Cour d'appel de Limoges, Chambre civile, 21 février 2019, n° 18/00326

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Chronologie de l’affaire

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Village Justice · 17 décembre 2019

Le maître d'ouvrage peut rechercher la responsabilité du constructeur sur plusieurs fondements juridiques. On pense notamment à la responsabilité contractuelle de droit commun, aux garanties de parfait achèvement et de bon fonctionnement et, surtout, à la responsabilité civile décennale qui protège contre les désordres les plus graves. 1) L'étendue matérielle de la responsabilité civile décennale des constructeurs. La responsabilité civile décennale oblige les constructeurs à garantir le maître d'ouvrage, pendant une durée de dix ans suivant la réception, contre les désordres …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Limoges, ch. civ., 21 févr. 2019, n° 18/00326
Juridiction : Cour d'appel de Limoges
Numéro(s) : 18/00326
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Tulle, 5 mars 2018
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N° .

N° RG 18/00326 – N° Portalis DBV6-V-B7C-BHZAS

AFFAIRE :

M. T U Z, Mme W AA A

C/

Mme G AC H, M. C Y, SARL BLAYEZ IMMOBILIER

GV/ER

Autres demandes tendant à faire sanctionner l’inexécution des obligations du vendeur

Grosse délivrée à Me EYSSARTIER et Me DURAND-MARQUET, avocats

COUR D’APPEL DE LIMOGES

Chambre civile

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ARRET DU 21 FEVRIER 2019

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Le VINGT ET UN FEVRIER DEUX MILLE DIX NEUF la chambre civile a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :

ENTRE :

Monsieur T U Z

né le […] à […]

représenté par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de LIMOGES

Madame W AA A

née le […] à […]

représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de LIMOGES

APPELANTS d’une décision rendue le 06 MARS 2018 par le TRIBUNAL de GRANDE INSTANCE de TULLE

ET :

Madame G AC H

née le […] à […]

représentée par Me AC EYSSARTIER, avocat au barreau de BRIVE

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle 25% numéro 2018/004226 du 17/07/2018 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Limoges)

Monsieur C Y,

né le […] à […]

représenté par Me AC EYSSARTIER, avocat au barreau de BRIVE

SARL BLAYEZ IMMOBILIER,

dont le […]

représentée par Me Christophe DURAND-MARQUET, avocat au barreau de LIMOGES

INTIMES

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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l’affaire a été fixée à l’audience du 10 Janvier 2019. L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 novembre 2018.

La Cour étant composée de Madame R S, Présidente de chambre, de Monsieur E F et de Madame Géraldine VOISIN, Conseillers, assistés de Madame P Q, Greffier placé. A cette audience, Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, a été entendue en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.

Puis Madame R S, Présidente de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 21 Février 2019 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

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LA COUR

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FAITS ET PROCÉDURE

Suivant compromis signé le 6 décembre 2012, puis acte notarié en date du 30 mars 2013, M. C Y et Mme G H son épouse ont acquis de M. T-U Z et de Mme W-AA A une maison d’habitation à ossature bois située Cournilloux à Valièrgues (19), par l’intermédiaire de la SARL BLAYEZ IMMOBILIER, agent immobilier, pour le prix de 108 000 €.

Six mois environ après cet achat, les époux C Y ont constaté une activité nocturne dans les boiseries. Ils ont alors fait analyser leur maison par un spécialiste, M. X, qui a diagnostiqué des traces de dégradations biologiques dues à la présence dans le bois de leur chalet d’insectes à larves xylophages et d’un champignon de pourriture fibreuse non identifié entraînant des dégradations progressives avec, à terme selon lui, un risque de rupture de la structure en bois.

En outre, les époux Y ont constaté l’absence de fonctionnement du poêle à granulés.

==0==

Au regard de ces désagréments, ils ont fait assigner en référé M. T-U Z et Mme W-AA A devant le tribunal de grande instance de Brive aux fins de voir ordonner une expertise et de les voir condamner à leur payer une provision de 3 000 €.

Par ordonnance de référé rendue le 13 février 2014, le président du tribunal de grande instance de Brive a ordonné une expertise confiée à M. I B et a condamné M. T-U Z et Mme W-AA A à verser aux époux Y une provision d’un montant de 1 000 €.

L’expert judiciaire a déposé son rapport le 8 janvier 2015.

