Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 4e section, 26 mai 2016, n° 15/00927

  • Brevetabilité de l'invention ou validité du brevet·
  • Préjudice économique ou commercial·
  • Reproduction des caractéristiques·
  • Fonction d'indication d'origine·
  • Préjudice subi par le licencié·
  • Validité du constat d'huissier·
  • Domaine technique identique·
  • À l'égard du distributeur·
  • Fonctions de la marque·
  • Contrefaçon de brevet

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 4e sect., 26 mai 2016, n° 15/00927
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 15/00927
Domaine propriété intellectuelle : BREVET ; MARQUE
Marques : AnyLock
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : EP1572548 ; 3405137
Titre du brevet : Procédé et dispositif de scellement d'un paquet
Classification internationale des brevets : B65D ; Y10T
Brevets cités autres que les brevets mis en cause : FR1205714 ; US3481007 ; US1141221 ; US20020094140 ; US582927 ; US4011636 ; US5050272
Classification internationale des marques : CL16 ; CL21
Référence INPI : B20160090
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Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 26 mai 2016

3e chambre 4e section N° RG : 15/00927

DEMANDERESSES Société SEHYANG INDUSTRIAL CO LTD 9-2 horim Don – Dalseo-Gu REPUBLIQUE DE COREE

Société DAE SUNG HI TECH CO LTD 10 Technodaero 2 Gil H – Daelson-Gun – Deagu REPUBLIQUE DE COREE

S.A.R.L. LJ IMPORT EXPORT […] 03000 MOULINS Toutes agissants poursuites et diligences de leur représentant légal, domicilié en cette qualité aux dits sièges. et représentées par Maître Patrice DE CANDÉ de la SELARL CANDE – BLANCHARD- DUCAMP, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0265

DÉFENDERESSE S.A.R.L. AVISTORE EU […] 13910 MAILLANE prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège. et représentée par Maître Eric NOUAL de la SCP SCP NOUAL DUVAL, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0493

COMPOSITION DU TRIBUNAL Camille LIGNIERES. Vice-Présidente Laurence L, Vice-Présidente Laure A, Vice-Présidente assistées de Sarah BOUCRIS, greffier.

DÉBATS À l’audience du 25 mars 2016 tenue en audience publique

JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoire En premier ressort

Les parties : La société SEHYANGINDUSTRIAL CO Ltd, société de droit coréen, (dite SEHYANG INDUSTRIAL) est titulaire d’un brevet européen n° EP 1 572 548 (dit EP 548) portant

sur un « procédé et dispositif de scellage d’un paquet », enregistré le 5 novembre 2003 et désignant la France. La société DAE SUNG HI TECH, société de droit coréen, (dite DAE S) est titulaire d’une licence exclusive d’exploitation du brevet EP 548 depuis le 17 novembre 2003 enregistrée au Registre National des Brevets le 10 décembre 2014. La société DAE SUNG est également titulaire de la marque française verbale « AnyLock », déposée à l’INPI le 23 janvier 2006 sous le n° 06/3405137, qui désigne notamment des « ustensiles et récipients non électriques pour le ménage ou la cuisine et pinces pour l’emballage » de la classe 21. La société LJ IMPORT EXPORT est une société de droit français, distributeur exclusif en France des produits vendus sous la marque « AnyLock », en vertu d’un contrat signé avec la société DAE SUNG le 1er avril 2011. La société AVISTORE EU (dite AVISTORE) est une SARL de droit français immatriculée au RCS de Tarascon depuis le 24 septembre 2013, qui a comme activité, selon l’extrait Kbis, la vente de divers produits de consommation courante non réglementés sur internet. La portée du brevet : Le brevet EP 548 protège un « procédé et dispositif de scellage d’un paquet » qui comporte une tige en forme de baguette comprenant deux parties dont l’une entoure l’autre : une tige et un élément tubulaire à l’intérieur duquel est disposée la tige laissant un espace libre entre les deux éléments afin d’y insérer un sachet pour en permettre la fermeture par pincement entre les deux éléments.

Les revendications du brevet sur lesquelles portent la demande en contrefaçon sont les suivantes :

- revendication n° 1 : « Dispositif de scellage d’un paquet (2) comprenant une tige (14), un élément tubulaire (16) apte à être engagé par coulissement autour de la tige (14), un intervalle de pincement (18) défini entre la tige (14) et l’élément tubulaire (16), une fente (20) ménagée dans l’élément tubulaire (16) selon la direction longitudinale dudit élément tubulaire (16), un élément de guidage incliné (14a) formé) à une extrémité de la tige (14) et un autre élément de guidage incliné formé à une extrémité de l’élément tubulaire (16), dans lequel : l’élément tubulaire (16) a une section transversale circulaire : caractérisé en ce que la tige (14) est formée, à l’une de ses extrémités, avec une partie coudée qui s’étend selon une inclinaison en direction de la fente (20) de l’élément tubulaire (16) lorsque la tige (14) a été introduite dans l’élément tubulaire (16), avec un prolongement horizontal qui s’étend horizontalement depuis l’extrémité de la partie coudée qui est située à l’opposé de la tige (14), et avec un ressaut semi-circulaire formé à l’extrémité du prolongement horizontal qui est située à l’opposé de la partie coudée » ;
- revendication n° 3 : « Dispositif de scellage d’un paquet (2) selon la revendication 1 ou la revendication 2, dans lequel la tige (14) est formée, à l’une de ses extrémités avec une butée en saillie qui présente une surface verticale et une surface inclinée » ;

