Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 11 septembre 2001

  • Droit commun de la responsabilité civile quasidélictuelle·
  • Liquidation de l'astreinte sur les ventes à l'étranger·
  • B) détermination de la marge beneficiaire applicable·
  • 1) manque a gagner ou perte des parts de marché·
  • Affectation des taux de remises sur factures·
  • Demandeur : capacite industrielle suffisante·
  • Prix de revient moyen des articles originaux·
  • A) détermination de la masse contrefaisante·
  • Charge de la preuve pesant sur le demandeur·
  • 2) préjudice moral et préjudice commercial

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Partie figurative (representation en couleurs du modele de girafe) jeux et jouets a l’exception des cartes a jouer

pour fabriquer des quantites superieures a sa propre production, necessite d’acquerir d’autres moyens de fabrication, d’embaucher ou de former du personnel supplementaire (non)

possibilite d’obtenir un complement de production par une meilleure utilisation des equipements et une rotation plus efficace des intervenants sans entrainer de surcouts significatifs

prise en compte des articles contrefaisants vendus en france et a l’etranger et des retours sur ventes

deduction du cout de la matiere premiere et des composants, du cout de la main d’oeuvre de fabrication et d’emballage

investissements importants de publicite pour maintenir la connaissance du public sur le modele et contrecarrer la contrefacon du defendeur

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch., 11 sept. 2001
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Publication : PIBD 2002 737 III 124
Décision(s) liée(s) :
  • COUR D'APPEL DE PARIS DU 30 JUIN 2000, TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS DU 22 NOVEMBRE 1996 ET TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS DU 19 JANVIER 1999
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Marques : SOPHIE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 913169;1655820
Classification internationale des marques : CL28
Classification internationale des dessins et modèles : CL21-01
Liste des produits ou services désignés : Jeux et jouets a l'exception des cartes a jouer
Référence INPI : D20010146
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Texte intégral

FAITS ET PROCEDURE La société VULLI (ci-après VULLI) a déposé le 24 mai 1991 à l’INPI sous le n°913169, trois modèles de jouets d’enfant dont celui dit « la girafe SOPHIE » référencée sous le n°0300786. Ces modèles ont été publiés le 30 août 1991. VULLI est par ailleurs titulaire d’une marque complexe constituée de la dénomination SOPHIE associée à la représentation en couleurs du modèle de la girafe SOPHIE n°0300786. Cette marque déposée le 10 avril 1991 a été enregistrée sous le n°1655820 et sert à désigner, en classe 28, les jeux et jouets, à l’exception des cartes à jouer. La girafe SOPHIE a été commercialisée pour la première fois en 1961 par la société DELACOSTE. Elle figure depuis 1990 au catalogue de VULLI dont elle est un des produits vedette. VULLI commercialise également dans une gamme appelée « premiers compagnons » un jouet en caoutchouc naturel représentant un éléphant. Après y avoir été régulièrement autorisée, VULLI a fait procéder le 30 mars 1995 à Strasbourg et le 4 avril 1995 au magasin LA SAMARITAINE à Paris, à la saisie- contrefaçon d’un jouet en forme de girafe, commercialisé sous la marque PLAYSKOOL par la société M. B FRANCE, qui reproduirait les caractéristiques de sa marque et de son modèle girafe SOPHIE. Puis, elle a assigné M. B FRANCE, par acte du 12 avril suivant, aux fins de constatation judiciaire de la contrefaçon de sa marque n°1655820 et de son modèle girafe SOPHIE sur le fondement tant des articles L111-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle que des articles L511-1 et suivants du même Code, ainsi que d’actes de concurrence déloyale commis à son préjudice résultant de la commercialisation d’un jouet girafe et d’un autre en forme d’éléphant dénommé « mon premier ami ». Elle sollicite, outre des mesures d’interdiction, de confiscation et de publication, une provision de 1.000.000 francs à valoir sur la réparation de son préjudice à déterminer après expertise comptable également requise, l’exécution provisoire et 50.000 francs au titre des frais irrépétibles. Par jugement rendu le 22 novembre 1996, le tribunal de céans a :

