Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 4e section, 2 juillet 2015, n° 14/00430

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 4e sect., 2 juill. 2015, n° 14/00430
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 14/00430

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S (footnote: 1)

3e chambre 4e section

N° RG :

14/00430

N° MINUTE :

AJ du TGI DE NANTERRE

N° BAJ 92050/001/2009/006077

JUGEMENT

rendu le 02 juillet 2015

DEMANDERESSE

Madame P-Q X

[…]

[…]

représentée par Me Dominique E, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #D1450, désignée au titre de l’aide juridictionnelle totale

DÉFENDEURS

Maître S-T B ès qualités de mandataire judiciaire – liquidateur de la S.A.R.L. H I.

[…]

[…]

Défaillant, faute d’avoir constitué avocat

S.A.R.L. H I, société liquidée, anciennement dénommée SERUBI S.A.R.L.

[…]

[…]

S.A.R.L. INSTITUT H, société liquidée

[…]

[…]

Toutes deux représentées par Maître Michaël AMADO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E448

[…]

Monsieur J A

[…]

[…]

Madame K L

[…]

[…]

Tous deux représentés par Me Emmanuel PIERRAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0166

COMPOSITION DU TRIBUNAL

François THOMAS, Vice-Président

Laure ALDEBERT, Vice-Présidente

Laurence LEHMANN, Vice-Présidente

assistés de Sarah BOUCRIS, Greffier.

DÉBATS

A l’audience du 13 mai 2015 tenue en audience publique

JUGEMENT

Réputé contradictoire

Prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

En premier ressort

FAITS ET EXPOSE DU LITIGE

Madame P Q X est graphologue et morpho psychologue diplômée.

La société SERUBI est une société à responsabilité limitée immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris depuis le 6 juin1995, sous le n° 380 315 697 ayant pour objet la réalisation et la commercialisation de produits ayant trait aux ressources humaines, fondée par monsieur J A et madame M D, qui ont été respectivement le gérant, et la directrice commerciale.

Cette société composée de graphologues et morpho-psychologues dispensait notamment une méthode de développement personnel ainsi que des cours de graphologie.

Le 24 novembre 1998, madame X a signé avec la société SERUBI, un contrat d’édition à titre exclusif portant surྭla publication dans une édition courante de sa composition consistant en un cours de graphologie par correspondance qui a pour titre « Les Cahiers de Graphologie d’ P Q R» moyennant paiement de droits d’auteur.

Le contrat était signé pour une durée de 5 ans, pour l’Europe francophone.

Les parties avaient convenu d’un coût de l’ouvrage qui ne saurait être inférieur à 3 800 francs soit environ 600 €.

L’éditeur s’engageait à faire figurer le titre de l’ouvrage et le nom de l’auteur en couverture de la manière suivanteྭ«ྭ Les Cahiers de Graphologie d’ P Q R».

Il s’engageait aussi à associer l’auteur pour l’exploitation des droits dérivés de l’ouvrage, comme des cours, séminaires, conférences de graphologie, analyse graphologique.

Madame X explique que les cahiers consistaient en une I qualifiante sur 15 mois, sanctionnée par un certificat, dit alors “certificat Serubi”, accessible à toute personne qui aurait envie de se familiariser avec les techniques de la graphologie et qu’elle pouvait, en complément des cahiers, proposer des séances personnalisées ou des regroupements d’une journée.

La méthode était composée de 14 cahiers illustrés d’exemples, de fiches pédagogiques, d’applications pratiques, le quinzième et le seizième servant aux devoirs et aux corrigés.

Le 4 mai 2007, Monsieur J A et madame K D ont cédé l’intégralité des parts sociales de la société Serubi à monsieur J Y et à la société Institut H ( Développement Personnel Harmonie), société à responsabilité limitée immatriculée au registre du commerce de Moudon en Suisse sous le n° 2003/02635, dont monsieur Y était le gérant.

