Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 30 septembre 2020, n° 17/01967

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Chronologie de l’affaire

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Cabinet Neu-Janicki · 1er novembre 2020

Une cession du fonds de commerce ne respectant pas le formalisme contractuel est inopposable au Bailleur mais doit présenter un degré de gravité pour justifier la résiliation judiciaire du bail. Pour mémoire, il convient d'attraire dans la cause le cédant du fonds de commerce pour formuler une demande de nullité ou d'inopposabilité de la cession de fonds de commerce (Cour d'appel, Colmar, 1re chambre civile, section A, 30 Septembre 2020 n° 17/01967). C'est en vain que le bailleur demande la résiliation judiciaire du bail commercial aux torts du preneur. Certes, ce dernier a cédé le …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, ch. 1 a, 30 sept. 2020, n° 17/01967
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 17/01967
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Strasbourg, 29 mars 2017
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

FH/SD

MINUTE N°

464/20

Copie exécutoire à

—  Me Mathilde SEILLE

—  Me Joseph WETZEL

Le 30.09.2020

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 30 Septembre 2020

Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A N° RG 17/01967 – N° Portalis DBVW-V-B7B-GOSC

Décision déférée à la Cour : 30 Mars 2017 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG

APPELANTE – INTIMEE INCIDEMMENT :

SARL QG

prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Représentée par Me Mathilde SEILLE, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me X, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMEE – APPELANTE INCIDEMMENT :

Madame F B-C

[…]

67400 ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN

Représentée par Me Joseph WETZEL, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me HEIDMANN, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 modifié du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Juillet 2020, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. ROUBLOT, Conseiller faisant fonction de Président, et M. BARRE, Vice-Président placé.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme HARRIVELLE, Conseillère, chargée du rapport

M. BARRE, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

— Contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

— signé par M. Philippe ROUBLOT, conseiller faisant fonction de président et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l’arrêt avant-dire droit de cette cour du 31 mai 2019 -ordonnant la réouverture des débats, relevant d’office la fin de non recevoir d’ordre public tirée de la non-citation en l’instance de la Sàrl Iguacu, partie à la cession de fonds de commerce du 16 avril 2014 dont Mme B-C poursuit à titre principal la nullité, et invitant les parties à présenter leurs observations sur la fin de non recevoir ainsi soulevée-, arrêt auquel il convient de se référer pour l’exposé du litige,

Par conclusions récapitulatives du 24 mars 2020, la Sàrl QG, appelante, a sollicité la confirmation du jugement déféré en ce qu’il avait validé la cession du fonds de commerce du 16 avril 2014 entre la Sàrl Iguacu et la Sàrl QG, son infirmation sur le surplus.

Elle a poursuivi :

— l’irrecevabilité de la demande de résiliation judiciaire du bail à défaut de délivrance d’un commandement visant la clause résolutoire,

— le rejet de cette demande,

— l’irrecevabilité, subsidiairement le rejet, des demandes présentées sur appel incident par Mme B-C,

— sa condamnation au paiement d’une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

La Sàrl QG a soutenu que la mise en oeuvre de la clause résolutoire du bail était subordonnée à la délivrance par la bailleresse d’un commandement contenant les infractions au bail reprochées au preneur.

Elle a contesté toute violation de la destination du bail :

'l’article 2 de l’avenant du 30 septembre 1999 avait prévu une extension de l’activité du commerce à des activités de restauration s’ajoutant à l’activité non prépondérante de vente de vêtements;

'l’activité de vente de crêpes et de gaufres avait cessé au moment où le juge avait statué;

'il avait été constaté par huissier que la preneuse se conformait aux activités autorisées par le bail et son avenant, la preuve contraire n’étant pas apportée, spécialement de la vente d’alcool au […] à l’enseigne des 'Gourmandises d’Z', en l’état d’un simple stockage de cartons de bouteilles d’alcool ;

'la vente de saucisses, fromages et vins régionaux pendant les fêtes de Noël entrait dans le champ contractuel de 'cadeaux pour la personne’ puisque la commercialisation de produits alimentaires était prévue par l’avenant;

'la nuisance olfactive provenant des fromages vendus n’était pas prouvée;

'la vente de nougats était étayée par une note manuscrite n’ayant pas la valeur d’une attestation et par des photographies n’ayant pas date certaine.

