Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 25 novembre 2021, n° 21/01404

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 1-5, 25 nov. 2021, n° 21/01404
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 21/01404
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Draguignan, 2 décembre 2020, N° 19/01788
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 25 NOVEMBRE 2021

MFB

N° 2021/ 519

N° RG 21/1404 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BIBQI

Syndic. de copro. SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L’IMMEUBLE LE […]

C/

Z A

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me François AUBERT

SCP ROBERT & ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Ordonnances du Tribunal Judiciaire de DRAGUIGNAN en date du 03 décembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° '' et du 23 Août 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/01788.

APPELANT

Le Syndicat des Copropriétaires de l’Immeuble LE TAMAYA sis Les Parcs de Cavalaire Avenue Saint-Raphaël 83240 CAVALAIRE SUR MER, prise en la personne de son syndic en exercice la société dénommée 'FIDUCIMO', SARL dont le siège est […], […], poursuites et diligences de son gérant en exercice

représentée par Me François AUBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIME

Monsieur Z A

demeurant […]

représenté par Me Philippe HAGE de la SCP ROBERT & ASSOCIES, avocat au barreau

D’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Octobre 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Florence BRENGARD, Président, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Florence BRENGARD, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Novembre 2021

Signé par Madame Marie-Florence BRENGARD, Président et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

M. Z A est copropriétaire dans la résidence 'le Tamaya’ situé à […].

Par ordonnance de référé construction rendue le 19 juin 2019, le président du tribunal judiciaire de Draguignan a, au visa de l’article 145 du Code de procédure civile, fait droit à la demande d’expertise présentée à l’égard du syndicat des copropriétaires le Tamaya par M. Z A qui invoquait de possibles désordres affectant les balcons de la résidence.

L’expert désigné était M. X ayant notamment pour mission de décrire les nuisances invoquées par M. A dénonçant des désordres affectant les balcons de la copropriété, en déterminer la cause et la nature juridique et chiffrer le coût de la remise en état .

Par ordonnance du 28 août 2019, cet expert a été remplacé par M. Thierry Y.

M. Y a déposé un pré-rapport d’expertise le 27 avril 2020 dans lequel il indique notamment que le désordre résultant de malfaçons d’armatures compromet la solidité de l’immeuble et rend les balcons impropres à leur destination, et qu’il existe un risque d’effondrement de ces ouvrages, par corrosion des armatures.

***

Par ordonnance rendue le 3 décembre 2020, le magistrat chargé du contrôle des expertises saisi par

un courrier du conseil du syndicat le Tamaya sollicitant que les parties et l’expert judiciaire soient réunis afin notamment de débattre de la nécessité de désigner un sapiteur ingénieur béton, a,

— constaté la réouverture des opérations d’expertise

— rejeté la demande d’intervention d’un sapiteur ingénieur béton

— invité l’expert judiciaire à solliciter un sapiteur pour effectuer un test de charge ainsi que la consignation complémentaire correspondante

— invité l’expert à dresser le calendrier des opérations à venir et solliciter un délai pour déposer son rapport.

Suivant déclaration en date du 29 janvier 2021, le syndicat des copropriétaires a relevé appel de cette décision (RG 21/01404). L’affaire a été fixée à bref délai devant la cour, selon les articles 905 et suivants du Code de procédure civile .

***

Dans l’intervalle, le magistrat chargé du contrôle des expertises a été à nouveau saisi par le conseil du syndicat le Tamaya , d’une requête en remplacement d’expert pour manquement au principe de contradiction et de neutralité, et absence de compétence professionnelle pour appréhender l’aspect technique de la mission.

Par ordonnance rendue le 23 août 2021, le premier juge a rejeté ladite demande et a constaté qu’au regard de l’appel interjeté à l’égard de l’ordonnance du 3 décembre 2020 non assortie de l’exécution provisoire, les opérations d’expertise étaient suspendues jusqu’à décision de la cour d’appel de céans.

