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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, ch. com., 20 janv. 2022, n° 20/01127
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 20/01127
Décision précédente : Tribunal de commerce de Romans-sur-Isère, 11 février 2020, N° 2019J157
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de commerce de Romans-sur-Isère, 12 février 2020
  • Cour d'appel de Grenoble, 6 mars 2020
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : FR1257656
Titre du brevet : Dispositif dermique multifeuillet, émetteur ou reflecteur de rayonnement infrarouge lointain, notammement à des fins médicales, patch ou article comprenant ce multifeuillet
Classification internationale des brevets : A61F ; A61L ; A61N
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Référence INPI : B20220011
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE GRENOBLE ARRÊT DU JEUDI 20 janvier 2022

CHAMBRE COMMERCIALE N° RG 20/01127 – N° Portalis DBVM-V-B7E-KMQJ

Appel d’un jugement (N° RG 2019J157) rendu par le Tribunal de Commerce de Romans-sur-Isère en date du 12 février 2020 suivant déclaration d’appel du 6 mars 2020

APPELANTE : E.U.R.L. NOUVELLE TERRE société à responsabilité limitée immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Romans sous le numéro 528 007 925, représentée par sa gérante, Madame N P T, 2761 Les Rouvières 26220 DIEULEFIT

représentée par Me Josquin LOUVIER de la SELARL LOUVIER AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me Anne-Sophie MERLE de A J AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

Société BIOENERGY RESEARCH CENTER – BRC Société à Responsabilité Limitée immatriculée auprès du Registre du Commerce et des Sociétés de ROMANS SUR ISERE sous le numéro 537 390 213, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège 65 A rue des Tuileries 26780 MALATAVERNE

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE-CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me Stéphanie PRUD HOMME, avocat au barreau d’AVIGNON

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Pierre FIGUET, Présidente, Mme Marie-Pascale BLANCHARD, Conseil ère, M. Lionel BRUNO, Conseil er,

Assistés lors des débats de Mme A R, Greffière.

Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

DÉBATS :

A l’audience publique du 10 novembre 2021, M. BRUNO conseil er, a été entendu en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l’affaire a été mise en délibéré pour que l’arrêt soit rendu ce jour,

EXPOSE DU LITIGE :

La société Bioenergy Research Center (ci-après la société BRC) a été créée en 2011, avec pour activité la recherche et le développement, l’exploitation, la commercialisation et l’exportation de produits minéraux, l’enseignement et la formation à l’utilisation de ces produits.

Son capital est détenu à 25 % par A T, à 25'% par J C, cogérant, à 25'% par J D, cogérant, et à 25 % par E B.

Dans le cadre de ses activités, la société BRC a développé et commercialisé depuis sa création un patch, dénommé Active Patch 4U, dont Monsieur T est l’inventeur.

Dans le cadre de leurs relations, les associés de la société BRC ont conclu un pacte le 6 mai 2013, prévoyant de ne pas rémunérer les gérants, mais indiquant qu’ils pourront se faire rembourser les frais engagés pour la société, tels que validés par l’ensemble des associés en début d’exercice.

Il a également été prévu que les associés qui prendraient de leur temps à titre personnel ou via leurs structures, pour aider au développement de la société, seront indemnisés afin de compenser leur absence dans leurs autres activités.

La société Nouvel e Terre, créée en novembre 2010, est détenue à 100 % par A T et a comme activité l’acquisition, l’exploitation ou la cession de tous procédés, brevets et droits de propriété intel ectuel e.

Invoquant avoir consacré un temps important au développement et au dépôt du brevet détenu par la société BRC, qui n’aurait pas réglé les sommes de ce travail, la société Nouvel e Terre a saisi le tribunal de commerce de Romans sur Isère, afin d’obtenir notamment le paiement de 83.737 euros HT, soit 100.484,40 euros TTC.

Par jugement du 12 février 2020, le tribunal de commerce de Romans sur Isère a':

— débouté la société Nouvel e Terre de sa demande';

— dit n’y avoir lieu d’ordonner l’exécution provisoire'; Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI


- rejeté toutes autres demandes des parties';

— condamné la société Nouvel e Terre aux dépens.

La société Nouvel e Terre a interjeté appel de cette décision le 6 mars 2020.

L’instruction de cette procédure a été clôturée le 30 septembre 2021.