L’activité de la société Serubi a été en fait reprise par l’intermédiaire d’une autre société, dénommée H I, dont monsieur Y était le gérant, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris depuis le 6 juin 1995 et qui avait pour objet la réalisation, la commercialisation, la I et l’enseignement à distance de produits ayant trait aux ressources humaines.

Monsieur J A et madame K D sont restés plusieurs mois en qualité de salariés de la société H I pour accompagner la cession.

Madame X indique que le contrat d’édition, renouvelé tacitement, n’a jamais pris fin et qu’il a été transféré dans le cadre de la cession des parts sociales de la société Serubi, à la société H I.

Elle prétend que la société Serubi a manqué à ses obligations de reddition de comptes et paiement de droits d’auteur et que son ouvrage a été commercialisé à son insu, par la société Serubi puis par son successeur, la société H I.

En février 2008, Madame X a pris attache avec monsieur Y en qualité de gérant de la société H I pour faire valoir ses droits.

Elle lui a remis le contrat d’édition dont la société H I prétendait n’avoir pas eu connaissance.

Elle a, en outre, découvert en juillet 2008 que l’Institut H Sarl sur son site internet www.institutdph.com offrait à la vente les 16 cahiers du cours de graphologie, en vue d’obtenir le certificat Serubi sans son nom ni son autorisation.

A partir de juillet 2008, par l’intermédiaire de son conseil, madame X est entrée en discussion avec monsieur Z, gérant des sociétés H I et de l’Institut H, pour obtenir une indemnisation de son préjudice et le rappel des commissions passées, que lui devait la société Serubi.

Au cours des négociations, la société H I envisageait une collaboration future avec madame X.

C’est ainsi qu’il a été envisagé le paiement d’une indemnité transactionnelle au profit de madame X, au titre de ses droits d’auteur et de son préjudice moral, la cession à titre gratuit de l’ouvrage « les cours de graphologie de madame X » en échange d’une collaboration professionnelle entre la société H I et l’auteur, et la résiliation du contrat d’édition passé avec la société Serubi.

Madame X souhaitait également inclure dans l’accord la promesse d’obtenir par l’intermédiaire de la société H I, de la part de monsieur A, ancien gérant de la société Serubi, le paiement de ses droits d’auteur antérieurement dus par la société Serubi, qu’elle évaluait à la somme de 25 000 €.

Après plusieurs échanges de mails et de rencontres qui ont conduit à élaborer plusieurs projets de protocoles transactionnels, madame X a renoncé à inclure dans la transaction la garantie du règlement de ses droits d’auteur dus par la société Serubi

Les parties ont recherché un accord sur le montant d’une indemnité revenant à madame X au titre de son préjudice et la mise en place d’une collaboration future.

Les autres termes du protocole restaient inchangés, sauf à convenir des conditions financières pour la collaboration professionnelle à l’avenir de madame X avec la société H I.

Cependant, les parties ne sont pas parvenues à la signature du protocole et la société H I a mis fin aux pourparlers par courrier du 12 mars 2009 adressé au conseil de madame X, signifiant également la fin du contrat d’édition des cahiers de graphologie, pour cause de caducité.

C’est dans ce contexte que madame X a par exploit, en date du 30 avril 2010, fait comparaître la société H I et l’Institut H devant le tribunal de grande instance de Paris reprochant à la société H I Sarl une rupture abusive de pourparlers, l’inexécution fautive et la rupture fautive du contrat d’édition, et à la société Institut H, des actes de contrefaçon de ses droits d’auteur sur internet, et indemnisation du préjudice.

Par exploits en date des 24 et 27 décembre 2010, la société H I a appelé en intervention forcée et garantie monsieur A et madame K D.

L’affaire a été jointe à l’affaire principale par ordonnance du 17 février 2011 qui s’est poursuivie sous le n° RG 10/06858.

Le 10 avril 2013, la société H I a fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire prononcée par le tribunal de commerce de Paris qui a désigné Maître B en qualité de mandataire liquidateur.