Suivant déclaration en date du 3 septembre 2021, le syndicat des copropriétaires a relevé appel de cette seconde ordonnance (RG n°21/12954), cet appel étant également fixé à bref délai .

***

A l’audience de la cour tenue le 6 septembre 2021, le président a demandé aux parties de présenter leurs observations sur la recevabilité de l’appel dans les deux dossiers qui ont été évoqués à l’audience du 4 octobre 2021, puis mis en délibéré.

***

Par conclusions n°4 du 29 septembre 2021, le syndicat des copropriétaires entend voir la cour,

— déclarer son appel recevable,

— ordonner la jonction des dossiers,

— au principal, ordonner le changement de l’expert qui a commis des manquements au principe du contradictoire en ne communiquant pas ses notes du 5 novembre 2019 et 11 septembre 2020,

— dire mal jugée la décision du 3 décembre 2020,

— dire y avoir lieu à la mise en place d’un collège d’expert,

— dire et juger que M. A a acquiescé à la demande faite en 1ère instance,

— désigner un ingénieur structure/béton aux fins suivantes:

' analyser l’existant pour déterminer les éventuelles faiblesses du balcon par prélèvement radiographique ou tout moyen approprié

— effectuer les calculs de nature à déterminer précisément les travaux à faire sur le balcon dans la partie située au-dessus de l’appartement de M. A,

— dire avoir lieu à faire un teste de charge à 350kg/m2,

— dire que les dépens suivront le fond.

En ses conclusions du 29 septembre 2021 M. A demande,

A titre principal, de,

déclarer irrecevable l’appel formé par le syndicat Le Tamaya ;

confirmer l’ordonnance du juge du contrôle des expertises du 3 décembre 2020,

A titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour venait à entrer en voie de réformation, attribuer la charge des frais d’expertise complémentaires au syndicat le Tamaya,

En tout état de cause,

condamner le syndicat le Tamaya à verser la somme la somme de 1.500 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel ainsi qu’aux entiers dépens,

rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires.

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture du 24 août 2021 a été révoquée pour recevoir les conclusions des parties et définitivement rendue le 4 octobre 2021 avant l’ouverture des débats.

MOTIFS DE LA DECISION

Il convient de procéder à la jonction des deux procédures et de dire qu’elles seront dorénavant suivies sous le n°RG 21/01404.

Les conclusions signifiées au RPVA le 4 octobre 2021 à 12H45 par le syndicat des copropriétaires le Tamaya dans le dossier 21/12954 seront déclarées irrecevables car tardives dans la mesure où l’avocat de la partie adverse n’a pas été en mesure d’y répondre avant l’audience fixée le même jour à 14H15 à laquelle il n’était pas présent.

Sur la recevabilité de l’appel

Le syndicat des copropriétaires a justifié la recevabilité de son appel à l’égard des deux ordonnances déférées à la cour.

En effet, aux termes de l’ordonnance de référé rendue le 19 juin 2019, le président du tribunal judiciaire de Draguignan qui a ordonné une expertise en vertu de l’article 145 du Code de procédure civile a épuisé sa saisine, de sorte que les décisions du juge chargé du contrôle des expertises statuant

sur des demandes relatives à l’exécution de cette mesure d’expertise, sont susceptibles d’appel immédiat.

En outre, les dispositions de l’article 170 du Code de procédure civile ne sont pas applicables à l’appel d’une décision qui se prononce sur une demande de changement d’expert.

Sur le bien fondé de l’appel

En son ordonnance du 3 décembre 2020, le magistrat chargé du contrôle des expertises a décidé, après avoir organisé le 20 octobre 2020, une réunion entre les parties et l’expert judiciaire M. Y, de rejeter la demande d’adjonction d’un sapiteur ingénieur béton, en motivant sa décision par le fait que l’expert préconise dans un premier temps, d’effectuer un test de charge du balcon qui permettrait de répondre à la question posée de la faiblesse de l’ouvrage, déjà démontrée, cette mission additionnelle lui apparaissant moins onéreuse .

