Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 9 décembre 2021, n° 20/11121

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 1-2, 9 déc. 2021, n° 20/11121
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 20/11121
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Grasse, 25 octobre 2020, N° 12-19-000334
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 09 DECEMBRE 2021

N° 2021/683

Rôle N° RG 20/11121

N° Portalis DBVB-V-B7E-BGQSD

SOCIETE HABITAT 06

C/

Y X

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Roselyne SIMON-THIBAUD

Me Franck BANERE

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal judiciaire de Grasse en date du 26 Octobre 2020 enregistrée au répertoire général sous le n° 12-19-000334.

APPELANTE

SOCIETE HABITAT 06

dont le siège social est […]

représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, substituée par Me Sébastien BADIE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

et assistée par Me Rose-marie FURIO-FRISCH, avocat au barreau de NICE

INTIME

Monsieur Y X

(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 2021/2013 du 28/05/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle d’AIX-EN-PROVENCE)

né le […] à […],

demeurant […]

[…]

représenté et assisté par Me Franck BANERE, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 02 Novembre 2021 en audience publique devant la cour composée de :

M. Gilles PACAUD, Président

Mme Catherine OUVREL, Conseillère

Mme Angélique NETO, Conseillère rapporteur

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Caroline BURON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Décembre 2021.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Décembre 2021,

Signé par M. Gilles PACAUD, président et Mme Caroline BURON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Aux termes d’un contrat de bail en date du 12 avril 2017, la société d’économie mixte (SEM) Habitat 06 a donné à bail à M. Y X un appartement à usage d’habitation situé […], ainsi qu’un emplacement de stationnement, moyennant un loyer mensuel initial de 308,16 euros, outre 100,79 euros de provision sur charges.

Le 7 février 2019, la SEM Habitat 06 a fait signifier à M. X un commandement de payer la somme de 1 821,59 euros en principal visant la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail.

Le commandement de payer étant demeuré infructueux, la SEM Habitat 06 a, par exploit d’huissier du 16 mai 2019, assigné M. X devant le juge des référés du tribunal d’instance de Grasse afin d’obtenir la résiliation du bail, son expulsion et sa condamnation à lui verser diverses sommes à titre provisionnel.

Par ordonnance de référé du 26 octobre 2020, le juge des référés a :

— déclaré irrecevables les demandes formées par la société Habitat 06 en constat d’acquisition de la clause résolutoire, en expulsion et en condamnation à une indemnité d’occupation ;

— condamné M. X à payer à la société Habitat 06, à titre provisionnel, la somme de 1 739 euros correspondant à l’arriéré locatif arrêté au 25 septembre 2020 ;

— débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

— dit que chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles ;

— condamné M. X aux dépens, en ce compris le coût de l’assignation en référé et de sa notification à la préfecture, mais non celui du commandement de payer.

Par acte du 16 novembre 2020, la société Habitat 06 a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions dûment reprises.

Dans ses dernières conclusions transmises le 15 février 2021, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens soulevés, la société Habitat 06 sollicite de la cour qu’elle :

— déclare recevable et fondé son appel et ses demandes ;

— réforme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :

— dise et juge que l’assignation a été délivrée dans le respect de deux mois de la saisine de la CCAPEX ;

— constate que le commandement de payer est conforme aux dispositions de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 ;

— dise et juge que les sommes réclamées à titre provisionnel ne font pas l’objet d’une contestation sérieuse ;

— constate la résiliation du bail liant les parties à la date du 7 avril 2019 ;

— ordonne l’expulsion de M. X des lieux loués et de tout occupant de son chef avec l’aide de la force publique et d’un serrurier si besoin ;

— condamne M. X à lui verser la somme principale de 3 151,51 euros à titre provisionnel au titre de l’arriéré locatif arrêté à la date du 14 janvier 2021, expurgé des frais d’huissier ;

— le condamne au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant des loyers, augmentée des charges, et révisable selon les dispositions contractuelles, due à compter de la date de la résiliation du bail et ce, jusqu’à libération effective des lieux ;

— le déboute de toutes ses demandes ;

— le condamne à lui verser la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, en ce compris notamment les frais du commandement.

