Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 18 décembre 2015, n° 14/17417

  • Manquement aux obligations contractuelles·
  • Obligation de paiement des annuités·
  • Obligation d'exécution de bonne foi·
  • Concession d'une licence exclusive·
  • Revendication de propriété·
  • Interprétation du contrat·
  • Contrat de copropriété·
  • Copropriété de brevet·
  • Validité de la clause·
  • Clause contractuelle

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 2e sect., 18 déc. 2015, n° 14/17417
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 14/17417
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : FR1057515
Titre du brevet : Dispositif de nettoyage et d'essorage d'applicateurs notamment de type pinceaux, brosses ou mousses
Classification internationale des brevets : A46B ; B44D
Brevets cités autres que les brevets mis en cause : EP2430946
Référence INPI : B20150177
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Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 18 décembre 2015

3e chambre 2e section N° RG : 14/17417

Assignation du 05 décembre 2014

DEMANDEUR Monsieur Frederick M représenté par Me Jean-François GUILLOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1166

DÉFENDEUR Monsieur Arnaud G représenté par Me Isabelle GUGENHEIM et Me Pierre L, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0978

COMPOSITION DU TRIBUNAL François A ln Vice-Président Adjoint Françoise B, Vice-Président Julien S. Vice-Président assistés de Jeanine R. FF Greffier

DEBATS À l’audience du 22 octobre 2015 tenue en audience publique

JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoire en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE Monsieur Frederick M et Monsieur Arnaud G, tous deux anciennement commerciaux dans le domaine du bricolage, ont déposé conjointement le 20 septembre 2010 à l’INPI une demande de brevet français, publiée le 5 octobre 2012 sous le n° FR 2 964 841 pour un « dispositif de nettoyage et d’essorage d’applicateurs notamment de type pinceaux, brosses ou mousses ». Le 20 septembre 2011, soit dans le délai de priorité d’un an, ils ont également déposé une demande de brevet européen, enregistrée sous le n° 11182067.6 et publiée sous le n° EP 2 430 946, qui est encore en cours d’examen devant l’Office européen des brevets. Ils ont en outre conclu le 17 octobre 2011, un « contrat de copropriété de brevet » avant pour objet de « définir leurs droits ci obligations de copropriétaires sur le brevet, ainsi que ses conditions d’exploitation ».

Le même jour, les deux copropriétaires ont signé un contrat de licence exclusive avec Monsieur M COURANT, et un avenant audit contrat relatif aux « modalités d’exploitation de la licence ». Indiquant avoir constaté le non-paiement par Monsieur Arnaud G de sa part des taxes et annuités des brevets français et européens en septembre 2012, s’en être acquitté en conséquence à sa place, l’avoir mis en demeure en vain les 2 octobre 2012, 4 février, 14 août et 1er octobre 2013, puis avoir à nouveau constaté son défaut de paiement en septembre 2014, et l’avoir encore mis en demeure les 11 juillet et 27 août 2014, et s’être aussi acquitté desdites taxes. Monsieur Frederick M, faisant valoir l’urgence selon lui de débloquer cette situation qui paralyserait ses efforts pour exploiter les brevets et ce alors qu’il s’est endetté à titre personnel et qu’il est poursuivi par ses créanciers, a assigné Monsieur Arnaud G devant le tribunal de grande instance de Paris par acte du 5 décembre 2014 aux fins, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, de constater l’abandon par Monsieur Arnaud G de sa quote-part de copropriété sur les brevets et en conséquence le transfert à son profit, et de le condamner à des dommages et intérêts, outre aux dépens et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 3 septembre 2015. Monsieur Frédérick M, demande au tribunal de :

— Déclarer Monsieur Frederick M recevable et bien fondé en ses demandes :

- Rejeter des débats les pièces communiquées par Monsieur G sous les numéros 11. 12. 13. 14 et 16, à défaut de justification par ce dernier des conditions licites dans lesquelles il se serait procuré lesdites pièces, en application du principe général de loyauté de la preuve ;

