Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 17 février 2022, n° 19/04024

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 3e ch. a, 17 févr. 2022, n° 19/04024
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 19/04024
Décision précédente : Tribunal de commerce de Lyon, 19 mai 2019, N° 2018j00658
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 19/04024

N° Portalis DBVX-V-B7D-MNFK


Décision du Tribunal de Commerce de LYON


Au fond

du 20 mai 2019


RG : 2018j00658


S.A.S. Y ET ASSOCIES


C/


SAS X ET ASSOCIES


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 17 Février 2022

APPELANTE :

S.A.S. Y ET ASSOCIES

[…]

[…]


Représentée par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547 et ayant pour avocat plaidant, Me Mohamed NAÏT KACI, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

SAS X ET ASSOCIES

[…]

[…]


Représentée par Me Ophélie MICHEL de la SELARL VIAJURIS CONTENTIEUX, avocat au barreau de LYON, toque : 2109, substitué par Me Childéric PAILLARD-BRUNET, avocat au barreau de LYON

INTERVENANTE VOLONTAIRE :
S.E.L.A.R.L. A, prise en la personne de Maître B C, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Y ET ASSOCIES

[…]

[…]


Représentée par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547 et ayant pour avocat plaidant, Me Mohamed NAÏT KACI, avocat au barreau de PARIS

* * * * * *


Date de clôture de l’instruction : 03 Juin 2020


Date des plaidoiries tenues en audience publique : 09 Décembre 2021


Date de mise à disposition : 17 Février 2022


Audience présidée par Catherine CLERC, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Julien MIGNOT, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :


- Anne-Marie ESPARBÈS, président


- Hélène HOMS, conseiller


- Catherine CLERC, conseiller


Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,


Signé par Anne-Marie ESPARBÈS, président, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSÉ DU LITIGE


Par jugement du 1er août 2006, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la SAS BMA dont l’associé majoritaire était la SAS Y et Associés (la société Y) et l’actionnaire minoritaire, Mme X, également dirigeante.


La créance de 98'016,81€ déclarée à titre chirographaire par la société Y au passif de cette procédure collective du chef de son compte courant d’associé, a été admise par le juge-commissaire le 19 juillet 2007.


Le même tribunal de commerce, par jugement du 11 décembre 2007, a arrêté un plan de continuation d’une durée de dix ans (l’échéance en étant fixée au 31 décembre 2017) au profit de la société BMA, qui contenait notamment’les deux dispositions suivantes :
«'- autorise la cession des actions de la société Y pour 1€ et de M. Y pour 1€ à Mme X. Une fois cette opération réalisée incessibilité des actions pendant toute la durée du plan, sauf accord préalable du tribunal,


- la créance de la société Y sera réglée hors plan, après l’apurement de la totalité du passif.'»


Le 31 juillet 2008, les sociétés Y et BMA ont signé une convention «'abandon de créance avec clause résolutoire'» par laquelle la société Y acceptait la remise de la totalité de sa créance (compte courant d’associés de 98'071€) sous la condition résolutoire de l’exécution complète par la société BMA du plan de redressement, cette dernière s’engageant en cas de réalisation de cette condition au 31 décembre 2017, à réinscrire au compte courant la créance de la société Y.


Il était par ailleurs prévu que cette convention serait résolue de plein droit notamment en cas de cession du fonds de commerce appartenant à la société BMA ou modification dans la répartition de son capital social, la totalité de la créance de la société Y devenant alors intégralement et immédiatement exigible et étant en conséquence inscrite de façon immédiate au crédit de son compte courant et ce, dans sa totalité.


Le 5 février 2009, la société Y a cédé à Mme X, moyennant le prix de 1 euro, les actions qu’elle détenait dans le capital de la société BMA conformément au plan de continuation


La société BMA a transféré son siège social à Lyon et est devenue la SAS X et Associés (la société X), modifications actées au plan de continuation par deux jugements du tribunal de commerce de Paris des 26 juin 2012 et 30 décembre 2015.


