Tribunal de grande instance de Paris, 1re chambre nationalité, 27 octobre 2017, n° 16/08678

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 1re ch. nationalité, 27 oct. 2017, n° 16/08678
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 16/08678

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

1/2/2 nationalité B

N° RG : 16/08678

N° PARQUET : 16/604

N° MINUTE :

Assignation du :

18 Mai 2016

Nationalité française

C.C.

JUGEMENT

rendu le 27 Octobre 2017

DEMANDERESSE

Madame Z X

[…]

[…]

NOUAKCHOTT

(MAURITANIE)

représentée par Me Nicole ANNONCIA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1405

DEFENDEUR

LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE

[…]

[…]

[…]

Madame Brigitte CHEMIN, Vice-procureur

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Carole CHEGARAY, Vice-président

Président de la formation

Madame Marion PRIMEVERT, Vice-Président

Monsieur Julien SENEL, Vice-Président

Assesseurs

assistés de Madame Frédérique LOUVIGNÉ, greffier,

DEBATS

A l’audience du 08 Septembre 2017 tenue publiquement sans opposition des représentants des parties, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile par Mme CHEGARAY et M. SENEL, magistrats rapporteurs, qui ont entendu les plaidoiries et en ont rendu compte au tribunal dans leur délibéré.

JUGEMENT

Contradictoire

en premier ressort

Rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Carole CHEGARAY, Président, et par Frédérique LOUVIGNÉ, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 3 novembre 2014, le service de la nationalité des français nés et établis hors de France a refusé à Madame Z X, née le […] à Y (Mauritanie), la délivrance d’un certificat de nationalité française sollicité à raison de sa filiation paternelle, au motif que son acte de naissance n’est pas conforme aux dispositions de l’article 47 du Code civil.

Par acte du 18 mai 2016, Madame Z X a fait assigner Monsieur le Procureur près le Tribunal de grande instance de Paris devant ce Tribunal aux fins d’entendre déclarer qu’elle est française par filiation paternelle, sur le fondement de l’article 18 du Code civil.

Une copie de l’assignation a été déposée au ministère de la justice le 10 juin 2016, lequel en a délivré récépissé le 11 juillet 2016.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 23 décembre 2016, Madame Z X a demandé à la juridiction saisie de :

— constater que les formalités de l’article 1043 du Code de procédure civile ont été respectées,

Vu les articles 18, 21-6, 201 et 202 du Code civil,

— constater que Madame Z X est née le […] à Y du mariage de Monsieur D C X et de Madame B A célébré le 9 février 1980 à Y,

— constater que Madame Z X bénéficie des effets putatifs de ce mariage,

En conséquence,

— déclarer Madame Z X française par filiation,

— ordonner les mentions de l’article 28 du Code civil,

— condamner le Trésor Public à verser au requérant la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 décembre 2016, le ministère public a demandé au Tribunal de :

Vu l’article 29-3 du Code Civil,

— constater que le récépissé prévu par l’article 1043 du Code de Procédure Civile a été délivré,

— dire que X Z née le […] à Y (Mauritanie) n’est pas française,

— ordonner la mention prévue par l’article 28 du Code Civil,

— statuer ce que de droit quant aux dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 3 février 2017.

MOTIFS

En application de l’article 30 du Code civil, il appartient à la demanderesse qui n’est pas titulaire d’un certificat de nationalité française de rapporter la preuve que les conditions requises par la loi pour l’établissement de sa nationalité française sont remplies.

Madame Z X prétend être française par filiation paternelle en application de l’article 18 du Code civil. Il lui incombe donc de rapporter la preuve d’une filiation légalement établie durant sa minorité à l’égard d’un père français lors de sa naissance.

Le ministère public conteste tant la nationalité française de Monsieur D C X, le père de la demanderesse, que l’établissement de la filiation de celle-ci à l’égard de Monsieur D C X.

Sur la nationalité française du père de Madame Z X :

Madame Z X expose à cet effet que Monsieur D C X a obtenu un certificat de nationalité française le 10 avril 1978, lequel a été renouvelé le 19 septembre 1995 par le greffier en chef du Tribunal d’instance de Clichy la Garenne en ces termes : “comme né en Mauritanie d’un père qui y est également né ; l’intéressé doit être réputé avoir conservé de plein droit la nationalité française puisqu’il résulte du certificat qui lui a été délivré qu’il était domicilié en France lors de l’accession à l’indépendance des territoires d’Outre Mer de la République Française” ; qu’en outre, la nationalité française de Monsieur D C X est établie par un jugement du Tribunal de grande instance de Nanterre du 13 juin 1997 qui, sur le fondement de l’article 147 du Code civil, a annulé son second mariage incompatible avec sa qualité de français.

Il est constant, comme le soutient le ministère public, que la présomption de nationalité française attachée au certificat de nationalité ne bénéficie qu’à son titulaire, et non aux tiers fussent’ils de la même famille, et quand bien même ce certificat n’a fait l’objet d’aucune contestation. Ainsi le certificat de nationalité française délivré à Monsieur D C X ne prive pas Madame Z X de rapporter la preuve de la nationalité française de ce dernier.

Il s’avère que par un jugement du 13 juin 1997, devenu définitif au vu de sa transcription sur le registre de l’état de civil de Monsieur D C X à Nantes, le Tribunal de grande instance de Nanterre, à la demande du ministère public, a prononcé la nullité du mariage de Monsieur D C X et de Madame B A célébré à Y (Mauritanie) le 9 février 1980, aux motifs que :

“Il ressort de l’examen du dossier que D C X, de nationalité française, a épousé le 2 août 1960 Maina KONATE à Y (Mauritanie). Ce mariage n’a jamais été dissout. Il a ensuite épousé le 9 février 1980 à Y B A. Aux termes de l’article 147 du Code civil “on ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier”. La seconde union consacrée avec D C X, sujet français, et Madame B A est donc entachée de nullité absolue”.

