Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 21 juillet 2016, n° 16/06388

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 21 juill. 2016, n° 16/06388
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 16/06388
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nice, 21 mars 2016, N° 14/02730

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 21 JUILLET 2016

N° 2016/342

Rôle N° 16/06388

E A

C/

LA MUTUELLE DES SPORTIFS

Grosse délivrée

le :

à :

Me JAIDANE

Me COHEN

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Juge de la mise en état du tribunal de grande instance de P en date du 22 Mars 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 14/02730.

APPELANT

Monsieur E A

né le XXX à XXX. A 222 Route de Turin – 06300 P

représenté par Me Riadh JAIDANE, avocat au barreau de P, substitué par Me Isabelle PIGNARD, avocat au barreau de P

INTIMEE

MUTUELLE DES SPORTIFS (M. D.S)

XXX – XXX

représentée par Me Elie COHEN, avocat au barreau de P

et assistée de Me Jacques LANG, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 14 Juin 2016 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Christiane BELIERES, Présidente, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Christiane BELIERES, Présidente

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER, Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie GALASSO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Juillet 2016.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Juillet 2016,

Signé par Madame Christiane BELIERES, Présidente et Madame Samira CHKIRNI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé des faits et de la procédure

Le 22 avril 1985 à P M. A assuré auprès de la Mutuelle des sportifs (MDS) jouait un match de football lorsqu’il a été victime d’un accident qui a nécessité son hospitalisation en urgence pour y subir une intervention chirurgicale.

Il a été examiné en 2005 dans le cadre d’une expertise amiable confiée au docteur D qui a déposé son rapport le 28 octobre 2010.

Il a saisi le 22 novembre 2011 le juge des référés qui, par ordonnance du 6 mars 2012, a prescrit une mesure d’expertise confiée au docteur X qui a déposé son rapport le 29 novembre 2012.

Par acte d’huissier du 31 mars 2014 il a fait assigner la MDS devant le tribunal de grande instance de P en réparation du préjudice subi.

Par conclusions d’incident du 27 février 2015 la MDS a opposé la nullité de l’assignation pour indication erronée de la mention obligatoire de l’adresse du demandeur et, subsidiairement, a soulevé l’exception d’incompétence territoriale de cette juridiction.

Par ordonnance du 22 mars 2016 le juge de la mise en état a prononcé la nullité de l’acte introductif d’instance du 31 mars 2014 motif pris de l’absence de justificatif de la réalité du domicile de M. A de nature à créer une difficulté future d’inexécution du jugement à intervenir, comme cela a déjà été le cas pour l’exécution par la MDS de l’ordonnance de référé du 6 mars 2012.

Par acte du 7 avril 2016, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, M. A a interjeté appel général de cette décision.

Moyens des parties

M. A demande dans ses conclusions du 31 mai 2016 de

— infirmer l’ordonnance

— évoquer l’affaire en application de l’article 562 du code de procédure civile

— statuer au fond pour lui accorder la somme de 150.639 € en indemnisation de son préjudice

A titre subsidiaire,

— renvoyer les parties devant la juridiction de première instance

— condamner l’intimée à lui verser la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens, avec recouvrement dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Il fait valoir que sur l’assignation du 31 mars 2014 figuraient toutes les mentions exigées par l’article 648 alinéa 2 du code de procédure civile, à savoir ' M. E A, né le XXX à XXX de nationalité tunisienne, demeurant XXX, Bâtiment A, XXX, 06 300 P', que l’adresse de son domicile était bien mentionnée, que le changement d’une adresse valablement indiquée dans une assignation n’est pas sanctionnée dès lors que l’adresse est réelle.

Il indique être retourné vivre en Tunisie après son accident, être ensuite rentré en France sous couvert d’un visa pour y subir l’expertise médicale amiable, avoir changé deux fois d’adresse depuis son arrivée avant d’être hébergé durablement par Mme I C, ainsi que celle-ci en atteste.

Il soutient qu’étant hébergé gracieusement, il ne peut fournir de bail d’habitation à son nom que toutefois il a pu communiquer un avis d’échéance par la société Côte d’ Azur Habitat au nom de son hébergeuse et la copie de la carte de l’aide médicale de l’Etat pour l’année 2016 à son nom cette adresse.

Il prétend que le retour de pli invoqué par la MDS est dû à d’autres causes, tenant aux difficultés d’acheminement de la Poste, puisqu’il a reçu un mois plus tard, une lettre-chèque expédiée à cette même adresse par cette même mutuelle.

Il souligne que cette adresse figure sur tous les actes de procédure entrepris depuis son retour en France, qu’il y a reçu les décisions relatives au bénéfice de l’aide juridictionnelle du 21 juin 2011, du 15 septembre 2011 et du 12 janvier 2012 et un courrier de la préfecture des Alpes-Maritimes du 20 avril 2011.

