Cour d'appel de Bordeaux, 8 novembre 2016, n° 14/04481

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 8 nov. 2016, n° 14/04481
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 14/04481
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bordeaux, 15 mai 2014, N° 2011F001492011F001230

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE


ARRÊT DU : 08 NOVEMBRE 2016

(Rédacteur : Monsieur Robert CHELLE,
Président)

N° de rôle : 14/04481

La SELARL LAURENT MAYON

c/

— Monsieur X Y

— La SAS MICHEL SIMOND
DEVELOPPEMENT

— La SAS TRANSACTIONS COMMERCIALES

Nature de la décision : AU
FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour :
jugement rendu le 16 mai 2014 (R.G. 2011F00149 2011F001230) par la 7e Chambre du Tribunal de Commerce de
BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 23 juillet 2014

APPELANTE :

La SELARL LAURENT MAYON, Mandataire judiciaire, en qualité de Liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL ENORA, domiciliée
XXXXXXXXX – 33081
BORDEAUX CEDEX

représentée par Maître Z A substituant
Maître B C, avocats au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

Monsieur X Y, demeurant XXX TOURS

représenté par Maître D E de la SELARL
LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX, et assisté de Maître
F G de la SELARL
FERREIRA-G-EVREUX-LEJEUNE, avocat au barreau de TOURS

La SAS MICHEL SIMOND DEVELOPPEMENT, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité en leur établissement, sis Parc Innolin 5, rue du Golf Bât E2 – 33700 MERIGNAC

L a S A S T R A N S A C T I O N S C O M M H , p r i s e e n l a p e r s o n n e d e s e s

représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis Parc Innolin 5, rue du
Golf Bât E2 – 33700 MERIGNAC

représentées par Maître Eric-Elinam TSE, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 786 du Code de
Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 18 octobre 2016 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Robert CHELLE, Président chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Robert CHELLE, Président,

Madame Elisabeth FABRY, Conseiller,

Monsieur Dominique PETTOELLO, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur I GOUDOT

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du
Code de Procédure Civile.

' ' '

FAITS ET PROCÉDURE

La liquidation judiciaire de la société Enora, qui avait une activité de restauration rapide 12 rue des Remparts à Bordeaux, a été prononcée le 3 mars 2010 par le tribunal de commerce de
Bordeaux, qui a désigné la société Laurent
Mayon en qualité de liquidateur.

En vue de la cession des actifs de la société, le mandataire liquidateur a reçu une offre de reprise du 19 avril 2010 au nom de M. Y, par lettre se référant à « TC Transactions » et signée de M. J K, pour des actifs dépendant de la liquidation judiciaire, pour un montant total de 202 000 euros, soit 20 200 euros pour les éléments corporels, en l’espèce l’ensemble du matériel, et 181 000 euros pour les éléments incorporels.

Une ordonnance de vente de gré à gré en ce sens a été rendu par le juge-commissaire le 4 mai 2010.

Par un courriel du 6 mai 2010, M. K a confirmé l’offre et fourni des détails complémentaires.

Toutefois, malgré plusieurs somations à M. Y, la vente ainsi autorisée n’est pas intervenue.

En définitive, la vente était autorisée le 1er décembre 2010 pour un montant de 40 000 euros à MM. L et M N.

Par actes des 27 janvier et 23 novembre 2011, le mandataire liquidateur a assignée M. Y ainsi que les sociétés
Michel Simond Developpement (MSD) et Transactions
Commerciales devant le tribunal de commerce de Bordeaux aux fins de voir retenir leur responsabilité dans l’échec de la vente et de les voir condamner in solidum à lui payer la somme de 160 000 euros au principal.

Par jugement du 16 mai 2014, le tribunal de commerce de
Bordeaux a mis hors de cause les sociétés MSD et Transactions Commerciales et condamné M. Y à payer à la société
Mayon la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts, outre intérêts à compter du 27 janvier 2011, ainsi que la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Par déclaration du 23 juillet 2014, la société
Laurent Mayon ès-qualités a interjeté appel de cette décision.

PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions déposées en dernier lieu le 22 octobre 2014, auxquelles il convient de se reporter pour le détail de ses moyens et arguments, la société Laurent Mayon, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Enora, demande à la cour de :

Statuant en application des dispositions de l’article L 642 – 18 du code de commerce et des articles 1134, 1147, 1149, 1153 alinéa 3, 1382 et 1985 du code civil :

DIRE ET JUGER la société concluante ès qualités recevable et bien fondée en son appel,

REFORMER le jugement entrepris en ce qu’il a limité le montant des dommages et intérêts accordés à la société concluante ès qualités à la somme de 40 000 majorée des intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2011 et condamner Monsieur X Y à lui payer la somme de 160 000 à titre de dommages et intérêts outre les intérêts au taux légal à compter du 13 septembre 2010,

d a n s l ' h y p o t h è s e o ù l a C o u r j u g e r a i t q u e l e s s o c i é t é s M O M PPP et
TRANSACTIONS COMMERCIALES SAS n’avaient pas de mandat valable ou ont commis des fautes dans l’exécution de leur mandat, LES
CONDAMNER in solidum avec Monsieur X
Y ou les unes à défaut de l’autre à payer à la société concluante ès qualités ladite somme de 160 000 à titre de dommages et intérêts augmentée des intérêts au taux légal à compter du 13 septembre 2010.

en toute hypothèse, CONDAMNER tout succombant au paiement d’une indemnité de 5 000 sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Le mandataire liquidateur de la société Enora fait notamment valoir que la vente est parfaite dès l’ordonnance du juge-commissaire l’autorisant ; que M. Y était tenu à compter de l’ordonnance de régulariser l’acte de cession et de payer le prix ; qu’en se soustrayant à ses obligations, il a engagé sa responsabilité ; qu’en l’espèce, la liquidation judiciaire a perdu le bénéfice du versement du prix de vente fixé à 202 000 euros, et a conservé le bien vendu qu’elle n’a pu en définitive céder à nouveau qu’au prix de 40 000 euros ; que le principe est la réparation intégrale du préjudice.

Par conclusions déposées en dernier lieu le 22 décembre 2014, auxquelles il convient de se reporter pour le détail de ses moyens et arguments, M. Y demande à la cour de :

Vu les dispositions d’ordre public de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et du décret n°72-678 du 20 juillet 1972

DIRE ET JUGER bien fondée et recevable Monsieur X Y en son appel incident.

INFIRMER le jugement en ce qu’il a déclaré que Monsieur X Y a régulièrement confié mandat aux sociétés
MICHEL SIMOND DEVELOPPEMENT SAS et
TRANSACTIONS COMMERCIALES SAS

INFIRMER le jugement en ce qu’il a retenu la responsabilité de Monsieur X
Y dans l’échec de la cession d’éléments d’actifs de la société ENORA SARL.

EN CONSEQUENCE,

DEBOUTER la SELARL LAURENT MAYON de toutes ces demandes, fins et conclusions formulées à l’encontre de Monsieur Y,

D E B O U T E R t a n t l a S A S M O M Q M
R q u e l a S A S
TRANSACTIONS COMMERCIALES de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de Monsieur Y,

CONDAMNER solidairement la SELARL LAURENT MAYON es-qualité et la SAS
TRANSACTIONS COMMERCIALES et MICHEL SIMOND au paiement de la somme de 4.000,00 Euros au titre de l’article 700 du
CPC.

CONDAMNER solidairement les mêmes aux entiers dépens de première instance et d’appel, lesquels seront liquidés par la SCP FERREIRA-G-EVREUX-LEJEUNE conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de
Procédure Civile.