Prétentions et moyens de la société Nouvelle Terre':

Selon ses conclusions n°2 remises le 10 mars 2021, el e demande, au visa des articles 1103 et 1104 du code civil':

— d’infirmer le jugement déféré';

— de le confirmer en ce qu’il a confirmé sa qualité à agir';

— par conséquent, de juger recevable et bien fondée son action';

— de débouter la société BRC de ses demandes visant à voir l’action introduite par la concluante prescrite et à considérer la créance comme injustifiée ;

— de constater l’existence de sa créance à l’encontre de la société BRC';

— de condamner l’intimée à lui payer la somme de 83.737 euros HT, soit 100.484,40 TTC';

— de condamner l’intimée à lui payer 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

El e expose':

— que la société BRC est née de la rencontre entre J C, inventeur du concept de la membrane Solares, brevetée par lui-même et Monsieur B, et A T, kinésithérapeute, qui a eu l’idée de fabriquer des patchs à partir de cette membrane, ces patchs permettant de soulager des inconforts physiques en libérant les blocages musculaires, tendineux, articulaires, mais aussi les tensions d’ordre digestives et utérines et entraînant une autostimulation naturel e du corps via les infrarouges lointains'; que Monsieur T a conçu et testé des patchs pendant deux ans dans son cabinet mais aussi auprès d’athlètes internationaux de trail'; qu’après s’être assurés du bon fonctionnement des patchs, messieurs T et C ont déposé un brevet qui a été apporté à la société BRC, avant de développer et vendre le produit auprès des professionnels paramédicaux'; que c’est dans ce cadre que le pacte d’associés a été conclu'; Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI


- que la concluante a une compétence particulière dans le développement de brevets et a consacré un temps important au développement et au dépôt du brevet désormais détenu par la société BRC, ce que cette dernière n’a jamais remis en cause'; que les partenaires s’étaient accordés pour valoriser ce travail mais pour que le paiement intervienne à une date qui arrangerait la société BRC'; que cependant, la concluante n’a jamais été réglée des sommes dues au titre de son travail au sein de la société BRC';

— que les comptes de la société BRC, approuvés par l’ensemble des associés, chaque année, sauf pour les comptes clos au 31 décembre 2017, pour lesquels Monsieur T n’a pas été convoqué à l’assemblée générale, valorisent le travail fourni par la concluante et par d’autres prestataires à un montant total de 125.050 euros, ainsi qu’il résulte de la ligne comptable « Frais immobilisations ' Factures non parvenues » figurant dans les annexes des comptes'; que ce montant a donc été validé par l’ensemble des associés depuis déjà plusieurs exercices et n’a pas été remis en cause par l’administration fiscale dans le cadre d’un contrôle réalisé en 2017'; que sur ce total, le montant des prestations réalisées par la concluante s’élève à un montant de 83.737 euros HT, soit 100.484,40 TTC, comme l’atteste le cabinet comptable en charge des comptes jusqu’à l’exercice clos au 31 décembre 2016'; que c’est sur cette base que la concluante a fait parvenir sa facture à la société BRC';

— que si le jugement déféré a indiqué que la concluante ne justifie pas de l’existence de la créance en ne produisant pas de justificatifs, à savoir compte-rendus d’essais, calendrier, documents, il résulte du brevet déposé par la société BRC que les études ont été réalisées par A T'; que ses études et ses photos ont d’ail eurs été reprises par Monsieur C et Monsieur D lors du dépôt du brevet réalisé dans le cadre de leur nouvel e société et ayant donné lieu au patch Evexia'; qu’il ressort de plusieurs mails échangés entre Monsieur C, Monsieur T et le cabinet juridique en charge du dépôt du brevet, que Monsieur C demandait à Monsieur T de transmettre lesdites études ainsi que divers éléments'; que dans un mail du 5 août 2012, Monsieur C a proposé de mentionner comme inventeur C et T'; que Monsieur T a également rédigé des comptes rendus sur les tests réalisés, notamment avec les athlètes Salomon';

— que si la société BRC affirme que la mention de ce poste au passif du bilan sous la rubrique «Frais immobilisations ' Factures non parvenues » ne permet pas d’établir que la créance a été définitivement admise, la créance aurait alors dû être inscrite en compte courant d’associé au nom de Monsieur T, puisque la concluante n’étant pas directement associé de la société BRC, cela n’aurait pas pu être comptabilisé à la ligne comptable « compte courant d’associé »';

Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

— que si l’intimée énonce que les diligences réalisées par la concluante figurant aux pages 23 à 28 du brevet déposé en 2012 ne sauraient davantage justifier leur valorisation à la somme de 83.737 euros HT, malgré les justificatifs apportés par la concluante dans le cadre de la présente procédure, la société BRC n’explique pas sa position'; que ces diligences sont antérieures au brevet déposé en 2012 et ne correspondent donc pas aux frais de développement du brevet';

— que si l’intimée soutient que la concluante n’aurait pas respecté le formalisme requis par le pacte lors de la production de sa facture et aurait transmis des factures sans lien avec l’intérêt personnel de la société BRC, cette dernière tente d’orienter les débats vers un autre sujet en détail ant les frais qui auraient été directement remboursés à A T au titre de ses déplacements et autres, alors que ces frais de déplacement ont été remboursés à Monsieur T et ne font pas l’objet d’un contentieux; que la majorité des factures produites par l’intimée sont il isibles et datées de 2014'; que la facture transmise en pièce 8 par la société BRC ne comporte rien de plus que la mention «Frais de mission», sans aucune description';

— que si l’intimée a soutenu en première instance que la concluante ne justifiait d’aucune mission qui lui aurait été confiée par el e, et qu’el e ne justifiait d’aucun rapport contractuel avec el e et qu’el e ne connaissait que Monsieur T, le tribunal de commerce n’a pas retenu cette argumentation et a considéré que la concluante avait qualité pour agir';

— que devant la cour, l’intimée ne reprend donc pas la même argumentation pour invoquer le défaut de qualité à agir de la concluante, puisqu’el e affirme désormais que les diligences effectuées par la concluante ne correspondent pas au développement du brevet mais aux démarches engagées préalablement'; que l’intimée ne s’explique cependant pas sur ce sujet, alors que les démarches réalisées en vue d’un dépôt de brevet et des suites de ce dépôt demandent un travail important';

— que si l’intimée indique que la concluante ne peut se fonder sur le pacte d’associés qui prévoit, en son article 2, que les associés sont défrayés en échange de factures émises par leur société personnel e, ce défraiement indemnisant l’absence des associés dans leurs autres activités, il est cependant naturel que Monsieur T facture les prestations réalisées pour le compte de la société BRC au titre du développement du brevet, avec la structure qu’il a personnel ement créée'; que la société BRC et les associés connaissaient parfaitement cette organisation, ce qui les a amenés à signer le pacte d’associés prévoyant expressément que « les associés sont défrayés en échange de factures émises par leur société personnel e »'; que cela valait pour toutes les prestations réalisées par les associés depuis la création de l’intimée, et pas uniquement pour les prestations futures'; que la concluante a ainsi qualité pour agir'; Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI


- concernant l’argumentation opposée par l’intimée tenant à la prescription de l’action, retirée d’un mail de l’expert-comptable indiquant que les frais de développement ont été immobilisés en 2013, il résulte cependant des comptes de la société BRC arrêtés au 31 décembre 2014 et au 31 décembre 2016 que la dette n’a été immobilisée pour la première fois que dans les comptes clos au 31 décembre 2015, puisque dans les comptes de l’exercice clos au 31 décembre 2014, aucune ligne «Frais immobilisations ' Factures non parvenues » n’apparaît'; qu’il n’y a pas ainsi de prescription.

Prétentions et moyens de la société BRC':

Selon ses conclusions remises le 15 décembre 2020, el e demande, au visa des articles L110-4 du code de commerce et 1240 du code civil':

— de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté l’appelante de ses demandes, sauf en ce qu’il a écarté l’argument tiré du défaut de qualité à agir et n’a pas statué sur la fin de non recevoir tirée de la prescription';

— par conséquent, de juger irrecevables les demandes de l’appelante pour cause de prescription';

— de juger irrecevables ces demandes pour défaut de qualité à agir';

— subsidiairement, de débouter la société Nouvel e Terre pour défaut de justification de sa créance';

— d’infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la concluante de sa demande reconventionnel e';

— de condamner la société Nouvel e Terre au paiement de la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive';

— en toute hypothèse, de condamner la société Nouvel e Terre au paiement de la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