Il conclut en substance que la maison est infestée par des insectes xylophages, car le bois utilisé n’a pas été traité initialement. Seule la destruction de l’immeuble est envisageable en l’absence de traitement possible.

En outre, le poêle à bois n’a pas été installé dans les règles de l’art.

==0==

Par acte d’huissier délivré le 12 janvier 2016, les époux C Y ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Tulle la SARL BLAYEZ IMMOBILIER aux fins principalement de la voir condamnée à leur payer la somme de 30 000 € de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice causé par le non-respect de son obligation de conseil.

Par actes d’huissier délivrés les 12 et 13 janvier 2016, les époux Y ont également fait assigner devant le tribunal de grande instance de Tulle M. Z et Mme A aux fins de les voir condamnés à leur payer, sur le fondement des dispositions des articles 1147, 1382 et 1792 du code civil, et à titre subsidiaire sur le fondement de l’article 1641 du code civil, les sommes suivantes :

—  125 920 € au titre du remboursement des frais d’acquisition de l’immeuble,

—  15 000 € au titre du trouble de jouissance,

—  3 650 € au titre de la mise en conformité du poêle à granulés,

—  5 745,01 € au titre de la surconsommation de chauffage,

—  5 000 € au titre du préjudice moral.

Par jugement rendu le 6 mars 2018, le tribunal de grande instance de Tulle a :

— condamné solidairement M. T-U Z et Mme W-AA A à verser aux époux C Y la somme de 107 000 € en réparation de leur préjudice matériel, au motif qu’en vertu des dispositions de l’article 1792-1 du code civil, ils sont réputés constructeurs de l’immeuble litigieux et par conséquent responsables de plein droit des dommages causés par les insectes xylophages infestant la maison à ossature bois qu’ils ont vendue aux époux Y en 2013 ;

— condamné solidairement M. Z et Mme A à verser aux époux Y la somme de 5 000 € en réparation de leur préjudice de jouissance ;

— dit que toute provision dont le versement est dûment justifié vient en déduction de ces sommes,

— débouté M. C Y et Mme G H épouse Y de leurs autres demandes formulées à l’encontre de M. T-U Z et de Mme W-AA A ;

— débouté M. C Y et Mme G H épouse Y de leurs demandes formulées à l’encontre de la Sarl BLAYEZ IMMOBILIER ;

— condamné solidairement M. T-U Z et Mme W-AA A à payer à M. C Y et à Mme G H épouse Y la somme indivise de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

— condamné solidairement M. C Y et Mme G H épouse Y à payer à la SARL BLAYEZ IMMOBILIER, la somme de 1 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné M. T-U Z et Mme W-AA A aux dépens ;

— rejeté la demande d’exécution provisoire du jugement.

==0==

M. Z et Mme A ont interjeté appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la cour le 5 avril 2018.

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées le 3 octobre 2018, M. T-U Z et Mme W-AA A demandent à la cour de :

— dire et juger recevable et fondé leur appel ;

— réformer le jugement déféré,

— débouter les époux C Y de leurs demandes et de leur appel incident ;

subsidiairement,

— ordonner une mesure d’expertise confiée à tel expert qu’il plaira à la cour de désigner en lui donnant pour mission :

— d’entendre les parties en leurs explications

— de se faire remettre les dossiers

— de se rendre sur les lieux afin de constater ou non la présence d’insectes xylophages, de les localiser, de préciser à quelle date ils ont pu apparaître

— de constater la conformité ou non de l’installation du poêle à bois

— de décrire l’étendue des désordres, d’en rechercher les causes, d’indiquer les moyens d’y remédier et de chiffrer les travaux de remise en état et donner tout élément susceptible de déterminer l’éventuel préjudice ;

— condamner les époux Y aux entiers dépens et au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Ils soutiennent que l’expert judiciaire procède par affirmations, sans investigation approfondie. La preuve des vices de construction invoqués n’est pas rapportée ni celle de l’atteinte à la solidité de

l’ouvrage, les époux C Y occupant toujours leur maison.

Ils contestent l’évaluation forfaitaire du coût de la démolition de l’immeuble faite par le premier juge à hauteur de 12 000 €.

Les époux Y ne justifient pas d’un préjudice de jouissance car ils habitent toujours l’immeuble en cause.