- constaté la validité du modèle de jouet n°0300786 dit SOPHIE,
- déclaré VULLI recevable et bien fondée en son action en contrefaçon sur le fondement tant des articles L511 et suivants du Code de la propriété intellectuelle que de l’article L122-4 du même Code,
- dit que M. B FRANCE, en fabriquant et en commercialisant, sans l’autorisation de VULLI, un jouet en forme de girafe reprenant les caractéristiques de la girafe SOPHIE, a commis la contrefaçon du modèle précité,
- interdit sous astreinte à M. B FRANCE la poursuite de ses agissements et ordonné à

celle-ci la remise des jouets « girafe » contrefaisants aux fins de destruction,
- avant dire droit sur la réparation définitive du préjudice subi par VULLI du fait de la contrefaçon de son modèle, commis Mr Philippe G en qualité d’expert avec mission de déterminer la masse contrefaisante, de donner son avis sur le préjudice subi et de fournir au tribunal tous les éléments lui permettant d’en fixer la réparation,
- condamné M. B FRANCE à payer à VULLI une indemnité provisionnelle de 300.000 francs,
- autorisé la publication du dispositif du jugement,
- débouté VULLI du surplus de son action en contrefaçon et en concurrence déloyale relativement à la commercialisation d’un jouet en forme d’éléphant,
- prononcé la nullité de l’enregistrement de la marque n°1.655.820 demandé le 10 avril 1991 par VULLI en ce qu’elle comprend la représentation d’une girafe et désigne le modèle de jouet girafe SOPHIE,
- ordonné l’exécution provisoire pour les mesures d’interdiction et d’expertise seulement,
- et condamné enfin M. B FRANCE à payer à VULLI la somme de 18.000 francs par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. L’expert a déposé son rapport le 14 février 1998. Le 19 janvier 1999, le même tribunal a sursis à statuer sur la demande de liquidation de préjudice présentée par VULLI jusqu’à ce que la Cour d’appel de Paris ait rendu son arrêt sur l’appel interjeté. Dans son arrêt du 30 juin 2000, la Cour d’appel a :

- donné acte à M. B FRANCE de ce que sa nouvelle dénomination sociale est HASBRO FRANCE et de ce qu’elle vient aux droits de M. B FRANCE,
- confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- y ajoutant, dit que les mesures de publication devront faire mention de l’arrêt,
- rejeté toute autre demande et condamné HASBRO FRANCE à payer à VULLI une somme complémentaire de 30.000 francs au titre des frais irrépétibles. Par conclusions signifiées le 22 septembre 2000, VULLI demande le paiement par la société HASBRO FRANCE venant aux droits de la société M. B FRANCE, des sommes suivantes, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :

- 1.820.410 francs calculés sur la totalité de la masse contrefaisante comprenant les ventes à l’étranger,
- 1.500.000 francs au titre de son préjudice commercial et moral constitué par la dépréciation et la vulgarisation du modèle,
- 200.000 francs au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens qui comprendront les frais d’expertise. Dans ses dernières écritures du 21 février 2001, VULLI modifie sa demande principale (et non celles formées en réparation de son préjudice moral et commercial et par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile). Faisant valoir que le modèle SOPHIE jouit d’une exceptionnelle notoriété depuis plus de quarante ans et représente plus du tiers de son chiffre d’affaires, elle réclame des

dommages et intérêts de 1.820.410 francs calculés sur la totalité de la masse contrefaisante comprenant les 14.724 girafes vendues par HASBRO FRANCE à l’étranger en 1997. S’il s’avère que les dites ventes ont été faites postérieurement au 14 janvier 1997, date du début de l’interdiction de vente sous astreinte ordonnée dans le jugement du 22 novembre 1996, VULLI demande subsidiairement le paiement de :

- 1.622.813 francs représentant le préjudice qui provient de toutes les ventes en France des girafes contrefaisantes,
- et 2.944.800 francs au titre de la liquidation de l’astreinte pour la vente de 14.724 girafes contrefaisantes à l’étranger postérieurement au 14 janvier 1997 et à raison de 200 francs par produits illicites vendus. HASBRO FRANCE conclut dans ses dernières écritures du 2 mars 2001 au rejet de toutes les demandes de VULLI qu’elle juge exorbitantes, irrecevables et non fondées et qu’elle souhaite voir ramener à de plus justes proportions. Elle conteste le taux indemnitaire proposé par l’expert et réclamé par VULLI. Elle estime erroné le calcul de la marge nette tant dans la détermination du bénéfice que des capacités de commercialisation éventuelle de VULLI. Pour cela, elle conteste le prix de revient moyen du jouet SOPHIE et la masse contrefaisante retenus par l’expert. HASBRO FRANCE prie le tribunal de rejeter la demande de liquidation d’astreinte en l’absence de preuve de ce que les ventes litigieuses sont postérieures à la signification du jugement ainsi que celle de dommages et intérêts en réparation d’un préjudice moral et commercial, la baisse alléguée du chiffre d’affaires ne pouvant pas être indemnisée deux fois et la dépréciation de la notoriété de la girafe SOPHIE n’étant pas justifiée. Elle conclut enfin au rejet de la demande fondée sur l’article 700 du nouveau code de procédure civile sauf à faire, selon elle, échec à l’autorité de la chose jugée par le jugement du 22 novembre 1996 et définitivement tranchée par la Cour d’Appel le 30 juin 2000.