L’appelante expose que ses demandes sont recevables dès lors qu’elle justifie avoir saisi la CCAPEX le 16 février 2018 par un envoi sur le site dédié, ce qui résulte du courrier de ladite commission en date du 12 novembre 2020, qui n’a adressé un accusé de réception de son envoi que le 9 avril 2018 ; qu’elle relève que la réouverture des débats faite par le juge de première instance ne portait pas sur ce

point, de sorte qu’elle n’a pas pu s’en expliquer.

Par ailleurs, elle affirme que le décompte arrêté au 14 janvier 2020 annexé au commandement de payer portant sur une somme principale de 3 151,51 euros étant détaillé et précis, ce dernier n’est entaché d’aucune nullité ; qu’elle indique que le décompte actualisé au 25 septembre 2020, qui fait état d’une somme de 6 235,54 euros, comprend la somme principale de 5 367,83 euros, le solde représentant des frais d’huissier (779,61 euros) et des frais de pénalité (88,10 euros), et non un supplément de loyer solidarité annulé en 2018 et 2019 ; qu’elle expose que les charges locatives réclamées après régularisation annuelle au titre des années 2017 et 2018 ne se heurtent à aucune contestation sérieuse dès lors que M. X n’a jamais émis la moindre contestation lors de la régularisation des comptes de charges et que les pièces justificatives sont tenues à sa disposition.

Enfin, elle s’oppose à tout délai de paiement estimant que M. X a bénéficié de suffisamment de temps pour se reloger et qu’il ne justifie d’aucune démarche entreprise en ce sens.

Dans ses dernières conclusions transmises le 7 février 2021, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens soulevés, M. X sollicite de la cour qu’elle :

— confirme l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a déclaré irrecevables les demandes formées par la société Habitat 06 en constat d’acquisition de la clause résolutoire, en expulsion et en condamnation à une indemnité d’occupation ;

— l’infirme pour le surplus et statuant à nouveau :

A titre principal,

— constate l’existence de contestations sérieuses ;

— déboute la SEM Habitat 6 de ses demandes ;

— la condamne à lui verser la somme de 565,03 euros ;

— ordonne la compensation s’il y a lieu ;

A titre subsidiaire,

— suspende les effets de la clause résolutoire ;

— lui accorde, si nécessaire, les plus larges délais de paiement et de relogement ;

— condamne la SEM Habitat 06 à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens au titre de la première instance ;

— condamne la SEM Habitat 06 à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens au titre de l’appel.

L’intimé expose que le juge de première instance n’a pas statué sur sa demande tendant à la nullité du commandement de payer en l’état de l’irrecevabilité des demandes formées par la SEM Habitat 06 ; qu’il fait valoir, dans le cas où ses demandes seraient déclarées recevables en appel, que le décompte annexé au commandement de payer n’est pas clair dès lors que divers frais sont mélangés aux loyers et charges et qu’une ligne « loyer annexe sans tva » d’un montant de 0,10 euros y apparaît à plusieurs reprises sans aucune explication ; qu’en tout état de cause, il relève que le décompte arrêté au 14 janvier 2021 faisant état d’un solde débiteur de 3 931,12 euros mentionne des frais d’un montant de 867,71 euros qui ne sont pas dus ainsi que des provisions sur charges de 100,79 euros par mois qui

ne sont pas justifiées, soit une somme de 3 628,44 euros sur 36 mois ; qu’il relève qu’après déduction de ces deux sommes, son compte est en réalité créditeur de la somme de 565,03 euros.

A titre subsidiaire, il sollicite la suspension des effets de la clause résolutoire et les plus larges délais pour se reloger au regard de sa situation personnelle et financière, comme étant en situation de handicap, du fait qu’il perçoive depuis septembre 2020 les allocations pour le logement d’un montant de 222 euros par mois et des virements qu’il a effectués pour apurer sa dette, dont un d’un montant de 1 739 euros le 14 décembre 2020 ; qu’il fait observer que sa dette n’a cessé de diminuer depuis la procédure de première instance.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 19 octobre 2021 et l’affaire appelée à l’audience du 2 novembre 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il importe de rappeler que les décisions de donner acte et de constat sont dépourvues de caractère juridictionnel et ne sont pas susceptibles de conférer un droit à la partie qui l’a requis et obtenu, raison pour laquelle la cour n’a pas à répondre aux demandes formées à ce titre par les parties.

En outre, le dispositif de l’arrêt doit être limité aux strictes prétentions formées par les parties, étant rappelé qu’il n’a pas vocation à contenir les moyens développés par les parties, peu important que ceux-ci figurent dans le dispositif de leurs conclusions.