El e soutient':

— que suite à son immatriculation en 2011, el e ne disposait d’aucune trésorerie, de sorte qu’il a été convenu au terme du pacte d’associé du 6 mai 2013 que les gérants seraient défrayés'; que monsieur T a exigé rapidement le remboursement de frais que la trésorerie de la concluante, qui n’avait pas encore d’activité, ne lui permettait pas de régler'; qu’il a ainsi souscrit un crédit auprès du Crédit Agricole en imitant la signature de ses associés sur un procès-verbal d’assemblée Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

générale daté du 6 août 2015'; que désavoué par ses associés, A T a présenté sa démission de ses fonctions de cogérant à l’assemblée générale du 1er août 2016';

— qu’une convention de distribution exclusive a néanmoins été conclue au bénéfice de la société Active Santé détenue et dirigée par A T, mais que cette société ne respectant plus ni ses obligations de règlements, ni ses obligations de commandes minimum, la concluante a décidé de rompre le contrat de distribution exclusive le 18 septembre 2018 et a introduit une procédure en injonction de payer contre el e, ce qui a donné lieu à un jugement du tribunal de commerce de Romans sur Isère en sa faveur'; que depuis le dépôt de la requête en injonction de payer, monsieur T ne cesse d’engager des procédures à l’encontre de la concluante et de ses gérants (action aux fins d’expertise de gestion contre messieurs D et C en leur qualités de gérant, dont Monsieur T a été débouté en première instance et en appel, action en concurrence déloyale à l’encontre des cogérants devant le tribunal de commerce de Bobigny)';

— concernant la prescription de l’action, que la demande en paiement porte sur des faits datant de la période de «mise au point et développement des activités active patch 4U, dépôt du brevet»'; que ces prestations relèvent d’actions qui semblent avoir été engagées entre la constitution de la société le 27 mai 2011 et le dépôt du brevet intervenu le 7 août 2012'; que l’expert-comptable en charge du dépôt des comptes clos de la concluante jusqu’au 31 décembre 2016, précise dans son mail du 27 février 2017 que les frais de développement ont été immobilisés en 2013'; que l’action en paiement aurait dû intervenir dans les cinq ans du fait générateur de la créance, ce qui n’est pas le cas, la juridiction ayant été saisie courant 2019'; que cette action est prescrite en application de l’article L 110-4 du code de commerce';

— concernant le défaut de qualité à agir de l’appelante, que le pacte d’associés conclu le 6 mai 2013 prévoit que «'Les gérants sont défrayés en échange de factures émises par leur société unipersonnel e. La société BRC défraye les associés à la demi- journée. »'; que les diligences invoquées par l’appelante ne correspondent donc pas au « développement du brevet », ayant été comptabilisées en 2012, mais aux démarches engagées préalablement'; qu’el e ne peut donc se fonder sur le pacte d’associé conclu postérieurement au dépôt du brevet et ne comportant aucune stipulation lui conférant un effet rétroactif, pour justifier de sa qualité à agir, ne pouvant ainsi facturer des interventions antérieures au 6 mai 2013, le fait générateur étant antérieur à la signature du pacte d’associé';

— s’agissant du principe de la créance, qu’el e n’est pas justifiée, puisque l’appelante ne produit qu’une facture datée du 26 avril 2019, intitulée « mise au point et développement des activités active patch Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

4U, dépôt du brevet »'; que si el e se fonde également sur une attestation établie le 15 avril 2019 par l’expert-comptable de la concluante ayant arrêté les comptes au 31 décembre 2016, par laquel e il indique que la somme de 125.050 euros correspondant, conformément aux informations transmises par les gérants, aux montant HT en attente de facturation par les prestataires ayant travail é sur les études liées au brevet porté en immobilisation incorporel e, dont 83.737 euros pour la société Nouvel e Terre, ainsi que sur les pages 23 à 28 des annexes du brevet déposé en 2012, la mention faite dans le bilan sous la rubrique « Frais immobilisations ' Factures non parvenues » ne permet pas d’établir que la créance a été définitivement admise, car dans ce cas, el e aurait été inscrite en compte courant associé, au nom de Monsieur T que si ce dernier n’a pas émis de facture jusqu’en avril 2019, c’est parce que sa créance était difficilement justifiable'; que l’énonciation des diligences réalisées par la société Nouvel e Terre aux pages 23 à 28 du brevet déposé en 2012 ne saurait davantage justifier leur valorisation à la somme de 83.737 euros HT'; que ces diligences sont antérieures au brevet déposé en 2012 et ne correspondent donc pas aux frais de « développement du brevet »';