— revendication n°7 : « Dispositif de scellage d’un paquet (2) selon la revendication 1 ou la revendication 2, dans lequel la tige (14) a une section transversale dont la forme est choisie dans un groupe constitué des formes circulaire, semi-circulaire, ovale, rectangulaire, losangique. trapézoïdale et polygonale ». Le litige Le produit correspondant à l’invention brevetée est diffusé dans le monde entier et notamment en France sous la forme d’une baguette de scellage sous la marque « AnyLock ». Il est reproché à la société AVISTORE de proposer à la vente à partir de la plateforme www.amazon.fr, notamment sous le nom commercial de « Avilady » des baguettes qui reprendraient de manière servile les éléments caractéristiques objet des revendications du brevet EP 548. Il est également reproché à la société AVISTORE le fait que les baguettes « Avilady » apparaissaient sur la page www.amazon.fr lors d’une recherche avec le terme « AnyLock ». Un constat d’achat a été établi par huissier de justice sur le site www.amazon.fr par procès-verbaux en date des 5 et 10 décembre 2014. Autorisée par ordonnance présidentielle du 12 décembre 2014 du tribunal de grande instance de Paris, des opérations de saisie-contrefaçon ont été effectuées au siège de la société AVISTORE à mai liane (13). L’huissier instrumentaire a notamment pu saisir réellement trois baguettes de scellage et des documents comptables.

C’est dans ces conditions que la société SEHYANG INDUSTRIAL, la société DAE SUNG et LJ IMPORT EXPORT ont fait assigner la société AVISTORE EU devant le tribunal de grande instance de Paris par exploit du 16 janvier 2015 en contrefaçon du brevet EP 548, en contrefaçon de la marque « AnyLock » et en concurrence déloyale. Dans leurs dernières conclusions notifiées par RPV A en date du 25 novembre 2015, les sociétés SEHYANG INDUSTRIAL, DAE S et LJ IMPORT EXPORT demandent au tribunal de : Vu les dispositions du livre VI et du livre VII du Code de la Propriété Intellectuelle ; Vu l’article 1382 du Code Civil ;

- Débouter la société AVISTORE EU de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

- Rejeter purement et simplement les demandes de nullité de la société AVISTORE EU relatives aux opérations de constat des 5 et 12 décembre 2014.

- Dire et juger que la société AVISTORE EU n’est pas recevable et en toute hypothèse mal fondée en ses prétentions de nullité des contrats de licence et de distribution exclusive.

- Dire et juger recevables et bien fondées les demandes présentées par les sociétés SEHYANG INDUSTRIAL, DAE S et LJ IMPORT EXPORT.

- En particulier dire et juger que la société DAE SUNG, comme la société LJ IMPORT EXPORT sont recevables dans leurs demandes dès lors que l’inscription de leurs droits est antérieure à l’assignation et en conséquence leur permet de solliciter une indemnisation même pour les actes antérieurs à cette inscription.

- Dire et juger que le brevet EP 1 572 548 est valable dès lors que celui-ci protège une invention ayant une application industrielle, nouvelle et inventive.

— Dire et juger qu’en faisant fabriquer, en important, en assurant la promotion et en vendant des baguettes de scellage sous la référence « AnyLock32_NOUS » et reprenant les enseignements du brevet EP 1 572 548 la société AVISTORE EU s’est rendue coupable de :

- contrefaçon des revendications 1, 3 et 7 du brevet EP 1 572 548 ;

- contrefaçon de la marque AnyLock n° 06/3405137.

- Dire et juger :

- Que ces agissements constituent pour la société LJ IMPORT EXPORT, distributeur exclusif de ces produits en France, des actes de concurrence déloyale.

- Qu’en utilisant pour la présentation de ses baguettes des couleurs et une matière identiques pour leurs composantes, des rainures et des perforations placées identiquement sur la partie tubulaire, aggravant ainsi le risque de confusion pour les consommateurs, la société AVISTORE EU s’est également rendue coupable de concurrence déloyale au détriment de la société LJ IM PORT EXPORT. En conséquence :

- Faire interdiction à la société AVISTORE EU de poursuivre la fabrication, l’offre, la promotion et la vente des baguettes correspondant aux produits saisis dans ses locaux le 18 décembre 2014 par le ministère de Maître Brila société DAE SUNGi et tout usage de la marque AnyLock pour désigner de tels produits et ce sous astreinte de 15 000 € par jour de retard et par infraction constatée, 8 jours après signification du jugement à intervenir.

- Condamner la société AVISTORE EU à verser :

- à la société SEHYANG INDUSTRIAL la somme de 25 000 € au titre de l’atteinte à la valeur du brevet EP 1 572 548 ;

- à la société DAE SUNG la somme de 10 000 € en réparation de l’atteinte à la valeur de la marque AnyLock n° 06/3405137 ;

- en réparation du préjudice commercial subi en conséquence des actes de contrefaçon du brevet EP 1 572 548 et de la marque n° 06/3405137 o à la société DAE SUNG la somme de 113 000 € o à la société LJ IMPORT EXPORT la somme de 15 000 €
- à la société LJ IMPORT EXPORT la somme de 10 000 € complémentaires en réparation du préjudice subi par cette dernière du fait des actes de concurrence déloyale résultant de la reprise des éléments de présentation des baguettes AnyLock non décrits dans le brevet.