M. Y fait notamment valoir l’absence de mandat de la société Michel Simond ; que les intimés ont la qualité d’agent immobilier ; que la société Michel Simond devait respecter les dispositions spéciales de la loi Hoguet ; que la preuve du mandat reçu ne pouvait être que littérale par l’effet de ces dispositions d’ordre public ; que la remise du mandat est exigée ad validitatem ; que M. Y n’a jamais été en contact avec la société Transactions
Commerciales ; que ni la société Michel Simond ni la société Transactions Commerciales n’a agi le 19 avril 2010 en vertu d’un pouvoir spécial ou d’un mandat de sa part ; qu’il ne peut donc voir sa responsabilité engagée quant à l’absence de réitération de l’acte de cession ; que l’établissement du chèque de 20 200 euros le 18 mai 2010 démontre qu’il entendait bénéficier d’une conditions suspensive liée à l’obtention d’un prêt, le montant étant « 10 % du prix de vente, soit un dépôt de garantie classique pour une vente sous condition suspensive » ; que la société Laurent Mayon a elle aussi agi avec une particulière légèreté en ne vérifiant pas l’existence d’un mandat et en introduisant la présente instance ; que la société Laurent Mayon ne démontre aucunement le lien de causalité direct entre l’échec de la cession et la baisse du prix de vente des actifs plus de 8 mois après.

Par conclusions déposées en dernier lieu le 26 septembre 2016, auxquelles il convient de se reporter pour le détail de ses moyens et arguments, la société Michel Simond
Développement (MSD) demande à la cour de :

PRINCIPALEMENT :

Confirmer en tous points la décision déférée.

Condamner la SELARL LAURENT MAYON ès-qualité à verser à la SAS MICHEL
SIMOND DEVELOPPEMENT, la somme de 1.500 sur le fondement de l’article 700 du
CPC, outre les entiers dépens, en ce compris les éventuels frais d’exécution de l’arrêt à intervenir.

Condamner Monsieur X Y à verser à la SAS MICHEL
SIMOND
DEVELOPPEMENT, la somme de 1.500 sur le fondement de l’article 700 du CPC, outre les entiers dépens, en ce compris les éventuels frais d’exécution de l’arrêt à intervenir.

SUBSIDIAIREMENT :

Dire et juger que les demandes formulées par la SELARL
LAURENT MAYON ès-qualité à l’encontre de la SAS MICHEL SIMOND DEVELOPPEMENT sont irrecevables car non fondées,

En conséquence,

Débouter la SELARL LAURENT MAYON ès-qualité des demandes par lui formulées à l’encontre de la SAS MICHEL SIMOND
DEVELOPPEMENT.

Condamner la SELARL LAURENT MAYON ès-qualité à verser à la SAS MICHEL
SIMOND DEVELOPPEMENT, la somme de 3.000 sur le fondement de l’article 700 du
CPC, outre les entiers dépens, en ce compris les éventuels frais d’exécution de l’arrêt à intervenir.

SUBSIDIAIREMENT ENCORE :

Dire et juger que Monsieur X
Y a donné un mandat régulier à la SAS
MICHEL SIMOND DEVELOPPEMENT,

En conséquence, mettre la SAS MICHEL SIMOND
DEVELOPPEMENT hors de cause,

Ou, en cas de condamnation,

D i r e q u e M o n s i e u r S e r g e C L A V E R I E d e v r a l a S A S M O M SSS, relever totalement indemne

Condamner Monsieur X Y à verser à la SAS MICHEL
SIMOND
DEVELOPPEMENT, la somme de 3.000 sur le fondement de l’article 700 du CPC, outre les entiers dépens, en ce compris les éventuels frais d’exécution de l’arrêt à intervenir.

La société MSD fait notamment valoir que l’assignation a été délivrée à la SAS
Michel
Simond Développement immatriculée au RCS de Bonneville n° 418 101 267 ayant son siège social à la Roche-sur-Foron (Haute-Savoie), et qu’elle n’a aucun établissement à Mérignac mais tout au plus une société simplement affiliée ;
qu’elle doit être mise hors de cause comme l’a jugé le tribunal de commerce ; subsidiairement, que sa mise en cause vient de ce que la société Transactions Commerciales est affiliée au groupe Michel Simond Développement ;
que l’offre a bien été établie à la demande et sur les indications données par M. Y, et que la société Transactions Commerciales n’intervenait qu’en qualité de mandataire de M. Y ; que seul celui-ci doit voir sa responsabilité mise en cause.