Par ordonnance de relevé de forclusion en date du 18 décembre 2013, madame X a été admise à déclarer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de ladite société, ce qu’elle a effectué le 28 janvier 2014 pour un montant de 90 000 € en référence à la présente procédure.

L 'affaire, qui avait été radiée le 27 octobre 2011, a fait l’objet d’un rétablissement le 13 mars 2014.

Par exploit en date du 26 novembre 2014, madame X a fait assigner en intervention forcée maître B ès qualité de liquidateur de la liquidation judiciaire de la société H I en constatation et fixation de sa créance.

Par ordonnance du 29 janvier 2015, l’affaire a été jointe à l’instance RG 10/06858.

Au terme de ses dernières écritures signifiées le 31 mars 2015, madame X demande au tribunal avec le bénéfice de l’exécution provisoire, deྭ:

— constater la responsabilité de la société H I et l’existence de la créance de Madame P-Q X en résultant et fixer celle-ci au passif de la liquidation judiciaire de la société H I SARL à la somme de 90 000 euros,

— donner acte à Madame X de ce qu’elle se réserve le droit de mettre directement en cause Monsieur J Y en sa qualité d’associé, et d’acquéreur des parts sociales de Monsieur J A et Madame K D

— juger que Monsieur J A et Madame K D, anciens dirigeants de droit de la société SERUBI, ont bien la qualité de dirigeants de fait, par immixtion dans la gestion, l’administration et la direction de H I, en leurs qualités d’anciens associés de la société SERUBI et de salariés de H I,

— condamner la société INSTITUT H , Monsieur J A et Madame D, co-responsables, in solidum entre eux et avec la société H I à payer à Madame P Q X, au titre de l’article 1382 du code civil :

— la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive des pourparlers et discussions destinées à trouver un accord amiable au règlement du litige,

— la somme de 20 000 euros, en l’absence de toute bonne foi, à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral subi par ricochet,

— la somme de 30 000 euros de dommages et intérêts pour inexécution fautive du contrat d’édition et rupture abusive et prématurée de celui-ci le 12 mars 2009,

— la somme de 30 000 euros pour contrefaçon sur le net de l’œuvre « Les Cahiers de Graphologie de P Q X » au titre d’un certificat « SERUBI »,

— juger que ces sommes seront assorties de l’intérêt légal à compter du prononcé du jugement outre la capitalisation desdits intérêts légaux,

— débouter Monsieur J A et Madame K D de leurs demandes relatives au titre des articles 32-1, en présence d’un droit légitime à agir et dans le respect des dispositions du code de procédure civile et du code de commerce,

— débouter Monsieur J A et Madame K D de leur demande relative à des frais irrépétibles, non démontrés, d’une part et du fait d’une défense accordée à Madame P-Q X au titre de l’aide juridictionnelle totale,

— condamner in solidum la société INSTITUT I et Monsieur J A et Madame K D, conjointement et solidairement à verser à Me E, au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 10 000 euros,

— juger que la société INSTITUT H, Monsieur A et Madame D seront condamnées in solidum aux entiers dépens de l’instance.

Selon leurs dernières écritures signifiées par RPVA le 19 février 2015, monsieur A et madame D demandent au tribunal,ྭà titre principal, de constater le caractère prescrit des faits poursuivis et de débouter madame X de ses demandes ; à titre subsidiaire, de la déclarer irrecevable et mal fondée ; à titre infiniment subsidiaire, de prononcer leur mise hors de cause, débouter madame X et la société H I de son appel en garantie et, en tout état de cause, condamner madame X à payer la somme de 3 000 € pour procédure abusive et solidairement avec la société H I la somme de 12 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Maître B ès qualités de liquidateur de la société H I n’est pas représenté et n’a pas conclu, de sorte que le présent jugement sera réputé contradictoire.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 9 avril 2015.