DECISION Le régime juridique de l’indemnisation de la victime d’une contrefaçon d’un dessin ou d’un modèle est celui du droit commun de la responsabilité civile quasi-délictuelle issue des articles 1382 et 1383 du Code civil. Il suit que cette victime doit obtenir réparation de la totalité de son préjudice effectivement causé par la contrefaçon et rien de plus.

Le préjudice subi par la victime de la contrefaçon d’un dessin ou d’un modèle peut comprendre deux éléments : le gain manqué ou la perte de parts de marché et la perte subie ou l’atteinte au prestige du dessin ou du modèle. VULLI réclame l’indemnisation de ces deux éléments qui vont être examinés successivement. I – SUR LA REPARATION DES ACTES DE CONTREFAÇON : Le gain manqué ou la perte des parts de marché est constitué des bénéfices perdus sur les ventes manquées, ces dernières étant celles que le titulaire du dessin ou du modèle aurait pu réaliser à la place du contrefacteur. Dès lors qu’en l’espèce, il est impossible de connaître de façon directe et certaine les bénéfices perdus sur les ventes manquées, l’indemnisation de la contrefaçon du modèle « girafe SOPHIE » commis au préjudice de VULLI s’effectuera en appliquant à la masse contrefaisante un prix de revient moyen du modèle de jouet contrefait, ces deux éléments étant fixés par le tribunal au vu du rapport d’expertise et des documents produits. 1 – Sur la masse contrefaisante : VULLI demande que soit prise en compte la totalité des ventes réalisées par la défenderesse, soit 135.649 produits, comprenant les ventes en France, les ventes à l’étranger et les retours sur vente de 2.034. HASBRO FRANCE conteste que soient retenues ces dernières et demande une réfaction sur les ventes en France dès lors que VULLI ne justifie pas, selon elle, qu’elle pouvait fabriquer et vendre tous ces produits. L’expert indique que les ventes effectives de la défenderesse en France représentent 115.770 unités pour un chiffre d’affaires de 2.331.690 francs et à l’étranger 17.845 unités pour un chiffre d’affaires de 128.016 francs. La totalité des ventes s’élève à 133.615 unités. Les retours sur vente se chiffrent à 2.034. Il ressort du rapport d’expertise et des pièces produites que les ventes des 17.845 produits contrefaisants réalisées à l’étranger par HASBRO FRANCE ont été faites à d’autres filiales du Groupe HASBRO avec des produits introduits en France, dédouanés puis réexportés à destination de l’étranger. Il s’agit bien de ventes qui ont été réalisées à partir de la France. Elles ne doivent pas de ce fait être écartées du calcul de la masse contrefaisante comme le souhaite pourtant la défenderesse.