- Constater l’abandon par Monsieur Arnaud G de sa quote-part de copropriété et, en conséquence, le transfert à Monsieur Frederick M, seul autre copropriétaire, de l’ensemble des droits indivis que détenait Monsieur Arnaud G sur : *le brevet français n° 10 57515 délivré le 23 mars 2012, dont la demande déposée le 20 septembre 2010 a été publiée sous le numéro FR 2 964 841, et délivré n° 10 57515 : *la demande de brevet européen n° 11182067.6 déposée le 20 septembre 2011 et publiée sous le numéro HP 2 430 946, revendiquant la priorité de la demande de brevet français susvisée, et ce pour tous les pays désignés dans ladite demande ;

- Ordonner l’inscription du transfert intégral de propriété au bénéfice de Monsieur Frederick M du brevet français n° 10 57515 au registre national des brevets, et de la demande de brevet européen n° 11182067.6, pour tous les pays désignés, au registre européen des brevets ;

- Condamner Monsieur Arnaud G à payer à Monsieur Frederick M la somme de deux cent mille (200.000) euros à titre de dommages-

intérêts, en réparation de ses préjudices matériel et nuirai, résultant de l’absence d’exécution de bonne foi par Monsieur Arnaud G de ses obligations contractuelles et des abus de droits commis par celui-ci :

- Débouter Monsieur Arnaud G de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner Monsieur Arnaud G aux entiers dépens et autoriser Maître Jean-François GUILLOT à les recouvrer directement, conformément à l’article 699 du code de procédure civile :

- Condamner Monsieur Arnaud G à payer à Monsieur Frederick M la somme de quinze mille (15.000 euros), en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonner l’exécution provisoire. Dans ses conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 15 juin 2015. Monsieur Arnaud G demande au tribunal de :

- Dire et juger irrecevable et mal fondé Monsieur Frederick M en toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- Donner acte en tout état de cause à Monsieur Arnaud G de ce qu’il est offrant de rembourser à Monsieur Frederick M toute somme qu’il aurait versée à l’INPI au titre des annuités des brevets français n° 1057515 et brevet européen n° l1182067.6. dont il aurait fait l’avance, et qui excéderait sa quote-part propre ;

- Impartir à Monsieur Frederick M d’en communiquer le montant et d’en justifier :

- Réputer en tout état de cause non écrite, et à défaut nul et de nul effet, la clause dont il est excipé par le demandeur (article 5.6 défaut de paiement) de l’accord de copropriété du 17 octobre 2011 en ce qu’elle prévoit un transfert de la quote-part du brevet du copropriétaire défaillant au profit du copropriétaire qui n’aurait pas été remboursé des taxes dites échues :

- Constater que ladite clause contrevient tout à la fois au droit de propriété (article 544 du code civil), au principe de proportionnalité, ainsi qu’aux droits de la défense, mais encore aux articles L.611-6 et L.613-8 du code de la propriété intellectuelle ;

- Débouter en tout état de cause Monsieur M de ses prétentions tendant à obtenir le transfert à lui seul des droits sur les brevets français n° 1057515 et brevet européen n° l 1182067.6;

- Dire et juger que Monsieur Arnaud G n’a commis aucune faute quelconque au détriment de Monsieur Frederick M ;

- Dire et juger au surplus que Monsieur Frederick M n’établit aucunement un quelconque préjudice et qu’il n’est pas fondé à demander une quelconque réparation à l’encontre de Monsieur Arnaud G ;

- Rejeter toutes conclusions contraires ;

- Condamner Monsieur Frederick M à verser à Monsieur Arnaud G une somme de 6.000 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile ;

- Le condamner aux entiers dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure

civile, avec distraction au profit de Maître GUGENHEIM, avocat constitué.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 24 septembre 2015. MOTIFS