Le plan de continuation étant terminé, la société Y a réclamé paiement de la somme de 98'016,81€ à la société X suivant courrier recommandé avec AR du 2 janvier 2018 demeuré infructueux.


Par jugement du 5 avril 2018, le tribunal de commerce de Paris a clôturé la procédure de redressement judiciaire de la société X en constatant que le plan de continuation avait été exécuté.


Par acte extrajudiciaire du 10 avril 2018, la société Y a fait assigner la société X en paiement devant le tribunal de commerce de Lyon.


Par jugement du 20 mai 2019, le tribunal de commerce précité a :

déclaré l’action de la société Y non prescrite,•

• constaté que la créance de 98'016,81€ en principal ne peut plus être inscrite au compte courant d’associés de la société X,

• débouté la société Y de sa demande de voir la société X condamnée à lui payer la somme de 98'016,81€ en principal,

• rejeté la demande de la société X à titre de dommages et intérêts pour abus de droit d’agir, ainsi que sa demande de condamnation d’une amende civile au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile, rejeté comme inutiles ou non fondées toutes autres demandes des parties,•

• condamné la société Y à payer à la société X la somme de 1'500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, condamné la société Y aux entiers dépens.•


La société Y a interjeté appel par acte du 11 juin 2019 des seules dispositions du jugement rejetant ses demandes et la condamnant à paiement de frais de procédure et aux dépens.
La société Y a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Paris du 3 mars 2020 et la SELARL A, prise en la personne de Me C, a été désignée liquidateur judiciaire (le liquidateur judiciaire).


Par conclusions n°3 du 10 avril 2020, fondées sur l’article 1134 du code civil, la société Y et son liquidateur judiciaire, partie intervenante, demandent à la cour de :

confirmer le jugement déféré en ce qu’il a dit la société Y recevable en son action,• infirmer le jugement pour le surplus•

et statuant à nouveau :

• condamner la société X à payer au liquidateur judiciaire, ès qualités, la somme de '98'016,81€ en principal, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l’assignation, débouter la société X de toutes ses demandes,•

• condamner la société X à payer au liquidateur judiciaire ès qualités la somme de 8'500€ au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

• condamner la société X aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.


Par conclusions du 9 mars 2020, fondées sur les anciens articles 1101, 1108, 1134, 1142 et 1147 et sur les nouveaux articles 1186 et 2224 du code civil, 32-1, 122, 700 et 900 du code de procédure civile, la société X demande à la cour de':

confirmer le jugement en ce qu’il a :•

• constaté que la créance de 98'016,81€ en principal ne peut plus être inscrite à son compte courant d’associés, débouté la société Y de l’ensemble de ses prétentions et demandes,•

• condamné la société Y à lui verser la somme de 1'500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux dépens,

infirmer le jugement en ce qu’il a :• déclaré l’action de la société Y non prescrite,•

• rejeté sa demande de dommages et intérêts au titre de l’abus de droit d’agir, outre une condamnation au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile laissée à l’appréciation de la juridiction,

statuant à nouveau

• déclarer en tout état de cause l’action de la société Y irrecevable pour être prescrite et rejeter en conséquence l’ensemble de ses prétentions et demandes,

• condamner la société Y à lui payer la somme de 10'000€ à titre de dommages et intérêts pour abus de droit d’agir, outre la condamnation à une amende civile au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile que la juridiction appréciera,

• condamner la société Y à lui payer la somme de 10'000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’instance et d’exécution.

MOTIFS


A titre liminaire, il est rappelé que la cour n’est pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendent inopérantes.


Il est, en tant que de besoin, donné acte au liquidateur judiciaire ès qualités de son intervention volontaire en cause d’appel.