- À titre subsidiaire si, par extraordinaire le tribunal estimait que les sociétés DAE SUNG et LJ IMPORT EXPORT ne seraient pas recevables à solliciter une indemnisation pour les faits de contrefaçon antérieurs au 10 décembre 2014 :

- condamner la société AVISTORE à verser :

- à la société SEHYANG INDUSTRIAL :

- la somme de 25 000 € au titre de l’atteinte à la valeur du brevet EP 1 572 548
- la somme forfaitaire de 50 000 € au titre de son préjudice commercial
- à la société DAE SUNG :

- la somme de 10 000 € en réparation de l’atteinte à la valeur de la marque AnyLock n° 06/3405137
- la somme de 15 000 € à titre forfaitaire en réparation du préjudice commercial

— à la société LJ IMPORT EXPORT la somme de 10 000 € complémentaires en réparation du préjudice subi par cette dernière du fait des actes de concurrence déloyale résultant de la reprise des éléments de présentation des baguettes AnyLock non décrits dans le brevet.

— Ordonner en toute hypothèse la publication dans trois journaux, magazines, revues, au choix des sociétés SEHYANG INDUSTRIAL, DAE S et LJ IMPORT EXPORT, dans la limite d’un budget de 25 000 € pour l’ensemble des publications, du texte suivant (police noir sur fond blanc, taille de la police : 12pt, type de police de caractères : « Times New Roman » ou « Arial ») : « Par jugement du……………………… le Tribunal de Grande Instance de Paris a jugé que la société AVISTORE EU, en faisant fabriquer, en important, en assurant la promotion et en vendant des baguettes de scellage sous la référence « AnyLock32_NOUS » et reprenant les enseignements du brevet EP 1 572 548, la société AVISTORE EU s’est rendue coupable de contrefaçon de ce brevet appartenant à la société SEHYANG et de la marque AnyLock appartenant à la société DAE SUNG et de faits de concurrence déloyale au préjudice de la société LJ IMPORT EXPORT importateur exclusif des produits AnyLock ».

- Condamner en toute hypothèse la société AVISTORE EU à verser à chacune des sociétés SEHYANG INDUSTRIAL, DAE S et LJ IMPORT EXPORT la somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

- Condamner en toute hypothèse la société AVISTORE EU aux entiers dépens de la présente instance dont distraction au profit de la SELARL CANDÉ-BLANCHARD- DUCAMP, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

- Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant toute voie de recours et sans constitution de garantie. En défense, la société AVISTORE par e-conclusions en date du 31 décembre 2015, demande au tribunal de : IN LIMINE LITIS : 1. DECLARER nul le Procès-verbal de constat d’huissier en date du 5 décembre 2014 (pièce adverse n°10-l) ;

- DECLARER nul le Procès-verbal de constat d’huissier en date du 10 décembre 2014 (pièce adverse n°10-2) ; EN CONSEQUENCE :

- DEBOUTER la société DAE SUNG de ses demandes d’indemnisation au titre de la contrefaçon de la marque AnyLock ; À TITRE PRINCIPAL : 1. CONSTATER l’absence de contrefaçon de la marque AnyLock par la Société AVISTORE. EN CONSEQUENCE :

- DEBOUTER la Société DAE SUNG de ses demandes d’indemnisation au titre de la contrefaçon de la marque AnyLock ;

- CONSTATER l’absence d’activité inventive du brevet EP n° 1 572 548; EN CONSEQUENCE :

- DIRE ET JUGER que le brevet de la Société SEHYANG INDUSTRIAL ne respecte pas les dispositions de l’article L.611 -10 du Code de la propriété intellectuelle ;

- DECLARER RECEVABLE la demande reconventionnelle de la Société AVISTORE en nullité des revendications n° 1, 3 et 7 du brevet EP n° 1 572 548 ;

- ANNULER les revendications n° 1, 3 et 7 du brevet EP n° 1 572 548 ;

- DEBOUTER la Sociétés SEHYANG INDUSTRIAL de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- CONSTATER l’absence de concurrence déloyale commise à rencontre de la Société LJ IMPORT EXPORT ; EN CONSEQUENCE :

— DEBOUTER la Société LJ IMPORT EXPORT de ses demandes au titre d’une prétendue concurrence déloyale ; À TITRE SUBSIDIAIRE :

- CONSTATER l’absence d’inscription au Registre National des Brevets avant le 10 décembre 2014 des contrats de licence et de distribution des Sociétés DAE SUNG et LJ IMPORT EXPORT ;

- CONSTATER l’inopposabilité de ces contrats à la Société AVISTORE avant le 10 décembre 2014 ;

- DIRE ET JUGER les Sociétés DAE SUNG et LJ IMPORT EXPORT non recevables à agir en contrefaçon et en concurrence déloyale pour des actes antérieurs à l’enregistrement de leur contrat au Registre National des Brevets le 10 décembre 2014 ; EN CONSEQUENCE,
- DEBOUTER la Société SEHYANG INDUSTRIAL de sa demande d’indemnisation, le montant de la réparation demandée n’étant assis sur aucun élément permettant d’en apprécier la réalité ;

- DEBOUTER les Sociétés DAE SUNG et LJ IMPORT EXPORT de toutes leurs demandes d’indemnisation pour le préjudice subi avant l’inscription de leurs contrats au Registre National des Brevets ;