Le fait est qu’à la lecture du pré-rapport, il apparait que l’expert a déjà donné son avis sur la matérialité et l’origine des désordres, et qu’il lui reste à déterminer les modalités de réparation du dommage structurel dont il relève l’existence. Or, pour lui, le test de charge est indispensable mais suffira à l’éclairer pour achever sa mission.

Le magistrat a donc retenu dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, que cette mission complémentaire était satisfaisante.

Sans attendre qu’il soit procédé audit test, le syndicat a déposé une requête en remplacement d’expert le 30 avril 2021 pour manquement au principe du contradictoire et de neutralité et en raison de la spécialité de M. Y architecte dont les compétences professionnelles ne lui permettraient pas d’appréhender techniquement la mission.

Dans son ordonnance également querellée du 23 août 2021, le magistrat a rappelé à juste titre que dans sa précédente décision du 3 décembre 2020 déférée à la cour par voie d’appel, il avait déjà été discuté du défaut de compétence technique de l’expert judiciaire et qu’en conséquence, il ne pouvait rejuger ce point.

Sur le grief tenant à la violation du principe du contradictoire, le juge a retenu que,

— l’expert n’est pas tenu de communiquer aux parties tous les courriers qu’il échange avec le juge,

— en tout état de cause, l’expert a adressé au juge un courrier du 11 septembre 2020 concernant une difficulté soulevée par le conseil du syndicat, ce courrier étant annexé à la convocation adressée aux parties pour l’audience du 20 octobre 2020.

Il a, dès lors, rejeté la demande de remplacement de l’expert judiciaire.

Dans le cadre de la première ordonnance, l’avocat du syndicat critiquait les premières conclusions de l’expert en faisant valoir que les accédits n’avaient pas mis en évidence des désordres visibles sur le balcon de M. A et que le recours à un ingénieur béton pour effectuer les calculs est nécessaire.

Cependant, le magistrat chargé du contrôle de l’expertise a, dans son entier pouvoir d’appréciation des éléments de fait de la mesure d’instruction dont il suit le déroulement, décidé que le test de charge était, dans un premier temps, suffisant pour régler le problème posé de la faiblesse de l’ouvrage sur lequel l’expert s’est déjà prononcé.

Étant saisie de l’appel à l’égard des deux ordonnances précitées, la cour considère que la requête en changement d’expert présentée par le syndicat le Tamaya est prématurée car il est nécessaire qu’il

soit procédé au test de charge préconisé par l’expert M. Y, cette mesure étant moins onéreuse que le recours à un sapiteur ingénieur béton, et moins susceptible de retarder l’issue de l’expertise.

Du reste, à l’appui de la demande de remplacement d’expert, le syndicat a soutenu que M. Y avait manqué gravement au respect du contradictoire par deux fois,

'd’une part en ne communiquant pas au syndicat la lettre du 11 septembre 2020 qu’il avait adressé au juge avec une notede trois pages,

'd’autre part, par le document du 5 novembre 2019 intitulé « compte rendu des discussions en réunion d’expertise » qui ne lui avait pas non plus été communiquée.

Cependant, comme l’a justement relevé le magistrat dans son ordonnance du 23 août 2021, il n’existe aucune obligation pour l’expert de communiquer aux parties les courriers qu’il adresse au magistrat, et ce d’autant que celui-ci, dans l’exercice de ses fonctions de suivi de l’expertise, doit mettre en débat, l’ensemble des difficultés qui lui sont soumises relativement au déroulement de la mesure d’instruction.

C’est d’ailleurs ce qu’il a fait en joignant la correspondance du 11 septembre 2020, à la convocation qu’il a adressée aux parties pour l’audience du 20 octobre 2020, à l’issue de laquelle il a rendu son ordonnance 3 décembre 2020.

