Cour d'appel d'Angers, 20 janvier 2015, n° 13/00347

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Angers, 20 janv. 2015, n° 13/00347
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 13/00347
Décision précédente : Tribunal d'instance d'Angers, 25 novembre 2012, N° 2011/01886

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

D’ANGERS

CHAMBRE A – CIVILE

XXX

ARRET N°

AFFAIRE N° : 13/00347

Jugement du 26 Novembre 2012

Tribunal d’Instance d’ANGERS

n° d’inscription au RG de première instance : 2011/01886

ARRÊT DU 20 JANVIER 2015

APPELANTS :

Monsieur I B

né le XXX à PARIS

XXX

XXX

Madame AJ-AK AL épouse B

née le XXX à XXX

XXX

XXX

Représentés par Me Régine GAUDRE de la SARL CAPPATO GAUDRE, avocat au barreau d’ANGERS – N° du dossier 2013/007

INTIMES :

Monsieur Q X

né le XXX au XXX

XXX

XXX

Madame K L épouse X

née le XXX à Bonnetable

XXX

XXX

Représentés par Me Ludovic GAUVIN de la SARL LEXCAP-BDH, avocat au barreau d’ANGERS – N° du dossier 13200583

INTIME SUR APPEL PROVOQUE

Monsieur U E

né le XXX à ANGERS

XXX

XXX

XXX

Représenté par Me Philippe HUVEY de la SCP HUVEY PAYE, avocat au barreau d’ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue publiquement, à l’audience du 02 Décembre 2014 à 14 H 00, Monsieur HUBERT, Président de chambre ayant été préalablement entendu en son rapport, devant la Cour composée de :

Monsieur HUBERT, Président de chambre

Madame GRUA, Conseiller

Monsieur CHAUMONT, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Monsieur Y

Greffier lors du prononcé : Madame F

ARRET : Contradictoire

Prononcé publiquement le 20 janvier 2015 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Louis-Denis HUBERT, Président de chambre et par AK F, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

XXX

FAITS ET PROCÉDURE

M. Q X et Mme K X (les époux X) sont propriétaires d’une maison située 284 ter rue des Banchais à Angers (Maine-et-Loire). Ils sont voisins de M. M C et de Mme AJ-AK AL épouse C (les époux C) propriétaires, au XXX, d’une maison entourée d’un jardin et d’une dépendance en limite des deux fonds.

Déplorant que les racines de peupliers situés dans le jardin des époux X dégradaient leur jardin ainsi que la dalle de leur dépendance, les époux C ont, le 19 janvier 2010, fait une déclaration de sinistre à leur assureur, la MAIF.

Le 25 mars 2010, les époux X ont fait abattre leurs peupliers par la SARL Chiron.

Une réunion d’expertise amiable contradictoire s’est tenue le 24 Avril 2010 à l’issue de laquelle il a notamment été noté qu’un dessouchage était prévu courant mai.

Le 18 mai 2010, les époux X ont fait rogner par M. U Z les six souches ainsi que quelques racines apparentes.

A la demande des époux C ayant constaté durant l’été 2010 une aggravation des désordres et la multiplication des rejets à partir des racines des arbres abattus, une réunion d’expertise amiable a été tenue le 12 janvier 2011 en présence de la société Chiron et de M. Z.

Sur la base du rapport d’expertise amiable du 14 janvier 2011, la GMF, assureur des époux X, a accepté de verser en février 2011 aux époux C la somme de 7 691,00 euros pour la remise en état de la pelouse (2 049,00 euros), la réfection de l’allée en ardoise et du dallage (5 642,00 euros), ainsi que celle de 150,00 euros pour la remise en état de la dépendance des époux C.

Se plaignant à nouveau de la multiplication de rejets de peupliers qu’ils imputaient à l’absence de dessouchage et de dévitalisation des racines et invoquant l’insuffisance des indemnités allouées par la compagnie d’assurances, les époux C ont, par acte d’huissier du 9 novembre 2011, fait assigner les époux X au visa de l’article 544 du code civil aux fins d’obtenir le paiement des sommes suivantes :

5 828,74 euros correspondant au surplus du montant des travaux restant à effectuer pour remettre en état intégralement leur propriété,

2 000,00 euros pour trouble de jouissance,

1 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Les époux X ont appelé en garantie M. U Z.