Sur la demande de Monsieur Frederick M de rejet des pièces 11, 12, 13, 14 et 16 Monsieur Frederick M forme cette demande de rejet de pièces dans son dispositif en application du principe général de loyauté de la preuve sans développer ce moyen dans le corps des conclusions de sorte qu’en l’absence de tout élément relatif aux conditions prétendument déloyales dans lesquelles le défendeur se serait procuré les pièces sus-visées relatives à une lettre de Monsieur M à un distributeur en date du 23 avril 2012, aux bulletins de paie et certificat de travail de Monsieur Frederick M au sein de la société ARABESQUE DECORS, d’un courriel et d’une grille de tarif de ladite société, il n’ y a pas lieu de faire droit à cette demande, le tribunal se réservant la faculté d’en apprécier la force probante le cas échéant lors de l’examen au fond.

Sur la demande de transfert de la quote-part de copropriété des brevets de Monsieur Arnaud G au profit de Monsieur Frederick M

Monsieur Frederick M fait valoir qu’aux termes du règlement de copropriété conclu entre les parties le 17 octobre 2011, chacun des deux copropriétaires a une quote-part de copropriété égale à hauteur de 50 %, les charges sont réparties entre les copropriétaires, et qu’en cas de défaut de paiement, l’article 5.6 stipule que faute d’être remboursé des taxes échues dans le mois suivant la date anniversaire de l’échéance de la taxe, le copropriétaire ayant procédé au paiement devient copropriétaire de la quote-part du copropriétaire défaillant. Il soutient qu’en l’espèce Monsieur G n’a pas réglé sa part des annuités dues à l’INPI et à l’OEB en septembre 2012 et en septembre 2014, et n’a pas répondu aux nombreuses mises en demeure émanant tant de lui-même que du Cabinet Chaillot, conseil en propriété industrielle, et qu’il a dû en conséquence les acquitter en totalité. Il demande en conséquence au tribunal en application de l’article 5.6 du contrat de copropriété de constater l’abandon par Monsieur Arnaud G de sa quote-part et le transfert à son profit. Monsieur Arnaud G rétorque que le contrat de copropriété de brevet ne peut recevoir application car son objet n’est pas identifié faute de production de l’annexe supposée décrire les brevets objet dudit contrat, de sorte que les articles L 613-29 et L.613- 21 du code de la propriété intellectuelle, qui ne prévoient pas un abandon forcé de la

quote-part de copropriété en guise de sanction mais seulement une cession volontaire et amiable, doivent s’appliquer. Il soutient en outre que les dispositions de l’article R..411-17 du code de la propriété intellectuelle font état de redevances perçues par l’INPI et non de taxes échues comme indiqué dans la clause 5.6 du règlement de copropriété, de sorte que du fait de cette différence il n’était pas en mesure de comprendre que l’absence de remboursement d’une annuité pour le maintien en vigueur était de nature à le priver de ses droits. Il fait aussi valoir que la clause litigieuse ne peut qu’être réputée non écrite et en tout cas de nul effet en ce qu’elle porte atteinte au droit au litre consacré par l’article L 611-6 du code de la propriété intellectuelle, mais encore aux formes obligatoires de la transmission de droits de propriété industrielle régie par l’article L. 613-8 du même code. Il ajoute que la clause susmentionnée, sur laquelle repose l’action de Monsieur Frederick M, est contraire au droit de propriété, au principe de proportionnalité et aux droits de la défense en ce qu’elle s’analyse en une expropriation forcée illicite, et qu’elle est donc abusive. Il prétend également ne pas avoir été touché par les demandes de remboursements émanant de Monsieur M alors qu’en droit commun des contrats la mise en demeure constitue une condition préalable à toute sanction d’une obligation de paiement. Il considère enfin que la stipulation 5.6 du règlement de copropriété revêt la nature d’une clause pénale, et que dès lors qu’il n’a pas été défaillant pour toutes les annuités, et qu’il propose de rembourser celles qui auraient été supportées par Monsieur M si ce dernier justifie des montants, il y a lieu de le relever de la perte de ses droits et de ne lui infliger une peine dont la portée est excessive.