— qu’en outre, le pacte prévoit que les gérants seront défrayés en échange de factures émises par leur société unipersonnel e'; que Monsieur T n’a pas respecté ce formalisme, puisqu’il a transmis à Nicole T, sa mère, en charge à l’époque du traitement de la comptabilité de la société, des factures de frais sans lien avec l’intérêt personnel de la société'; que ces dépenses ne relèvent pas de l’objet de la facture établie par la société Nouvel e Terre au titre de la «mise au point et développement des Active patch 4U, dépôt de brevet »';

— concernant l’infirmation du jugement en ce qu’il a débouté la concluante de sa demande reconventionnel e en paiement de dommage et intérêts, qu’en raison de la qualité d’associé qu’occupe Monsieur T, tant au sein de la concluante qu’au sein de la société Nouvel e Terre, il est manifeste que son intention est de parvenir à la ruine de la concluante, qui ne dispose ni de la trésorerie, ni des réserves nécessaires au paiement d’une tel e somme, injustifiée par ail eurs'; que la multiplication des actions judiciaires menées à l’encontre de la concluante, engagées directement ou indirectement par Monsieur T, est fautive'; qu’el es ne sont que la riposte à une requête en injonction de payer parfaitement légitime portant sur une facture émise par la concluante consécutivement à une commande de patchs 4U dûment livrée à la société Active Santé, dirigée par Monsieur T.

*****

Il convient en application de l’article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties. Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

MOTIFS DE LA DECISION':

Le tribunal de commerce a exactement retenu que le pacte d’associés a prévu que les gérants sont défrayés en échange de factures émises par leur société personnel e, afin d’indemniser leur absence dans leurs autres activités. Il en résulte que pour les frais exposés par Monsieur T au titre de ses activités réalisées pour le compte de la société BRC, au détriment de ses fonctions dans la société qu’il détient personnel ement, seule la société Nouvel e Terre était à même d’adresser des factures à la société BRC. La société Nouvel e Terre a ainsi qualité et intérêt à agir dans la présente instance. Le jugement déféré ne peut ainsi qu’être confirmé en ce qu’il a déclaré son action recevable sur ce point.

Concernant l’existence de la créance de la société Nouvel e Terre, fondant ses demandes au titre du pacte d’associés conclut le 6 mai 2013, cette appelante a établi une facture de 83.737 euros HT le 26 avril 2019, portant comme motifs «'mise au point et développement des Active patch 4U dont suivi de tests en plusieurs phases, dépôt de brevet'».

Cette facture ne comporte aucun autre détail concernant la somme globale qu’el e énonce. Il est ainsi impossible d’en vérifier intrinsèquement le bien fondé, de même que la date des différentes prestations dont el e fait mention, puisque le détail de ces prestations n’est pas indiqué.

En outre, le pacte d’associés a rappelé que si le brevet sur les patchs a été déposé par A T et J C, l’objet de la société BRC est le développement et la commercialisation des produits, ainsi que la bonne application du brevet par l’industriel fabriquant les patchs, dont la société BRC assure la revente. Ce pacte conclu le 6 mai 2013 n’a pas prévu l’indemnisation des diligences réalisées pour le dépôt du brevet au cours de l’année 2012, mais cel es entreprises pour le développement de l’activité, à compter du pacte. Aucune stipulation ne prévoit qu’il ait un effet rétroactif.

Cependant, selon l’attestation du 22 février 2017 de Monsieur B, expert-comptable de la société BRC, produite par la société Nouvel e Terre, des frais de développement ont été immobilisés en 2013, mais sans facturation établie afin de ne pas fragiliser la société BRC. De ce fait, ces frais ont été comptabilisés sur un compte de factures sur immobilisation non parvenues. L’attestation établie le 15 avril 2019 par Monsieur J , expert-comptable de la société BRC pour l’exercice 2016, confirme que des frais ont été portés sur ce poste comptable à hauteur de 125.050 euros, dont 83.737 euros pour la société Nouvel e Terre. Ce témoin précise que cette ventilation lui a été transmise par les gérants.