Sur la recevabilité de l’action en paiement du compte courant d’associé de la société Y


La société X soutient l’irrecevabilité de cette action comme étant prescrite depuis le 5 février 2014 en faisant valoir que':


- le droit de la société Y de demander l’inscription de sa créance en compte courant est né le 5 février 2009, date à laquelle elle a cédé les titres qu’elle détenait dans le capital de la société BMA'; c’est à partir de cette date qu’a commencé à courir le délai de prescription quinquennale dans lequel était enfermé l’exercice de ce droit né à la suite de la modification dans la répartition du capital de la société BMA comme stipulé dans la convention d’abandon de créance signée le 31 juillet 2008'; l’achèvement du plan de redressement ne peut remettre en cause l’acquisition de cette prescription,


- cette convention lui imposait seulement d’inscrire la créance de la société Y en compte courant d’associé si celle-ci le lui demandait dans le délai prévu et non de la payer, et l’article L.622-7 du code de commerce ne fait pas interdiction d’inscrire une somme en compte courant d’associé'; la société Y est donc mal fondée à soutenir qu’elle était dans l’impossibilité légale de solliciter cette inscription en compte courant d’associé du fait de la procédure collective,


- la convention signée le 31 juillet 2008 est régulière, le jugement du tribunal de Paris du 11 décembre 2007 n’étant pas la loi des parties’et ne privant pas celle-ci de préciser leurs rapports et le régime de la créance dans une convention ultérieure.


La société Y réplique que':


- sa créance a été admise définitivement par le juge-commissaire au passif de la procédure collective de la société BMA (devenue X), elle ne pouvait pas agir en remboursement de sa créance en application de l’article L.622-7 du code de commerce, et sa déclaration de créance, ayant été effectuée en 2006 avant la réforme du droit des procédures collectives de 2014, avait la nature d’une action en justice et a interrompu la prescription des actions relatives à cette créance jusqu’à la clôture de la procédure collective,


- elle n’a retrouvé son droit d’agir qu’à la clôture du plan de redressement après constat de son exécution, soit à la date du jugement du tribunal de Paris du 5 avril 2018, ledit plan ayant clairement dit que sa créance sera réglée hors plan, après apurement du passif,


-son action en paiement initiée par assignation du 10 avril 2018 n’est donc pas prescrite.


Ce qui doit être retenu comme juridiquement exact, étant au surplus relevé que l’action en justice de la société Y tend exclusivement à obtenir paiement de la somme de 98'016,81€ et non pas à voir inscrire cette créance au compte courant d’associé de la société X contrairement à ce que motive cette dernière au soutien de sa fin de non-recevoir tirée de la prescription.


C’est donc à bon droit que les premiers juges ont dit non prescrite cette action en paiement.


Sur le bien fondé de cette action en paiement


La société Y et son liquidateur protestent contre le rejet de la demande en paiement de la somme de 98'016,81€ prononcé par le jugement déféré en faisant valoir que':


- une convention de compte courant d’associé s’analyse en un prêt consenti à la société et qu’à ce titre, le titulaire du compte cumule deux qualités, celle de créancier et celle de prêteur de fonds, et son abandon ne se présume pas, même dans le cas où le titulaire du compte cède l’intégralité des titres qu’il détient dans la société,


- la convention signée le 31 juillet 2008 ne prévoit aucunement que la société Y a renoncé au remboursement de sa créance dans l’hypothèse d’une sortie totale du capital de la société BMA (X), la circonstance qu’elle ne soit désormais plus associée de la société X impliquant seulement que ce remboursement intervienne en numéraire, et non pas par une inscription en compte courant,


- le remboursement de sa créance a été admis par le tribunal de commerce de Paris qui en a réservé le paiement après l’exécution du plan,


- la société X est mal fondée à lui contester le bénéfice de sa créance alors que celle-ci en a fait mention dans ses comptes annuels arrêtés au 30 septembre 2009 soit après la cession de ses titres à Mme X le 5 février 2009 qui lui a fait perdre sa qualité d’associée, son rapport de gestion faisant également référence à son engagement financier de lui rembourser ladite créance, l’ensemble de ces actes valant reconnaissance de dette.


