Tribunal de grande instance de Paris, 2e chambre 2e section, 12 janvier 2018, n° 16/13922

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 2e ch. 2e sect., 12 janv. 2018, n° 16/13922
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 16/13922

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

2e chambre

2e section

N° RG : 16/13922

N° MINUTE :

Assignation du :

05 Août 2016

JUGEMENT

rendu le 12 janvier 2018

DEMANDERESSE

Madame Y X

[…]

[…]

représentée par Me Marie-Laure TARRAGANO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1134

DÉFENDERESSE

S.A.R.L. PROMODIM

[…]

[…]

représentée par Me Jérémie NUTKOWICZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0323

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur H I, Vice-Président

Monsieur A B, Juge

Madame C D, Juge

assistés de E F-G, Greffière,

DÉBATS

A l’audience du 17 Novembre 2017 tenue en audience publique devant Monsieur B, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile.

A l’audience, avis a été donné que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2018.

JUGEMENT

Rendu publiquement par mise à disposition au greffe

Contradictoire

En premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Par acte notarié du 5 juillet 2013, la société Promodim a acquis un bien immobilier situé […]. Des travaux ont été entrepris pour le compte de cette société en juillet et août 2013 visant notamment à installer un sanibroyeur et une douche.

Lors de l’assemblée générale du 8 octobre 2013, la société Promodim a sollicité du syndicat des copropriétaires une demande d’acquisition de toilettes communes situées sur le palier. Cette demande lui a été refusée lors de l’assemblée générale du 8 octobre 2013 selon résolution adoptée à l’unanimité.

Après avoir réalisé de nombreux travaux, la société Promodim a publié une annonce de vente de ce studio sur le site internet « Le bon coin ».

Par acte notarié du 26 décembre 2013, Mme Y X a acquis ce bien immobilier pour la somme de 134 000 euros dont 5000 euros relatifs à du mobilier présent dans l’appartement.

Par courrier du 14 octobre 2015, le syndic de copropriété mettait Mme X en demeure de lui faire parvenir l’autorisation de la mairie concernant l’installation d’un sanibroyeur dans son appartement.

Mme Y X a sollicité dès le mois d’octobre 2015 la société Promodim pour qu’elle lui communique la demande et l’autorisation d’installation du sanibroyeur.

Le 23 décembre 2015, suite à une demande formulée par ses soins, Mme X se voyait opposer un refus de la mairie quant à l’installation du sanibroyeur au vu des pièces fournies.

Par courrier recommandé en date du 15 juin 2016, le conseil de Mme X mettait en demeure la société Promodim de réparer son préjudice.

Par exploit d’huissier en date du 5 août 2016, Mme X a fait assigner la société Promodim devant le tribunal de grande instance de Paris. Dans ses dernières conclusions récapitulatives signifiées par RPVA le 28 avril 2017, elle demande au tribunal, au visa des articles 1641 et suivants du code civil, de :

« -Prononcer la résolution du contrat de vente pour vice caché ;

En conséquence,

— Ordonner la restitution de l’appartement par Mme X et condamner la société Promodim à lui restituer le prix de vente de 134 000€ ;

— Condamner la société Promodim au remboursement des sommes suivantes :

—  9502,78€ au titre des frais d’emprunt et intérêts et frais dossier bancaire pour le prêt immobilier souscrit par Mme X ;

-2316,60€ au titre des travaux effectués par Mme X ;

-1790,01€ au titre des frais de cautionnement souscris par Mme X ;

-4576,4€ au titre des charges de copropriété depuis le 4e trimestre 2013, arrêtée au 2e trimestre 2017, ainsi que les charges à venir jusqu’à parfaite annulation de la vente ;

-455€ au titre du règlement des taxes foncières depuis 2014, la société Promodim devant également supporter la taxe foncière appelée en octobre 2017 ;

—  288,42€ au titre des frais de publication foncière ;

— Condamner la société Promodim à verser à Mme X la somme de 30.000€ à titre de dommages et intérêts pour réparation de son préjudice de moral ;

— Condamner la société Promodim à payer la somme de 5000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens ;

— Ordonner l’exécution provisoire ».

Dans ses dernières conclusions récapitulatives signifiées par RPVA le 20 avril 2017, la société Promodim, au visa des articles 1116 et 1134 du code civil, de :

« Rejeter les demandes formulées par Mme X, présentées à titre principal, subsidiaire et en tout état de cause.

A titre subsidiaire :

Reconnaître l’accord de la société Promodim de faire prononcer la résolution de la vente au prix de 134.000,00 €, somme de la quelle sera déduite la dévalorisation des meubles, soit 5.000,00 € , laissant un prix de rachat à 129.000,00 €.