Sur l’irrecevabilité des demandes en constatation de la résiliation du bail, en expulsion de la SEM Habitat 06 et en condamnation, à titre provisionnel, d’une indemnité d’occupation

Il résulte des termes du II de l’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 que les bailleurs personnes morales autres qu’une SCI familiale ne peuvent faire délivrer, sous peine d’irrecevabilité de la demande, une assignation aux fins de constat de résiliation du bail avant l’expiration d’un délai de deux mois suivant la saisine de la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) prévue à l’article 7-2 de la loi du 31 mai 1990.

En l’espèce, la SEM Habitat 06 verse aux débats un mail qu’elle a adressé à la CCAPEX le 16 février 2019 ainsi qu’un mail de cette commission en date du 9 avril 2019 aux termes duquel elle indique avoir bien été saisie de la situation d’impayé de loyers de M. X.

En l’état de ces éléments, le juge de première instance a déclaré les demandes de la SEM Habitat 06, aux fins notamment de constatation de la résiliation du bail et d’expulsion, irrecevables au motif que l’assignation en date du 16 mai 2019 a été délivrée moins de deux mois suivant le mail de la CCAPEX du 9 avril 2019.

Or, devant la cour, la SEM Habitat 06 verse aux débats un mail de la CCAPEX en date du 12 novembre 2020 aux termes duquel elle accuse réception le 16 février 2018 de la saisine de la SEM Habitat 06 au nom de M. X datant du 13 février 2018.

Dans ces conditions, il y a lieu d’infirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a déclaré irrecevables les demandes formées par la SEM Habitat 06 à l’encontre de M. X en constatation de la résiliation du bail, en expulsion et en condamnation à une indemnité d’occupation.

La fin de non-recevoir soulevée par M. X tirée d’un assignation délivrée moins de deux mois après la saisine de la CCAPEX sera donc rejetée.

Sur l’exception de nullité du commandement de payer

Il résulte de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 applicable en l’espèce que le commandement de payer contient, à peinte de nullité:

• la mention que le locataire dispose d’un délai de deux mois pour payer sa dette ;

• le montant mensuel des loyers et charges ;

• le décompte de la dette ;

• l’avertissement qu’à défaut de paiement ou d’avoir sollicité des délais de paiement, le locataire s’expose à une procédure judiciaire de résiliation de son bail et d’expulsion ;

• la mention de la possibilité pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement de son département, dont l’adresse est précisée, aux fins de solliciter une aide financière ;

• la mention de la possibilité pour le locataire de saisir, à tout moment, la juridiction compétence aux fins de demander un délai de grâce sur le fondement de l’article 1343-5 du code civile.

En l’espèce, M. X sollicite la nullité du commandement de payer du 7 février 2019, mentionnant des charges et loyers impayés d’un montant de 1 821,59 euros en principal, au motif que le décompte de la dette qui y est annexé n’est pas clair et comprend des sommes qui ne sont pas dues.

Le décompte annexé au commandement de payer porte sur la période allant du mois de novembre 2017 au 21 janvier 2019, loyers et charges du mois de décembre 2018 inclus.

Ce décompte détaille les sommes réclamées à M. X mois par mois de la manière suivante :

• novembre et décembre 2017 : 408,85 euros par mois comprenant 255,41 euros de loyer pour le logement, 52,65 euros de loyer pour le garage et 100,79 euros d’acompte pour charges générales ;

• janvier 2018 : 1 111,70 euros comprenant la somme susvisée de 408,85 euros, outre un surloyer de 670,23 euros et des frais pour non-réponse à l’enquête et au surloyer (32,62 euros)

• février 2018 : 1 086,70 euros comprenant la somme susvisée de 1 111,70 euros excepté les frais pour non-réponse au surloyer (25 euros) ;

• mars 2018 : 1 230,93 euros comprenant la somme susvisée de 1 086,70 euros, outre 144,23 euros de frais en plus ;

• avril 2018 et mai 2018 : 1 086,70 euros comme en février 2018 ;

• juin 2018 et juillet 2018: 408,85 euros comme en novembre et décembre 2017 ;

• août 2018: 841,53 euros comprenant les 408,85 euros, outre 432,68 euros de charges après régularisation annuelle en 2017 ;

• septembre, octobre, novembre, décembre 2018 : 408,85 euros.

