Cour d'appel de Douai, 2 mai 2013, n° 12/06183

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, 2 mai 2013, n° 12/06183
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 12/06183
Décision précédente : Tribunal d'instance de Valenciennes, 29 août 2012, N° 11-12-0035

Texte intégral

XXX

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 02/05/2013

***

N° MINUTE :

N° RG : 12/06183

Jugement (N° 11-12-0035)

rendu le 30 Août 2012

par le Tribunal d’Instance de VALENCIENNES

REF : HB/VC

APPELANTE

Madame Y Z

de nationalité Française

XXX

Représentée par Me Margaux LEMOINE (avocat au barreau de VALENCIENNES)

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 59178002/12/09903 du 06/11/2012 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de DOUAI)

INTIMÉS

Monsieur A B

né le XXX à XXX

demeurant : XXX

Représenté par Me Betty RYGIELSKI (avocat au barreau de VALENCIENNES)

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 59178002/13/00227 du 15/01/2013 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de DOUAI)

SAS X

ayant son siège social : XXX

Représentée par Me Christophe DOUTRIAUX (avocat au barreau de VALENCIENNES)

DÉBATS à l’audience publique du 13 Février 2013 tenue par Hélène BILLIERES magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre CHARBONNIER, Président de chambre

Benoît PETY, Conseiller

Hélène BILLIERES, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 02 Mai 2013 après prorogation du délibéré du 11 avril 2013 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Selon offre préalable acceptée le 19 octobre 2007, la société X a consenti à Monsieur A B et à Madame Y Z un prêt personnel d’un montant de 6 000 euros remboursable en 60 mensualités de 125,99 euros chacune avec assurance, incluant des intérêts au taux nominal de 8,15 % et au taux effectif global de 8,92 %.

Alléguant le défaut de paiement des échéances mensuelles, la société X a prononcé la déchéance du terme et a obtenu, du président du tribunal d’instance de Valenciennes, une ordonnance en date du 4 mai 2010 enjoignant à Monsieur A B et à Madame Y Z de payer à l’établissement de crédit la somme de 4 536,43 euros avec intérêts au taux conventionnel de 8,15 % à compter de la signification de l’ordonnance.

Statuant sur l’opposition de Madame Y Z, le tribunal d’instance de Valenciennes, par jugement contradictoire du 30 août 2012, a débouté la société X de ses demandes formulées à l’encontre de Monsieur A B, a prononcé la déchéance du droit aux intérêts du prêteur et a condamné Madame Y Z à payer à la société de crédit la somme de 3 480,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement.

Madame Y Z a relevé appel de ce jugement le 17 septembre 2012.

Reprenant son argumentation de première instance, elle excipe de l’absence de production du bordereau de rétractation, de l’absence des mentions obligatoires prévues aux articles L. 311-10 et L. 311-11 du code de la consommation et de la petitesse des caractères d’imprimerie figurant sur l’offre pour prétendre à la déchéance du droit aux intérêts du prêteur.

Elle fait valoir en outre que la clause pénale est une clause « abusive » et sollicite sa réduction à la somme d’un euro, ce d’autant que la société X ne démontre pas le moindre préjudice.

Elle fait enfin état d’une situation financière précaire pour solliciter le report du paiement de sa dette à deux ans, et à défaut, offre de verser 20 euros par mois pendant 23 mois, le solde de sa dette étant payé le 24e mois.

Madame Y Z sollicite en tout état de cause la condamnation de Monsieur A B à la garantir de toute condamnation mise à sa charge.

Monsieur A B, qui conteste être signataire de l’offre de crédit du 19 octobre 2007, conclut pour sa part à la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société X de ses demandes formulées à son encontre. Il sollicite, à titre subsidiaire, l’organisation d’une expertise graphologique et conclut au rejet des demandes formées à son encontre tant par la société de crédit que par Madame Y Z. Il réclame enfin, à la charge de la société X, l’allocation d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

La société X, formant appel incident, sollicite quant à elle la condamnation solidaire de Madame Y Z et de Monsieur A B au paiement de la somme de 4 877,33 euros avec intérêts au taux contractuel sur la somme de 4 536,43 euros et au taux légal pour le surplus à compter de la déchéance du terme, outre leur condamnation solidaire au paiement d’une indemnité procédurale de 1 500 euros.

Elle conteste le jugement en ce qu’il a prononcé la déchéance de son droit aux intérêts au motif que les caractères d’imprimerie utilisés dans l’offre préalable de prêt ne présentaient pas la hauteur réglementaire alors qu’aucune sanction n’est prévue en cas de non respect des règles de l’article R. 311-6 du code de la consommation, l’article L. 311-33 dudit code ne visant pas cette disposition réglementaire.

Outre qu’elle fait sienne l’argumentation du premier juge relativement au bordereau de rétractation, la société de crédit soutient par ailleurs que les autres irrégularités soulevées par Madame Y Z ne sont pas transposables ou applicables au cas d’espèce.