Sur ce. En application de l’alinéa 1 de l’article L 612-19 du code de la propriété intellectuelle, toute demande de brevet ou tout brevet donne lieu au paiement de redevances annuelles qui doivent être acquittées au plus tard le dernier jour du mois de la date anniversaire du dépôt de la demande conformément à l’article R. 613-46 du code de la propriété intellectuelle. L’article L. 613-22 du code de la propriété intellectuelle dispose en outre : « Est déchu de ses droits le propriétaire d’une demande de brevet ou d’un brevet qui n’a pas acquitté la redevance annuelle prévue à l’article L. 612-19 du code de la propriété intellectuelle dans le délai prescrit par ledit article. La déchéance prend effet à la date de l’échéance de la redevance annuelle non acquittée. Elle est constatée par une décision du directeur de l’INPI ou, à la requête du breveté ou d’un tiers ».

Enfin la copropriété d’une demande de brevet est régie par les articles L. 613-29 à L.613-31 du code de la propriété intellectuelle. L’article L. 613-32 du code de la propriété intellectuelle énonce cependant : « Les dispositions des articles L. 613-29 à L.613-31 s’appliquent en l’absence de stipulations contraires. Les copropriétaires peuvent y déroger à tout moment par un règlement de copropriété ». En l’espèce, il résulte du contrat de copropriété de brevet conclu entre les parties le 17 octobre 2011 que :

- « les parties sont convenues de déposer conjointement les demandes de brevet pour protéger les inventions issues de leur recherche commune et d’organiser leurs droits et obligations respectifs dans le cadre d’un contrat de copropriété de brevet » (préambule) ;

- « le ou les brevets et/ou demandes de brevet sont mentionnés à l’annexe l »descriptif du brevet« portant sur l’invention décrite dans cette annexe » (définitions) ;

- « la copropriété du brevet est répartie en quotes-parts égales soit 50% par partie. Les droits, prérogatives et bénéfices, ainsi que les obligations, risques et charges résultant du brevet sont réparties d’une façon générale, et sauf dérogation prévue aux présentes, au prorata de la quote-part détenue par chaque copropriétaire » (article 5.1);

- « les frais engagés pour le brevet en France et à l’étranger, les procédures d’obtention, le maintien en vigueur des titres obtenus et d’une façon générale toutes les dépenses, taxes, honoraires, indemnités et autres nécessaires à la conservation des titres communs seront partagés par les copropriétaires au prorata de leurs quotes-parts respectives » ( article 5.5) ;

- "Si l’un des copropriétaires manque à ses obligations de paiement de toutes taxes, frais et honoraires relatifs au brevet, les autres copropriétaires auront la faculté de payer les taxes échues. Faute d’être remboursés des taxes échues au cours d’une période d’un mois suivant la date anniversaire de l’échéance de la taxe, les copropriétaires ayant procédé au paiement deviendront copropriétaires de la quote-part du brevet du copropriétaire défaillant au prorata de leurs droits sur le brevet " (article 5.6). Monsieur Arnaud G ne saurait prétendre que le contrat de copropriété du brevet n’aurait pas d’objet au motif que l’annexe 1 relative au descriptif des brevets n’y aurait pas été jointe alors que le préambule indique clairement que ledit contrat porte sur les demandes de brevet déposées conjointement par les parties pour protéger les inventions issues de leur recherche commune, de sorte qu’il ne fait aucun doute qu’il a pour objet les deux demandes de brevet français publiée sous le n° 2 964 841 et européen publiée sous le n° 2 430 946, seules demandes de brevet déposées conjointement par les parties à la date de signature du contrat de copropriété.