Par conclusions déposées en dernier lieu le 26 septembre 2016, auxquelles il convient de se reporter pour le détail de ses moyens et arguments, la société Transactions Commercialesdemande à la cour de :

PRINCIPALEMENT :

Confirmer en tous points la décision déférée.

Y ajoutant,

Constatant le préjudice subi par la SAS TRANSACTIONS
COMMERCIALES,

Condamner Monsieur Y à verser à la SAS TRANSACTIONS COMMERCIALES, la somme de 3.000 en réparation dudit préjudice,

C o n d a m n e r l a S E L A R L L A U R R M T è s – q u a l i t é à v e r s e r à l a S A S
TRANSACTIONS COMMERCIALES, la somme de 1.500 sur le fondement de l’article 700 du CPC, outre les entiers dépens, en ce compris les éventuels frais d’exécution de l’arrêt à intervenir.

C o n d a m n e r M o n s i e u r S e r g e C L A V E R I E à v e r s e r à l a S A S T R A N S A C T I O N S
COMMERCIALES, la somme de 1.500 sur le fondement de l’article 700 du CPC, outre les entiers dépens, en ce compris les éventuels frais d’exécution de l’arrêt à intervenir.

SUBSIDIAIREMENT :

Dire et juger que Monsieur X
Y a donné un mandat régulier à la SAS
TRANSACTIONS COMMERCIALES,

En conséquence, mettre la SAS TRANSACTIONS COMMERCIALES hors de cause,

Ou, en cas de condamnation,

Dire que Monsieur X Y devra la SAS TRANSACTIONS COMMERCIALES, relever totalement indemne

Constatant le préjudice subi par la SAS TRANSACTIONS
COMMERCIALES,

Condamner Monsieur Y à verser à la SAS TRANSACTIONS COMMERCIALES, la somme de 3.000 en réparation dudit préjudice,

C o n d a m n e r M o n s i e u r S e r g e C L A V E R I E à v e r s e r à l a S A S T R A N S A C T I O N S
COMMERCIALES, la somme de 3.000 sur le fondement de l’article 700 du CPC, outre les entiers dépens, en ce compris les éventuels frais d’exécution de l’arrêt à intervenir.

La société Transactions Commerciales, après avoir repris l’historique de ses relations avec la société Enora d’une part, qui souhaitait vendre son fonds, et avec M. Y d’autre part, qui souhaitait s’installer à Bordeaux, fait notamment valoir :

à titre principal, que la décision qui a reconnu que M. Y lui avait donné mandat et l’a mise hors de cause doit être confirmée ;

à titre subsidiaire, que l’ensemble des pièces du dossier démontre qu’elle est intervenue dans cette affaire à la demande expresse de M. Y ; que l’offre de reprise des éléments d’actifs a été établie à sa demande et sur ses indications ; qu’il l’a par ailleurs validée ;
qu’elle-même n’est intervenue qu’en qualité de mandataire de M. Y ; que la présentation d’une offre de reprise ne nécessite pas un mandat ad litem ; que M. Y était en contact direct avec Me U représentant la société Mayon, ce qui valide de plus fort

le mandat donné ab initio à la société
Transactions Commerciales ; qu’il s’agit ici d’une offre de reprise des éléments d’actifs dépendant de la liquidation judiciaire de la société Enora, et que la loi Hoguet ne concerne en rien cette affaire ;

L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 septembre 2016.

Malgré les prescriptions de l’article 912 alinéa 3 du code de procédure civile qui l’imposent, M. Y, intimé et appelant incident, n’a pas déposé à la cour quinze jours avant la date fixée pour l’audience de plaidoiries le dossier comprenant les copies des pièces visées dans les conclusions.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les responsabilités dans l’échec de la cession d’actifs

Une offre datée du 19 avril 2010 de « reprise des éléments d’actifs dépendant de la liquidation judiciaire de la SARL ENORA (') par Monsieur X Y », présentée par « Nous, TC TRANSACTIONS, spécialistes de la transaction en fond de commerce sommes mandatés par M. X
Y (…) » et signée « J K, Directeur du
Cabinet », est parvenue au mandataire liquidateur (sa pièce n° 2). L’offre proposait un montant de 20 200 euros pour les éléments corporels et 181 000 euros pour les éléments incorporels.