S’agissant d’une prétendue sous-location non autorisée, elle a objecté :

'que le ticket de caisse intitulé 'Bodega’ remis pour des achats au […] ne suffisait pas à démontrer une sous-location dont la bailleresse n’établissait ni la réalité, ni la durée, ni l’existence d’une contrepartie.

S’agissant des travaux, la Sàrl QG a affirmé :

'que la bailleresse avait connaissance de ces menus travaux dès la reprise du bail;

'qu’elle avait été informée par la notification d’un arrêté municipal portant autorisation de travaux du 25 août 2015, arrêté qu’elle n’avait pas contesté, auquel elle avait donc consenti;

'que l’installation d’un climatiseur et le déplacement du compteur électrique ne présentaient pas un degré de gravité justifiant la résiliation du bail, que cet équipement était obligatoire et indispensable;

'que l’aménagement des locaux sanitaires était également obligatoire;

'que l’ensemble de ces travaux imposés par l’autorité administrative incombait au surplus au bailleur.

S’agissant de la non-ouverture des locaux, elle a soutenu :

'qu’il n’était pas établi que les locaux aient été continuellement fermés.

Elle a indiqué justifier de la souscription d’une assurance risques locatifs de même que du paiement de l’indemnité d’occupation de 1.800 euros fixée par le tribunal.

Enfin, la Sàrl QG a dénié tout préjudice subi par la bailleresse, dès lors qu’elle s’était acquittée des loyers et charges en contrepartie de la jouissance des locaux.

Par conclusions récapitulatives du 23 janvier 2020, Mme B-C a poursuivi l’infirmation du jugement en ce qu’il avait jugé la cession du fonds de commerce opposable à la bailleresse et le prononcé de l’inopposabilité de la cession constituant ainsi la locataire sans droit ni titre.

Subsidiairement, elle a sollicité la confirmation du jugement en ce qu’il avait prononcé la résiliation du bail et de l’avenant sauf à réclamer additionnellement la majoration à 2.500 euros de l’indemnité d’occupation et une astreinte portée à 500 euros.

Elle a sollicité en tout état de cause la condamnation de l’appelante au paiement de 15.000 euros de dommages et intérêts, d’une indemnité de 15.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, des dépens y compris les frais d’huissier afférents à sa requête du 3 septembre 2014 et du 20 octobre 2017.

Mme B-C a exposé que la Sàrl QG avait poursuivi -nonobstant la procédure- les infractions au bail; en effet, avaient été relevés : vente de tartines chaudes et de panini constitutifs d’une restauration chaude non autorisée susceptible de causer des troubles et des nuisances au voisinage, installation d’une machine à glace, vente d’alcool en terrasse au-delà de 22 heures, vente d’alcool dans les locaux, magasin converti sans autorisation en décembre 2018 en commerce de charcuterie, vin et fromage causant des nuisances au voisinage, vente de nougats, fermeture quasi systématique en semaine jusqu’en décembre 2017, demande à la mairie d’une autorisation de travaux d’accessibilité sans accord de la bailleresse, travaux nécessitant des percements de murs dans le magasin et le sous-sol, installation de toilettes, le tout sans l’accord de la bailleresse, manquement à l’obligation d’assurance de 2015 à 2017, manquement à l’obligation d’entretien du sous-sol, sous-location irrégulière, non-paiement de l’indemnité d’occupation, manquement à l’obligation de bonne foi, disparition de l’activité initiale cédée justifiant à titre principal le prononcé de l’inopposabilité de la cession, le tout justifiant le prononcé de la résiliation du bail.