Pour tenter d’échapper à l’application contractuelle. Monsieur Arnaud G ne peut davantage prétendre que les frais compris dans l’article 5.5 sus-visé ne visent pas littéralement les redevances telles que prévues à l’article R. 411-17 du code de la propriété intellectuelle qui dispose que l’INPI perçoit des redevances, alors qu’en prévoyant l’éventualité d’un défaut de paiement par l’un des copropriétaires de « toutes taxes, frais, et honoraires relatifs au brevet » les parties ont manifestement eu la commune intention d’englober l’ensemble des sommes dont le paiement est nécessaire au maintien en vigueur des brevets, au premier rang desquelles les annuités ou redevances à verser à l’INPI et à l’OEB. Monsieur Arnaud G prétend enfin que la clause 5.6 du règlement de copropriété qui prévoit qu’en cas de défaut de paiement des annuités par un copropriétaire, le copropriétaire ayant procédé au paiement, faute d’être remboursé des taxes échues dans le mois suivant la date anniversaire de l’échéance de la taxe, devient copropriétaire de la quote-part du copropriétaire défaillant, doit cire réputée non écrite, et à défaut nulle et de nul effet, en ce que le transfert de copropriété qu’elle prévoit, contrevient selon lui tant au droit de propriété, qu’au principe de proportionnalité, aux droits de la défense et à ceux contenus aux articles L. 611-6 et L.613-8 du code de la propriété intellectuelle. Il est cependant établi qu’en application de l’article L 613-32 sus-visé, les copropriétaires d’une demande de brevet ou d’un brevet peuvent à tout moment déroger aux règles régissant la copropriété du titre qui ne sont pas d’ordre public. En outre, Monsieur Arnaud G ne peut soutenir que ledit transfert de propriété affectant le copropriétaire qui n’a pas payé les taxes échues et ne les a pas davantage remboursées au copropriétaire qui les acquittées à sa place dans le délai d’un mois suivant l’échéance de la taxe, serait une atteinte disproportionnée à son droit de propriété résultant de l’article L 611-6 du code de la propriété intellectuelle qui consacre le droit au titre de propriété industrielle à l’inventeur, alors que le paiement des annuités est une obligation du titulaire du brevet dont le non-respect est sanctionné de plein droit par la déchéance du brevet en application de l’article L 613-22 du code de la propriété intellectuelle qui ne pose pas d’autres conditions à la déchéance que le défaut de paiement des annuités. Par ailleurs, il résulte des éléments versés au dossier que contrairement aux allégations de Monsieur Arnaud G, ce dernier a été relancé et mis en demeure à de nombreuses reprises. Ainsi selon courrier du 2 octobre 2012. Monsieur Frederick M a écrit à Monsieur Arnaud G 2 fosse des Landes à MEZERAY (72) qui est son adresse actuelle : "Vous n’avez, pas répondu aux notifications et rappels de notre conseil en propriété industrielle avant la date d’échéance fixée au 21 septembre 2012 de telle sorte que j’ai dû régler

en intégralité ces taxes et annuités afin d’assurer le maintien en vigueur du brevet. Aussi, je vous remercie de bien vouloir me rembourser sous un mois conformément aux dispositions de l’article 5.6 du contrat de copropriété du brevet les sommes suivantes :

- frais et taxes 2012 pour la France : 129,18 euros
- frais et taxes 2012 pour l’Europe : 1.174,60 euros soit un total de : 1.300,78 euros« . Ce même courrier a été adressé à Monsieur Arnaud G par lettre simple et recommandée le 4 février 2013, ce dernier étant retourné le 23 février 2013 comme non réclamé. Il a à nouveau été envoyé par courrier simple et recommandé également revenu comme »non réclamé« le 14 août 2013, Monsieur Frederick M précisant » vous ne répondez à aucun de mes courriers et ne prenez même plus la peine de retirer vos recommandés (…) Je n’ai -pas plus que notre conseil en propriété industrielle – aucune nouvelle de votre part alors qu’une nouvelle annuité doit être réglée à l’INPI avant le 21 septembre prochain (…). Je vous mets en demeure de me rembourser sans délai les sommes suvisées et de procéder au règlement de la quote part des taxes et annuités qui vous incombe pour l’année à venir (…)".