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées le 27 juillet 2018, les époux C Y demandent à la cour de :

— dire infondé l’appel formé par M. T-U Z et Mme W-AA A,

— faire droit à leur appel incident :

à titre principal, sur le fondement des articles 1792, 1147, 1382 du code civil, et, subsidiarement, sur le fondement des articles 1641, 1147, 1382 du code civil,

— condamner solidairement, avec exécution provisoire, les consorts A-Z à leur verser les sommes de :

—  107 000 € au titre du remboursement des frais d’acquisition de l’immeuble sis Cornilloux à Valiergues,

—  15 000 € au titre du trouble de jouissance,

—  3 650 € au titre de la mise en conformité du poêle à granulés,

—  5 745,01 € au titre de la surconsommation de chauffage,

—  5 000 € au titre du préjudice moral,

outre la somme de 3 000 € sur le fondement de 700 code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 19 septembre 2018, la SARL BLAYEZ IMMOBILIER, agence immobilière, demande à la cour de :

— constater qu’aucune des parties à l’instance ne forme en cause d’appel de demande à son encontre ;

— confirmer le jugement rendu en ce qu’il a considéré que le rapport d’expertise judiciaire ne lui était pas opposable et qu’elle n’avait commis aucune faute susceptible d’engager sa responsabilité ;

— dire que, si une nouvelle mesure d’expertise judiciaire devait être ordonnée, cette dernière ne pourrait s’étendre à elle puisqu’aucune demande n’a été formée à son encontre ;

— condamner la partie succombante à lui payer la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Christophe DURAND-MARQUET, avocat.

Elle fait notamment valoir qu’aucune demande n’a été formée contre elle en appel.

==0==

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la mise en cause de la SARL BLAYEZ IMMOBILIER

Attendu qu’il convient de constater que ni les époux C Y, ni les consorts Z-A ne forment de demande en appel à l’égard de la SARL BLAYEZ IMMOBILIER laquelle sollicite la confirmation du jugement déféré'; que par conséquent, le jugement du 6 mars 2018 est devenu définitif en ses dispositions concernant la SARL BLAYEZ IMMOBILIER';

I SUR LA RESPONSABILITÉ DE M. T-U Z ET DE MME W-AA A

Attendu qu’aux termes de l’article 1792 du code civil, tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de cet ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination ;

Attendu qu’en l’espèce, il résulte du compromis de vente signé le 6 décembre 2012 que M. T-U Z et Mme W-AA A ont vendu à M. C Y et Mme G AC H, épouse Y, une maison à ossature bois qu’ils ont fait construire en 2005 ;

Qu’ils se sont engagés aux termes du compromis (seul versé aux débats) à assurer aux acquéreurs une garantie sur les travaux de gros oeuvre jusqu’à l’expiration d’une durée de dix ans, à compter de l’achèvement des travaux, soit jusqu’au 31 décembre 2015';

Attendu qu’il se déduit de ces éléments que M. T-U Z et Mme W-AA A doivent être réputés constructeurs de la maison litigieuse au sens de l’article 1792-1 2° du code civil';

1) Sur les insectes xylophages

Attendu que le rapport d’expertise judiciaire, ainsi que le compte-rendu n°1 établi par l’expert le 12 juin 2014, comprennent des éléments précis et circonstanciés selon lesquels l’apparition d’insectes xylophages est survenue six mois après la prise de possession des lieux par les époux C Y le 30 mars 2013 ;

Que leur présence indubitable est due à l’absence de traitement des bois lors de la construction initiale ;

Que les dégâts sont irréparables avec les moyens connus à ce jour pour le traitement des bois, que ce soit par badigeonnage ou par traitement gazeux ; qu’ainsi, la maison sera rapidement inhabitable compte tenu de son insalubrité;

Attendu que M. T-U Z et Mme W-AA A reprochent à l’expert judiciaire d’avoir procédé par voie d’affirmations catégoriques sans décrire les phénomènes observés, ni démontrer le mécanisme de destruction atteignant la solidité de l’ouvrage au moyen d’une analyse technique et détaillée des conditions de son intervention';

Attendu cependant que, comme l’a relevé le premier juge, ces reproches ne sont pas fondés dès lors’que :

— l’expert judiciaire, aux termes de son rapport définitif, indique avoir examiné les différentes parties

de la maison,

— le compte-rendu n°1 de l’expert judiciaire en date du 12 juin 2014 contient des précisions suffisantes sur le déroulement des opérations d’expertise et sur les conditions d’habitation des acheteurs :

'A l’extérieur :

- nombreux trous dans les poteaux bois de l’auvent,

- des clins de bois déposés précédemment montrent à leur envers des traces de galeries.