En plus de ces sommes, il a été porté au débit du compte de M. X la somme mensuelle de 0,10 euros entre les mois de mai 2017 et décembre 2018, outre celle de 0,06 euros en avril 2017, au titre du loyer annexe sans TVA.

Enfin, outre les sommes réclamées à M. X portées au débit du compte, en ce compris celles dues après rejet des prélèvements, le décompte fait apparaître au crédit du compte les sommes qui ont été réglées, mais également l’annulation de la somme de 3 351,15 euros au mois de juin 2018 correspondant aux cinq surloyers de 670,23 euros portés au débit du compte en janvier, février, mars, avril et mai 2018.

Si M. X conteste devoir les différents frais portés au débit de son compte et les provisions pour charges en l’absence de régularisation annuelle, lesquelles seront examinées ci-dessous, il n’en demeure pas moins que le décompte annexé au commandement de payer détaille précisément les sommes réclamées par la SEM Habitat 06 à M. X, étant rappelé qu’un commandement de payer qui est notifié pour une somme erronée et supérieure au montant de la créance réelle du bailleur au titre des loyers et charges reste valable jusqu’à due concurrence des sommes exigibles.

Il y a donc lieu de rejeter la demande de nullité du commandement de payer formée par M. X, demande qui n’avait pas été examinée par le juge de première instance en l’état de l’irrecevabilité des demandes de la SEM Habitat 06.

Sur la demande de constatation de la résiliation du bail

En application des articles 1728, 1741 du code civil et 15 I de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, le locataire a pour obligation principale le paiement du loyer. Un manquement grave et répété à cette obligation justifie la résiliation du contrat ou la délivrance d’un congé pour ce motif à l’initiative du bailleur.

Aux termes de l’article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus. L’article 24 alinéa 1 dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour le non versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, le contrat de bail signé par les parties comporte une clause résolutoire applicable de plein droit en cas de non-paiement des loyers et charges.

C’est ainsi que l’article 5 des conditions générales du contrat énonce que le contrat de location sera résilié de plein droit à défaut du paiement intégral du dépôt de garantie ou des loyers ou des charges au terme convenu, deux mois après un simple commandement de payer resté sans effet.

Le commandement de payer du 7 février 2019 visant la clause résolutoire porte sur une somme de 1 821,59 euros en principal.

Or, il résulte de ce qui précède qu’un certain nombre de frais pour un montant total de 207,33 euros ont été portés au débit du compte de M. X, étant rappelé que les cinq surloyers réclamées entre le mois de janvier et mai 2018 ont été annulés par la SEM Habitat 06.

Déduction faite de la somme de 207,33 euros, M. X était redevable, à la date du commandement de payer, de la somme de 1 614,26 euros arrêtée au 21 janvier 2019, loyers et charges du mois de décembre 2018 inclus.

Si M. X conteste devoir les provisions à valoir sur les charges locatives en l’absence de régularisation annuelle au titre de l’année 2017, cette régularisation a fait apparaître un solde en faveur de la SEM Habitat 06 de 432,68 euros, laquelle a été portée au débit du compte de M. X au mois d’août 2018.

Le décompte de régularisation de charges portant sur l’année 2017 versé aux débats par la SEM Habitat 06 étant conforme à ce que les textes exigent, comme cela sera examiné ci-dessous, il n’y a pas lieu de déduire des sommes réclamées, aux termes du commandement de payer, les charges locatives portées au débit du compte de M. X au cours de la période considérée.

Dès lors que M. X ne réglera que la somme de 500 euros le 27 juin 2019, ce dernier n’a pas réglé l’arriéré locatif de 1 614,26 euros dans les deux mois suivant la signification du commandement de payer.

Il y a donc lieu de constater la résiliation du bail par suite de l’acquisition de la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail au 7 avril 2019, demande qui n’avait pas été examinée par le juge de première instance en l’état de l’irrecevabilité des demandes de la SEM Habitat 06, sous réserve toutefois de ce qui sera dit ci-dessous.

Sur la demande de provision au titre des loyers et charges locatives impayés

Par application de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

Il appartient au demandeur d’établir l’existence de l’obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu’en son montant et la condamnation provisionnelle, que peut prononcer le juge des référés sans excéder ses pouvoirs, n’a d’autre limite que le montant non sérieusement constestable de la créance alléguée.

En l’espèce, M. X conteste non seulement devoir les provisions sur charges mais également les frais portés au débit de son compte.

