Tribunal administratif de Strasbourg, 3ème chambre, 29 janvier 2024, n° 2207093

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Strasbourg, 3e ch., 29 janv. 2024, n° 2207093
Juridiction : Tribunal administratif de Strasbourg
Numéro : 2207093
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 6 février 2024

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 26 octobre 2022, Mme B A, représentée par Me Dollé, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d’enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour l’autorisant à travailler et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai déterminé, au besoin sous astreinte ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 800 euros à verser à son conseil, au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

— le préfet n’a pas répondu à sa demande tendant à la communication des motifs de la décision attaquée ;

— la décision, qui méconnaît les dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation ;

— elle peut prétendre à une admission au séjour en qualité d’étudiante.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 mai 2023, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Le préfet fait valoir que :

— le 12 mai 2023, il a adopté une décision expresse de refus de séjour ;

— les moyens invoqués par Mme A ne sont pas fondés.

Mme A a été admise au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 21 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

— le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Bouzar,

— et les observations de Me Dollé, représentant Mme A, présente à l’audience.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A, ressortissante albanaise née en 1999, est entrée en France le

11 juillet 2017 avec ses parents et son frère. Sa demande d’asile a été rejetée en dernier lieu par la cour nationale du droit d’asile par décision du 28 janvier 2019. Sa demande de titre de séjour en qualité d’étudiante a été rejetée par une décision du 17 mai 2019. Ce même jour, elle a fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français. Par un courrier du 8 septembre 2021, l’intéressée a sollicité son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale. Elle a saisi le tribunal d’une requête tendant à l’annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité. Postérieurement à cette saisine, par une décision expresse du 12 mai 2023, le préfet de la Moselle a expressément rejeté la demande de titre de séjour de Mme A. Sa requête doit ainsi être regardée comme dirigée contre cette dernière décision, qui s’est substituée à la première.

2. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme A ne peut utilement soutenir que le préfet de la Moselle n’a pas répondu à sa demande de communication des motifs de la décision implicite contestée initialement, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 232-4 du code des relations entre le public et l’administration. Au surplus, la décision du 12 mai 2023, qui s’est substituée à la décision implicite de rejet, comporte suffisamment les considérations de droit et de fait qui la fondent. Par conséquent, ce moyen doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « L’étranger qui n’entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d’autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention » vie privée et familiale « d’une durée d’un an, sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d’existence de l’étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d’origine. L’insertion de l’étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ».

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A est entrée en France à l’âge de 17 ans et 10 mois avec ses parents et son jeune frère. A la date de la décision attaquée, sa mère séjourne de manière irrégulière sur le territoire français et son père réside en Belgique. Par ailleurs, elle ne se prévaut d’aucune autre relation familiale sur le territoire français suffisamment ancienne, stable et intense. De plus, si elle produit quelques attestations de ses amis ou faisant état de son engagement bénévole auprès de l’association AFEV, qui a pour mission le soutien scolaire à de jeunes élèves, ou encore si elle fait état des études qu’elle poursuit à l’université de Lorraine en « langues étrangères appliquées », il n’en résulte pas une intégration dans la société française telle que, en refusant de l’admettre au séjour, le préfet de la Moselle puisse être regardé comme ayant méconnu les dispositions de l’article L. 423-23 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Par conséquent, ce moyen doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l’article L. 435-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « L’étranger dont l’admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu’il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention » salarié « , » travailleur temporaire « ou » vie privée et familiale « , sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1 ».

6. Il résulte des motifs exposés précédemment que Mme A ne peut se prévaloir d’aucune considération humanitaire ou de motifs exceptionnels dont il résulterait qu’en refusant de l’admettre au séjour à titre exceptionnel au titre de la vie privée et familiale, le préfet de la Moselle aurait commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’application des dispositions précitées.

7. En dernier lieu, Mme A a uniquement demandé son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale. Elle ne peut, dès lors, utilement invoquer le bénéfice des dispositions de l’article L. 422-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, en ce qu’elles prévoient la possibilité pour l’autorité administrative d’accorder une carte de séjour portant la mention « étudiant » en cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l’étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l’âge de seize ans et qu’il y poursuit des études supérieures.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme A doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d’injonction ainsi que celles tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1 : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A et au préfet de la Moselle.

Copie en sera adressée au ministre de l’intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l’audience du 15 janvier 2024 à laquelle siégeaient :

M. Julien Iggert, président,

M. Mohammed Bouzar, premier conseiller,

Mme Laetitia Kalt, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 janvier 2024.

Le rapporteur,

M. BOUZAR

Le président,

J. IGGERT

Le greffier,

S. PILLET

La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Strasbourg, le

Le greffier,

No 2207093

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