Certes, l’objet du litige ne portait pas sur la nationalité de Monsieur D C X. Toutefois, le second mariage de celui-ci n’a pu être annulé qu’au regard de sa qualité de français qui lui a été nécessairement et expressément reconnue par le Tribunal. A défaut, cette procédure n’aurait pas pu exister. Il s’agit d’une reconnaissance judiciaire de la nationalité française de Monsieur D C X -au moins depuis 1980- dont Madame Z X est fondée à se prévaloir.

Sur l’acte de naissance de Madame Z X :

Madame Z X produit la copie intégrale de son acte de naissance n° 25 établi selon le Recensement Administratif National à Vocation d’Etat Civil (RANVEC) du mois de septembre 1998, délivrée le 22 juin 2006, ainsi qu’un extrait d’acte de naissance émanant du centre d’accueil des citoyens El Mina dressé par l’agence nationale du registre des populations et des titres sécurisés, délivré le 18 février 2015.

Le ministère public soutient que Madame Z X ne présente pas un état civil fiable. Il lui oppose :

— que l’acte de naissance de son père D C X établi par l’officier d’état civil du ministère des affaires étrangères français indique comme date de naissance de ce dernier le 20 février 1936 alors que la copie intégrale et l’extrait d’acte de naissance mauritanien de Madame Z X mentionnent que son père est né le […],

— que de la même façon, l’extrait d’acte de naissance de Madame B A produit par la demanderesse indique qu’elle est née le 31 décembre 1954 alors que l’acte de naissance de l’intéressée produit lors de la demande de délivrance d’un certificat de nationalité française mentionne que sa mère est née le […],

— qu’outre ces incohérences, l’acte de naissance de Madame Z X n’indique pas la date à laquelle il a été dressé, ce qui ne permet pas de vérifier sa conformité au code d’état civil mauritanien selon lequel, dans sa version applicable à l’espèce, la naissance doit être déclarée dans les trois mois à l’officier d’état civil, passé ce délai elle ne peut être relatée dans les registres de l’état civil que si elle est constatée par un jugement.

Il s’avère qu’en Mauritanie en 1993 a été créé un secrétariat d’état chargé de l’état civil ayant notamment pour mission l’élaboration et la mise en place d’un système d’état civil national ainsi que l’organisation du recensement administratif initial des populations pour les besoins de l’état civil. Les actes d’état civil sont ainsi établis par l’agence nationale du registre des populations et des titres sécurisés sur la base de différents recensements (1998 et 2012) et sur une base déclarative.

L’acte de naissance de Madame Z X a été établi sur la base du recensement administratif national à vocation d’état civil de septembre 1998 et émis par l’agence nationale du registre des populations et des titres sécurisés, laquelle ne précise pas la date initiale de l’établissement de l’acte, selon les formes usitées en Mauritanie.

Les discordances sur les jours ou mois de naissance des parents de Madame Z X relevées par le ministère public ne remettent pas en cause la véracité de l’acte de naissance de Madame Z X, dès lors d’une part que celles-ci peuvent s’expliquer par le caractère déclaratif de l’établissement des actes, le 31 décembre étant généralement retenu en cas d’incertitude, d’autre part que les vérifications faites par l’ambassade de France en Mauritanie le 29 juillet 2014 ont permis d’authentifier l’acte de naissance de Madame Z X malgré les discordances de date, et ce quand bien même cet acte pourrait ne pas correspondre à des faits réels selon l’ambassade : “L’acte de naissance de Z bien qu’authentique pourrait ne pas correspondre à des faits réels”.

Enfin, le ministère public fait grief à Madame Z X de ne pas produire l’acte de mariage de ses parents. Celle-ci fait valoir à juste titre que l’existence du mariage de ses parents, transcrit en marge de l’état civil de Monsieur D C X au service d’état civil de Nantes en ces termes “Marié à Y (République Islamique de Mauritanie) le 9 février 1980 avec B A”, ne saurait être remise en cause puisque que c’est précisément ce mariage qui a fait l’objet de l’annulation prononcée par le Tribunal de grande instance de Nanterre par jugement du 13 juin 1997.

Madame Z X justifie ainsi du mariage de ses parents avant sa naissance et partant de l’établissement de sa filiation paternelle avec Monsieur D C X, de nationalité française.

Il convient de rappeler s’agissant de l’annulation du mariage de Monsieur D C X et de Madame B A que l’article 21-6 du Code civil dispose que “l’annulation du mariage n’a point d’effet sur la nationalité des enfants qui en sont issus”.

Sur l’article 700 du Code de procédure civile :

Compte tenu des circonstances de l’espèce, il apparaît équitable de laisser à la charge de Madame Z X les frais irrépétibles qu’elle a exposés à l’occasion de l’instance.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL statuant par mise à disposition au greffe après débats en audience publique, par jugement contradictoire et en premier ressort,

Dit que Madame Z X née le le […] à Y (Mauritanie) est de nationalité française,

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du Code civil,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne le trésor public aux dépens.

Fait et jugé à Paris, le 27 Octobre 2017.

Le Greffier Le Président

[…]

1:

Expéditions

exécutoires

délivrées le :

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Textes cités dans la décision

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