Sur la déduction des charges locatives

L’article 23 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version issue de la loi du 24 mars 2014 applicable au litige, dispose que les charges récupérables, sommes accessoires au loyer principal, sont exigibles sur justification en contrepartie :

1° Des services rendus liés à l’usage des différents éléments de la chose louée ;

2° Des dépenses d’entretien courant et des menues réparations sur les éléments d’usage commun de la chose louée. Sont notamment récupérables à ce titre les dépenses engagées par le bailleur dans le cadre d’un contrat d’entretien relatif aux ascenseurs et répondant aux conditions de l’article L. 125-2-2 du code de la construction et de l’habitation, qui concernent les opérations et les vérifications périodiques minimales et la réparation et le remplacement de petites pièces présentant des signes d’usure excessive ainsi que les interventions pour dégager les personnes bloquées en cabine et le dépannage et la remise en fonctionnement normal des appareils ;

3° Des impositions qui correspondent à des services dont le locataire profite directement.

La liste de ces charges est fixée par décret en Conseil d’Etat. Il peut y être dérogé par accords collectifs locaux portant sur l’amélioration de la sécurité ou la prise en compte du développement durable, conclus conformément à l’article 42 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 précitée.

Les charges locatives peuvent donner lieu au versement de provisions et doivent, en ce cas, faire l’objet d’une régularisation annuelle. Les demandes de provisions sont justifiées par la communication de résultats antérieurs arrêtés lors de la précédente régularisation et, lorsque l’immeuble est soumis au statut de la copropriété ou lorsque le bailleur est une personne morale, par le budget prévisionnel.

Un mois avant cette régularisation, le bailleur en communique au locataire le décompte par nature de charges ainsi que, dans les immeubles collectifs, le mode de répartition entre les locataires et, le cas échéant, une note d’information sur les modalités de calcul des charges de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire collectifs. Durant six mois à compter de l’envoi de ce décompte, les pièces justificatives sont tenues, dans des conditions normales, à la disposition des locataires.

A compter du 1er septembre 2015, le bailleur transmet également, à la demande du locataire, le récapitulatif des charges du logement par voie dématérialisée ou par voie postale.

Lorsque la régularisation des charges n’a pas été effectuée avant le terme de l’année civile suivant l’année de leur exigibilité, le paiement par le locataire est effectué par douzième, s’il en fait la

demande.

Pour l’application du présent article, le coût des services assurés dans le cadre d’un contrat d’entreprise ou d’un contrat d’achat d’électricité, d’énergie calorifique ou de gaz naturel combustible, distribués par réseaux correspond à la dépense, toutes taxes comprises, acquittée par le bailleur'.

Cet article 23, qu’il s’agisse de sa version antérieure ou postérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014, fait donc obligation aux bailleurs de communiquer, au moins un mois avant la régularisation annuelle, le décompte par nature de charges ainsi que, dans les immeubles collectifs, le mode de répartition entre les locataires, et de tenir à la disposition de leur locataire les pièces justificatives, pendant une durée d’un mois avant l’entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014, pendant une durée de six mois postérieurement à cette entrée en vigueur. Il est constant en droit que le défaut de production par le bailleur du décompte dans le délai d’un mois avant régularisation annuelle n’est pas assorti de sanction et que le bailleur, sous réserve de l’application de la prescription triennale, peut produire ce décompte postérieurement, de même qu’il peut, également postérieurement au délai de six mois prévu à cet égard, tenir ou faire tenir les pièces justificatives de ce décompte à son locataire.

En l’espèce, la SEM Habitat 06 verse un décompte actualisé au 14 janvier 2021, comprenant les loyers et provision sur charges du mois de décembre 2020, mentionnant tous les mois la provision mensuelle sur charges de 100,79 euros, outre la somme de 432,68 euros portée au débit du compte en août 2018 au titre des charges de 2017 après régularisation annuelle, et celle de 234,38 euros portée au débit du compte en novembre 2019 au titre des charges de 2018 après régularisation annuelle.

La SEM Habitat 06 produit les décomptes de régularisation de charges adressés à M. X au titre des années 2017 et 2018 faisant apparaître en faveur de la bailleresse un solde de charges de 432,68 euros en 2017 et de 234,38 euros en 2018, après avoir détaillé, poste par poste, le montant total des charges locatives à répartir, la part incombant à M. X, le montant total des provisions appelées et le solde de charges locatives restant dû.