Il se prévaut de l’absence de preuve d’un grief du fait de la nullité invoquée par la MDS qui soulève ces moyens dilatoires pour retarder l’échéance de l’indemnisation, ce qui prouve la mauvaise foi de cette société.

Il estime que le tribunal de grande instance de P est parfaitement compétent territorialement pour connaitre de l’affaire puisque l’accident s’est produit à P, qu’il y est domicilié, que l’expertise tant amiable que judiciaire s’y est déroulée sans aucune objection soulevée par l’assureur à ce sujet, que l’intimée avait le loisir de contester cette compétence devant le juge des référés mais s’est abstenue de le faire, exécutant les termes de sa décision.

Il rappelle que la victime exerçant l’action directe peut se prévaloir soit des règles de l’article R 114-1 du code des assurances soit des règles des articles 42 et suivants du code de procédure civile et en déduit qu’il serait contraire à une bonne administration de la justice que la cour se déclare incompétente.

Il se prévaut, par ailleurs, des dispositions combinées des articles 380 et 568 du code de procédure civile pour demander à la cour d’user de son pouvoir discrétionnaire d’évocation afin de mettre fin au litige puisque la MDS ne remet pas en cause le lien causal entre l’accident et l’aggravation de la blessure dans la mesure où elle a fait une proposition d’indemnisation à la suite de l’expertise amiable qui a clairement mis en évidence le lien de causalité entre son état de santé et l’accident.

Il fait valoir qu’aucune clause d’exclusion de garantie ne saurait aujourd’hui lui être opposée, faute d’avoir été portée à sa connaissance au moment de son adhésion ou avant la réalisation du sinistre.

Il chiffre son préjudice comme suit :

* pertes de gains professionnels actuels : 4.627 €

* incidence professionnelle y compris la perte de chance de réussir ses études juridiques : 80.000 €

* déficit fonctionnel temporaire total et partiel : 5.662 €

* déficit fonctionnel permanent : 18.000 €

* souffrances endurées : 10.600 €

* préjudice esthétique permanent : 1.750 €

* préjudice d’agrément : 20.000 €

* préjudice né des man’uvres dilatoires de la MDS : 10.000 €

La MDS demande dans ses dernières conclusions du 2 juin 2016 , de

Vu les articles 56 et 648 du code de procédure civile

— confirmer la décision

— dire que M. A ne verse aux débats aucun document de nature à établir la réalité de son domicile à l’adresse indiquée dans les actes de procédure

Vu les articles 200 à 203 du code de procédure civile

— dire que l’attestation produite en pièce n°2 des dernières conclusions d’appel, est irrecevable et doit être écartée des débats

— procéder, en application de l’article 203 du code de procédure civile, par voie d’enquête à l’audition de l’auteur de l’attestation ne remplissant pas les conditions de l’article 202 du même code

— décerner injonction à l’appelant d’avoir à produire :

* copie de l’intégralité de son passeport établissant la pérennité de son séjour sur le sol français depuis le 28 octobre 2010

* un bordereau de pièces dont la numérotation correspondra aux 19 pièces mentionnées en fin de ses conclusions récapitulatives et en réplique

*dire que l’affaire ne sera pas en état, tant qu’il ne sera pas satisfait à cette demande d’injonction

A titre complémentaire, en cas de refus de l’injonction

— dire que M. A ne justifie par de la réalité d’un domicile en France

— dire qu’il a fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français dans le délai d’un mois à compter du 20 avril 2011

En conséquence,

— dire nul et non avenu l’exploit introductif d’instance ne comportant pas la mention d’un domicile réel de l’appelant

— prononcer la nullité de l’assignation du 31 mars 2014, qui lui cause grief, ne pouvant valablement exercer de voie de recours ou procéder à l’accomplissement d’un certain nombre de formalités

A titre subsidiaire,

— Se déclarer territorialement incompétent au profit du tribunal de grande instance de Paris

A titre encore plus subsidiairement,

— dire que lors de l’expertise du docteur X, M. A a déclaré être assuré social sous l’immatriculation 1 60 02 99 351 112

— dire qu’il conviendrait de régulariser la procédure quant à la mise en cause de son organisme social

— dire que les conditions de l’évocation ne sont pas réunies

— dire irrecevable toute demande à caractère pécuniaire formée sur un fondement de droit commun, alors même que le litige s’inscrit dans un cadre contractuel

— dire que les pièces produites par M. A démontrent qu’il était informé des conditions de couverture en Individuelle Accident, les ayant lui-même produites aux débats

— dire que le domaine contractuel constitue la consistance des garanties et non des clauses d’exclusion des chefs de demandes formées sur le terrain du droit commun par M. A

En toute hypothèse,

— débouter M. A de toutes ses demandes, fins et conclusions

— le condamner au paiement de la somme de 6.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

— le condamner aux entiers dépens avec recouvrement dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Elle indique faire sommation à M. A de produire la copie intégrale de son passeport et de son visa en cours de validité, un bail d’habitation ou un titre régulier à son nom à l’adresse indiquée 'les Loggias du Paillon, bâtiment A, XXX, 06300 P', qu’à défaut, la nullité de l’assignation est encourue et doit être prononcée comme lui faisant grief car elle est fondée à formuler des demandes reconventionnelles à son encontre.