Il est acquis que le jugement du 22 novembre 1996, assorti de l’exécution provisoire pour les mesures d’interdiction sous astreinte et d’expertise, a été signifié le 14 janvier 1997, si bien que l’astreinte s’appliquait à compter de cette date. VULLI soutient que les ventes des jouets contrefaisants réalisées à l’étranger par la défenderesse ont eu lieu après cette date. Mais elle n’en rapporte pas la preuve alors que celle-ci lui incombe. Il suit que la demande principale de VULLI de voir liquider l’astreinte sur les ventes contrefaisantes effectuées à l’étranger est rejetée. Il convient en revanche d’accueillir sa demande subsidiaire en faisant figurer dans la masse contrefaisante totale celle des 17.845 jouets contrefaisants vendus à l’étranger. Les pièces communiquées par VULLI et le rapport d’expertise établissent qu’elle dispose d’une réelle capacité de fabrication de la girafe SOPHIE de 500.000 exemplaires par an, l’élaboration du produit n’apparaissant pas d’une grande complexité, n’exigeant qu’un matériel relativement simple et apte à être exploité par un personnel déjà formé. La masse contrefaisante représentant en ce qui concerne les achats moins de 85.000 pièces en 1995 et un peu plus de 50.000 pièces en 1996, VULLI avait sans équivoque la capacité industrielle de fabriquer les quantités correspondantes au-delà de sa propre production en 1995 et 1996 qui était d’environ 400.000 girafes SOPHIE par an, sans qu’il lui fût nécessaire d’acquérir d’autres moyens de fabrication et d’embaucher et de former du personnel supplémentaire. L’expert ajoute, sans être contesté par la défenderesse, que le complément de production, qui ne représente sur ces deux années qu’un accroissement moyen d’environ 20%, pouvait être certainement obtenu par une meilleure utilisation des équipements et une rotation plus efficace des intervenants sans entraîner de surcoûts véritablement significatifs. La capacité de VULLI à fabriquer la masse des produits contrefaisants est nécessairement suivie par celle de la commercialiser. Elle a démontré avoir augmenté de 30% sans difficulté majeure la fabrication et la commercialisation de sa girafe entre 1996 et 1997 (passant de 150.000 commandes clientèle au premier trimestre 1996 à 201.000 au premier trimestre 1997). Rien dans le rapport d’expertise ne permet d’appliquer une réfaction sur la masse contrefaisante parce que VULLI ne pouvait pas commercialiser 85.000 pièces supplémentaires en 1995 et un peu plus de 50.000 pièces en 1996 ou qu’elle ne pouvait pas vendre toutes les unités vendues par la défenderesse à l’étranger. Sur ce dernier point, il vient d’être démontré que, si VULLI ne pouvait pas vendre ces unités en France, elle avait néanmoins la capacité industrielle et commerciale de les vendre en France avec les 2.034 retours sur ventes. La masse totale contrefaisante se chiffre dans ces conditions à 135.649 unités (c’est à dire à 115.770 unités vendues en France plus 17.845 vendus à l’étranger plus les 2.034 retours sur ventes) que VULLI pouvait fabriquer et commercialiser en totalité comme indiqué ci- dessus.

2 – Sur la marge bénéficiaire applicable ou le prix de revient moyen du produit contrefait : Pour fixer le prix de revient moyen actuel du jouet contrefait, HASBRO FRANCE propose de prendre en compte l’attestation de Mr V qui indique qu’en 1988, il était de 5, 65 francs ce qui conduit à un prix de revient moyen actuel de 10, 06 francs et non de 6, 65 francs comme le soutient VULLI. Elle ajoute enfin que la simple comparaison des prix de revient moyen pondérés par le coût de la main d’oeuvre selon les pourcentages donnés par VULLI permet de réduire de 45% l’évaluation de l’expert. Il résulte des documents parfaitement explicites de VULLI et plus particulièrement de deux attestations de son commissaire aux comptes et des tarifs pour les années 1995 et 1996 que le prix de vente net de la girafe SOPHIE était de 23, 50 francs en 1995 et de 24 francs en 1996. L’expert indique justement qu’il convient d’affecter sur ces prix les taux de remises sur factures qui ont représenté 13, 30% en 1995 et 12, 92% en 1996, ces valeurs justifiées par la demanderesse apparaissant parfaitement conformes à la pratique normale pour ce type d’activité. Il convient ensuite de déduire les remises globales de fin d’année, consenties à la clientèle par VULLI que le commissaire aux comptes atteste avoir représenté 2, 17% en 1995 et 2, 56% en 1996. Le prix de vente, hors remises, de la girafe SOPHIE s’établit en 1995 à 19, 86 francs et en 1996 à 20, 28 francs ou encore en valeur moyenne, à 20, 07 francs. Pour déterminer le bénéfice marginal effectif sur la vente des girafes SOPHIE, il convient encore de déduire de ce dernier montant, un certain nombre d’éléments, représentant en particulier le coût de la matière première utilisée, le coût de la main d’oeuvre et le cas échéant un certain nombre d’autres frais, nécessairement impliqués par la fabrication et la vente de l’article considéré. En l’espèce, les éléments fournis ont permis à l’expert de retenir le coût de la matière première et des composants par la société VULLI pour un total de 1, 92 francs par article et le coût de la main d’oeuvre de fabrication et d’emballage à hauteur de 4, 73 francs par article. Ainsi en retranchant du prix de vente catalogue de la girafe SOPHIE, le montant des remises ainsi que le montant des coûts précités, on obtient une marge moyenne brute par article de 13, 42 francs (soit 20, 07 francs – (1, 92 + 4, 73). Comme l’a indiqué la Cour d’Appel dans son arrêt du 30 juin 2000, l’attestation de Mr V doit être prise avec les plus extrêmes réserves dans la mesure où VULLI établit qu’il est à