Si la SEM Habitat 06 ne justifie pas avoir procédé à la régularisation annuelle des provisions sur charges appelées au titre des années 2019 et 2020, il n’en demeure pas moins que cette dernière peut en justifier dans le délai de prescription triennale, étant rappelé que le défaut de production par un bailleur du décompte dans le délai d’un mois avant régularisation annuelle n’est assorti d’aucune sanction.

Dans ces conditions, les provisions à valoir sur les charges locatives et le solde des charges locatives réclamées au titre des années 2017 et 2018 par la SEM Habitat 06 au cours de la période considérée ne sont pas sérieusement contestables, de sorte que ces sommes ne seront pas déduites de la provision réclamée par la SEM Habitat 06 au titre de la dette locative.

Sur la déduction des frais

Aux termes du dernier décompte actualisé au 14 janvier 2021 qui porte sur les loyers allant des mois de novembre 2017 à décembre 2020, il apparaît que les surloyers, qui ont été portés au débit du compte entre les mois de janvier et mai 2019 à hauteur de 4 095,84 euros ont été annulés, a l’instar des surloyers portés au débit du compte entre les mois de janvier et mai 2018, qui ont également été annulés au mois d’août 2018.

En revanche, un certain nombre de frais apparaissent au débit du compte, à savoir 207,33 euros pour la période allant des mois novembre 2017 à décembre 2018 et 660,38 euros pour celle allant des mois de janvier 2019 à décembre 2020, soit un total de 867,71 euros qui devra être déduit de la somme réclamée par la SEM Habitat 06.

Sur le montant de la dette locative non sérieusement contestable

Au terme de l’article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer les loyers et charges récupérables aux termes convenus.

Devenu occupant sans droit ni titre du fait de l’acquisition de la clause résolutoire, il est tenu de payer une somme équivalente au loyer augmenté des charges à titre de réparation du préjudice subi par le bailleur.

En l’espèce, déduction faite des frais portés au débit du compte d’un montant de 867,71 euros, M. X était redevable à la date du 14 janvier 2021 de la somme de 3 063,41 euros au titre des loyers et charges arrêtés au mois de décembre 2020.

Il y a donc lieu d’infirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a condamné M. X à verser à la SEM Habitat 06 la somme provisionnelle de 1 739 euros arrêtée au 25 septembre 2020 et de le condamner au paiement de la somme provisionnelle de 3 063,41 euros au titre des loyers et charges arrêtés au 14 janvier 2021.

Cette somme produira intérêts au taux légal sur la somme de 1 614,26 euros à compter du 7 février 2019, date du commandement de payer, et à compter du jour du prononcé du présent arrêt pour le surplus.

Sur la demande de délais de paiement et la suspension des effets de la clause résolutoire

L’article 24 V de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989 dispose que le juge peut, même d’office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, au locataire en situation de régler sa dette locative. Pendant le cours des délais ainsi accordés, les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus. Si le locataire se libère dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué ; dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.

En l’espèce, il résulte de ce qui précède que M. X est redevable de la somme de 3 063,41 euros arrêtée au 14 janvier 2021, la SEM Habitat 06 ne produisant aucun décompte actualisé.

M. X justifie avoir perçu une pension d’invalidité d’environ 337 euros par mois en 2019 et être bénéficiaire, depuis le mois de septembre 2020, de l’aide pour le logement d’un montant de 222 euros par mois, la part du loyer et de la provision sur charges laissée à sa charge s’établissant à la somme mensuelle de 195,48 euros.

A la lecture du dernier décompte arrêté au 14 janvier 2021, il apparaît que M. X règle la part du loyer et de la provisions sur charges laissée à sa charge depuis le mois de septembre 2020, outre le fait qu’il a procédé au paiement de la somme de 1 739 euros au mois de décembre 2020.

Compte tenu de ces éléments, il y a lieu d’accorder à M. X des délais de paiement afin de lui permettre de régler la dette locative de 3 063,41 euros en 36 mensualités de 85 euros chacune, la 36ème mensualité devant être augmentée du solde de la dette, en plus du loyer et des charges courant à hauteur de 417,48 euros par mois, sans possibilité de révision.

Les effets de la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail sont donc suspendus. En cas de remboursement intégral par M. X de sa dette, en plus de la reprise du paiement du loyer et des charges courant, la résiliation du bail sera considérée comme n’ayant jamais été prononcée et le bail reprendra pleinement ses effets entre les parties.