A titre Infiniment subsidiaire :

Réduire les demandes de dommages et intérêts à la somme globale de 3.000 €, en raison d’absence de toute démonstration de préjudice ».

L’ordonnance de clôture est intervenue le 23 juin 2017.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’existence de vices cachées

Mme X estime que deux vices cachés affectent le bien qu’elle a acquis à la société Promodim.

Le premier est selon elle constitué par l’installation par la société Promodim d’un sanibroyeur sans autorisation préalable de la mairie de Paris ou de l’assemblée des copropriétaires alors qu’elles sont requises pour l’installation d’un tel équipement du fait de l’article 47 du Règlement sanitaire du département de Paris. Or, Mme X a acquis ce logement pour le mettre en location et l’absence de sanibroyeur rend le logement impropre à cet usage.

Le second vice est lié à la présence d’humidité causée par les malfaçons des travaux engagés par la société Promodim. Constatant un problème d’humidité, elle a fait intervenir la société Laumonier Frères qui a constaté que l’humidité persistante était la conséquence des malfaçons des travaux réalisés par la société Activa à la demande de la société Promodim, notamment la pose d’une douche. Elle cite à ce titre les conclusions du rapport de cette société : «Nous constatons que le bac à douche a été posé sur un sol hors d’état, le carrelage de douche, mal posé sans étanchéité est fuyard ».

Elle rappelle enfin que les deux vices étaient antérieurs à la vente.

Pour solliciter l’annulation du contrat, Mme X souligne que la société Promodim n’est pas en mesure de remédier aux vices, surtout que l’assemblée des copropriétaires a refusé d’autoriser la pose d’un sanibroyeur lors de son assemblée générale du 24 octobre 2016. En réponse à la société Promodim, elle précise en outre qu’en application du dernier état de la jurisprudence, une fois la résolution d’une vente prononcée, le prix doit être restitué sans diminution liée à l’utilisation de la chose vendue ou à l’usure en résultant.

La société Promodim oppose qu’elle n’a commis aucun dol ; que la publicité publiée sur le site « le bon coin » par Mme X n’est pas datée ou référencée ; que Mme X ne démontre pas le caractère substantiel et déterminant du sanibroyeur.

La société Promodim affirme qu’en cas de résolution, elle ne devrait être condamnée qu’au remboursement de la somme de 129 000 euros puisqu’elle peut réclamer à Mme X la dévalorisation des meubles.

Elle indique qu’à la lecture du procès-verbal de l’assemblée générale du 24 octobre 2016, il semble que l’installation du sanibroyeur ait finalement été approuvée.

Il résulte des articles 1641 et suivants du code civil que l’acquéreur d’un bien peut soit solliciter la résolution de la vente et la restitution du prix, soit la réduction du prix, dès lors que le bien vendu présente des défauts cachés et existant au moment de la vente, qui le rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquis, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.

En l’espèce, entendant procéder à sa location, Mme X a acquis l’appartement à usage d’habitation litigieux qui comprenait notamment un sanibroyeur installé par la société Promodim. Or, il s’est avéré que le sanibroyeur a été installé sans autorisation par cette société. Il ne fait absolument aucun doute que l’absence de cet élément rend le bien impropre à son usage d’habitation, qui plus est dans l’objectif locatif qui était celui de Mme X. Ce vice était non apparent pour un acquéreur profane comme Mme X. La société Promodim n’oppose par ailleurs aucun argument sur ce point, commençant d’ailleurs par répondre qu’elle n’a commis aucun dol alors que la demanderesse exerce une action en garantie, ce qui rend ce point complètement inopérant. Il convient en conséquence de constater que le bien immobilier vendu comportait un vice caché, sans qu’il y ait lieu à examiner si la douche présentait un vice caché.

Il y a donc lieu de prononcer la résolution de la vente et de condamner la société Promodim à restituer à Mme X le prix de la vente.

S’agissant du prix à restituer, il résulte de l’article 1184 du code civil qu’en matière de garantie des vices cachés, lorsque l’acheteur exerce l’action rédhibitoire, le vendeur, tenu de restituer le prix qu’il a reçu, n’est pas fondé à obtenir une indemnité liée à l’utilisation de la chose vendue ou à l’usure résultant de cette utilisation par l’acheteur. Il y a en outre lieu de procéder à une appréciation globale du contrat du 26 décembre 2013, les meubles étant purs accessoires de l’immeuble acquis.

Ainsi, la société Promodim sera condamnée à verser à Mme X la somme de 134 000 euros.