- DONNER ACTE à la Société AVISTORE qu’elle propose le paiement, à titre forfaitaire et définitif d’une somme de 240 euros par société demanderesse, correspondant au montant des ventes par elle effectuées entre le 10 décembre 2014 et le 18 décembre 2014 ;

- DEBOUTER les sociétés SEHYANG INDUSTRIAL, DAE S et LJ IMPORT de leur demande d’indemnisation à titre subsidiaire d’un montant respectif de 75.000 €, 25.000 € et 10.000 €, À TITRE RECONVENTIONNEL :

- CONSTATER les actes de concurrence déloyale des Sociétés SEHYANG INDUSTRIAL, DAE S et LJ IMPORT EXPORT commis à rencontre de la Société AVISTORE et lui causant un trouble commercial EN CONSÉQUENCE :

- CONDAMNER les sociétés SEHYANG INDUSTRIAL, DAE S et LJ IMPORT EXPORT au paiement de dommages et intérêts d’un montant de 189.661,32 €, à parfaire au jour de la décision à intervenir, au titre de la concurrence déloyale causée par ces dernières à la concluante. EN TOUT ETAT DE CAUSE,
- DEBOUTER les sociétés SEHYANG INDUSTRIAL, DAE S et LJ IMPORT EXPORT de leur demande de publication dans des journaux ;

- DEBOUTER les sociétés SEHYANG INDUSTRIAL, DAE S et LJ IMPORT EXPORT de leur demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

- DEBOUTER les sociétés SEHYANG INDUSTRIAL, DAE S et LJ IMPORT EXPORT de leur demande d’exécution provisoire ;

- CONDAMNER les sociétés SEHYANG INDUSTRIAL, DAE S et LJ IMPORT EXPORT à verser chacune à la Société AVISTORE la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNER les sociétés SEHYANG INDUSTRIAL. DAE S et LJ IMPORT EXPORT aux entiers dépens. La clôture a été prononcée en date du 7 janvier 2016. MOTIFS

Sur la validité des procès-verbaux de constat d’huissier en date du 5 décembre 2014 et du 10 décembre 2014 La défenderesse reproche au procès-verbal de constat d’achat en ligne du 5-12-2014, le fait que la personne ayant procédé à l’achat en ligne constaté par l’huissier de justice était l’assistante juridique du conseil de la demanderesse et n’était donc pas une personne neutre. Cependant, il suffit que ce soit une personne tierce, autre que l’huissier de justice, qui procède à l’achat et que l’huissier de justice ne fasse que constater l’acte d’achat pour que le constat soit valide, ce qui a été fait en l’espèce (pièce 10-1 en demande). Concernant la réception du colis acheté en ligne ayant fait l’objet d’un constat en date du 10 décembre 2014, il est fait remarquer en défense que la facture annexée au procès-verbal de réception ne correspond pas à l’achat réalisé le 10 décembre 2014 auprès de la société AVISTORE EU.

En effet, la facture annexée mentionnant comme vendeur « JUSTE PRIX » et non pas « AVISTORE » ne correspond pas à l’évidence à l’achat en ligne constaté le 5-12- 2014, cet élément ne justifie pas l’annulation du procès-verbal critiqué mais affaiblit considérablement sa force probante (pièce 10-2 en demande). Sur la contrefaçon de la marque verbale française « AnvLock » dont la société DAE SUNG est titulaire Les demanderesses reprochent à la défenderesse d’avoir reproduit la marque « AnyLock » à la fois sur les factures délivrées lors des achats en ligne sur des sites marchands et saisies par l’huissier de justice le 12 décembre 2014 au siège social de la société AVISTORE EU, et également comme mot clé dans le moteur de recherche du site AMAZON.fr comme cela a pu être constaté par procès-verbal en ligne du 5 décembre 2014. La société AVISTORE EU réplique que la mention « AnyLock.32_NOUS » sur les « bons de commande » est utilisée de façon privée pour des raisons de référencement interne uniquement, que cette mention n’est jamais portée à la connaissance des clients, que d’ailleurs la référence « AnyLock.32_NOUS » est mentionnée après « SKU » signifiant « Stock Keeping unit » soit en français « unité de gestion des stocks », qui sert à la gestion précise des volumes mis en vente. La société AVISTORE EU prétend que ces bons de commandes comprenant la mention « AnyLock » sont uniquement des documents internes à l’entreprise. La défenderesse ajoute que c’est sous le nom « Fresh-Lock » que les baguettes sont mises en vente sur le site Amazon.fr, qu’en effet pour trouver les baguettes de la société AVISTORE EU dans le moteur de recherche Amazon, il faut utiliser le mot clé « fresh-lock ». SUR CE ; En application de l’article L.713-2 du code de la propriété intellectuelle : « Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire :

a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, même avec l’adjonction de mots tels que : « formule, façon, système, imitation, genre, méthode », ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement En application de l’article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle : "sont interdits sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public : a) la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l’enregistrement ; b) l’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement.''''