MOTIVATION

Sur la rupture abusive des pourparlers

Madame X soutient que la société H I SARL a mis fin abusivement et brutalement le 12 mars 2009 aux pourparlers attestés par de nombreux mails qui avaient abouti à la mise au point d’un protocole transactionnel qui tenait compte de leurs volontés. Elle met en cause la bonne foi des sociétés H I et Institut H qui se seraient désengagées brutalement pour de faux motifs.

Elle sollicite, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, la fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société H I et en tant que co-responsable, la condamnation in solidum de l’Institut H au paiement de la somme de 30 000€ au titre de dommages et intérêts et celle de 20 000€ pour préjudice moral par ricochet.

Sur ce

Si les parties, avant de conclure un accord, ne sont pas engagés contractuellement et peuvent à tout moment décider de ne pas poursuivre la négociation et donc de rompre les pourparlers, elles sont néanmoins soumises à une obligation de loyauté, qui peut engager leur responsabilité délictuelle sur le fondement de l’article 1382 du code civil.

Il est constant qu’après des pourparlers suffisamment avancés, la liberté de ne pas conclure diminue et peut être considérée au regard des circonstances comme abusive.

En l’occurrence, il ressort des échanges des mails produits que madame X était en pourparlers de mars 2008 à mars 2009 avec monsieur Y, gérants des sociétés H I et Institut H, qu’ils se sont rencontrés à plusieurs reprises et que leurs discussions tendaient à trouver un accord portant sur l’indemnisation de madame X au titre de ses droits d’auteur, la résiliation d’un commun accord du contrat d’édition passé antérieurement avec la société Serubi, la cession à titre gratuit de l’exploitation de son ouvrage, «ྭles cours de graphologieྭ» contre une collaboration professionnelle future de l’auteur en tant que graphologue et morpho psychologue pour la supervision des acheteurs de la méthode.

Il est avéré que les parties ont échangé sur ces points pour aboutir le 13 novembre 2008 à un projet transactionnel que madame X, par l’intermédiaire de son conseil, a adressé à monsieur Z, aux termes duquel la société H I s’engageait notamment à verser à madame X la somme de 25 000 € en réparation de son préjudice au titre des droits d’auteur pour la commercialisation de son ouvrage.

Figurait dans le protocole l’engagement de la société H I à «ྭobtenir de l’ancien dirigeant , monsieur A, le montant de ses droits d’auteur de madame X non versés pendant plusieurs années, la créance indemnitaire étant évaluée à 25 000 €ྭ» (article 3 du protocole, pièce 36).

Il ressort des échanges que, si cet engagement prévu à l’article 3 a été remis en cause par monsieur Y ( 9 12 2008, pièce 31) il a néanmoins clairement indiqué par mail le 19 décembre 2008 à madame X et à son conseil «ྭmesdames, je n’entends nullement revenir sur la transaction ébauchée au Mercure de gare de Lyon, vous avez mon accord sur le fond du document. Sur la forme je souhaite apporter quelques modifications […] et reporter la signatureྭ»( pièce 28).

Il est établi que madame X ayant renoncé à la clause de garantie de paiement de ses commissions arriérées, une nouvelle convention a été élaborée et adressée à monsieur Y, à l’issue d’une rencontre le 15 janvier 2009, prévoyant alors une indemnité de 30 000 € nets CSG CRDS au titre de son indemnisation payable en plusieurs fois (pièces 16 et 16 bis).

Le 22 janvier 2009, monsieur Z O en effet «ྭavoir reçu la dernière mouture de la convention qui fait partie d’un tout. Le chèque sera établi quand tous les éléments seront OKྭ […] ABS [P-Q X] doit également proposer une indemnité forfaitaire pour le suivi des cours (moyenne) je reste dans l’attente de vos nouvelles » (pièce 14).

Le 13 février 2009, un document intitulé «ྭdocument final 2ྭ» était adressé par le conseil de madame X à monsieur Y, accompagné de la proposition financière de madame X pour ses prestations futures de suivi des acheteurs, moyennant un forfait par élève.