Sur les dommages et intérêts réclamés

Mme X sollicite le remboursement de différents préjudices qu’elle estime avoir subi du fait de cette situation :

— l’installation d’une nouvelle douche pour 2316,60 euros,

— le remboursement des frais de notaire pour 9502,78 euros,

— le remboursement des frais de cautionnement pour 1790,01 euros qu’elle a dû souscrire pour ses deux prêts immobiliers,

— le remboursement des charges de copropriété pour 4576,4 euros arrêtées au 2e trimestre 2017,

— la restitution du montant des taxes foncières pour 455 euros, depuis 2014,

— le remboursement des frais de publication foncière : 288,42 euros,

soit un total de de 18929,21 euros de préjudice matériel et financier.

— et le paiement de 30 000 euros au titre de son préjudice moral.

Elle souligne la qualité de professionnelle de l’immobilier de la société Promodim, dont découle une présomption de mauvaise foi. La société était en outre parfaitement au courant de ce problème car elle avait demandé à l’assemblée générale des copropriétaires d’installer des toilettes communes sur le palier, ce que lui avait été refusé.

La société Promodim oppose simplement que « les frais auprès des hypothèques constatant la résolution de la vente seront supportés par le vendeur », qu’il n’est donc pas inéquitable de laisser supporter par Mme X les frais de notaire à l’acquisition et que le préjudice moral n’est pas justifié.

Il résulte de l’article 1645 du code civil qu’un vendeur professionnel est tenu de connaître les vices affectant la chose vendue et qu’il est alors tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.

En l’espèce, la société Promodim est un vendeur professionnel exerçant selon ses statuts une activité de marchand de biens et de rénovation de biens en vue de leur revente. Elle est donc tenue à réparation de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur. De son côté, Mme X a droit à indemnisation de toutes les dépenses liées à l’acquisition, à l’amélioration et à la conservation du bien qu’elle n’aurait pas eu à faire si elle n’avait pas acquis l’appartement, à condition qu’elle en justifie. Or, celle-ci justifie avoir réalisé des dépenses d’amélioration (installation d’une douche liée en outre à un dysfonctionnement) ainsi que des dépenses liées à l’acquisition (frais de notaire, frais de cautionnement) et à la conservation du bien (charges de copropriété, taxes foncières). La société Promodim ne formule aucune motivation pertinente à l’égard des préjudices invoqués par Mme X et sollicite que ceux-ci soient limités à 3000 euros, sans autre précision. Eu égard à ces éléments, il y a lieu de condamner la société Promodim à payer à Mme X la somme de 18 929,21 euros.

Mme X ne produit aucun justificatif quant au préjudice moral particulier qu’elle invoque. Elle sera en conséquence déboutée au titre de cette demande.

Sur les dépens

L’article 696 du code de procédure civile énonce que la partie perdante est en principe condamnée aux dépens. Il y a en conséquence lieu de condamner la société Promodim aux dépens.

Sur l’indemnité réclamée au titre de l’article 700 du code de procédure civile

L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il doit à ce titre tenir compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée et peut écarter pour les mêmes considérations cette condamnation. En l’espèce, et compte tenu de la situation économique des parties et de l’équité, il y a lieu de condamner la société Promodim à payer à Mme X la somme de 5000 euros.

Sur l’exécution provisoire

L’article 515 du code de procédure civile indique que l’exécution provisoire peut être ordonnée, à la demande des parties ou d’office, chaque fois que le juge l’estime nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire, à condition qu’elle ne soit pas interdite par la loi. Elle peut être ordonnée pour tout ou partie de la condamnation. En l’espèce, dans la mesure où Mme X réalise présentement des dépenses d’entretien quant au bien immobilier, il y a lieu de prononcer l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

— Prononce la résolution de la vente intervenue entre Mme Y X et la SARL Promodim par contrat du 26 décembre 2013 portant sur un bien immobilier situé […] et sur le mobilier accessoire,

— Ordonne en conséquence à Mme Y X de restituer à la SARL Promodim ledit appartement et son mobilier,

— Ordonne en conséquence à la SARL Promodim à restituer à Mme Y X la somme de 134 000 euros,

— Condamne la SARL Promodim à payer à Mme Y X la somme de 18 929,21 euros au titre du préjudice matériel,

— Déboute Mme Y X de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral,

— Condamne la SARL Promodim aux dépens,

— Condamne la SARL Promodim à payer à Mme Y X la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision,

— Déboute la SARL Promodim et Mme Y X du surplus de leurs demandes.

Fait et jugé à Paris le 12 janvier 2018

La greffière Le président

E F-G H I

1:

Expédition exécutoire délivrée le:

Copie certifiée conforme délivrée le :

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Textes cités dans la décision

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