Lorsque l’usage par un tiers d’un signe identique à la marque est fait pour des produits identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, le titulaire de la marque est habilité à en interdire l’usage si celui-ci est susceptible de porter atteinte à l’une des fonctions de la marque et notamment à la fonction essentielle de la marque qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service marqué, en lui permettant de distinguer ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance. Le seul fait d’utiliser une marque comme mot-clé ne constitue pas en soi un acte de contrefaçon. En effet, la CJUE a dit pour droit dans son arrêt rendu, le 22 septembre 2011, (aff. C- 323/09, Interflora cl Marks and Spencer ) que "la marque n’a cependant pas pour objet de protéger son titulaire contre des pratiques inhérentes au jeu de la concurrence, que l’utilisation d’une marque même notoire à titre de mot clé est licite si elle respecte un certain nombre de conditions […] le titulaire d’une marque renommée n 'est pas habilité à interdire, notamment, des publicités affichées par des concurrents à partir de mots clés correspondant à cette marqué". Dans ses arrêts Google du 23 mars 2010 et Interflora cité plus haut, la CJUE a ajouté la notion d’atteinte à la fonction d’indication d’origine à propos des liens commerciaux comme suit : «Il y a atteinte à cette fonction lorsque l’annonce ne permet pas ou permet seulement difficilement à l’internaute normalement informé et raisonnablement attentif de savoir si les produits ou les services visés par l’annonce proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d’un tiers ». Et l’arrêt Google a apporté la précision suivante : « Eu égard à la fonction essentielle de la marque, qui, dans le domaine du commerce électronique, consiste notamment à permettre aux internautes parcourant les annonces affichées en réponse à une recherche au sujet d’une marque précise, de distinguer les produits ou les services du titulaire de cette marque de ceux qui ont une autre provenance, ledit titulaire doit être habilité à interdire l’affichage d’annonces de tiers que les internautes risquent de percevoir erronément comme émanant de lui ». Il convient donc de déterminer s’il y a une atteinte à la fonction d’identification de la marque du fait de l’annonce litigieuse qui dépend de la façon dont est présentée

l’annonce suscitée par le mot-clé identique à cette marque. Ainsi, il y a atteinte à la fonction d’identification de la marque lorsque l’annonce ne permet pas ou permet difficilement à l’internaute normalement informé et raisonnablement attentif, de savoir si les produits ou services visés par l’annonce proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou au contraire d’un tiers.

-la contrefaçon de marque par le mot clé sur le site Amazon.fr En l’espèce, au vu du procès-verbal de constat d’achat du 5 décembre 2014 sur le site de vente en ligne Amazon.fr , en indiquant dans le moteur de recherche interne au site le mot « anylock », la page suivante

En première position, apparaît le produit de la société AVISTORE EU sous le nom de « Avilady » et en deuxième position le produit « Anylock ». Cependant, la société AVISTORE EU n’est pas responsable de l’organisation du moteur de recherche du site Amazon.fr qui a choisi de faire jouer la concurrence en présentant des produits analogues aux baguettes « AnyLock » sur une même page. En outre et surtout, l’internaute d’attention moyenne ne pourra confondre les produits de la société AVISTORE EU qui sont vendues sous le nom de AVILADY et appelées « Fresh-lock baguettes ». D’ailleurs, quand l’internaute clique sur l’annonce du produit « Fresh-lock » et accède à la description du produit, le terme « AnyLock » n’est nullement mentionné. L’acheteur en ligne ne sera donc pas amené à penser que les produits visés par l’annonce de la société AVISTORE EU proviennent du titulaire de la marque « AnyLock » ou d’une entreprise économiquement liée au vendeur des produits '« AnyLock ».

-la contrefaçon de marque par la mention sur les factures saisies au siège de la société AVISTORE EU

Malgré les dénégations en défense sur la mise en contact de ces documents avec les clients, il apparaît que ceux-ci sont indiqués comme des « factures » (pièce 12-3 en demande : annexes du procès-verbal de saisie-contrefaçon). En outre, il est démontré que ce même type de document avec la référence SKU en bas de page est reçu par les acheteurs en ligne du site Amazon.fr, certes délivré en l’espèce par un vendeur autre que la société AVISTORE EU soit « Juste Prix », mais qui montre la facture type destinée aux clients d’Amazon (pièce 10-2 en demande).

Sur les factures saisies, il est mentionné de façon très apparente le nom du produit : « Fresh-lock baguettes ». Le terme « AnyLock.32_NOUS » est indiqué en petits caractères après la mention SKU et en bas de page, ce terme sera donc lu par le client comme une référence et non comme une marque c’est à dire une indication de l’origine du produit. Enfin, la facture étant reçue à la réception du colis, ce document n’est pas déterminant au moment de l’acte d’achat en ligne. Par conséquent, les faits de contrefaçon de la marque « AnyLock » ne sont pas prouvés et toutes les demandes à ce titre envers la société AVISTORE EU seront rejetées.

Sur la contrefaçon des revendications 1.3 et 7 du brevet EP 1 572 548

— la validité des revendications opposées La société défenderesse sollicite la nullité des revendications 1,3 et 7 pour défaut d’activité inventive. Elle fait valoir tout d’abord que l’activité inventive du brevet n’aurait pas été analysée par l’INPI lors de son dépôt, ensuite, elle oppose sept brevets antérieurs ainsi que quatre photos et une vidéo qui permettraient aisément, selon elle, d’aboutir à l’invention revendiquée. Les demanderesses répondent, d’une part, que s’agissant d’un brevet européen c’est à l’OEB et non à l’INPI d’analyser la validité du brevet afin de l’enregistrer, ce que l’OEB a fait ; et d’autre part, que les quatre photos et la vidéo, laquelle d’ailleurs n’est versée au débat que par l’indication d’un lien hypertexte, n’ont aucune date certaine, enfin qu’aucun des brevets antérieurs opposés ne révèle ni une tige coudée à l’une de ses extrémités qui est le premier élément de la partie caractérisante de la revendication 1, ni la butée révélée par la revendication 3, ni une tige avec une section transversale sous les formes enseignées par la revendication 7. SUR CE ; L’article 56 de la Convention de Munich pour les brevets européens dispose qu’une " invention est considérée comme impliquant une activité inventive, si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique.'''' Pour apprécier l’activité inventive, il faut rechercher si l’homme du métier qui a su identifier un problème technique était conduit de manière évidente à trouver la solution en combinant divers enseignements.