A l’inverse, à défaut de paiement du loyer et des charges courants ou d’une seule des mensualités de

remboursement à son échéance, la résiliation judiciaire du bail retrouvera pleinement ses effets et le bail sera automatiquement résilié.

A défaut de départ volontaire, il sera alors procédé à l’expulsion des occupants conformément aux articles L 411-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, et M. X sera tenu de payer une indemnité d’occupation égale au montant du dernier loyer augmenté de la provision sur charges, soit à la somme de 417,48 euros par mois, en réparation du préjudice causé par l’occupation illicite.

Ces indemnités seront dues jusqu’à libération effective des lieux matérialisée par la remise des clés à la bailleresse.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il convient de confirmer l’ordonnance entreprise, en ce qu’elle n’a pas fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et a condamné M. X aux dépens de première instance, sauf en ce qu’elle n’a pas inclus dans ces dépens le coût du commandement de payer.

Il y a donc lieu de condamner M. X aux dépens de première instance, en ce compris le coût du commandement de payer.

Compte tenu du sens de la présente décision, les dépens d’appel seront laissés à la charge de M. X.

En revanche, l’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en faveur de la SEM Habitat 06.

En tant que partie perdante, M. X sera débouté de sa demande formée au même titre.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME l’ordonnance entreprise du 5 novembre 2020 sauf ce qu’elle a :

dit que chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles ;

condamné M. Y X aux dépens, en ce compris le coût de l’assignation en référé et de sa notification à la préfecture ;

STATUANT A NOUVEAU et Y AJOUTANT :

DECLARE recevables les demandes formées par la société d’économie mixte Habitat 06 à l’encontre de M. Y X en constat d’acquisition de la clause résolutoire, en expulsion et en condamnation à une indemnité d’occupation ;

DEBOUTE M. Y X de sa demande de voir annuler le commandement de payer délivré le 7 février 2019 ;

CONDAMNE M. Y X à payer à la société d’économie mixte Habitat 06 la somme provisionnelle de 3 063,41 euros au titre des loyers et charges locatives arrêtée 14 janvier 2021, loyers et provision sur charges du mois de décembre 2020 inclus ;

DIT que cette somme produira intérêts au taux légal sur la somme de 1 614,26 euros à compter du 7

février 2019, date du commandement de payer, et à compter du jour du prononcé du présent arrêt pour le surplus ;

AUTORISE M. Y X à se libérer de sa dette en 36 mensualités de 85 euros le 15 de chaque mois, la 36ème mensualité étant augmentée du solde de la dette ;

DIT que ces mensualités devront être payées en plus du loyer et des charges courant et en même temps qu’eux ;

DIT que la première mensualité sera due en même temps que le loyer et des charges courant du premier mois suivant la signification de la présente décision ;

DIT que les effets de la clause résolutoire sont suspendus pendant l’exécution des délais de grâce ;

DIT que si les délais sont respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais joué et le bail reprendra pleinement ses effets entre les parties ;

DIT qu’au contraire, à défaut de paiement d’une seule mensualité ou du loyer et des charges courant à son terme exact :

1 ' le bail sera automatiquement résilié,

2 – le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,

3 – à défaut pour M. Y X d’avoir libéré les lieux deux mois après la notification au Préfet du commandement d’avoir à quitter les lieux, il sera procédé à leur expulsion et à celle de tous occupants de son chef, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier, si besoin est, conformément aux dispositions des articles L 412-1 et suivants, R 412-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, et au transport des meubles laissés dans les lieux aux frais des expulsés dans tel garde-meuble choisi par ce dernier ou à défaut par l’huissier en charge des opérations conformément aux dispositions des articles L 433-1 et L 433-2 du code des procédures civiles d’exécution,

4 ' M. Y X sera tenu au paiement d’une indemnité d’occupation égale au montant du dernier loyer augmenté des provisions sur charges, tels qu’ils auraient été dus en cas de poursuite du bail, soit égale à la somme de 417,48 euros, sans possibilité de révision ;

DIT n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens ;

CONDAMNE M. Y X aux dépens de première instance, en ce compris le coût du commandement de payer du 7 février 2019, et aux dépens de la procédure d’appel.

La greffière Le président

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 9 décembre 2021, n° 20/11121