Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 1er octobre 2020, n° 18/03513

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, ch. 8 sect. 1, 1er oct. 2020, n° 18/03513
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 18/03513
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Valenciennes, 18 avril 2018, N° 17/00947
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 01/10/2020

N° de MINUTE : 20/765

N° RG 18/03513 – N° Portalis DBVT-V-B7C-RUNY

Jugement (N° 17/00947) rendu le 19 avril 2018

par le tribunal de grande instance de Valenciennes

APPELANTS

Madame Z X

née le […] à […]

[…]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 591780022018007279 du 10/07/2018 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de douai)

Monsieur A Y

né le […] à […]

[…]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 591780022018007373 du 10/07/2018 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de douai)

Représentés par Me Guillaume Buguet, avocat au barreau de Valenciennes

INTIMÉE

Sa Creatis

[…]

Représentée par Me Bernard Delemer, avocat au barreau de Lille

DÉBATS à l’audience publique du 24 juin 2020 tenue par Pauline Mimiague magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au

greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Betty Moradi

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Mme Dominique Duperrier, président de chambre

Mme Hélène Billières, conseiller

Mme Pauline Mimiague, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 01 octobre 2020 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Dominique Duperrier, président et Harmony Poyteau, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 4 juin 2020

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 15 mai 2008, la société Creatis a consenti à M. A Y et Mme Z X, solidairement tenus, un prêt personnel dans le cadre d’un regroupement de crédits d’un montant de 37 400 euros, remboursable en 144 mensualités de 442,78 euros, avec assurance, assorti d’un taux d’intérêt contractuel de 7,66 % l’an.

Suite à des impayés et après mise en demeure du 3 octobre 2016, restée infructueuse, la société Creatis a prononcé la déchéance du terme du prêt par lettre recommandée avec avis de réception du 16 février 2017. Par acte d’huissier de justice du 9 mars 2017 la société Creatis a fait assigner les emprunteurs devant le tribunal de grande instance de Valenciennes aux fins de les voir condamner solidairement au paiement de la somme de 41 798,26 euros avec intérêts au taux contractuel majoré de 11,66 % sur la somme de

33 666,55 euros à compter du 28 février 2017, la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Mme X a conclu à la prescription de l’action de la banque, subsidiairement a sollicité la réduction à la somme d’un euro de l’indemnité réclamée et le rejet de la demande relative à la majoration du taux d’intérêt. M. Y n’a pas comparu.

Par jugement réputé contradictoire du 19 avril 2018, le tribunal de grande instance de Valenciennes a :

— déclaré l’action de la société Creatis recevable,

— débouté Mme X de sa demande de réduction de l’indemnité conventionnelle,

— condamné solidairement les emprunteurs à payer à la société Creatis la somme de

41 798,26 euros avec intérêts au taux contractuel majoré de 11,66 % l’an sur la somme de 36 666,55 euros à compter décision,

— débouté la société Creatis de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

— condamné solidairement les défendeurs aux dépens, dont distraction au profit de Maître Delemer.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 19 juin 2018, M. Y et Mme X, ensemble, ont relevé appel des chefs du jugement à l’exception des dispositions relatives à l’exécution provisoire et à l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de leurs conclusions notifiées par voie électronique le 18 septembre 2018, M. Y et Mme X demandent à la cour de :

— réformer le jugement rendu par le tribunal de grande instance le 19 avril 2018,

— débouter la société Creatis de ses demandes, fins et conclusions.

— la dire irrecevable en ses demandes compte tenu de la prescription acquise au bénéfice de Mme X,

— réduire à la somme d’un euro l’indemnité sollicitée au titre de la clause pénale,

— débouter la société Creatis de sa demande tendant à voir porter les intérêts au taux contractuel de 11,66 % l’an,

— dire et juger que la condamnation à intervenir portera intérêt au taux contractuel de 7,66 % l’an,

— statuer de droit quant aux dépens.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 octobre 2018, la société Creatis demande à la cour de :

— dire et juger que son action n’est pas prescrite,

— dire et juger que ses demandes au titre de l’indemnité conventionnelle et des intérêts au taux contractuel majoré sont bien fondées,

— débouter en conséquence M. Y et Mme X de leurs demandes,

et, confirmant le jugement dont appel,

— condamner solidairement M. Y et Mme X à lui payer la somme de

41 798,26 euros due selon compte arrêté au 27 février 2017 et les intérêts au taux contractuel de 11,66 % l’an sur la somme de 33 666,55 euros à compter du 28 février 2017,

— les condamner solidairement à lui payer la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et en tous les frais et dépens dont distraction au profit de Maître Bernard Delemer, avocat aux offres de droit.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l’exposé de leurs moyens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 4 juin 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sauf précision particulière, les textes du code de la consommation mentionnés dans l’arrêt sont les textes dans leur version en vigueur à la date du contrat litigieux.

1- Sur la prescription de l’action de la banque

Les appelants font valoir qu’en application des articles R. 312-35 et L. 218-2 du code de la consommation, l’action de la banque, introduite plus de deux ans après un incident de paiement survenu le 31 octobre 2014, est prescrite.

La banque leur oppose que, si les dispositions de l’article L. 218-2 sont applicables en l’espèce, l’action engagée par l’assignation du 9 mars 2017, soit moins de deux ans après la notification de la déchéance du terme, date d’exigibilité de la créance, n’est pas prescrite.