Puis, un message électronique du 6 mai suivant est venu confirmer et apporter des détails supplémentaires à cette offre, toujours sous signature de M. K, « SAS TC
TRANSACTIONS ' Cabinet Michel Simond de Bordeaux ' Directeur
Général » (pièce n° 3 du mandataire).

C’est ainsi qu’est intervenue l’ordonnance du 4 mai 2010 du juge-commissaire, ordonnant la vente de gré à gré au profit de M. Y pour le prix total de 202 000 euros (pièce n° 4 du mandataire).

Il est constant que, malgré diverses mises en demeure, M. Y n’a jamais régularisé la vente ainsi ordonnée, et que les actifs en cause ont été finalement vendus à des tiers selon une nouvelle ordonnance du 1er décembre 2010 pour le prix total de 40 000 euros.

M. Y, qui demande l’infirmation du jugement ayant retenu sa responsabilité, soutient l’absence de mandat de la « société Michel
Simond », alors que l’activité principale de cette société serait l’intermédiation en matière de cession de fonds de commerce, et que cette activité est soumise aux dispositions d’ordre public de la loir n° 70-9 du 2 janvier 1970, dite « loi Hoguet », qui s’applique notamment aux personnes morales qui se livrent ou prêtent leur concours à des opérations d’achat, de vente ou de location gérance de fonds de commerce, et qui exige une convention rédigée par écrit.

Il fait valoir que la production d’un mandat écrit est exigée ad validitatem.

Il se fonde notamment, en cause d’appel, sur les indications du site Internet de la société
Michel Simond Développement.

A ce stade, il convient pourtant de relever que, bien que M. Y soutienne que la société
Transactions Commerciales lui serait « totalement inconnue », l’offre à son nom a été déposée par M. K, directeur général de la société Transactions
Commerciales, à laquelle il est fait expressément référence (page 2, 3° paragraphe de la pièce précitée), dont le siège est à Mérignac (Gironde) et qui n’apparaît être, lorsqu’il fait référence à l’enseigne

commerciale « Cabinet Michel Simond Bordeaux », que le représentant d’une « société affiliée » à la société Michel Simond
Développement, dont le siège est en Haute-Savoie, selon les explications non contredites de cette dernière (ses conclusions, p. 3). M. K n’apparaît pas être un représentant social ni un préposé de la société Michel Simond
Développement.

En conséquence, M. Y n’a pas contracté avec la société Michel Simond
Développement, et c’est à bon droit que cette dernière a été mise hors de cause par le tribunal de commerce.

M. Y soutient alors que la qualité d’agent immobilier de la société
Transactions
Commerciales ressortirait de son extrait K-Bis, pour en tirer les mêmes conclusions sur la nécessité d’un mandat écrit.

Toutefois, cette société oppose à bon droit que M. Y lui avait donné mandat pour faire en son nom une offre de reprise des éléments d’actifs dépendant de la liquidation judiciaire de la SARL ENORA, et non pour l’achat d’un fonds de commerce.

Aucun mandat écrit n’était nécessaire à cette fin, la loi invoquée ne trouvant pas matière à s’appliquer dans un reprise d’éléments d’actifs d’une entreprise en liquidation judiciaire.

La société TC fait valoir à bon droit tant les dispositions de l’article 1985 du code civil que les usages commerciaux pour opposer que nul n’est besoin d’un mandat expressément écrit pour valider les engagements de celui qui s’oblige.

Elle ajoute que M. Y, qui ne conteste pas qu’il avait fourni lui-même les éléments et détails le concernant pour la formuler (pièce n° 1 des sociétés ' fiche acquéreur ' photocopies de carte nationale d’identité), a bien validé l’offre émise en son nom et pour son compte, et a d’ailleurs remis à l’avocat du mandataire liquidateur un chèque de 20 200 euros représentant 10 % de l’offre.

De même, M. Y a pu confirmer à cet avocat qu’il comptait prendre en charge les loyers commerciaux du local à compter du 1er juillet 2010 (pièce n° 7 de la société TC).