A l’intérieur : des traces d’activité sous la forme de trous' ;

ainsi, les observations de l’expert judiciaire relatives à l’existence de trous et galeries constatés à l’intérieur comme à l’extérieur de la maison ne font que confirmer les conclusions du précédent rapport établi par M. X, qui bien que non contradictoire, dénonçait la présence d’insectes et d’une activité intense à l’intérieur des murs et cloisons intérieures après réalisation de sondages ;

— l’expert judiciaire a été accompagné par un spécialiste de traitement insecticide au moment des opérations d’expertise,

— il se déduit de la préconisation de l’expert judiciaire visant à détruire puis reconstruire la maison au vu de l’ampleur de l’infestation des insectes xylophages que ce désordre compromet la solidité de l’ouvrage ainsi que sa destination,

— cette conclusion suffit à justifier que l’expert judiciaire n’ait pas retenu, pour être sans lien avec le litige, l’un des devis de plomberie, menuiseries intérieures ou mises en lasure de bois que M. T-U Z et Mme W-AA A lui ont soumis ;

Attendu en outre que M. T-U Z et Mme W-AA A reprochent également à l’expert judiciaire d’avoir considéré qu’il existait un lien de parenté entre M. K A de l’entreprise de construction et Mme A défenderesse'; Que toutefois, cette indication est sans incidence sur l’issue à donner au litige';

Qu’en tout état de cause, M. T-U Z et Mme W-AA A n’ont émis aucun dire à expert, que ce soit au sujet du déroulement des opérations d’expertise ou sur ce dernier point ;

Attendu que M. T-U Z et Mme W-AA A se prévalent également de l’attestation du 5 septembre 2016 établie par Mme L M, négociatrice en immobilier, pour soutenir que les époux Y ont réalisé une contre-visite lors de l’acquisition de la maison en présence de M. N O, spécialiste de la construction de maisons en bois, lequel s’est montré «'rassurant'» et ne «'semblait pas inquiet'»';

Que néanmoins, cette visite qui a eu lieu en novembre 2012, sans que l’on ne dispose d’autres précisions sur son déroulement, ne suffit pas à remettre en cause la présence à cette date d’insectes xylophages dont la détection ne peut être établie de façon certaine que par le biais d’inspections réalisées par un professionnel agréé';

Attendu qu’au contraire, ce document démontre que le vice n’était pas apparent au moment où les époux C Y ont acheté la maison d’habitation en cause ;

Attendu par conséquent au vu de l’ensemble de ces éléments que la présence massive d’insectes xylophages constitue ici un désordre de nature décennale, car de nature à compromettre la solidité de

l’ouvrage et sa destination, engageant la responsabilité de M. T-U Z et de Mme W-AA A sur le fondement des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil, sans qu’ils puissent se prévaloir de la clause d’exclusion de garantie insérée au compromis de vente en matière de termites, celle-ci étant réputée non écrite en application de l’article 1792-5 du code civil';

2) Sur le poêle à bois

Attendu qu’il résulte du devis signé le 1er octobre 2008 et des factures des 7 octobre 2008 et 28 novembre 2008 que M. T-U Z et Mme W-AA A avaient fait installer un poêle à granulés de bois par l’entreprise Plomberie J.P. située à la Palisse';

Attendu que l’expert judiciaire a retenu que ce poêle à bois était 'inutilisable' car le cahier des charges n’avait pas été respecté en ce que l’évacuation des fumées doit se faire hors toit et non directement à travers la cloison comme c’est le cas en l’espèce ;

Attendu que le poêle à bois constitue un équipement au sens de l’article 1792-2 du code civil ; que son absence totale de fonctionnement rend l’ouvrage impropre à sa destination ;

Attendu que si M. T-U Z et Mme W-AA A prétendent que le poêle fonctionnait sans difficulté particulière et que les évacuations dont l’installation est critiquée par l’expert étaient visibles au moment de la vente, seule l’expertise judiciaire a pu permettre de révéler l’existence du désordre dont est affecté le poêle à bois, à savoir un défaut de conformité au cahier des charges ;

Qu’en conséquence, M. T-U Z et Mme W-AA A doivent être déclarés responsables de ce désordre sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil ;

Attendu en conséquence qu’il y a lieu de réformer le jugement déféré en ce qu’il a écarté à tort l’application de la garantie décennale due par M. T-U Z et Mme W-AA A aux époux Y s’agissant du désordre relatif au poêle à bois ;