Le 18 février 2009, monsieur Y a contesté le caractère réaliste d’une proposition au forfait et a indiqué «ྭavoir d’autres priorités s’engageant à revenir vers vous début marsྭ» (pièce 7).

Le 11 mars 2009, monsieur Y a fait part des difficultés conjoncturelles du groupe et de la décision prise avec ses associés de ne donner aucune suite à la transaction, ce qui a été confirmé par un écrit de la société H I en date du 12 mars 2009 adressé au conseil de madame X .

Le 19 mars 2009, madame X a souhaité en dernier lieu retenir seulement la proposition financière de 30 000 € pour l’indemnisation de son préjudice renonçant au reste des dispositions du protocole, ce que monsieur Z a fermement refusé en indiquant «ྭSerubi, H I et moi même s’en remettent à justiceྭ» (pièce 1).

Il résulte des éléments produits que monsieur Y, pour le compte de la société H I, a laissé entendre à madame X qu’il allait conclure une transaction aux termes de laquelle elle serait indemnisée de son préjudice au titre de ses droits d’auteur sur ses cahiers, lui faisant croire à un contrat de collaboration future pour la commercialisation de sa méthode.

Il ressort des échanges qui ont duré un an qu’un document final avait été élaboré le 13 février 2009 suite à une dernière rencontre, que la date de signature devait suivre et que seule une discussion sur les modalités annexes de la rémunération future de madame X restaient en cours.

Pour autant, le 18 février 2009 monsieur Z a repoussé de nouveau l’échéance de la signature et a mis fin le 12 mars 2009 à tout accord en invoquant des difficultés conjoncturelles et une prétendue décision des associés de la société.

Le tribunal constate que ces circonstances invoquées sont justifiées par aucune pièce et n’ont à aucun moment été évoquées au cours de la négociation qui a duré près d’un an.

Il en résulte que monsieur Y, en qualité de gérant de la société H I, a manqué à son obligation de loyauté à l’égard de madame X, en rétractant le 12 mars 2009 son accord pour signer une transaction élaborée depuis plusieurs mois entre les parties, pour laquelle il avait confirmé son accord au fur et à mesure de l’avancement des pourparlers, de sorte que la rupture est abusive.

La rupture abusive n’ engage que la responsabilité de son auteur.

En l’occurrence, il est établi que c’est au nom de la société H I que monsieur Y a signifié la fin des pourparlers selon courrier du 12 mars 2009.

En conséquence, la responsabilité de l’institut H ne saurait être retenue.

Au vu des éléments, il convient d’évaluer à la somme de 25 000 €, la créance madame X, tous préjudices confondus à ce titre.

L’article L 622-22 du code précité prévoit que, sous réserve des dispositions de l’article L. 625-3, les instances en cours sont interrompues jusqu’à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l’administrateur ou le commissaire à l’exécution du plan nommé en application de l’article L.ྭ626-25, dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

Il convient donc de constater et de fixer la créance de madame X à hauteur de la somme de 25 000 €.

Sur la rupture abusive du contrat d’édition

Madame X reproche à la société H I une rupture abusive du contrat d’édition qui lui a été transféré par la société Serubi en ayant mis un terme au contrat d’édition par courrier du 12 mars 2009, de manière brutale et prématurée sans respecter les dispositions contractuelles convenues par le contrat.

Elle estime avoir subi un manque à gagner depuis 2007 jusqu’au 24 novembre 2009, date à laquelle le contrat aurait du se terminer,qu’elle évalue à 30 000 €.

Elle poursuit également sur le fondement de l’article 1382 du code civil la responsabilité de l’Institut H I dont elle demande la condamnation in solidum au paiement de sa créance.

Sur ce

Il n’est pas contesté que le contrat d’édition conclu entre madame X et la société Serubi s’est poursuivi par tacite reconduction et était en cours lors de la cession des parts sociales de la société Serubi.