Par jugement en date du 26 novembre 2012 le tribunal d’instance d’Angers a :

— débouté les époux C de l’intégralité de leurs demandes fins et prétentions ;

— condamné les époux C à payer aux époux X la somme de 1 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— débouté les époux C de leurs autres demandes plus amples ou contraires ;

— condamné les époux C aux entiers dépens.

M. M B et Mme AJ-AK AL épouse B ont interjeté appel de ce jugement le 29 janvier 2013.

Les parties ont conclu.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 novembre 2014 .

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement

— du 6 mars 2013 pour M. M B et Mme AJ-AK AL épouse B,

— du 21 juin 2013 pour M. U E,

— du 9 août 2013 pour M. Q X et Mme K X,

qui peuvent se résumer ainsi qu’il suit.

Les époux C demandent à la cour

— d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

— de condamner in solidum les époux X à leur verser avec intérêts au taux légal à compter de la demande, la somme de 5 828,74 euros selon décompte ci-après :

— remise en état du jardin (moyenne des devis Naveau, Linea Verde, S T) : 11'984,33 euros,

— remise en état de la dépendance : 1 685,41 euros soit :

devis Tuzelet 525,74 euros,

devis Bricaud 1 159,66 euros

soit un total de 13'669,74 euros et, après déduction de l’acompte de 7 841,00 euros, un solde de 5 828,74 euros ;

— de condamner in solidum et sous astreinte de 500,00 euros par jour de retard à compter du 15e jour suivant la signification de l’arrêt à intervenir, les époux X à faire réaliser par un professionnel les travaux de dessouchage et de dévitalisation de leurs racines présentes dans leur sous-sol, ce de façon à éviter que de nouveaux rejets portent atteinte à la propriété des époux C ;

— de condamner in solidum les époux X à verser aux époux C une indemnité de 3000 euros en réparation de leurs préjudices de jouissance ;

— de condamner in solidum les époux X à leur verser une indemnité de 3 000,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— de condamner in solidum les époux X aux entiers dépens ;

Subsidiairement au cas où la cour ne s’estimerait pas suffisamment informée, par arrêt avant-dire droit,

— de commettre un expert judiciaire avec pour mission notamment de décrire la nature et l’importance des désordres, d’en déterminer les causes, de dire si le dessouchage et la dévitalisation des racines de la propriété C s’imposaient l’issue de la réunion d’expertise du 12 janvier 2011, de dire si ces travaux ont été effectivement et efficacement réalisés et d’en préciser la date, de dire quels travaux sont nécessaires pour procéder à la réfection des désordres affectant notamment le jardin, l’allée, le muret et la dépendance des époux C, de dire si, après l’exécution de ces travaux de remise en état, l’immeuble restera affecté d’une moins-value et de donner son avis sur son importance, d’évaluer les préjudices subis du fait des désordres constatés (trouble de jouissance notamment).

Les époux C soutiennent que l’aggravation du sinistre résulte du fait que les époux X ont volontairement ignoré les conclusions des experts préconisant, dès le 12 janvier 2011, le desssouchage et la dévitalisation des racines des peupliers abattus comme seuls moyens de tuer les racines en sous-sol. Ils font valoir que l’arrachage des racines dans leur sous-sol laisserait perdurer la source des racines et des rejets se trouvant dans le sous-sol du fonds des époux X. Ils se fondent sur le rapport du cabinet G-Esteve pour affirmer que l’arrachage des souches et celui des grosses racines ou la dévitalisation des souches et des racines sur le terrain des époux X est un préalable indispensable au nettoyage de leur propre sous-sol. Ils déplorent que les intimés n’ont pas procédé au dessouchage demandé dans leur courrier du 30 mars 2010 et prévu lors de la réunion du 24 avril 2010 pour le mois suivant.