Elle s’oppose enfin à l’octroi de délais de grâce au profit de l’appelante en faisant valoir l’absence de tout paiement depuis près de deux ans, la mauvaise foi de Madame Y Z, accusée d’avoir falsifié la signature de Monsieur A B, et l’absence de perspective d’amélioration de sa situation financière dans un délai de deux ans.

La société X estime par ailleurs que les éléments produits par Monsieur A B ne suffisent pas à prouver la falsification de sa signature et qu’en tout état de cause, il reste tenu solidairement au paiement de la dette par application de l’article 1338 du code civil.

SUR CE

Sur la dénégation de signature

Attendu qu’il résulte des dispositions combinées des articles 1315, 1323, 1324 du code civil et 287 du code de procédure civile que, dans le cas où une partie désavoue sa signature ou son écriture dans l’acte qu’on lui oppose, il appartient au juge de procéder à la vérification à moins qu’il puisse être passé outre cet acte ;

Que pour apprécier l’authenticité de la signature et de la mention manuscrite contestée, le juge tient compte de tous les documents utiles provenant de l’une ou de l’autre parties, étant rappelé que c’est à la partie qui invoque l’acte dont l’authenticité est déniée d’en établir la sincérité ; qu’en l’occurrence, cette charge incombe à la société X, ainsi qu’à Madame Y Z dès lors que cette dernière soutient que Monsieur A B est bien signataire de l’offre litigieuse et qu’il doit, à ce titre, la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre de ce chef ;

Attendu que la société de crédit produit aux débats le contrat conclu le 19 octobre 2007 sur lequel figure, à trois reprises, la signature contestée de Monsieur A B, laquelle a ainsi été successivement apposée au titre de l’acceptation de l’offre de prêt, de la demande d’adhésion à l’assurance facultative et de la déclaration de santé ; qu’elle produit en outre le tableau d’amortissement, le décompte de créance relatif audit contrat en date du 23 mars 2010 ainsi qu’historique de fonctionnement du compte ;

Que Madame Y Z produit pour sa part un document qui apparaît être la copie tronquée de plusieurs autres documents sur lesquels figurent plusieurs spécimens de signature attribués à Monsieur A B, l’état des créances établi dans le cadre de la procédure de surendettement ouverte au profit de Monsieur A B et de Madame Y Z, arrêté au 16 juin 2009, ainsi qu’une attestation établie le 11 septembre 2012 par Madame C-D E ;

Que Monsieur A B, qui conteste avoir apposé sa signature sur l’offre de prêt consentie le 19 octobre 2007 par la société X, verse quant à lui aux débats la photocopie du contrat de location qu’il a conclu le 22 août 2011, un courrier adressé à son conseil en date du 24 novembre 2011, l’ordonnance de non-conciliation du 23 mars 2010 ainsi qu’une feuille volante sur laquelle est apposée une série de signatures ;

Que le nombre et la qualité des éléments de comparaison produits mettent la Cour à même de vérifier la signature sans ordonner de mesure d’instruction ;

Qu’il apparaît que la signature de Monsieur A B qui figure sur les documents qu’il produit lui-même aux débats correspond, dans son tracé et son mouvement, aux différents spécimens de signatures apposés sur le document produit par Madame Y Z et attribuées par elle à son ancien compagnon, les menues variantes décelables d’un spécimen à l’autre, qui procèdent de l’aléa inhérent au geste du scripteur, n’altérant en rien l’identité de l’ensemble des signatures figurant sur lesdits documents ;

Qu’il est ainsi suffisamment démontré que contrairement que prétend Madame Y Z, Monsieur A B n’est pas coutumier de l’utilisation de plusieurs signatures différentes ou changeantes au fil du temps, mais utilise au contraire une signature qui est habituellement la même, laquelle diffère sensiblement des signatures apposées sur l’offre préalable de prêt attribuées à Monsieur A B ;

Que la seule circonstance que la créance de la société X ait été reprise dans le plan de surendettement dont bénéficient Madame Y Z et Monsieur A B, outre qu’à défaut de figurer à l’état des créances, elle n’est nullement établie, n’équivaut en tout état de cause pas à un aveu judiciaire de l’authenticité de la signature attribuée à Monsieur A B apposée sur l’offre préalable de crédit ;

Que l’attestation versée par Madame Y Z ne permet pas davantage, en raison de ses termes généraux et imprécis, d’affirmer que la signature figurant sur l’offre préalable de crédit a bien été apposée par Monsieur A B, et non par un tiers ;

Que la décision déférée sera donc confirmée en ce qu’elle a jugé que Monsieur A B n’avait pas signé l’offre de prêt du 19 octobre 2007 ;

Attendu que pour solliciter néanmoins la condamnation de Monsieur A B, la société X soutient que ce dernier aurait, dès lors que les fonds prêtés ont été versés sur le compte commun des concubins et les mensualités prélevées sur ledit compte pendant une durée significative sans protestation de sa part, ratifié le contrat de prêt conclu uniquement par Madame Y Z ;