Mme B-C a fait valoir que l’indemnité d’occupation majorée à 2.500 euros, correspondant à l’excellence de l’emplacement des locaux, aurait un intérêt dissuasif, de même que l’astreinte portée à 500 euros par jour de retard.

Elle a invoqué l’important préjudice causé par la multiplicité des agissements fautifs, pouvant être réparé sur le fondement de l’article 1382 ancien, subsidiairement de l’article 1147 ancien du code civil.

La cour se référera à ces dernières écritures pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 29 mai 2020.

L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 8 juillet 2020, à laquelle les parties ont développé leur argumentation et déposé les pièces à l’appui de leurs allégations.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité :

— la fin de non recevoir opposée à la demande de nullité de la cession du fonds de commerce :

Sur appel incident, Mme B-C poursuit l’annulation ou encore l’inopposabilité à son égard de la cession du fonds de commerce du 16 avril 2014, arguant de ce que la Sàrl QG, cessionnaire, recherchait exclusivement la cession du droit au bail, qu’elle n’avait pas l’intention d’exploiter et n’avait de fait pas exploité le fonds de commerce selon son activité première, à savoir 'l’exploitation d’un commerce de vêtements et accessoires de vêtements, de cadeaux pour la personne et petits mobiliers de la maison et bijouterie’ à laquelle l’avenant de renouvellement du bail du 30 septembre 1999 a ajouté l’activité de 'glacerie, sandwicherie, salon de thé avec vente à emporter de glaces et sandwichs à l’exclusion de toute activité pouvant occasionner des troubles et nuisances (bruits, odeurs ou autres) pour le voisinage, tels que restauration chaude, A avec vente d’alcool et toute activité susceptible d’accueillir la clientèle à l’intérieur des locaux au-delà de 20 heures'.

La cour a relevé d’office la fin de non recevoir tirée de la non-citation en l’instance de la Sàrl Iguacu, partie à la cession.

Faute d’avoir attrait en la cause la Sàrl Iguacu, cédante du fonds de commerce, la demande en nullité de la cession du fonds de commerce doit être déclarée irrecevable par application des articles 122 et 12 du code de procédure civile, l’article 12 disposant que nul ne peut être jugé sans avoir été entendu ou appelé.

— la fin de non recevoir opposée à la demande en résiliation du bail commercial :

La SARL QG soulève en cause d’appel la fin de non recevoir tirée du défaut de délivrance par la bailleresse d’un commandement d’avoir à se conformer aux obligations du bail, préalable à la saisine du juge.

Mme B-C oppose l’article 564 du code de procédure civile relatif à l’irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d’appel.

La cour observe qu’aux termes de l’article 123 du code de procédure civile, 'les fins de non recevoir peuvent être proposées en tout état de cause sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages et intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.'

La fin de non recevoir soulevée par l’appelante principale est donc recevable en cause d’appel ; t o u t e f o i s , e l l e n ' e s t p a s f o n d é e e t s e r a r e j e t é e p u i s q u e l a d e m a n d e d e Mme B-C, appelante incidente, tend au prononcé par le juge de la résiliation judiciaire du bail motifs pris de l’inexécution, par la société locataire, de ses obligations contractuelles -inexécution dont cette juridiction est invitée à apprécier la réalité et la gravité-et non pas au constat, par le juge, de l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire du bail faisant suite à l’inexécution par le preneur des causes d’un commandement délivré par application de l’article L145-41 du code de commerce.

Sur la résiliation du bail :

Sur appel incident, Mme B-C sollicite subsidiairement la confirmation du jugement en ce qu’il a prononcé la résiliation du bail dont elle invoque de multiples violations par la Sàrl QG.

— la non-exploitation du commerce :

La bailleresse invoque une fermeture des locaux durant 2 mois, entraînant la disparition de la clientèle, suivie d’une réouverture par intermittence, compromettant la pérennité du commerce.

La cour rappelle qu’en vertu de l’article L.145-1 du code de commerce, l’exploitation dans les locaux loués d’un fonds de commerce lui appartenant constitue une obligation du preneur à bail commercial et une condition du bénéfice du statut des baux commerciaux.