Selon les échanges intervenus entre les parties au cours des pourparlers, la société H I a envisagé avec madame X de résilier le contrat d’édition au profit d’une nouvelle collaboration.

Le contrat d’édition faisait donc bien partie de la reprise de l’activité de la société Serubi par la société H I.

Il est reconnu par Monsieur A et madame D, qui sont restés salariés quelques mois dans ladite société H I, que l’ouvrage a été commercialisé par cette société sur les salons jusqu’en mai 2008, ce qui est confirmé par une lettre adressée par monsieur Y le 26 juin 2008 à madame X lui notifiant la fin de son activité de vente à cette date en lui adressant un exemplaire du solde du compte (pièce 55).

Il est avéré que les parties sont alors entrées en voie de négociations.

Au demeurant c’est par courrier du 12 mars 2009 que la société H I a mis fin aux pourparlers en indiquant que le contrat «ྭsans activité est devenu caduc comme il le précise lui mêmeྭ».

Pour autant le contrat stipule qu’il peut être résilié aux conditions prévues par l’article VII, «ྭnotamment pour manquement des parties à leurs obligations non réparé dans un délai de 30 jours de réception de la notification par lettre recommandéeྭ» sans prévoir une cause de caducité.

Il s’ensuit que la société H I n’a pas respecté ses obligations contractuelles en signifiant la fin du contrat par le courrier du 12 mars 2009.

Par ailleurs, la notification de cette résiliation s’inscrit dans le cadre de la rupture des pourparlers dont le caractère abusif a été retenu par le tribunal.

Il en résulte que la société H I a agi avec la même déloyauté vis-à-vis de madame X en rompant sans préavis le contrat d’édition et en s’affranchissant par ailleurs des conditions prévues par l’article VII du contrat pour procéder à la résiliation du contrat.

Au regard de ces éléments, il convient d’évaluer la créance de madame X au titre de la rupture abusive du contrat à la somme de 5 000 € aux fins de fixation.

Sur la responsabilité de l’ Institut H au titre de la résiliation du contrat d’édition

Madame X a étendu ses demandes au titre de de la rupture prématurée du contrat d’édition à l’encontre de la société Institut H sur le fondement de l’article 1382 du code civil.

Cependant, madame X ne démontre aucun fait de participation de l'ྭInstitut H I à à la résiliation du contrat dont la décision appartenait à la société H I.

Elle sera en conséquence déboutée de sa demande.

Sur l’inexécution fautive du contrat d’édition

Madame X fait grief à la société H I, de ne pas avoir indiqué son nom d’auteur sur les cahiers commercialisés.

Elle considère que la non diffusion de son nom porte atteinte à son droit moral d’auteur dont elle demande réparation également à l’ Institut H sur le fondement de l’article 1382 du code civil.

Sur ce

Madame X considère que la société H I a manqué aux obligations du contrat d’édition en diffusant l’ouvrage sans son nom mais ne justifie d’aucune pièce à l’appui de sa demande.

Elle sera déboutée de sa demande à l’encontre de la société H I.

En l’absence de preuve, sa demande ne saurait davantage prospérer contre l’Institut H.

Il convient de débouter madame X intégralement de sa demande.

Sur les demandes dirigées par madame X contre monsieur A et madame D

Suite à l’appel en garantie formé par la société H I à l’encontre de monsieur A et madame D, madame X a étendu ses demandes en paiement des sommes réclamées au titre de la rupture abusive des pourparlers, de l’inexécution du contrat d’édition pour omission de son nom d’auteur et rupture anticipée du contrat d’édition, à l’égard des défendeurs appelés dans la cause.

Elle soutient qu’ils ont la qualité de dirigeants de fait de la société H I par immixtion dans la gestion et l’administration de la société H I en qualité d’anciens associés de la société Serubi et salariés de la société H I et qu’ils ont ainsi engagé sur le fondement de l’article 1382 du code civil, leur responsabilité.