Il est également justifié du courrier du 1er octobre 2013 par lequel le Cabinet Chaillot, conseil en propriété industrielle commun aux copropriétaires, après avoir remercié Monsieur Arnaud G d’avoir réglé la 4ime annuité, lui demande d’adresser à Monsieur Frederick M la somme de 1.300,78 euros correspondant aux frais et taxes de l’année 2012. S’agissant de l’annuité 2014, il est justifié de trois courriers du Cabinet Chaillot adressés à Monsieur Arnaud G les 8 et 11 juillet 2014 par lettre recommandée avec accusé de réception et par courrier simple lui indiquant qu’il doit acquitter au plus tard le 30 septembre 2014 sa quote part d’annuités à savoir 326 euros pour la demande de brevet européen et 54 euros pour le brevet français, ainsi qu’un dernier rappel annexant les précédents courriers envoyé par lettre recommandée avec accusé de réception le 28 août 2013 et retourné le 19 septembre avec la mention « non réclamé ». Il s’ensuit qu’en dépit de nombreuses relances, les annuités de 2012 qui venaient à échéance en septembre 2012 n’ont pas été réglées par Monsieur Arnaud G, qui ne les a pas davantage remboursées à Monsieur Frederick M ni dans le mois suivant la date d’échéance de la taxe comme le stipule le règlement de copropriété pour éviter le transfert de la quote-part, ni par la suite, ces annuités n’étant à ce jour toujours pas remboursées, ce qui n’est pas contesté. Il en est de même de la quote-part de l’annuité échue en septembre 2014 qui n’a pas été acquittée par Monsieur Arnaud G ni à l’échéance, ni dans le mois qui a suivi l’échéance, ni par la suite, ce qui n’est pas davantage

contesté et est attesté par le courrier du Cabinet CHAILLOT daté du 25 novembre 2014 par lequel ce dernier confirme avoir encaissé les chèques de Monsieur Frederick M pour le règlement complet « compte terni de l’absence de règlement de la part de Monsieur Arnaud G ». Monsieur Arnaud G ne peut enfin invoquer les dispositions du code civil relatives aux clauses pénales pour demander à être relevé de la perte de ses droits et à ce que ne soit pas appliquée une sanction qui lui paraît excessive, alors qu’aux ternies de la disposition contractuelle 5.6 litigieuse intitulée « défaut de paiement » qui fait partie dans le règlement de copropriété de la partie 5 "Étendue de la copropriété'*, qui vient après les clauses 5.1 « fixation des quotes-parts ». 5.2 « extensions ». 5.3 « Perfectionnements et nouvelles applications du brevet ». 5.4 « répartition des charges » et 5.5 « proportions », les parties ne se sont pas engagées « à quelque chose en cas d’inexécution » ce qui correspond à une clause pénale telle que définie par l’article 1226 du code civil invoqué par le défendeur, mais ont convenu un transfert de propriété en cas de défaillance de l’une des parties dans le paiement des taxes nécessaires au maintien en vigueur du brevet, outre, en tout état de cause que Monsieur Arnaud G. qui ne justifie d’aucune démarche entreprise depuis 2012 aux fins d’exploitation du brevet, ne s’explique pas sur les raisons pour lesquelles il n’a pas payé les taxes échues en 2012 et 2014 et continue dans la présente instance à demander la justification des montants dont il est redevable, qui lui ont pourtant été envoyés à de multiples reprises tant par Monsieur Frederick M que par le conseil en propriété industrielle. Il résulte des développements qui précèdent qu’il y a lieu de constater qu’en violation des dispositions du règlement de copropriété. Monsieur Arnaud G s’est abstenu de payer la moitié des sommes dues au titre des frais et taxes du brevet français n° 2 964 841 et de la demande de brevet européen n° 2 430 946 pour les années 2012 et 2014, que Monsieur Frederick M s’est personnellement acquitté du paiement de la totalité des sommes dues et qu’il n’a pas été remboursé, et qu’en application de la clause 5.6 dudit règlement de copropriété, il y a lieu de constater que Monsieur Frederick M devient propriétaire de la quote part que détenait Monsieur Arnaud G dans lesdits brevets. En outre, en application des articles L. 613-9 du code de la propriété intellectuelle qui dispose que " tous les actes transmettant ou modifiant les droits attachés à une demande de brevet ou à un brevet doivent, pour être opposables aux tiers, être inscrits au registre national des brevets tenu par l’INPI" et L. 614-11 du même code qui indique que "l’inscription au registre européen des brevets des actes transmettant ou modifiant les droits attachés à une demande de brevet européen ou à un brevet européen rend ces actes opposables aux tiers " il y a lieu de dire que le présent jugement, une fois celui-ci devenu définitif, sera transmis à l’INPI par la partie la plus diligente aux fins d’inscription au registre national et registre européen des brevets.

