectivement, obtenu une copie du dossier [confidentiel] et reçu le mémoire en duplique de la FRA ainsi que ses annexes.

[…]

138 Quant aux annexes au dossier [confidentiel], ces dernières concernent [confidentiel]. La requérante justifie leur dépôt tardif par la réception du dossier [confidentiel] le 11 mai 2017. »

77 Force est de constater que, compte tenu de l’omission des données confidentielles qu’ils comportent, ces passages ne permettent pas de près ou de loin d’identifier la requérante ou encore de porter à la connaissance du public des éléments qui permettraient de le faire.

78 En second lieu, s’agissant de l’argument visant à mettre en cause la composition de la formation de jugement, il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 28, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, « [l]orsque la difficulté en droit ou l’importance de l’affaire ou des circonstances particulières le justifient, une affaire peut être renvoyée devant la grande chambre ou devant une chambre siégeant avec un nombre différent de juges ».

79 Le renvoi d’une affaire à une formation de jugement élargie est une faculté et non une obligation, dont l’usage est subordonné aux critères définis dans ce règlement de procédure.

80 En l’espèce, la requérante n’établit pas, à suffisance de droit, les raisons objectives pour lesquelles il devrait être considéré que l’affaire dont était saisi le Tribunal présentait une difficulté, une importance ou encore une particularité qui justifiait nécessairement un renvoi à une formation de jugement élargie.

81 Par ailleurs, l’argument selon lequel la juge rapporteure se serait vu attribuer une double voix en raison de sa qualité de présidente faisant fonction de président de la formation de jugement concernée doit être écarté, la requérante n’avançant aucun fondement à l’appui de cette allégation. Si l’article 21, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, qui porte sur les modalités de vote lors des délibérations, indique que « [le] juge rapporteur […] vote en premier lieu et [le] président […] vote en dernier lieu », cette précision n’implique pas que le juge rapporteur qui est en même temps président de la formation de jugement est appelé à voter à deux reprises, et donc à bénéficier de deux voix, en vertu de cette même disposition.

82 Par conséquent, le quatrième moyen doit être écarté comme étant non fondé.

Sur le troisième moyen

83 Par son troisième moyen, la requérante soutient que le Tribunal a violé les articles 134 et 135 de son règlement de procédure ainsi que l’obligation de motivation en décidant que chaque partie devait supporter ses propres dépens. Elle vise plus particulièrement les points 415 et 416 de l’arrêt attaqué.

84 À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il est de jurisprudence constante que, dans l’hypothèse où tous les autres moyens d’un pourvoi ont été rejetés, les conclusions relatives à la prétendue irrégularité de la décision du Tribunal sur les dépens doivent être rejetées comme étant irrecevables, en application de l’article 58, second alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, aux termes duquel un pourvoi ne peut porter uniquement sur la charge et le montant des dépens (arrêts du 12 juillet 2001, Commission et France/TF1, C-302/99 P et C-308/99 P, EU:C:2001:408, point 31, ainsi que du 9 juin 2016, CEPSA/Commission, C-608/13 P, EU:C:2016:414, point 75 et jurisprudence citée).

85 La requérante ayant succombé en ses premier, deuxième et quatrième moyens du pourvoi, le présent moyen, relatif à la répartition des dépens, doit, dès lors, être déclaré irrecevable.

86 Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, il convient de rejeter le pourvoi dans son intégralité.

Sur les dépens

87 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En l’espèce, la requérante ayant succombé en ses moyens et la FRA ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de condamner la requérante à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la FRA.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) déclare et arrête :

1) Le pourvoi est rejeté.

2) BP est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA).

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.


1 Données confidentielles occultées.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CJUE, n° C-669/19, Arrêt de la Cour, BP contre Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne (FRA), 16 septembre 2020