La cour relève que la Sàrl QG a contracté une obligation d’exploiter les locaux loués le 16 avril 2014, date de la cession à son profit du fonds de commerce situé […] à Strasbourg, comportant une boutique ouvrant sur la rue des Frères et une terrasse dans son prolongement place du Marché Gayot.

Or, Mme X, domiciliée depuis 2009 place du marché Gayot dans l’immeuble accueillant au rez-de-chaussé le local commercial litigieux, atteste que le commerce a fermé vers avril 2014 mais que sa terrasse sur la place a toujours été exploitée par le A 'Le Gayot’ contigu aux locaux loués, que le commerce dénommé 'Gaufres et Compagnie’ a ouvert ses portes début juin 2014 au […].

M Y, domicilié dans l’immeuble durant 8 ans jusqu’en mars 2015, atteste de même que le commerce du […] a fermé mi-avril 2014 jusqu’en juin 2014.

Un procès-verbal d’huissier a été dressé à la requête de Mme B-C :

du 10 au 26 novembre 2017, Me Demmerle, huissier, a effectué neuf passages à des horaires et jours différents pour constater, photographies à l’appui, que les locaux litigieux à l’enseigne des 'Gourmandises d’Z' étaient continuellement fermés au public, grilles de fer baissées ou non, étant observé qu’aucun panonceau n’indiquait un motif particulier de fermeture.

La non-exploitation du commerce en avril et mai 2014 puis durant 17 jours en novembre 2017, est donc établie.

— les travaux effectués sans autorisation :

La Sàrl ne conteste pas l’absence d’autorisation mais soutient qu’aucune autorisation n’était requise s’agissant de travaux peu importants de mise aux normes, sans nécessité de percer des murs ou de modifier la structure.

L’article 5-d) du bail liant les parties prévoit que le preneur 'ne pourra faire aucun percement de murs, ni aucune transformation constructive de quelque nature que ce soit sans avoir reçu au préalable par écrit l’autorisation du bailleur. Les travaux qui seraient ainsi entrepris devront être faits sous la surveillance d’un architecte ou d’un maître d’oeuvre et sous la responsabilité exclusive du preneur.'

Le 1er décembre 2017, Me Wagner, huissier, a constaté :

— au rez-de-chaussée, à gauche de la devanture, un bloc de climatisation muni d’un câble pénétrant dans le sol vers la cave;

— à l’arrière du magasin, un espace sanitaire comportant un lave-mains, une bouche vmc, deux wc, des disjoncteurs, un tableau électrique et des câbles;

— dans la cave, une motorisation d’un bloc climatiseur, deux compteurs d’eau, un chauffe-eau neuf, une descente d’eaux usées, une installation électrique 'Automatisme Dassaut Electronique';

— dans le couloir commun de l’immeuble, une armoire électrique contenant des câbles de

grosse section pénétrant dans le mur vers le commerce.

La cour note que chacun de ces travaux implique des percements de murs et requière une autorisation écrite de la bailleresse dont la Sàrl QG admet ne pouvoir justifier de sorte que les infractions au bail sont caractérisées.

— les infractions aux activités stipulées au bail :

Le bail du 28 novembre 1988 modifié par l’avenant du 30 septembre 1999, article 2, stipule une activité de 'commerce de vêtements et accessoires du vêtement, de cadeaux pour la personne, petit mobilier pour la maison et bijouterie', qui est élargie à la convenance du preneur à l’activité de 'glacerie, sandwicherie, salon de thé avec vente à emporter de glaces et sandwiches à l’exclusion de toute activité pouvant occasionner des troubles et nuisances (bruits, odeurs ou autres) pour le voisinage, telle la restauration chaude, A et vente d’alcool et toute activité susceptible d’accueillir la clientèle à l’intérieur des locaux au-delà de 20 heures.'