Elle souligne que les dispositions du code des assurances ne sont pas applicables puisqu’elle est une entité régie par le code de la mutualité, que l’article 42 alinéa 1er du code de procédure civile attribue compétence territoriale au domicile du défendeur, qu’ainsi le litige relève de la compétence juridictionnelle du tribunal de grande instance de Paris dans la mesure où son siège social est situé à Paris.

Elle conteste l’existence d’une permanence de domicile de M. A à l’adresse susvisée, puisque le 19 novembre 2010 il a indiqué être domicilié au 109, Q de la Madeleine chez M. Y à P, qu’il a déclaré à l’expert judiciaire être domicilié au 4, Q R, le Majestic à P, ce qui démontre le caractère fictif de la domiciliation réelle et constante à l’adresse indiquée, qu’en outre, l’attestation de Mme C est irrégulière en ce qu’elle ne répond pas aux prescriptions des articles 200 à 203 du code de procédure civile.

Elle ajoute que les conditions légales et jurisprudentielles de l’évocation ne sont pas réunies.

Elle se prévaut des conditons générales de la garantie qui écarte de l’indemnisation les préjudices à caractère personnel qui sont d’ailleurs formulés pour des montants contestés et sans justificatifs.

Motifs de la décision

La note en délibéré transmise par M. A le 30 juin 2016 à sa seule initiative doit être déclarée irrecevable et écartée des débats comme sollicité par la MDS dans un courrier en réplique du 1er juillet 2016 au visa de l’articles 445 du code de procédure aux termes duquel, après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l’appui de leurs observations si ce n’est à la demande du président dans les cas prévus par les articles 442 et 444 du même code.

En effet, aucune invitation n’a été donnée à l’une ou l’autre des parties de préciser un quelconque point, de fournir une explication, de recueillir quelque observation.

Sur la nullité de l’assignation introductive d’instance

En vertu de les articles 56 et 648 du code de procédure civile l’assignation indique notamment si le requérant est une personne physique son domicile, à peine de nullité.

L’acte d’huissier du 31 mars 2014 délivré par xx contient cette mention à savoir 'Les Loggias du Paillon Bâtiment A XXX 06300 P'.

Seule la réalité de ce domicile est mise en cause.

Suivant attestation du 7 avril 2016 revêtue de la signature et accompagnée de la copie de la carte d’identité de son auteur Mme I N O a attesté héberger à cette adresse qui est celle de son domicile 'M. A depuis son arrivée en France pour les besoins de son procès qui l’oppose à la MDS ; ami de la famille de longue date et sans aucun revenu, j’ai accepté de l’héberger à titre gratuit durant son séjour en France ; est également versé aux débats l’avis d’échéance du loyer de ce témoin.

Mais, contrairement aux mentions de ce document dactylographié, depuis son arrivée en France en octobre 2010, date mentionnée sur le visa de son passeport, M. A a désigné diverses adresses successives, jamais personnelles, toujours chez des tiers.

En août 2010, date de l’expertise amiable et en décembre 2010, date d’un courrier de la Caisse primaire d’assurance maladie des Alpes Maritimes il est mentionné résider chez Y Mourad 109 Q de la Madeleine à P.

En avril 2011 la préfecture lui a signifié le rejet de sa demande de titre de séjour avec obligation de quitter le territoire français chez Mme Z Les Loggias du Paillon Bâtiment A XXX 06300 P.

En mars 2012 lors de la procédure de référés en désignation d’expert et octroi d’une provision devant le tribunal de grande instance de P c’est à cette même adresse qu’il s’est domicilié pour délivrer l’assignation.

La lettre chèque adressée en recommandé avec accusé de réception le 22 mai 2012 exécution de l’ordonnance de référé qui lui a alloué une provision est revenue avec la mention 'destinataire non identifiable'.

En novembre 2012, lors de l’expertise judiciaire, il a déclaré à l’expert résider 4 Q R Le Majestic à P.

Cette situation est de nature à créer des difficultés d’exécution en cas de dispositions du jugement à intervenir rendue en faveur de la défenderesse, ce qui suffit à constituer le grief nécessaire à l’annulation de l’acte.

L’ordonnance sera confirmée.

Sur les demandes annexes

Les dispositions de l’ordonnance relatives aux frais irrépétibles et dépens doivent être confirmées.

Les dépens d’appel seront supportés par M. A E .

L’équité ne commande pas de faire application devant la cour des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de M. A qui succombe dans sa voie de recours ni de la MDS.

Par ces motifs

La Cour,

— Confirme l’ordonnance.

Y ajoutant,

— Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’une ou l’autre des parties.

— Condamne M. A aux entiers dépens avec recouvrement dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président

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Textes cités dans la décision

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