Ces points sont effectivement de nature à corroborer l’existence du mandat donné.

De même, M. Y, qui a été rendu destinataire par le greffe d’une expédition de l’ordonnance autorisant la cession des actifs, n’a pas cru devoir la contester.

Ainsi, l’ensemble de ces éléments établit suffisamment l’existence d’un mandat, même non écrit, donné par M. Y à la société Transactions Commerciales pour la reprise d’éléments d’actif dépendant de la liquidation judiciaire de la société Enora.

M. Y ne peut justifier d’aucune condition suspensive, qui serait d’ailleurs inopérante en la matière.

C’est donc à juste titre que le tribunal de commerce a retenu la responsabilité de M. Y dans l’échec de la cession d’actifs et mis hors de cause la société Transactions Commerciales.

Sur le montant des dommages-intérêts alloués

La société Mayon ès-qualités est appelante principale sur le montant de 40 000 euros de dommages-intérêts qui lui a été alloué par le tribunal de commerce.

Elle soutient que la vente était parfaite dès l’ordonnance du juge-commissaire, que M. Y était tenu à compter de son prononcé de régulariser l’acte de cession.

C’est à bon droit qu’elle fait valoir que M. Y, qui a engagé sa responsabilité contractuelle, est tenu de dommages-intérêts calculés conformément aux dispositions de l’article 1149.

Le principe est celui de l’indemnisation intégrale du préjudice.

Ainsi, il convient de faire droit à la demande du mandataire liquidateur, le montant du préjudice subi étant celui du prix non payé par M. Y, diminué du prix versé par les acquéreurs finaux, soit la somme de 160 000 euros.

En application des dispositions de l’article 1153 du code civil, les intérêts au taux légal partiront du 13 septembre 2010, jour de la sommation d’assister à l’acte de cession, et donc d’en payer le prix.

Le jugement du tribunal de commerce sera réformé en ce sens sur ces deux points.

Sur les autres demandes

La présence dans la procédure de la société Michel Simond Développement apparaît avoir été causé par l’utilisation du nom « Michel
Simond » par la société Transactions
Commerciales, et il lui appartient de clarifier cet usage avec sa « société affiliée ».

Il n’est donc pas inéquitable de laisser ici à la charge de la société Michel Simond
Développement les frais non compris dans les dépens qu’elle a pu engager.

Partie tenue aux dépens d’appel, dont recouvrement direct par les avocats qui en ont fait la demande, dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile, M. Y paiera à la société Mayon, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Enora, la somme de 2 500 euros, et à la société Transaction
Commerciales la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

La demande relative aux frais d’exécution présentée par les sociétés Transactions
Commerciales et MSD en même temps que celle relative aux dépens dont elle est pourtant distincte, qui est en l’état purement hypothétique, rien ne laissant ici présumer une volonté de résistance de leurs adversaires nécessitant la mise en 'uvre d’une procédure d’exécution forcée, est au surplus superfétatoire, puisque la loi, notamment par les dispositions de l’article
L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution, met déjà par principe les frais d’une exécution forcée nécessaire à la charge du débiteur, sous le contrôle du juge de l’exécution.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu entre les parties le 16 mai 2014 par le tribunal de commerce de
Bordeaux, SAUF sur le quantum des dommages-intérêts que M. Y a été condamné à payer au mandataire liquidateur de la société Enora, ainsi que sur le point de départ de ces intérêts,

L’infirme sur ces deux seuls points, et, statuant à nouveau,

Condamne M. Y à payer à la société Mayon, ès-qualités de mandataire liquidateur de

la société Enora, la somme de 160 000 euros à titre de dommages-intérêts,

Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 13 septembre 2010,

Condamne M. Y à payer à la société Mayon, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Enora, la somme de 2 500 euros et à la société Transactions Commerciales la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Condamne M. Y aux dépens d’appel, dont recouvrement direct par les avocats qui en ont fait la demande, dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dit n’y avoir lieu à statuer ici sur des frais d’exécution forcée.

Le présent arrêt a été signé par M. Chelle, président, et par M. Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

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Cour d'appel de Bordeaux, 8 novembre 2016, n° 14/04481