Ils insistent aussi sur le fait qu’aucune dévitalisation n’a été réalisée malgré le rapport d’expertise amiable du 12 janvier 2011 et les courriers des 12 et 18 avril 2011 de la GMF et de la MAIF. Les époux C ajoutent que les entreprises Bricaud et S T ont fait de la dévitalisation des souches et de la résolution du problème racinaire un préalable à la remise en état de leur terrain. Ils relèvent que les intimés n’ont fait état de l’application d’un produit destructeur de souches par leurs propres soins que dans leurs conclusions du 14 août 2012 en produisant seulement deux factures d’achat d’un tel produit en date du 10 juin 2011. Ils constatent que la quantité de produit achetée est manifestement insuffisante à la lecture de sa notice d’utilisation. Ils relèvent aussi que les époux X n’ont pas fait réaliser le dessouchage pour lequel ils avaient obtenu un devis de 865,10 euros TTC le 20 juin 2011 de la société Terre Decape. Les époux C font observer que rien ne prouve que la dévitalisation des souches par l’application d’un produit a pour effet de dévitaliser les racines en sous-sol.

S’agissant du coût des réparations, les appelants soutiennent qu’il ne peut leur être reproché de n’avoir pas mandaté la société Chiron pour l’exécution des travaux de remise en état sur la base de son devis du 5 janvier 2011 alors que les époux X n’avaient pas nettoyé efficacement leur sous-sol. Ils justifient ainsi leur production de devis actualisés pour les mêmes travaux mais prenant en considération les nouveaux dégâts occasionnés par les racines et les rejets notamment au muret. Ils estiment nécessaire de changer la terre infestée de racines et de gravats du fait de la future réfection de la terrasse et de l’allée, de refaire les volets de leur dépendance endommagés par les peupliers, de planter divers arbustes et de réparer la déformation et la fissuration de la dalle en y ajoutant la pose d’une natte de désolidarisation.

Les époux C sollicitent en outre la condamnation sous astreinte des intimés à faire effectuer et à justifier du dessouchage effectif et de la dévitalisation des racines provenant des souches, ainsi qu’à leur payer la somme de 3 000,00 euros en indemnisation de leur impossibilité de jouir paisiblement de leur jardin et de leur dépendance depuis plus de 3 ans.

Les époux X demandent à la cour

— de dire les époux C non fondés en leur appel ainsi qu’en l’ensemble de leurs demandes fins et conclusions et de les en débouter ;

— de confirmer le jugement entrepris ;

Subsidiairement si par impossible la cour faisait droit aux demandes des époux C,

— de condamner M. U Z à garantir les époux X de l’intégralité des condamnations qui viendraient à être prononcées à leur encontre ;

À titre infiniment subsidiaire,

— de dire que les frais d’expertise seront à la charge des époux C ;

en tout état de cause,

— de condamner in solidum les époux C et à défaut M. U Z à verser aux époux X une indemnité de 3 500,00 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

et rejetant toutes prétentions contraires comme non recevables en tout cas non fondées,

— de condamner in solidum les époux C et à défaut M. U Z aux entiers dépens de première instance et d’appel avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Les époux X rappellent que les époux C ont été intégralement indemnisés à hauteur de 7 826,00 euros à l’issue de la réunion d’expertise contradictoire du 12 janvier 2011 qui a pris en compte les nouveaux dommages constatés en juillet 2010. Ils contestent de nouveaux troubles anormaux de voisinage depuis janvier 2011. Ils considèrent que le coût des travaux complémentaires que les époux C affirment nécessaires a été expressément exclu par les experts le 12 janvier 2011 et que les appelants ne peuvent légitimement prétendre faire procéder ni à la réfection intégrale de leur jardin et de leur muret, ni des volets de leur dépendance. Il convient seulement de reboucher les fissures de la dalle de cette dépendance. Ils imputent à faute aux époux C le fait de n’avoir pas fait dévitaliser leurs propres racines et d’avoir volontairement laissé les rejets devenir de véritables arbres comme en atteste le procès-verbal de constat du 5 septembre 2012. Ils relèvent que M. G a indiqué que la dévitalisation de la souche n’ayant d’effet qu’après plusieurs mois, il aurait fallu aussi dévitaliser les racines et intervenir chez les époux C.