Sur la demande en réparation Se fondant sur les articles 1134 et 1135 du code civil. Monsieur M soutient que Monsieur G n’a pas exécuté de bonne foi le contrat de copropriété de brevets, en se désintéressant totalement desdits brevets, et en violant son obligation de contribuer à l’entretien des titres mettant ainsi en péril leur existence même. Il ajoute que Monsieur Arnaud G a proposé seul à la société OCAI de lui vendre les brevets dont il n’était que copropriétaire, au mépris et en fraude manifeste de son droit de copropriété, et qu’en lui affirmant qu’il avait un pouvoir bloquant sur la relation commerciale avec elle et qu’il était en droit de distribuer le produit nonobstant les accords de commercialisation, il l’a volontairement privé de toute possibilité de parvenir à un accord sur l’exploitation des brevets. Il soutient en outre que Monsieur G a également manqué à son obligation de bonne foi en préférant laisser la situation dégénérer vis- à-vis du licencié défaillant, plutôt que d’agir conjointement avec le copropriétaire des brevets en cause. Il conclut que l’attitude fautive et dolosive de Monsieur G depuis quatre ans a rendu impossible l’exploitation des brevets, et qu’il est en conséquence bien fondé à demander réparation de ses préjudices matériel résultant de la perte de chance de percevoir des redevances d’exploitation, et moral consécutif à sa perte de revenus et aux procédures menées à son encontre par ses créanciers, qu’il évalue à la somme de 200.000 euros. Monsieur G réplique que l’on ne voit pas précisément quelle stipulation il aurait enfreinte au préjudice de Monsieur M et en quoi ce dernier pourrait prétendre à une indemnisation, alors qu’il n’établit aucun fait tangible et positif qui lui aurait causé un préjudice personnel, conditions pourtant nécessaires à la recevabilité d’une demande indemnitaire. Il prétend au contraire que Monsieur M a saboté une bonne idée par un comportement manquant de professionnalisme et de transparence, notamment en tentant de mettre sur le marché un produit qui n’était pas encore prêt. S’agissant du fait de ne pas l’avoir soutenu vis-à-vis du licencié défaillant, voire de ne pas avoir agi face aux manquements de ce dernier, il explique que Monsieur M ne démontre pas en quoi il l’aurait tenu au courant de quoi que ce soit, et précise que Monsieur M peut agir contre la société ARABESQUE DÉCORS et Monsieur C, licencié exclusif, s’il estime que celle-ci a failli à ses obligations. Sur ce.

En application de l’article 11 34 alinéa 3 du code civil les conventions doivent être exécutées de bonne foi.