En premier lieu, il convient de rappeler que, conformément à ce qu’a retenu le premier juge, les dispositions de l’article L. 311-3 du code de la consommation (devenu l’article R. 312-35), qui soumettent les actions en paiement engagées à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur à un délai de forclusion (et non de prescription) de deux ans, ne sont pas applicables en l’espèce, s’agissant d’un crédit d’un montant supérieur à

21 500 euros, en application des articles L. 311-3 et D. 311-1 du même code.

En revanche est applicable au présent litige l’article L. 218-2 du code de la consommation, dans sa version issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, qui dispose que l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.

Contrairement à ce que soutiennent les appelants, le point de départ du délai de prescription est la date d’exigibilité de la créance, et non la date du premier incident de paiement non régularisé comme pour la forclusion.

Il résulte des articles 2224 et 2233 du code civil qu’à l’égard d’une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d’échéance successives et l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme qui emporte son exigibilité.

Il ressort des pièces communiquées par la banque que les emprunteurs ont bénéficié d’un plan conventionnel de redressement entrant en vigueur le 31 août 2010, prévoyant la suspension de la créance de la société Creatis pendant onze mois puis le règlement de mensualités de 55 euros pendant treize mois. Ils ont ensuite bénéficié de mesures imposées par la commission de surendettement mises en application le 30 avril 2013 prévoyant la suspension de la créance pendant treize mois puis le règlement de 327 euros par mois pendant onze mois. Il n’est pas contesté qu’à l’issue de ce plan, les conditions initiales du prêt étaient de nouveau applicables, comme cela ressort de l’historique du compte communiqué par la banque et non contesté par les emprunteurs.

L’analyse de cet historique montre qu’aucune échéance n’a été réglée après le mois d’octobre 2014. La somme réclamée par la banque au titre des échéances impayées, arrêtée au 17 novembre 2016 (6 338,23 euros), correspond à seize échéances, soit sur la période d’août 2015 à novembre 2016. Il en résulte que l’action de la banque, introduite par l’assignation du 9 mars 2017, moins de deux ans après la première échéance réclamée, n’est pas prescrite, et il en est de même s’agissant du capital restant dû devenu exigible avec la déchéance du terme notifiée le 18 février 2017.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré l’action de la banque recevable comme non prescrite.

2- Sur la créance de la banque

L’offre de prêt dispose (article II-3 'résiliation du contrat ou non paiement') que la résiliation du contrat entraîne la déchéance du terme et l’exigibilité immédiate des sommes restant dues, soit la ou les échéances échues impayées augmentées du capital restant dû à la date de la résiliation et des frais et honoraires de justice, l’ensemble produisant des intérêts de retard jusqu’à la date du règlement effectif de la créance ; la société Creatis pourra en outre exiger à titre de clause pénale, une indemnité de 8 % calculée sur la totalité de la créance telle que précédemment définie. L’offre prévoit également (article II-5 'intérêts de retard') que les intérêts de retard seront calculés au taux contractuel majoré de quatre points sur les échéances impayées et les sommes dues en application de l’article 3 à compter en cas d’impayé, du jour de l’échéance concernée et sur le capital restant dû à compter du jour de la déchéance du terme, ceci sans délai, tout mois commencé étant dû en entier.

En vertu de l’article 1231-5 du code civil, deuxième alinéa, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité convenue dans un contrat, si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Au regard des pièces communiquées par la banque, la créance s’établit comme suit :

— échéances impayées : 6 338,23 euros (dont 2 331,01 euros en capital)

— capital restant dû au 17 novembre 2016 : 31 335,54 euros

En outre la société Creatis est en droit de demander l’indemnité de 8 % prévue au contrat, laquelle ne paraît pas manifestement excessive au regard de l’ancienneté de la créance et du préjudice subi par la banque, soit la somme de 2 693,32 euros réclamée.

En revanche, il n’y a pas lieu de faire application de la majoration du taux d’intérêt pour l’avenir, laquelle constitue une pénalité au sens de l’article 1231-5 du code civil et qui apparaît manifestement excessive compte tenu du taux conventionnel déjà appliqué et du montant attribué au titre de l’indemnité conventionnelle prévue par ailleurs.

Il convient en conséquence d’allouer à la société Creatis la somme de 41 798,26 euros avec intérêt au taux de 7,66 % l’an à compter de la déchéance du terme, le 16 février 2017, sur la somme de 33 666,55 euros.

3- Sur les demandes accessoires

Il convient de confirmer le jugement en ces dispositions relatives aux dépens et à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

Les intimés succombant principalement en leur appel, il convient de mettre les dépens d’appel à leur charge, lesquels pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile. Il n’apparaît pas inéquitable en revanche de laisser à chacune des parties la charge des frais exposés par elle et non compris dans les

dépens ; la banque sera en conséquence déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, par arrêt contradictoire :

Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a condamné solidairement M. A Y et Mme Z X à payer à la société Creatis la somme de 41 798,26 euros avec

intérêts au taux contractuel majoré de 11,66 % l’an sur la somme de 36 666,55 euros et débouté Mme X de sa demande de réduction de l’indemnité conventionnelle ;

Statuant à nouveau :

Condamne solidairement M. A Y et Mme Z X à payer à la société Creatis la somme de 40 367,09 euros avec intérêt au taux de 7,66 % l’an à compter du 16 février 2017 sur la somme de 33 666,55 euros ;

Y ajoutant :

Condamne in solidum M. A Y et Mme Z X aux dépens d’appel, recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Déboute la société Creatis de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,

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