Les époux X affirment avoir fait procéder au rognage des souches de peupliers et avoir procédé eux-mêmes à la dévitalisation des racines par application en juin 2011de 300 ml de produit destructeur des souches comme en témoigne le fait que leur propre jardin est désormais exempt de rejets de peupliers. Ils estiment que les rejets devenus arbres présents sur le fonds des époux C ne font qu’accroître le nombre des racines et provoquent eux-mêmes de nouveaux rejets. Ils en déduisent que la prolifération des rejets sur le fonds des époux C ne résulte désormais que de leur propre inaction. Ils font valoir que le dessouchage est inutile puisqu’il n’y a plus de repousses sur leur terrain et que celles qui sont présentes sur le terrain des époux C sont des arbres autonomes n’ayant plus de liens avec les anciennes racines des peupliers abattus. En outre, ils insistent sur le fait que ce dessouchage serait impossible puisqu’aucun engin mécanique ne peut accéder à leur jardin et que, selon M. G, il ne garantirait pas l’arrêt des rejets sur le fonds voisin. Les époux X considèrent qu’il ne peut leur être reproché aucune négligence puisqu’ils ont procédé à l’abattage des peupliers puis au rognage des souches et à leur dévitalisation. Ils en déduisent n’être pas débiteurs d’une indemnisation au titre du préjudice de jouissance invoqué par les époux C.

À titre subsidiaire, les époux X sollicitent la garantie de M. Z dont l’action de rognage des souches s’est avérée insuffisante et n’a pas mis fin aux rejets et qui, en sa qualité de professionnel, a manqué à son devoir de conseil sur les travaux à entreprendre pour mettre fin à ces rejets sur la propriété voisine ainsi qu’à son devoir d’information sur le risque important et prévisible d’apparition de ces rejets malgré le rognage des souches dont le seul examen permettait de déduire l’importance du système racinaire pouvant occasionner des dommages au fonds voisin.

Les époux X estiment inutile l’expertise sollicitée à titre infiniment subsidiaire par les appelants.

M. U E demande à la cour, au visa des articles 1147 et 1384 alinéa 1 du code civil,

Au principal,

— de confirmer le jugement entrepris ;

en conséquence,

— de dire et de juger pour les causes ci-dessus énoncées que les époux X et les époux C sont irrecevables, à tout le moins mal fondés, en l’ensemble de leurs demandes fins et conclusions ;

— de dire n’y avoir lieu à l’organisation de nouvelles mesures d’instruction ;

— de confirmer le jugement ;

Subsidiairement, dans l’hypothèse où la cour d’appel s’estimerait insuffisamment éclairée sur le litige devrait ordonner une nouvelle mesure d’expertise,

— de lui donner acte qu’il formule à les plus expresses réserve et protestations quant aux éventuelles responsabilités ;

— d’ordonner une expertise aux frais avancés des époux C, à défaut des époux X ;

en tout état de cause,

— de condamner les époux X ou toutes autres parties défaillantes à lui payer la somme de 3 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— de condamner les époux X ou toutes autres parties défaillantes aux entiers dépens de la procédure avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

M. U Z rappelle qu’il est intervenu en mai 2010 après une expertise contradictoire en avril 2010 et que le rapport d’expertise du 12 janvier 2011 indique que seul l’arrachage des racines de gros diamètre présentes dans le sol du fonds des époux C depuis plusieurs années aurait pu empêcher l’émergence des rejets sur celui-ci et que le lien de causalité entre l’absence d’avertissement qui lui est reproché et les dommages n’est pas établi. Il rappelle aussi que le même rapport a préconisé la dévitalisation des racines mais que les époux X n’ont fait procéder ni à cette dévitalisation ni à l’arrachage des racines. Il fait valoir que la dévitalisation doit être effectuée à l’automne avant l’abattage des arbres et qu’il appartenait à l’entreprise Chiron d’y procéder ou de mettre en garde elle-même les époux X. Il affirme avoir ignoré que son intervention était destinée à réduire les problèmes de rejets existant sur le terrain des époux C dissimulé à son regard par une dépendance de trois mètres de large, et non pas seulement à permettre la plantation de gazon dans le jardin des époux X. Il ajoute qu’il ressort du procès-verbal d’expertise du 12 janvier 2011 qu’il a informé ces derniers que le rognage de la souche n’entraînait pas la dévitalisation des racines. En outre, M. Z soutient qu’il n’existe aucun lien de causalité entre le manquement qui lui est reproché et le dommage subi par les époux C au titre de désordres apparus au printemps et à l’été 2011 qui ne sont dus à l’inaction des époux X depuis le rapport d’expertise du 12 janvier 2011.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il n’est pas contesté que les racines des peupliers plantés sur la propriété des époux X se sont étendues dans le sous-sol de la propriété des époux C en passant sous leur dépendance provoquant des rejets endommageant le dallage de celle-ci ainsi que leur pelouse, et leur allée en ardoises.