Quant au document du 5 novembre 2019, il apparaît que dorénavant, les parties en ont eu connaissance alors que l’expertise est toujours en cours et qu’elles peuvent donc en discuter le contenu dans le cadre des opérations menées par M. Y.

En tout état de cause, les manquements présentés par le syndicat des copropriétaires comme attentatoires au principe de neutralité voire d’impartialité de l’expert judiciaire ne constituent pas une violation des obligations de celui-ci. En effet, la réponse qu’il peut apporter aux dires des parties contient nécessairement son avis sur la question posée, mais la critique de l’orthographe, de la grammaire ou du style ne peut être utilisée contre l’expert pour en déduire un manquement à ses obligations professionnelles.

Il appartient à la partie qui se prétend victime d’une 'attitude méprisante et agressive’ (sic) de répondre à l’expert ou de produire ensuite tous les éléments de nature à remettre en cause et conclusions et les constatations de l’expert judiciaire qui sont réunies dans un rapport qui peut être ensuite combattu par tout autre élément de valeur probante équivalente.

Il en résulte que les éléments invoqués par le syndic ne sont assurément pas suffisants pour caractériser un manquement de l’expert au principe de neutralité ou d’impartialité ou encore une atteinte au principe du contradictoire, de nature à justifier qu’il soit procédé à son remplacement par application de l’article 235 du Code de procédure civile qui requiert qu’il existe un empêchement légitime ou que le technicien ait manqué à ses devoirs.

En tout état de cause, saisie à l’égard de décisions du magistrat chargé du suivi d’une mesure d’expertise, la cour d’appel ne pourrait désigner un nouvel expert mais seulement réformer sa décision.

Il est à noter qu’en défense, le conseil de M. A qui n’a relevé aucun manquement de l’expert à sa mission, soutient que le changement d’expert serait de nature à différer gravement l’issue de l’expertise judiciaire .

Il est vrai que cette mesure d’instruction a été ordonnée au visa de l’article 145 du code de procédure civile, avant tout procès au fond, dans le cadre d’une procédure introduite le 13 mars 2019 par

assignation de M. A , soit depuis plus de 2ans et demi à la date où la cour statue.

Les critiques que formule le syndicat des copropriétaires à l’égard de l’expert judiciaire, seront utilement développées, sauf à être purement dilatoires, lors du dépôt du rapport définitif d’expertise puis dans le cadre du procès au fond, s’il a lieu.

Les parties ne peuvent pas choisir l’expert judiciaire qui n’est désigné que par décision judiciaire, mais elles peuvent se faire assister d’experts privés : d’ailleurs, le syndicat a déjà eu recours à l’avis du bureau d’architectes Thonon-Remacle pour une lecture 'rapide et partielle' (sic) des premiers travaux de M. Y ainsi qu’à une consultation par mail du bureau d’études Donato ( pièces 27 et 28).

L’appel du syndicat des copropriétaires le Tamaya apparait donc totalement dépourvu de fondement, ce qui justifie la confirmation des deux ordonnances querellées et la condamnation de l’appelant au paiement d’une indemnité de procédure à M. A sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que des dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

Vu la jonction des procédures sous le n° 21/1404,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 4 octobre 2021,

Ecarte des débats comme étant irrecevables les conclusions déposées le 4 octobre 2021 par le syndicat des copropriétaires le Tamaya,

Vu les appels à l’égard des ordonnances rendues le 3 décembre 2020 et le 23 août 2021 par le magistrat chargé du contrôle des expertises du tribunal judiciaire de Draguignan dans le dossier RG n°19/01788 ( n° expertise : 19/00000435),

Confirme les deux ordonnances précitées en toutes leurs dispositions,

Condamne le syndicat des copropriétaires le Tamaya représenté par son syndic en exercice à payer à M. Z A une somme de 1500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel,

Le condamne également aux dépens d’appel,

Le greffier Le président

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