3) Sur la contre-expertise

Attendu que M. T-U Z et Mme W-AA A demandent subsidiairement à la cour d’ordonner une nouvelle expertise en soutenant que le rapport de l’expert judiciaire M. B ne constituerait pas un travail sérieux ;

Mais attendu que M. T-U Z et Mme W-AA A ne produisent en appel aucune pièce susceptible de venir contredire les conclusions expertales';

Qu’en conséquence, ils seront déboutés de leur demande de nouvelle expertise formée à titre subsidiaire';

II SUR LA RÉPARATION DES PRÉJUDICES

1) Sur le préjudice matériel

Attendu que les époux C Y demandent la confirmation du jugement attaqué en ce qu’il a condamné M. T-U Z et Mme W-AA A à leur verser, sur le fondement de l’article 1792 du code civil, la somme de 107 000 € au titre du préjudice matériel subi ;

Attendu que l’expert judiciaire a en effet indiqué que la réparation du désordre lié à la présence d’insectes xylophages correspond au prix d’acquisition du bien immobilier, compte tenu de la nécessité d’une démolition-reconstruction ;

Attendu que le montant retenu en première instance à hauteur de 107 000€ correspond au prix d’acquisition de la maison, soit 108 000 €, auquel a été retranché le montant non contesté du prix du terrain de 13 643,58 € sur la base de sa valeur en 2003, soit une somme arrondie à 95 000 €, à laquelle il convient d’ajouter les frais de démolition que le juge a chiffré forfaitairement à la somme de 12 000 € compte tenu de la surface de l’habitation';

Attendu que si l’application d’un forfait est contesté par M. T-U Z et Mme W-AA A, ces derniers ne produisent aucun élément permettant de remettre en cause ce montant de 12 000 € qui relève d’une juste évaluation opérée par le juge, laquelle ne justifie pas à elle seule d’ordonner une nouvelle expertise ; que par conséquent, le jugement sera confirmé de ce chef';

2) sur la demande au titre de la mise en conformité du poêle à granulés

Attendu qu’il ne peut pas être considéré que le préjudice des époux C Y n’existerait pas, en ce que le prix du poêle à bois était inclus dans le prix de vente de la maison dont ils obtiennent remboursement ;

Qu’en effet, M. T-U Z et Mme W-AA A sont responsables, sur le fondement de la garantie décennale, du désordre affectant ce poêle, si bien qu’ils doivent indemniser les époux Y du préjudice subi du fait de son dysfonctionnement en leur qualité de constructeurs ;

Qu’en conséquence, il convient de condamner solidairement M. T-U Z et Mme W-AA A à payer aux époux C Y la somme de 3 650 € correspondant à la remise en état du poêle à bois ;

3) Sur la surconsommation de chauffage

Attendu que les époux C Y versent aux débats des factures d’électricité pour la période courue entre 2013 et 2015 ainsi qu’un calendrier de prélèvements mensuels pour 2015 aux fins de démontrer que le caractère inutilisable du poêle à bois a eu pour effet d’entraîner une augmentation importante de leur consommation électrique ;

Attendu cependant que ces pièces ne permettent pas de mesurer précisément la cause et l’évolution de la consommation d’électricité';

Attendu par ailleurs que le chiffrage proposé par les époux C Y correspond à la facturation TTC de leur consommation totale d’électricité laquelle ne tient pas compte de la part de la consommation utilisée à des fins autres que de chauffage et ne permet pas de déterminer la part de la hausse d’électricité imputable de façon directe et certaine au désordre relatif au poêle à bois lequel n’est utilisé qu’au moment des périodes hivernales ;

Qu’en conséquence, il convient de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a débouté les époux C Y de leur demande relative à l’indemnisation au titre d’une surconsommation de chauffage ;

4) Sur le préjudice de jouissance des époux C Y

Attendu que le préjudice de jouissance des époux C Y est caractérisé par l’absence de chauffage, l’altération de la fonction d’habiter en raison de la présence d’insectes xylophages provoquant à terme une insalubrité des lieux et l’obligation de déménager ;

Attendu que, contrairement à ce que soutiennent M. T-U Z et Mme W-AA A, le maintien actuel des époux Y dans cette habitation, vraisemblablement dans l’attente de l’issue de la procédure judiciaire, ne fait que contribuer à leur faire courir un risque plus grand, compte tenu de

la prolifération inévitable des insectes et de la détérioration continue des éléments en bois mettant en péril la solidité de l’ouvrage ;