Monsieur A et Madame D contestent la recevabilité et le bien fondé des demandes.

Ils indiquent en premier lieu que la société Serubi a rempli ses obligations au regard du contrat d’édition et qu’en tout état de cause la demande est prescrite.

Ils reconnaissent avoir été salariés de la société H I pour accompagner la cession de leur activité sur quelques mois mais contestent avoir été dirigeants de fait de la société H I .

Ils indiquent ne pas être personnellement débiteurs des obligations du contrat d’édition transmis par la société Serubi à la société H I, et être étrangers aux faits postérieurs à la cession, aux pourparlers et à la fin du contrat intervenue le 12 mars 2009.

Sur ce

Madame X se plaint d’un défaut d’exécution du contrat d’édition sur une période sans préciser de date exacte mais sur une période allant apparemment de 2007 à 2009.

L’action se prescrivant par cinq ans, en application de l’article 2224 du code civil, l’action engagée par madame X par exploit en date du 30 avril 2010, moins de 5 ans après les faits, est recevable.

Il est constant que le dirigeant de fait est celui qui exerce toutes les attributions qui sont dévolues au dirigeant de droit, alors qu’il n’en a pas le pouvoir .

La qualité de dirigeant de fait ne se présumant pas, il appartient à celui qui en soutient l’existence d’en apporter la preuve.

Madame X prétend que monsieur A et madame D ont été gérants de fait de la société H I mais ne rapporte aucunement la preuve qu’ils aient commis des actes de direction effective ou d’immixtion dans la gestion de la société H I allant au delà de leurs fonctions de salariés.

Les pièces, qui se rapportent aux échanges intervenus entre monsieur Y et madame X exclusivement, ne rapportent aucun élément relatif à un acte positif de gestion des défendeurs pour le compte de la société H I en lien avec les faits reprochés.

Madame X sera en conséquence déboutée de ses demandes à l’encontre monsieur A et de madame D.

Il convient de relever que le «ྭdonner acteྭ» étant dénué de valeur juridique, il ne sera pas fait droit à la demande présentée par Madame X quant à la possibilité de mettre directement en cause Monsieur J Y.

Sur la contrefaçon des cahiers de graphologie

Sur le fondement des dispositions de l’article 1382 du code civil, Madame X reproche à l’Institut H des actes de contrefaçon pour avoir commercialisé sur internet ses cahiers, sans son nom ni son autorisation. Elle justifie sa demande par la production de captures d’écran internet éditées le 28 et 30 juillet 2008.

Elle poursuit également Monsieur A et Madame D au titre de ces faits, comme dirigeants de fait de la société H I sur le fondement de l’article 1382 du code civil.

Elle réclame globalement la somme de 30 000€ à ce titre.

De leur côté, Monsieur A et Madame D ont conclu à l’irrecevabilité et au mal fondé de la demande en contrefaçon à défaut de justifier de l’oeuvre protégée et de la preuve des faits allégués.

Ils confirment ne pas avoir la qualité de dirigeants de fait de la société H I.

Sur ce

L’utilisation d’une œuvre sans l’autorisation de son auteur est un acte de contrefaçon.

L’action en contrefaçon est régie par les dispositions de l’article 122-4 du code de la propriété intellectuelle et non par celles de l’article 1382 du code civil.

L’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle dispose que toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayant cause est illicite.

Madame X reproche à l’ Institut H Sarl des actes de contrefaçon en ayant reproduit et offert à la vente ses cahiers sous la rubrique « Cours de graphologieྭ» de son site internet www.institutdph.com, « 16 cahiers du cours de graphologie se composent d’une trentaine de pages chacun illustrés de nombreux exemples, applications pratiques […] chaque futur graphologue pourra ainsi affiner progressivement son observation des écritures […]ྭ; un examen annuel regroupe à Paris les étudiants désireux d’obtenir le certificat Serubiྭ» selon des feuilles d’écran internet qu’elle a imprimées les 23 et 28 juillet 2008 et qu’elle produit.