L’homme du métier, qui est en l’espèce un spécialiste des dispositifs ménagers de conditionnement destinés aux aliments de consommation courante liquides ou solides, cherchait à résoudre les problèmes posés par l’état antérieur de la technique, à savoir le défaut de fiabilité du dispositif de scellage notamment pour les paquets contenant des aliments liquides, et d’autre part, le fait qu’il n’ était pas pratique pour l’usager d’utiliser le dispositif de scellage.

Le brevet propose de remédier à ces deux inconvénients, d’une part, en améliorant la fiabilité du dispositif de scellage grâce à une partie coudée à l’extrémité de la tige permettant d’assurer plus facilement le couplage du paquet au dispositif de scellage d’un paquet ; et d’autre part, en facilitant l’insertion du sachet dans le dispositif de fermeture par un ressaut semi-circulaire à la pointe de la tige de sorte à guider le paquet pour qu’il s’engage aisément par coulissement dans le dispositif de scellage d’un paquet.

La défenderesse oppose tout d’abord une première série de quatre brevets antérieurs qui ont divulgué des dispositifs de scellage de paquets dans le domaine de l’alimentaire :

-le brevet français n° 1.205.714 délivré le 17 août 1959 : « Système de fermeture étanche de sacs, pochettes et articles analogues »,
- le brevet US n°3.481.007 délivré le 29 avril 1968 : « fermeture étanche pour sac en plastique »,
- le brevet US n° 1.141.221 enregistré le 21 juillet 1964 : « fermeture pour sacs souples »,
- la demande de brevet US n° 20020094140 A1 déposé le 20 novembre 2001 : « dispositif d’étanchéité pour réservoir de liquide souple ». Cependant, aucun de ces quatre brevets ne divulgue la partie coudée à l’extrémité de la tige et le ressaut semi-circulaire du brevet de la société SEHYANG INDUSTRIAL. Selon le défendeur, incliner un objet pour faciliter son insertion est une technique utilisée depuis de nombreuses années et des brevets antérieurs présentant cette caractéristique existent depuis fort longtemps. Il est alors cité une autre série de deux brevets antérieurs qui ne relèvent pas du domaine alimentaire mais de celui du séchage du linge :

-le brevet n°US582927 A déposé le 9 juillet 1896 : ce brevet représente dans son ensemble un étendage pour linge, mais il se propose de trouver une solution concernant le maintien des cordes et propose pour faciliter l’insertion de la corde à linge dans l’embout la fixant, que cet embout soit courbé ;

-le brevet n° US4011636 (A), déposé le 15 mars 1977 : ce brevet propose une attache pour linge et pour faciliter l’insertion une inclinaison est nécessaire. Le défendeur oppose également des objets de la vie quotidienne comme des boucles d’oreilles et des boucles de ceinture existant depuis l’antiquité dans lesquels l’extrémité de l’attache est coudée, ce qui a pour but exclusif de permettre une facilité d’insertion. Enfin, la société AVISTORE EU oppose un dernier brevet ; le brevet n° US5050272 A déposé le 16 octobre 1990 : cette invention sert pour la fermeture hermétique de sac pouvant contenir notamment de la glace, dans lequel se trouve une inclinaison

permettant de faciliter l’entrée dans la fermeture ainsi qu’une butée empêchant l’enlèvement de l’objet. La vidéo opposée en défense comme autre document antérieur, avec un accès par mention d’un lien hypertexte, sera écartée en ce qu’elle n’a aucune date certaine et ne peut donc être retenue comme une antériorité au brevet critiqué.

Il convient tout d’abord de constater que si la défenderesse oppose de nombreux documents antérieurs, elle ne propose pas de combinaisons précises de ces documents permettant d’aboutir sans activité inventive à l’invention divulguée dans le brevet critiqué. La société AVISTORE EU ne fait aucune démonstration, revendication par revendication, alors que la validité des trois revendications opposées est remise en cause. La première série de quatre brevets opposée relève bien du domaine de la fermeture des sacs alimentaires, néanmoins aucun ne divulgue la partie coudée à l’extrémité de la tige permettant de sceller plus facilement le paquet, et l’OEB lors de l’enregistrement du brevet litigieux a d’ailleurs à bon droit fait remarquer que même la demande de brevet US n° 20020094140, retenue comme l’état du droit antérieur le plus proche, ne décrit ni ne rend évident le dispositif de scellage du brevet de la société SEHYANG INDUSTRIAL. Quant au brevet n° US5050272 relatif à la fermeture d’un sac de glace, celui-ci décrit un dispositif consistant non pas dans une baguette disposée de manière concentrique et fixe au sein d’un élément tubulaire, mais en une pince comportant une gaine et une lame coopérant par l’intermédiaire d’une articulation dans le but de pouvoir «être libérée plus facilement d’une seule main ». L’homme du métier qui intervient dans le domaine alimentaire n’était pas incité, sans activité inventive, à aboutir aux revendications 1, 3 et 7 du brevet EP 548, en combinant la partie coudée présente dans des objets quotidiens comme des boucles d’oreille ou des boucles de ceinture ou bien encore dans des systèmes d’étendage de linge divulgués dans deux brevets antérieurs dont le but différent puisque, pour les boucles, on cherche à les insérer dans un trou et à les maintenir en place, et pour les systèmes d’étendage, on cherche à fixer sur un fil ou sur une corde. En l’état de ces constatations, la demande de nullité pour absence d’activité inventive des revendications n° 1 , 3 et 7 du brevet EP 548 sera donc rejetée.