Attendu qu’en conséquence, il convient de réformer le jugement déféré pour porter le montant de la condamnation solidaire de M. T-U Z et Mme W-AA A à indemniser les époux C Y à hauteur de 10 000 € au titre du préjudice de jouissance ;

5) Sur le préjudice moral des époux C Y

Attendu que les époux C Y justifient d’un préjudice moral caractérisé par la déception inhérente à l’achat d’un logement principal affecté par d’importants désordres, ainsi que par les contraintes inhérentes à une procédure judiciaire qui perdure ; qu’ainsi, le jugement de première instance sera infirmé et M. T-U Z et Mme W-AA A seront condamnés solidairement à payer aux époux Y la somme de 3 000 € en réparation de leur préjudice moral';

— Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Attendu que, succombant en leurs prétentions, M. T-U Z et Mme W-AA A seront condamnés solidairement aux dépens d’appel, et leur distraction sera accordée au profit de Maître Christophe DURAND-MARQUET, avocat, pour ceux exposés par la Sarl BLAYEZ IMMOBILIER, en application de l’article 699 du code de procédure civile';

Attendu qu’il est équitable de condamner solidairement M. T-U Z et Mme W-AA A à payer :

— aux époux C Y la somme indivise de 1 500 €,

— à la Sarl BLAYEZ IMMOBILIER la somme 1 000 €,

sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

— Sur l’exécution provisoire

Elle est de droit.

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PAR CES MOTIFS

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LA COUR

Statuant par décision contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

CONSTATE que le jugement du 6 mars 2018 rendu par le tribunal de grande instance de Tulle est devenu définitif en ses dispositions concernant la SARL BLAYEZ IMMOBILIER';

DÉBOUTE M. T-U Z et Mme W-AA A de leur demande tendant à voir ordonner une nouvelle expertise ;

CONFIRME le jugement rendu le 6 mars 2018 par le tribunal de grande instance de Tulle rendu, en ce qu’il a':

— condamné solidairement M. T-U Z et Mme W-AA A à payer à M. C Y et Mme G H son épouse la somme de 107 000 € en réparation de leur préjudice matériel,

— débouté M. C Y et Mme G H son épouse de leur demande au titre de la surconsommation d’électricité,

— débouté M. C Y et Mme G H son épouse de leurs demandes présentées contre la SARL BLAYEZ IMMOBILIER,

— condamné solidairement M. T-U Z et Mme W-AA A à payer à M. C Y et à Mme G H son épouse la somme de 1 500 € et la somme de 1 000 € à la SARL BLAYEZ IMMOBILIER sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens ;

INFIRME le jugement du tribunal de grande instance de Tulle rendu le 6 mars 2018, en ce qu’il a':

— condamné solidairement Mme W-AA A et M. T U Z à verser à M. C Y et Mme G H son épouse la somme de 5 000 € en réparation de leur préjudice de jouissance';

— débouté M. C Y et Mme G H son épouse de leurs autres demandes formulées à l’encontre de M. T-U Z de Mme W-AA A ;

Statuant à nouveau de ces chefs :

—  CONDAMNE solidairement Mme W-AA A et M. T U Z à payer à M. C Y et à Mme G H son épouse la somme de 3 650 € (somme globale) correspondant à la remise en état du poêle à bois ;

—  CONDAMNE solidairement Mme W-AA A et M. T U Z à payer à M. C Y et à Mme G H son épouse la somme de 10 000 € (somme globale) en réparation de leur préjudice de jouissance';

—  CONDAMNE solidairement Mme W-AA A et M. T U Z à payer à M. C Y et à Mme G H son épouse la somme de 3 000 € (somme globale) en réparation de leur préjudice moral';

CONDAMNE solidairement Mme W-AA A et M. T U Z à payer à :

— M. C Y et à Mme G H son épouse la somme de 1500€ (somme globale),

— la SARL BLAYEZ IMMOBILIER la somme de 1 000 € (somme globale),

sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE solidairement Mme W-AA A et M. T U Z aux dépens d’appel, avec bénéfice de distraction au profit de Me Christophe DURAND-MARQUET, avocat, pour ceux exposés par la SARL BLAYEZ IMMOBILIER, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

P Q. R S.

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Limoges, Chambre civile, 21 février 2019, n° 18/00326