'Engagement express : l’activité se déroulera à partir de 10 heures le matin et jusqu’à 22 heures le soir. La terrasse pourra être exploitée jusqu’à 22 heures’ (article 3 de l’avenant).

'Selon Mme B-C, la Sàrl QG n’aurait pas maintenue l’activité contractuelle initiale, à savoir l’activité de vente de vêtements et accessoires, cadeaux pour la personne, etc.

La cour constate que ce grief est fondé ainsi qu’il ressort du constat d’huissier du 1er décembre 2017 qui relève qu’aucun article se rapportant à l’activité initiale du bail n’est exposé dans les deux devantures principales des locaux rue des Frères ou dans la devanture place du Marché Gayot et que seuls deux sacs munis d’étiquettes de prix sont proposés à la vente à côté de trois cartons à pâtisserie et de produits alimentaires, dans le passage vers la place du Marché Gayot situé entre les numéros 12 et […].

'Selon Mme B-C, la Sàrl QG développerait des activités non autorisées par le bail et son avenant

La Sàrl QG conteste cette infraction; elle fait valoir que l’activité de fabrication de crêpes et de gaufres a cessé, que l’infraction doit persister au moment où le juge statue ; elle soutient que la vente de charcuterie, vin et fromage constatée en décembre 2018 entre dans la catégorie des cadeaux à la personne autorisés.

La cour rappelle que le juge appelé à statuer sur la résiliation judiciaire du bail fondée sur l’inexécution, par la société locataire, de ses obligations contractuelles est invité à apprécier la réalité et la gravité des infractions aux clauses contractuelles, peu important que ces infractions perdurent ou non au moment où il statue.

Il convient en l’espèce de relever que :

— sous l’enseigne 'Les Gourmandises d’Z' au […], la Sàrl QG s’est livrée, outre à l’activité autorisée de 'glacerie, sandwicherie', à la vente de restauration chaude tels que gaufres, crêpes, paninis et sandwichs chauds ainsi qu’il ressort du constat et des photographies de Me Demmerle, huissier, du 1er décembre 2017 et du constat de Me Wagner, huissier, des 19 et 26 août 2017;

— la Sàrl QG a utilisé la terrasse pour une activité interdite de vente de boissons alcoolisées et au-delà des horaires d’ouverture autorisés par le bail, en violation explicite de l’avenant, ainsi qu’il ressort des constats de Me Wagner, huissier, des 15 et 23 août 2017;

— la Sàrl QG a converti le commerce en magasin de vente de charcuterie, vin d’Alsace et fromage au mois de décembre 2018 ainsi qu’il ressort du procès-verbal de Me Wagner, huissier, des 18 et 24 décembre 2018 ; que les achats de portions de comté ou de saucisson opérés sur mandat de l’huissier ne sauraient être qualifiés de 'cadeau pour la personne’ au sens de la destination initiale du bail de 'commerce de vêtements et accessoires du vêtement, de cadeaux pour la personne, petit mobilier pour la maison et bijouterie';

— lors de son passage du 24 décembre 2018, l’huissier a relevé que la cage d’escalier desservant les logements d’habitation de l’immeuble exhalait une odeur caractéristique de fromage s’atténuant vers les étages, laquelle constitue une nuisance olfactive pour le voisinage proscrite par l’avenant.

La cour induit de ces éléments une violation patente et grave de la destination du bail.

— sous-location irrégulière :

Les 15 et 23 août 2017, Me Wagner, huissier, constate que la terrasse place du Marché Gayot dépendant du local du […] est servie par le seul personnel du 'QG A’ situé au […] et disposant d’une terrasse voisine place du Marché Gayot; la carte des consommations est personnalisée 'QG A', les tickets de caisse sont au nom de 'A le QG’ ou des 'Gourmandises d’Z A le QG'.

Les 24 et 26 décembre 2018, Me Wagner constate qu’à l’issue d’achats réglés par carte bancaire, lui sont remis des coupons de carte bancaire à en-tête de 'Bodega, Strasbourg, […] de l’Etoile'.