Ces désordres constituent un trouble anormal de voisinage faisant peser sur les époux X une responsabilité sans faute fondée sur le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui de trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage.

Sur la base du rapport d’expertise amiable du 13 janvier 2011, les époux C ont été indemnisés à hauteur de 7 841,00 euros. Cependant cette indemnisation ne leur interdit pas de réclamer la réparation intégrale des dommages à raison des fautes qu’ils allèguent à l’encontre des époux X.

Il leur appartient donc de rapporter la preuve de ces fautes, des préjudices non encore indemnisés qu’elles leur ont causés et du lien de causalité directe entre ces fautes et ces préjudices.

Les époux C imputent à l’inaction des époux X, depuis janvier 2011, l’aggravation de leur dommage puisqu’ils n’ont pas tenu compte des conclusions des experts préconisant le dessouchage et la dévitalisation des racines des peupliers abattus.

Le rapport d’expertise amiable du 13 janvier 2011 établi par les cabinets Elex et Texa assistés du cabinet G en qualité de sapiteur constate que, malgré l’abattage des peupliers effectué en mars 2010 par l’entreprise Chiron et le rognage des souches effectué en mai 2010 par M. E, les époux C ont subi en juillet 2010 un soulèvement du dallage autobloquant, l’apparition de nouveaux rejets sur ce dallage et sur leur pelouse ainsi que le développement des rejets déjà présents dans le sol. Le rapport indique : « il y avait lieu de dévitaliser les racines pour empêcher tous rejets et reprises. » Le rapport du cabinet G en date du 14 janvier 2011 précise que la prolifération des rejets de peupliers résulte de leur abattage, la sève sous pression étant redirigée vers les nombreux bourgeons dormants situés sur les racines . Il ajoute que le système racinaire des peupliers s’est, « pour une raison inconnue, développé de façon optimale et privilégiée sur le terrain des époux C » . Il estime que la seule solution qui aurait pu mettre un terme au sinistre aurait été la suppression des racines mais que cette solution s’avère matériellement et financièrement inenvisageable. Il conclut donc qu’il aurait fallu non seulement dévitaliser la souche mais aussi les racines en intervenant aussi chez les époux C.

Il appartient donc aux époux X de rapporter la preuve que la dévitalisation des souches et des racines a été effectuée dans les meilleurs délais après janvier 2011 et qu’elle a été réalisée dans des conditions optimales d’efficacité compte tenu des dommages évolutifs subis par l’immeuble des époux C dont ils avaient eu connaissance dans le cadre des opérations d’expertise.

Or les intimés ne prouvent pas avoir procédé à une telle dévitalisation dans ces conditions.

En effet, ils n’ont pas jugé utile d’avoir recours à un professionnel. Depuis août 202, ils affirment avoir procédé eux-mêmes à la dévitalisation des souches et des racines et prétendent justifier celle-ci en produisant seulement des factures d’achat, le 2 mai et le 5 juin 2011, de produits « BHS Dévitalisant de souches » et « Bayer Jardin Dévitalisant » qui doivent être appliqués peu après la coupe des arbres et de préférence à l’automne et dont rien ne garantit qu’ils étaient appropriés à la situation.

Cette seule affirmation et ces factures ne permettent de prouver ni la réalité de la dévitalisation alléguée, ni la réunion des conditions de son efficacité alors que les époux X connaissaient les enjeux de cette dévitalisation qui leur avait été présentée par les experts comme le seul remède efficace pour mettre fin à l’envahissement dommageable du fonds des époux C par les rejets de leurs peupliers abattus .