ce jour le gérant d’une société Vullierme International qui a des liens très étroits avec la société de droit américain HASBRO, société mère d’HASBRO FRANCE. Il convient de relever par ailleurs que Mr V raisonne sur des chiffres de 1988 et que, comme l’indique l’expert, ses estimations pour aboutir à un coût de production en 1995- 1996 à 10 francs sont pour le moins hasardeuses. La marge moyenne brute par article de 13, 42 francs multipliée par le nombre d’unités contrefaisantes retenues préalablement, soit 135.649, permet dans ces conditions de fixer à la somme de 1.820.410 francs le montant des bénéfices perdus par VULLI sur les ventes manquées. HASBRO FRANCE est condamnée à lui verser cette somme assortie des intérêts au taux légal à compter du présent jugement. II – SUR LE PREJUDICE MORAL ET COMMERCIAL ALLEGUE : VULLI fonde sa demande, outre sur la vulgarisation de son modèle notoirement connu, sur le fait que le modèle SOPHIE est, pour elle, un facteur essentiel de son activité tant pour lui permettre d’être référencé en qualité de fournisseur dans les grandes centrales d’achat, que pour faire référencer d’autres produits de puériculture complémentaires comme cela est vérifiable par l’évolution de son chiffre d’affaires de 1995 à 1999. VULLI réclame l’indemnisation de « sa perte subie » ou de l’atteinte au prestige de son modèle « la girafe SOPHIE » qui consiste en la diminution de la valeur patrimoniale de celui-ci. Il est acquis que le modèle revendiqué jouit d’une grande notoriété depuis au moins vingt ans (c.f : le jugement du 22 novembre 1996, l’arrêt de la cour d’appel du 30 juin 2000 et les nombreuses coupures de presse…) Cette notoriété est illustrée par le fait que modèle, n°2 de la petite puériculture en France en 1996, se vend chaque année à plus de 400.000 exemplaires depuis au moins dix ans. L’expert a relevé que VULLI justifiait également de ce qu’elle avait du engager des frais additionnels de publicité fin 1996 début 1997 pour non seulement maintenir la connaissance du public sur son produit phare mais également pour contrecarrer la contrefaçon de HASBRO FRANCE. VULLI justifie d’ailleurs avoir du diminuer pour cela sa marge bénéficiaire sur le dit produit dès lors qu’elle a ajouté à chaque girafe SOPHIE vendue un accessoire commercialisé gratuitement en maintenant le prix de vente. Sans pour autant faire droit à la totalité de la demande de VULLI, il convient de lui allouer en réparation de « sa perte subie » une indemnité de 300.000 francs. III – SUR LES AUTRES DEMANDES :

Eu égard à la provision de 300.000 francs, allouée par le tribunal le 22 novembre 1996 et confirmée par la cour d’appel, les indemnités accordées à VULLI dans le présent jugement, le sont en deniers ou quittances. L’origine de l’affaire remontant à plus de six ans, il est nécessaire et compatible avec sa nature d’ordonner d’office l’exécution provisoire. L’équité commande de faire droit à la demande de 200.000 francs présentée par VULLI au titre des frais irrépétibles. Elle justifie en effet dans son dossier de tous ceux qu’elle a dû engager et payer depuis 1995 pour obtenir gain de cause : frais d’huissiers, frais et honoraires de conseillers en propriété industrielle et d’avocats qui s’élèvent à plus de 539.000 francs. HASBRO FRANCE qui succombe et doit payer la somme susvisée, est également condamnée aux dépens qui comprendront les frais d’expertise. PAR CES MOTIFS Le Tribunal statuant, publiquement, contradictoirement et en premier ressort, Condamne la société HASBRO FRANCE à verser à la société VULLI des dommages et intérêts d’un montant de 1.820.410 francs avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement en réparation des gains manqués par la société VULLI et d’un montant de 300.000 francs en réparation de son préjudice moral et commercial ; Ordonne l’exécution provisoire ; Condamne la société HASBRO FRANCE à verser à la société VULLI la somme de 200.000 francs par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; Condamne la société HASBRO FRANCE aux dépens qui comprendront notamment tous les frais d’expertise ; Fait application de l’article 699 du nouveau code de procédure civile à Me François G, avocat, qui en a fait la demande et ce, pour les dépens dont il a fait l’avance et pour lesquels il n’a pas reçu de provision.

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