Ces faits rendent plausible la sous-location dénoncée par la bailleresse.

— manquement à l’obligation d’assurance de 2015 à 2017 :

L’appelante ne saurait justifier avoir satisfait à cette obligation en produisant une attestation d’assurance Swiss Life couvrant les années 2017 à 2020. L’infraction au bail est établie.

— manquement à l’obligation d’entretien du sous-sol :

Les clichés joints au procès-verbal de Me Demmerle, huissier, du 1er décembre 2017 révèlent un sous-sol en désordre mais n’établissent pas le défaut d’entretien allégué.

— Non-paiement des loyers en décembre 2019 et janvier 2020 :

Il est à noter que la Sàrl QG ne rapporte pas la preuve du paiement qui lui incombe en produisant un simple relevé, sans indication de sa provenance, mentionnant un virement du 13 mars 2020 à la bailleresse d’un montant de 4.773, 70 euros. Dès lors, l’infraction au bail est démontrée.

— manquement à l’obligation de bonne foi :

Les développements qui précèdent caractérisent suffisamment l’exécution de mauvaise foi du bail par la société locataire.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a prononcé la résiliation du bail sanctionnant les nombreuses et graves infractions commises par la preneuse.

Sur l’indemnité d’occupation et l’astreinte :

La cour confirmera le jugement déféré qui a fixé à 1.800 euros l’indemnité d’occupation due par la Sàrl QG, sauf à préciser que cette indemnité d’occupation indexée selon la clause d’indexation stipulée au bail est payable à compter du 30 mars 2017, date du jugement prononçant la résiliation du bail.

Afin d’assurer l’évacuation célère des lieux, la cour, infirmant le jugement déféré, fixera l’astreinte à 500 euros par jour de retard selon les modalités précisées au dispositif de l’arrêt.

Sur la demande de dommages et intérêts :

Les multiples violations de ses obligations de locataire par la Sàrl QG préjudicient à Mme B-C, bailleresse, en termes de perte de clientèle pour l’activité initiale de 'commerce de vêtements et accessoires de vêtements, de cadeaux pour la personne et petits mobiliers de la maison et bijouterie’ du fonds, de mauvaise image du commerce donnée par la Sàrl QG constatée par huissier, de changement contraint d’activité dans la mesure compatible avec la destination et les caractères de l’immeuble, de sorte que la cour, en infirmation du jugement déféré, allouera à Mme B-C la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts.

Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile :

La Sàrl QG sera condamnée aux entiers dépens de la procédure d’appel qui comprendront les frais d’huissier afférents à la requête du 20 octobre 2017.

L’équité commande de la condamner à verser à Mme B-C la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Il n’y a pas lieu de faire application de ce texte au profit de la Sàrl QG.

P A R C E S M O T I F S

LA COUR,

DECLARE recevable la fin de non recevoir soulevée par la Sàrl QG,

La REJETTE,

INFIRME le jugement rendu le 30 mars 2017 par le tribunal de grande instance de Strasbourg, troisième chambre civile, en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts de Mme B-C et assorti l’expulsion d’une astreinte de 100 euros par jour de retard,

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la Sàrl QG à payer à Mme B-C la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts

DIT que la condamnation de la Sàrl QG à évacuer les locaux commerciaux situés […] à Strasbourg sera assortie d’une astreinte de 500 euros par jour de retard à l’expiration d’un délai de huit jours courant du jour de la signification du présent arrêt, et ce pour une période de deux mois à l’expiration de laquelle il pourra être à nouveau statué,

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus sauf à préciser que l’indemnité d’occupation est due à compter du 30 mars 2017, date du prononcé de la résiliation du bail,

Y ajoutant,

CONDAMNE la Sàrl QG aux entiers dépens de la procédure d’appel qui comprendront les frais d’huissier afférents à la requête du 20 octobre 2017,

CONDAMNE la Sàrl QG à payer à Mme B-C la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la Sàrl QG.

LA GREFFIÈRE : LE CONSEILLER :



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