En outre, rien ne permet d’ affirmer que les époux X ont procédé à l’indispensable dévitalisation des racines elles-mêmes.

La cour fera donc droit à la demande des époux C aux fins de voir condamner les époux X à faire procéder par un professionnel dans les trois mois suivant la signification de l’arrêt à peine d’astreinte aux travaux de dévitalisation des souches et des racines présentes à la surface et dans le sous-sol de leur fonds.

L’abstention fautive des intimés a provoqué des dommages sur l’immeuble des époux C qui ont été constatés par Me AH-AI huissier de justice le 5 septembre 2012.

Ce dernier relève :

— au niveau de la dépendance au fond du jardin :

des fissures de 1 mètre à 2,20 mètres sur la dalle béton,

la surélévation de cette dalle sur le côté gauche,

l’impossibilité de fermeture du volet gauche en raison de rejets de peupliers

— dans le jardin :

de multiples rejets de peupliers dont la hauteur dépasse 5 mètres dans l’allée en ardoises et sur la pelouse,

la présence de racines multiples sur trois niveaux d’un diamètre variant entre 7 et 11 centimètres,

— sur la terrasse :

deux rejets soulevant et dégradant les dalles autobloquantes sur le côté gauche,

un rejet de peupliers sur le côté droit,

un petit rejet au milieu,

l’aspect incurvé de la surface de la terrasse.

Les constatations effectuées dans le cadre de l’expertise amiable n’ayant, avant janvier 2011, fait état que de rejets importants sur la pelouse, l’allée en ardoise et le dallage de pavés autobloquants ainsi que de micro-fissurations du dallage de la dépendance dont la reprise avait été évaluée à 150 euros, le constat d’huissier du 5 septembre 2012 prouve une aggravation des préjudices subis par les époux C qui résulte du développement ininterrompu du système racinaire des peupliers abattus faute de dévitalisation réelle et efficace des souches et des racines des arbres sur le terrain des époux X.

Ces derniers ne peuvent utilement reprocher aux appelants de n’avoir pas procédé à l’éradication des rejets au fur et à mesure de leur apparition sur leur terrain alors que celle-ci résulte de leur inaction fautive qui les oblige à réparation intégrale des dommages provoqués par la prolifération des repousses de leurs arbres chez leurs voisins . Par ailleurs, il ne peut s’exonérer de cette obligation au prétexte fallacieux qu’ils sont eux-mêmes parvenus à en débarrasser leur propre fonds alors que l’expert du cabinet G relève que le systèmes racinaires des arbres s’est développé surtout vers le fonds des époux C.

En outre, les rejets qui envahissent le terrain des appelants ont incontestablement pour origine les peupliers des époux X et rien ne permet d’affirmer qu’ils se développent aujourd’hui de manière autonome.

Les appelants soutiennent que, comme l’entreprise Bricaud auteur devis pour la réfection du sol de la dépendance, toutes les entreprises qu’ils ont contactées en vue d’entreprendre les travaux de réparation s’y sont refusés avant que soit résolu le problème lié aux racines des arbres abattus. Un tel refus apparaît parfaitement justifié à la lecture des conclusions des experts amiables et les époux C n’encourent aucun reproche lorsqu’ils font de la dévitalisation des souches et des racines qui auraient dû être effectuée depuis janvier 2011 par les époux X, la condition préalable des travaux de remise en état de leur immeuble.

Les époux C peuvent donc à bon droit prétendre à la réparation intégrale des préjudices résultant de l’abstention fautive des époux X.

La cour trouve dans les conclusions de l’expertise amiable, dans le procès-verbal de constat du 5 septembre 2012 et dans l’examen des devis des entreprises Chiron, Naveau, Linea Verde, S T, Tuzelet et Bricaud motifs suffisants pour condamner les époux X, compte tenu de la somme de 7 841,00 euros antérieurement versée, à payer aux époux C la somme de 3 414,00 euros pour la remise en état du jardin, du dallage autobloquant, de l’allée en ardoises, l’enlèvement des racines, l’apport de terre, ainsi que la reprise de la dalle de la dépendance déformée et fissurée.