Mais attendu que c’est par des motifs pertinents que la cour fait siens que le premier juge, après avoir relevé que l’établissement de crédit ne rapportait pas le moindre commencement de preuve de ces allégations, a jugé que la société de crédit n’établissait ni la connaissance par Monsieur A B du vice affectant l’offre de prêt, ni l’exécution volontaire de l’obligation en résultant pour lui ;

Attendu qu’il s’infère des éléments qui précèdent que la société X n’est pas fondée à invoquer contre Monsieur A B l’engagement d’emprunteur établi au nom de celui-ci le 19 octobre 2007 ;

Que sa demande en paiement, en tant qu’elle vise cette partie, doit donc être rejetée, le jugement étant confirmé de ce chef ;

Sur la déchéance du droit aux intérêts conventionnels

Attendu qu’aux termes de l’article R. 311-6 ancien du code de la consommation, l’offre préalable doit être imprimée au moyen de caractères d’imprimerie dont la hauteur ne doit pas être inférieure à celle du corps huit ;

Que dès lors que le prêteur doit saisir l’emprunteur d’une offre préalable satisfaisant à l’ensemble des prescriptions légales et réglementaires impératives du code précité déterminant la forme et le contenu de cet acte, il encourt la déchéance du droit aux intérêts prévue par l’article L. 311-33 du même code s’il n’y satisfait pas ;

Que le corps huit visé par l’article R. 311-6, à l’époque de sa rédaction, faisait référence au point DIDOT et correspond donc à une hauteur de 3 millimètres ; que le texte visant la rédaction du caractère, c’est le caractère imprimé qui doit être pris en compte ; qu’il est donc nécessaire qu’il y ait au moins 3 millimètres du haut des lettres montantes (b, d ou l) au bas des lettres descendantes (g, p ou q) ;

Que la vérification des caractères de l’offre conclue par Madame Y Z fait apparaître que celle-ci comporte des mentions dont les caractères n’excèdent pas 2,5 millimètres et sont donc inférieurs à la hauteur du corps huit de sorte qu’il y a lieu de constater son irrégularité ;

Qu’il s’ensuit que, conformément aux dispositions de l’article L. 311-33 ancien du code de la consommation, la déchéance du droit aux intérêts est bien opposable à la société X, la décision déférée devant à ce titre être confirmée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens d’irrégularités soulevées par Madame Y Z ;

Que dès lors que Madame Y Z doit, en conséquence de ce qui précède, être déclarée tenue au seul remboursement du capital emprunté sous déduction des versements opérés, il apparaît que c’est par des calculs exacts, au demeurant non contestés par les parties, et que la cour reprend, que le premier juge, tirant les conséquences de la déchéance du droit aux intérêts, a condamné Madame Y Z à payer à la société X la somme de 3 480,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

Sur les demandes accessoires

Attendu, sur la demande de garantie présentée par Madame Y Z à l’encontre de Monsieur A B, qu’à défaut de démontrer que ce dernier est le signataire de l’offre de prêt et qu’il aurait bénéficié seul des sommes prêtées par la société X avant leur mariage, Madame Y Z doit être déboutée de sa demande de garantie formée à l’encontre de son ancien compagnon et mari, la circonstance que le « remboursement des crédits » ait été mis, par ordonnance de non-conciliation, à la charge du mari étant à cet égard indifférente dès lors que cette disposition ne visait que l’endettement commun du couple et non les dettes propres à chaque époux, comme en l’espèce ;

Attendu ensuite, sur la demande de délais de grâce, qu’il doit être rappelé que l’article 1244-1 alinéa 1er du code civil énonce que, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues ;

Qu’à ce titre, Madame Y Z justifie ne percevoir que des prestations familiales s’élevant à 1 094,19 euros, allocation de logement comprise, avec deux enfants à charge ; que si elle sollicite le report du paiement de sa dette à deux ans, elle ne justifie ni même n’allègue aucunement d’un supplément de ressources dans les deux ans à venir ; qu’il n’y a donc pas lieu de reporter le paiement de la dette à deux ans ;

Qu’outre les faibles ressources dont elle dispose à ce jour, il ne peut par ailleurs être négligé que la créance de la société X est relativement ancienne, le premier impayé remontant au 10 juin 2009, et qu’aucun versement n’a été depuis lors effectué ; que l’échéancier proposé ne permettrait d’obtenir de la part de Madame Y Z qu’un remboursement très partiel de la créance au terme de 23 mensualités successives, le règlement final du solde de 3 020,20 euros assorti des intérêts n’étant aucunement garanti ;

Que dans ces conditions, c’est à raison que le premier juge a rejeté la demande de délais de grâce, ce qui conduit à confirmer également à ce titre le jugement entrepris ;

Attendu enfin que compte tenu des circonstances de la cause, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles tant de première instance que d’appel ;

PAR CES MOTIFS ;

Statuant publiquement et contradictoirement ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Madame Y Z aux dépens d’appel qui seront recouvrés par Maître MASSIN, avocat membre de la S.C.P. TIRY-DOUTRIAUX ADNB, et par Maître Betty RYGIELSKI, avocats, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

A. DESBUISSONS P. CHARBONNIER

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