-la matérialité de la contrefaçon Selon le demandeur, l’examen des baguettes de scellage saisies dans les locaux de la société AVISTORE EU reprennent l’ensemble des enseignements de la revendication 1,3 et 7 du brevet EP548. La matérialité de la contrefaçon n’est pas contestée en défense. SUR CE ;

Il résulte de l’examen des produits saisis versés au débat que les baguettes « Fresh- lock » reprennent les parties caractérisantes de la revendication n°1, soit la tige formée, à l’une de ses extrémités, avec une partie coudée qui s’étend selon une inclinaison en direction de la fente de l’élément tubulaire , avec un prolongement horizontal qui s’étend horizontalement depuis l’extrémité de la partie coudée qui est située à l’opposé de la tige, et avec un ressaut semi-circulaire formé à l’extrémité du prolongement horizontal qui est située à l’opposé de la partie coudée.

Concernant la reprise des caractéristiques enseignées par la revendication n° 3, le tribunal retrouve dans les baguettes saisies la structure tubulaire décrite dans le brevet où il est inséré une tige maintenue à l’intérieur de la structure tubulaire grâce à une butée en saillie de la tige et présentant une surface verticale et une surface inclinée.

Quant aux caractéristiques de la revendication 7, elles sont également reprises puisque les baguettes « Fresh-lock » comportent une tige identique à la tige du brevet EP 1 572 548 et que cette tige, lorsqu’elle est extraite de l’élément tubulaire dans lequel elle est insérée, a une structure transversale en forme de triangle, soit un polygone à trois côtés.

En conséquence, il est démontré que le dispositif des baguettes « Fresh-lock » importées et commercialisées en France est la contrefaçon des revendications n° 1,3 et 7 de son brevet EP 1 572 548.

-le préjudice subi du fait de la contrefaçon du brevet Il est sollicité une indemnisation réparant une atteinte aux droits de propriété intellectuelle détenus par la société SEHYANG INDUSTRIAL et aussi une indemnisation réparant le préjudice commercial subi par la société DAE SUNG, le licencié exploitant le brevet, ainsi que celui subi par la société LJ MPORT EXPORT, en sa qualité d’importateur et de distributeur exclusif en France. La société AVISTORE EU fait valoir tout d’abord que l’indemnisation due au licencié ne pourrait porter que sur la période courant à compter du 10 décembre 2014 (date d’opposabilité du contrat de licence inscrit au registre) et jusqu’ au 18 décembre 2014, date de la saisie-contrefaçon, après laquelle elle a décidé de ne plus commercialiser de baguette tant qu’un litige serait en cours. La société défenderesse soutient également que la société LJ MPORT EXPORT ne peut à la fois recevoir réparation pour des faits de contrefaçon et pour des faits de concurrence déloyale. Les demanderesses répliquent qu’une fois la formalité d’inscription du contrat de licence d’exploitation du brevet accomplie, le titulaire de la licence est apte à solliciter l’indemnisation du préjudice qu’il a subi du fait des atteintes aux droits de propriété intellectuelle sur lequel il dispose de droits d’exploitation, que celles-ci soient antérieures ou postérieures à l’inscription de la licence sur le registre des brevets. La société LJ IMPORT EXPORT précise qu’elle reproche à la société AVISTORE EU des faits de concurrence déloyale distincts de ceux de la contrefaçon. SUR CE ;

L’article L 623-28 du code de propriété intellectuelle dispose que : « pour fixer les dommages-intérêts, la juridiction prend en considération les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisées par le contrefacteur et le préjudice moral causé au titulaire des droits du fait de l’atteinte. Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire qui ne peut être inférieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. »
-sur le préjudice commercial La société DAE SUNG HI TECH en sa qualité de licencié des droits d’exploitation du brevet EP 548 peut se prévaloir du préjudice commercial subi par la contrefaçon de ce brevet à compter de la date de la conclusion du contrat de licence, soit en l’espèce à compter de 2003. D’ailleurs, l’article L615-2 du code de propriété intellectuelle permet au licencié d’agir en contrefaçon même si sa licence n’est pas inscrite lors de l’assignation mais du moment qu’une inscription ultérieure régularise la procédure. Il résulte du procès-verbal de saisie-contrefaçon établi le 12 décembre 2014 (factures en annexe, pièce 12-3 en demande) que 14.304 baguettes contrefaisantes ont été vendues entre novembre 2013 et décembre 2014 (447 lots de 32 baguettes ayant été facturés à des clients au regard des factures ayant été récupérées lors de la saisie). La masse contrefaisante retenue sera de 14.304 articles, la marge du contrefacteur sera fixée à 1,10 euros par baguette (0,15 euros est le prix d’achat par baguette au vu des factures saisies et 1,25 euros le prix de vente au vu du constat d’achat produit en demande) le préjudice commercial subi par la société DAE SUNG, licencié exclusif, sera évalué à la somme globale de 14.304x 1,10 soit 16.000 euros. La société LJ IMPORT EXPORT, en sa qualité de distributeur exclusif en France, a qualité à agir seulement sur le fondement de la concurrence déloyale, demande qui sera examinée plus bas.