Par contre, les époux C ne peuvent prétendre être indemnisés ni au titre de la réfection du muret, ni au titre de l’achat d’arbustes, ni au titre du carrelage et de la réfection des volets de la dépendance, travaux dont ils ne démontrent pas qu’ils sont rendus nécessaires par la prolifération des repousses de peupliers générée à partir du fonds des époux A.

Au titre de leur préjudice de jouissance résultant des tracas et des démarches liés au litige et aux travaux à venir ainsi que de leur impossibilité de jouir paisiblement leur propriété, il sera alloué aux époux H la somme de 1 500,00 euros.

Invoquant un manquement à son obligation de résultat et à son devoir d’information et de conseil, les époux X sollicitent la garantie de M. U Z.

Cependant, il ne peuvent se décharger de leur propre faute en invoquant celle de ce dernier qui a affirmé le 12 janvier 2011, devant les experts amiables, avoir précisé à M. X que « le rognage de la souche ne fait pas la dévitalisation des racines. » Cette affirmation n’a ultérieurement pas été contestée. Par ailleurs, M. Z est intervenu à la demande des intimés pour effectuer le rognage des six souches de peupliers afin de permettre le réengazonnement de leur jardin et les époux X ne rapportent pas la preuve qu’ils l’ont informé que son intervention avait pour but de mettre un terme à la prolifération des racines des arbres abattus dans le sous-sol du fonds voisin alors que cette prolifération et les rejets de peupliers n’étaient pas visibles à partir du jardin des époux X. Dans ces conditions, il ne saurait utilement être reproché à M. Z l’insuffisance ou l’inefficacité de sa prestation ainsi qu’un manquement à son devoir de conseil.

En outre, il y a lieu de relever que le rognage des souches a été effectué le 18 mai 2010 alors que les désordres sont apparus dans toute leur ampleur à partir de l’été 2010. Par ailleurs, les époux X ne démontrent pas le lien de causalité directe entre le manquement de M. Z à son devoir d’information et de conseil et l’aggravation des préjudices des époux C objet de la procédure alors que cette aggravation résulte de leur propre carence dans la mise en oeuvre de la dévitalisation préconisée par les experts amiables en janvier 2011.

En conséquence, la cour déboutera les époux X de leur demande de garantie.

La demande d’expertise complémentaire sera rejetée puisque le rapport d’expertise amiable et celui du sapiteur sont suffisamment argumentés et circonstanciés pour permettre la résolution du litige.

Les époux X succombant en cause d’appel seront condamnés aux dépens ainsi qu’à payer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 3 000,00 euros aux époux C et à M. U Z.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement rendu le 26 novembre 2012 par le tribunal d’instance d’Angers ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE in solidum M. Q X et Mme K X à payer à M. M B et Mme AJ-AK AL épouse B pris ensemble la somme de 3 414,00 euros en réparation de leur préjudice matériel ;

CONDAMNE in solidum M. Q X et Mme K X à payer à M. M B et Mme AJ-AK AL épouse B pris ensemble la somme de 1 500,00 euros en réparation de leur préjudice de jouissance ;

CONDAMNE in solidum M. Q X et Mme K X à faire réaliser par un professionnel les travaux de dévitalisation des souches des peupliers abattus ainsi que de leurs racines présentes à la surface et dans le sous-sol de leur fonds dans un délai de quatre mois à compter de la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte de 30 euros par jour de retard pendant six mois ;

DÉBOUTE M. Q X et Mme K X de l’intégralité de leurs demandes en ce compris leur demande de garantie formée à l’encontre de M. U E ;

DÉBOUTE M. M B et Mme AJ-AK AL épouse B ainsi que M. U E de leurs demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE M. Q X et Mme K X à payer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre de leurs frais irrépétibles de procédure de première instance et d’appel, la somme de 3 000,00 euros à M. M B et Mme AJ-AK AL épouse B pris ensemble , et la même somme à M. U E ;

CONDAMNE M. Q X et Mme K X au paiement des entiers dépens d’appel, lesquels seront recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP HUVEY-PAYE qui le sollicite.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

C. F L.D. HUBERT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel d'Angers, 20 janvier 2015, n° 13/00347