La société X oppose que':


- la société Y ne dispose d’aucun droit de créance'; ayant perdu sa qualité d’associée, elle ne peut pas inscrire une créance en compte courant dans ses livres'; la commune intention des parties au moment de la conclusion de la convention d’abandon de créance du 31 juillet 2008 était de subordonner le remboursement de la créance à la qualité d’associé de la société Y, cette convention ne prévoyant aucunement le remboursement dans l’hypothèse où celle-ci ne serait plus associée,


- la mesure sollicitée est impossible à mettre en 'uvre'; l’inscription en compte courant d’associé telle que prévue à la convention est une obligation de faire qui est empêchée par le seul fait de son créancier, la société Y ayant accepté de céder ses titres et de perdre sa qualité d’associée, qui ne peut se résoudre en dommages et intérêts et qui entraîne la caducité de la convention,


- les dispositions du jugement du 11 décembre 2007 n’ont pas vocation à primer sur la volonté des parties exprimée dans la convention d’abandon de créance signée le 31 juillet 2008, le tribunal ayant seulement repoussé le paiement de la créance de la société Y hors plan, après apurement de la totalité du passif, laissant ainsi le soin aux parties d’en prévoir les modalités dans ces limites,


- aucune reconnaissance de dette ne peut lui être opposée, la prise en compte de la créance litigieuse dans ses comptes sociaux procédant du principe comptable à l’égard de toute demande en paiement formée par des tiers,


- en tout état de cause, si la créance devait être retenue par la cour, la demande en paiement de la société Y ne peut être accueillie car contraire aux prévisions des parties portées dans la convention précitée fixant un échéancier et un plafond de paiement pour la dotation du compte courant d’associé de cette société.


Il est acquis que la créance de compte courant d’associé de la société Y a été inscrite au passif de la procédure collective de la société BMA pour la somme de 98'016,81€, que le tribunal de commerce de Paris a exclu du plan de redressement cette créance, en réservant le paiement hors plan, après exécution de celui-ci, c’est-à-dire l’apurement du passif.


La convention signée par les parties le 31 juillet 2008 mentionne en préambule que «'la société Y en sa qualité d’actionnaire étroitement intéressée à l’avenir de la société BMA et au redressement de sa situation financière, a exprimé sa confiance dans la capacité de la société BMA d’assurer son redressement'».
Y figure ensuite un paragraphe I «'remise de dette'» aux termes duquel «'le créancier consent par les présentes à la société BMA, la bénéficiaire, la remise de la totalité de la créance qu’il détient à son encontre eu égard à sa situation financière pour un montant total de 98'071€.'»


Son paragraphe II «'condition résolutoire'» prévoit «'la remise de dette ci-dessus est consentie sous la condition résolutoire de l’exécution complète par la société BMA du plan de continuation dont bénéficie cette dernière jusqu’au 31 décembre 2017, et ce aux termes d’un jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 11 décembre 2007. En conséquence, conformément aux dispositions de l’article 1183 alinéa 1 du code civil, l’obligation née de la remise de dette ci-dessus définie au paragraphe I sera de plein droit résolue le 31 décembre 2017, en cas de réalisation de la condition résolutoire définie ci-dessus. En revanche, chacune des parties demeurera liée par les obligations souscrites aux présentes à défaut d’avènement de la condition résolutoire'».


Il s’en déduit que si le plan est complètement exécuté, la remise de dette consentie est résolue de plein droit ce qui implique que la société Y recouvre le bénéfice de sa créance de compte courant d’associé et que s’il n’est pas exécuté, la même société abandonne cette créance à la société BMA (X).


C’est à ce titre que cette convention organise les modalités de restitution de la créance de la société Y en cas de réalisation de cette condition résolutoire, en prévoyant sa réinscription en compte courant d’associé de la société BMA selon un calendrier et des montants bien précis (au plus tard dans les 6 mois de la clôture de chaque exercice social, le solde du résultat après déduction des sommes nécessaires à l’amortissement du report à nouveau et à l’affectation légale, à concurrence des sommes dues au titre de l’abandon de créance de 98'071€).