Pour autant, les captures d’écran internet produites par madame X ne présentent pas de garantie de stabilité satisfaisante, ne permettent pas au tribunal de vérifier le contenu des cahiers commercialisés, et il est constant que madame X qui n’a pas communiqué l’ouvrage sur lequel elle revendique ses droits, n’a fourni qu’un résumé de la méthode qui ne permet pas au tribunal d’examiner le bien fondé de sa demande.

Sa demande est donc irrecevable tant à l’encontre de la société H I que de l’Institut H et de monsieur A et Madame D.

Sur l’appel en garantie

La société H I a appelé en garantie des condamnations qui seraient mises à sa charge, monsieur A et madame D.

A l’appui de sa demande, elle a fait valoir dans son assignation en intervention forcée que l’affaire avait trait à un différend entre madame X et l’ancien dirigeant de la société Serubi, monsieur A, pour le règlement de commissions impayées au titre de ce contrat dont elle indiquait ne pas avoir eu connaissance.

Il appartenait donc selon elle aux anciens associés de garantir la société du paiement des sommes qui seraient, le cas échéant, mises à sa charge.

Il convient de rappeler que postérieurement à ses demandes, la société H I a fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire désignant maître B en qualité de mandataire liquidateur.

En vertu de la règle du dessaisissement du débiteur prévue par l’article L 641-9 du code de commerce, seul Maitre B avait qualité pour reprendre la demande de la société H I.

A défaut d’avoir constitué avocat et conclu, l’appel en garantie non soutenu, sera rejeté.

Sur la demande reconventionnelle de monsieur A et madame D

Monsieur A et madame D ne démontrent pas que madame X a été animée d’une intention de nuire ou une légèreté blâmable en formant ses demandes.

Le caractère abusif de la procédure n’étant pas démontré, ils seront déboutés de leur demande.

Sur l’exécution provisoire

Il parait nécessaire en l’espèce et compatible avec la nature de l’affaire d’ordonner l’exécution provisoire de la présente décision.

Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile

L’équité commande de condamner la société H I prise en la personne de son liquidateur judiciaire, partie perdante, à payer à madame X la somme de 2 000 € et à monsieur A et madame D qu’elle a appelé en garantie, la somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles.

L’équité ne commande pas de faire droit à la demande de monsieur A et madame D en paiement de frais irrépétibles contre madame X.

Sur les dépens

La société H I prise en la personne de son mandataire liquidateur, maître B qui succombe sera condamnée aux entiers dépens avec distraction au profit de Me E, au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

Prononce la mise hors de cause de monsieur A et madame D,

Dit que la société H I Sarl a rompu abusivement les pourparlers et le contrat d’édition le 12 mars 2009,

Constate et fixe la créance indemnitaire de madame P Q X à la somme de 25 000€ pour la rupture des pourparlers et à celle de 5 000€ pour la rupture du contrat d’édition

Déclare irrecevable l’action de madame P Q X, en contrefaçon de ses cahiers de graphologie,

Déboute madame P Q X du surplus de ses demandes

Rejette l’appel en garantie formé par la société H I contre monsieur A et madame D et non soutenu,

Rejette la demande en garantie formée par la société H I contre monsieur A et madame D,

Déboute monsieur A et madame D de leur demande reconventionnelle en procédure abusive,

Ordonne l’exécution provisoire,

Condamne la société H I, prise en la personne de son mandataire liquidateur, maître B à payer à madame P-Q X la somme globale de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société H I prise en la personne de son mandataire liquidateur, maître B à payer à monsieur A et madame D la somme globale de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société H I prise en la personne de son mandataire liquidateur, maître B aux entiers dépens avec distraction au profit de Me E au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Fait et jugé à Paris, le 02 Juillet 2015.

Le Greffier Le Président

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Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 4e section, 2 juillet 2015, n° 14/00430