-sur le préjudice subi du fait de l’atteinte au brevet Du fait de la commercialisation de produits reprenant sans son autorisation les caractéristiques enseignées par le brevet EP 548, la société SEHYANG INDUSTRIAL, titulaire du droit de propriété intellectuelle, a subi un préjudice dû à la banalisation de son brevet et en sera indemnisée par l’allocation de la somme de 8000 euros. Sur la concurrence déloyale à l’égard du distributeur LJ IMPORT EXPORT Le défendeur invoque le principe de la liberté du commerce en faisant valoir que les demandeurs ne peuvent monopoliser le marché des baguettes de scellement de paquets. Cependant, il a été démontré plus haut que les baguettes « Fresh-lock » vendues par la société AVISTORE EU reproduisent des caractéristiques protégées par un brevet. Ceci est constitutif d’actes de concurrence déloyale engageant conformément à l’article 1382 du code civil la responsabilité délictuelle de la société AVISTORE EU à l’égard du distributeur exclusif en France, soit la société LJ IMPORT EXPORT.

L’attitude de la société AVISTORE EU est d’autant plus fautive que les baguettes « Fresh-lock » sont commercialisées avec des couleurs et une matière identiques aux baguettes « AnyLock », ainsi que des rainures et des perforations placées identiquement sur la partie tubulaire (pièce 10-1 en demande).

Cette présentation similaire aggrave le risque de confusion pour les consommateurs.

Le préjudice subi du fait d’actes de concurrence déloyale par la société LJ IMPORT EXPORT sera évalué à 10.000 euros. Sur les mesures d’interdiction de commercialiser Il sera fait droit à cette demande selon les modalités fixées dans le dispositif de ce jugement. Sur la demande reconventionnelle de la société AVISTORE EU Alors que la société AVISTORE EU a commis des actes de contrefaçon de brevet et des actes de concurrence déloyale, elle ne peut être accueillie dans sa demande de dommages et intérêts pour l’arrêt de la commercialisation des baguettes contrefaisantes dû à l’action en justice des demandeurs. La société AVISTORE EU sera donc déboutée de sa demande reconventionnelle. Sur les autres demandes La publication judiciaire de la présente décision n’est pas opportune en l’espèce et sera rejetée. La société AVISTORE EU qui succombe partiellement supportera la charge dépens. Les conditions sont réunies pour allouer aux sociétés demanderesses la somme globale de 12.000 euros soit 4000 euros à chacune des trois demanderesses sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. L’exécution provisoire est compatible avec la nature de l’affaire.

PAR CES MOTIFS, le tribunal, Statuant publiquement par remise au greffe le jour du délibéré, par jugement contradictoire et en premier ressort, Valide les procès-verbaux de constat des 5 et 12 décembre 2014, Rejette toutes les demandes envers la société AVISTORE EU fondées sur la contrefaçon de la marque française verbale « AnyLock » n° 06/3405137 dont la société DAE SUNG est titulaire,

Déboute la société AVISTORE EU de sa demande de nullité des revendications 1.3 et 7 du brevet EP 548 pour défaut d’activité inventive.

Dit que la société AVISTORE EU en commercialisant sur le territoire français, des baguettes de scellage reproduisant les caractéristiques du brevet EP 548, a commis des actes de contrefaçon des revendications 1. 3 et 7 de ce brevet dont la société SEMYANG INDUSTRIAL, est titulaire.

En conséquence, Interdit à la société AVISTORE EU la poursuite de la commercialisation des baguettes contrefaisantes des revendications 1.3 et 7 du brevet EP 548, et ce sous astreinte de 150 euros par infraction constatée, l’astreinte prenant effet dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement. Se réserve la liquidation de l’astreinte conformément aux dispositions de l’article 1.131-3 du code des procédures civiles d’exécution. Condamne la société AVISTORE EU à verser à la société SEHYANG INDUSTRIAL la somme de 8000 euros en réparation du préjudice subi en raison de l’atteinte porté à son brevet EP 548. Condamne la société AVISTORE EU à payera la société DAE SUNG la somme de 16.000 euros au titre du préjudice commercial subi du fait de la contrefaçon de brevet EP 548. Rejette les demandes de la société LJ IMPORT EXPORT au titre de la réparation en contrefaçon de brevet. Condamne la société AVISTORE EU à payer à la société LJ IMPORT EXPORT la somme de 10.000 euros au titre des actes de concurrence déloyale par la commercialisation des baguettes « Fresh-Lock » sur le site Amazon.fr.

Déboute la société AVISTORE EU de sa demande reconventionnelle.

Rejette la demande de publication judiciaire. Condamne la société AVISTORE EU à payer aux sociétés demanderesses la somme globale de 12.000 euros, soit 4000 euros à chacune des demanderesses, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Déboute la société AVISTORE EU de l’ensemble de ses demandes indemnitaires.

Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision.

Condamne la société AVISTORE EU aux dépens.

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Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 4e section, 26 mai 2016, n° 15/00927