Pour justifier du comportement fautif de Monsieur Arnaud G qui n’aurait pas selon lui exécuté le contrat de bonne foi et aurait ainsi créé une situation de blocage préjudiciable. Monsieur Frederick M se borne à produire un courriel que lui a adressé le 19 septembre 2012 Monsieur L, directeur commercial d’une société OCAI qui indique : "J’ai découvert lors d’un appel téléphonique que vous aviez un associé Monsieur G qui proposait de me vendre votre brevet… À plusieurs reprises il m’a fait cette proposition en m’indiquant qu’il en avait le droit et le souhait et que contrairement à ce que vous pouviez m’affirmer, il avait un pouvoir bloquant sur notre relation commerciale, et qu’il était en droit de distribuer ces outils alors même que nous avons signé ensemble un contrat de commercialisation quasi-exclusif"''. Cependant, outre qu’aux termes de l’article 6.1 du règlement de copropriété, conforme à l’article L. 613-29 du code de la propriété intellectuelle, chacun des copropriétaires peut exploiter l’invention à son profit à condition d’indemniser les autres copropriétaires, ce seul courriel, s’il établit une mésentente réciproque entre les copropriétaires du brevet, Monsieur Frederick M s’étant gardé d’informer son interlocuteur chargé de la distribution des nettoyeurs de pinceaux fabriqués en application du brevet litigieux de l’existence de Monsieur Arnaud G, lequel aurait pris contact avec ledit distributeur pour tenter de déstabiliser ce partenariat, comportements pouvant caractériser un manquement des parties à leur devoir réciproque de loyauté, ne prouve en tout état de cause aucun lien de causalité entre le comportement prétendument fautif de Monsieur Arnaud G et la situation de blocage dont résulterait l’absence d’exploitation du brevet, alors qu’il ressort au contraire de ce même courriel que les difficultés de commercialisation rencontrées sont dues à des problèmes techniques, Monsieur L indiquant « devant les difficultés techniques que nous rencontrons sur ces produits et qui nous ont poussés à suspendre leur commercialisation », difficultés corroborées par la correspondance adressée le 23 avril 2012 à la société OCAI mentionnant ses réserves relatives à « une certaine fragilité du produit pour les professionnels ». Enfin il n’est pas davantage établi un lien entre les manquements reprochés à Monsieur Arnaud G et l’endettement de Monsieur Frederick M qui a fait l’objet de poursuites de la part de ses créanciers, Monsieur Frederick M ayant seul et librement contracté ces emprunts, ce qui n’est pas contesté. Il s’ensuit qu’en l’état de ces constatations, Monsieur Frederick M sera débouté de sa demande de condamnation indemnitaire à l’encontre de Monsieur Arnaud G.

Sur les autres demandes

Il y a lieu de condamner Monsieur Arnaud G, partie perdante, aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile. En outre, il doit être condamné à verser à Monsieur Frederick M, qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 4.000 euros. Il n’y a pas lieu enfin d’ordonner l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS Le tribunal, statuant publiquement par remise au greffe le jour du délibéré, par jugement contradictoire et en premier ressort, REJETTE la demande d’écarter les pièces 11, 12, 13, 14 et 16 ; CONSTATE qu’en violation des dispositions du règlement de copropriété en date du 17 octobre 2011, Monsieur Arnaud G s’est abstenu de payer la moitié des sommes dues au titre des frais et taxes du brevet français n° 2 964 841 et de la demande de brevet européen n° 2 430 946 pour les années 2012 et 2014, que Monsieur Frederick M s’est personnellement acquitté du paiement de la totalité des sommes dues et qu’il n’a pas été remboursé : CONSTATE qu’en application de la clause 5.6 dudit règlement de copropriété. Monsieur Frederick M devient propriétaire de la quote part que détenait Monsieur Arnaud G dans le brevet Français n° 2 964 841 et la demande de brevet européen n° 2 430 946: DIT que le présent jugement, une fois celui-ci devenu définitif sera transmis à l’INPI par la partie la plus diligente aux fins d’inscription au registre national et registre européen des brevets: CONDAMNE Monsieur Arnaud G à verser à Monsieur Frederick M, la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile : DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes :

DIT n’y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision : CONDAMNE Monsieur Arnaud G aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

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Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 18 décembre 2015, n° 14/17417