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Il n’est pas contesté par les parties que ces comptes ont été approuvés par les associés de la société BRC. Il est en outre établi que le contrôle opéré par l’administration fiscale en 2017 (ainsi qu’énoncé par Monsieur B) n’a pas donné lieu à des observations sur ce poste comptable.

L’appelante a établi sa facture peu détail ée sur la base de ce poste comptable. La mention des frais comptabilisés à son profit en poste d’attente atteste que la société BRC, par l’intermédiaire de ses associés lors de l’approbation des comptes annuels, a reconnu l’existence de cette créance.

Il résulte en outre des anciens articles 1330 et 1331 du code civil, en vigueur jusqu’au 30 septembre 2016, et ainsi applicables en la cause, que les livres des marchands font preuve contre eux, de même que les registres et papiers domestiques font foi contre celui qui les a écrits, notamment lorsqu’ils contiennent la mention expresse que la note a été faite pour suppléer le défaut du titre en faveur de celui au profit duquel ils énoncent une obligation.

Tel est le cas en l’espèce de la comptabilité de la société BRC, comportant un compte d’attente pour des factures sur immobilisation non parvenues, dans l’attente d’une meil eure situation financière de la société.

Peu importe en conséquence que la société BRC soutienne que les diligences faisant l’objet de cette imputation dans ses livres aient concernées, en tout ou partie, des démarches engagées antérieurement à la conclusion du pacte d’associés en 2013, puisque le brevet a été déposé en 2012, ou qu’il ne s’agisse pas de frais de développement de ce brevet. Peu importe également que l’intimée soutienne que Monsieur T n’aurait pas respecté le formalisme prévoyant la remise de factures concernant les frais énoncés par le pacte d’associés, ou qu’il s’agirait de frais sans rapport avec le développement du brevet. Si tel avait été le cas, ces frais auraient été passés en compte courant d’associé de Monsieur T, et non dans un compte d’attente incluant la société Nouvel e Terre, pour une facturation à intervenir en application du pacte d’associés.

En conséquence, l’appréciation opérée par le tribunal de commerce sur le fait que l’immobilisation de cette facturation, même validée par l’ensemble des associés pendant plusieurs exercices, ne présumerai en rien que cette facturation soit liée à des dépenses réel es, ne peut qu’être invalidée par la cour. Il s’ensuit que la société Nouvel e Terre rapporte la preuve de l’existence de sa créance, tel e que constatée dans les livres comptables de la société Nouvel e Terre.

Concernant la prescription de l’action de la société Nouvel e Terre, au sens des articles 2240 du code civil, la reconnaissance par le débiteur Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription.

En l’espèce, la créance de l’appelante a été comptabilisée au bilan du 31 décembre 2016 dans le poste «'emprunts et dettes financières diverses'». La société BRC a ainsi reconnu l’existence de la créance à cette date, ce qui a entraîné une interruption de la prescription, puisque selon l’attestation de l’expert-comptable de la société BRC, les frais de développement ont été immobilisés dès 2013, mais sans factures établies afin de ne pas fragiliser la société BRC. Il en résulte que l’action en paiement introduite suite à l’émission de la facture émises par la société Nouvel e Terre le 26 avril 2019 est recevable sur ce point, l’assignation ayant été délivrée le 6 mai 2019.

En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en toutes ses dispositions. Statuant à nouveau, la cour condamnera la société BRC à payer à la société Nouvel e Terre la somme de 83.737 euros HT, soit 100.484,40 euros TTC.

Succombant devant cet appel, la société BRC verra sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive être rejetée. El e sera en outre condamnée à payer à la société Nouvel e Terre la somme de 3.500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu les articles 1315, 1330 et 1331 (anciens) et 2240 du code civil;

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions'; statuant à nouveau';

Déclare l’action en paiement de la société Nouvel e Terre recevable et bien fondée';

Condamne en conséquence la société BRC à payer à la société Nouvel e Terre la somme de 83.737 euros HT, soit 100.484,40 euros TTC';

Déboute la société BRC de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive';

Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

Condamne la société BRC à payer à la société Nouvel e Terre la somme de 3.500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile';

Condamne la société BRC aux dépens';

SIGNE par Mme FIGUET, Présidente et par Mme S D , Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

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