Le paragraphe III de cette convention consacré «'aux autres motifs de résolution du contrat'» prévoit qu’en dehors de l’hypothèse prévue ci-dessus (exécution complète du plan de continuation au 31 décembre 2017) elle serait également résolue de plein droit dans les hypothèses suivantes': (') cession du fonds de commerce appartenant à la société BMA ou modification dans la répartition du capital de la société BMA. Dans ces divers cas, la totalité de la créance de la société Y deviendra intégralement et immédiatement exigible. En conséquence, la créance de la société Y sera inscrite de façon immédiate au crédit de son compte courant et ce, dans sa totalité.'»


Ainsi la convention litigieuse doit s’analyser comme portant la volonté des parties de prévoir le sort de cette créance pour le cas où le plan n’aurait pas été exécuté, à savoir que dans cette hypothèse, elle serait abandonnée au profit de la société X. Elle organise également les modalités de «'restitution'» de cette créance pour le cas où le plan serait exécuté.


De fait, la société Y est doublement fondée à réclamer paiement de sa créance sur le fondement de cette convention, d’une part, en ce que la condition résolutoire attachée à l’exécution complète du plan s’est réalisée et d’autre part, en raison du fait que l’autre condition résolutoire attachée à la modification dans la répartition du capital de la société BMA s’est également réalisée à la suite de la cession des titres de la société Y à Mme X le 5 février 2009.


Le compte courant d’associé s’analyse en un prêt consenti par un associé à la société dont il est membre'; il découle du principe d’indépendance des qualités d’associé et de créancier que la cession des titres sociaux n’entraîne pas ipso facto celle du compte courant d’associé qui n’est pas l’accessoire des droits sociaux, sauf l’existence de dispositions expresses contraires.


Or, l’acte de cession d’actions du 5 février 2009 ne précise pas que le compte courant d’associé de la société Y est transféré au profit de Mme X à titre personnel'; c’est donc le principe de remboursement par la société X qui trouve application, nonobstant les modalités particulières de remboursement arrêtées par les parties dans leur convention du 31 juillet 2008.
Sans plus ample discussion, il doit être jugé que la société X, seule bénéficiaire des comptes courants d’associés et qui reste à ce titre, seule redevable de leur remboursement au plan de sa comptabilité, doit en conséquence restitution à la société Y, associée ayant perdu cette qualité avec la cession de ses actions à Mme X, de la somme de 98'071€ ayant figuré sur son compte courant d’associé. Sauf à ajouter au texte de cette convention, il ne peut pas être admis comme le soutient la société X que le remboursement de cette créance était subordonné exclusivement au fait que la société Y reste l’associée de la société BMA, aucune clause expresse n’étant prévue en ce sens, et ce d’autant que le plan de redressement autorisait clairement la cession des actions de la société Y pour 1€ à Mme X.


Enfin, la société X ne peut pas utilement se prévaloir des modalités spécifiques prévues à la convention quant à l’échéancier et au plafond de paiement, celles-ci ayant uniquement vocation à s’appliquer dans le cadre d’une restitution de la créance sous forme d’une réinscription en compte courant d’associé.


Le jugement déféré est infirmé et la société X condamnée à payer au liquidateur judiciaire, ès qualités, la somme de 98'071€ avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation.


Il est cependant confirmé par substitution de motifs sur le rejet des demandes de la société X en paiement de dommages et intérêts pour abus du droit d’agir et de condamnation à une amende civile, cette société succombant dans ses prétentions principales.


Sur les dépens et les frais irrépétibles


L’action de la société Y étant justifiée dans son principe, la société X doit supporter les dépens de première instance et d’appel et les frais irrépétibles qu’elle a exposés'; elle est condamnée à verser une indemnité de procédure à la société Y (son liquidateur judiciaire) pour les frais exposés en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, et par arrêt contradictoire,

Donnant acte à la SELARL A, prise en la personne de Me C, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Y et Associés de son intervention volontaire en cause d’appel,

Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a':

dit non prescrite l’action en paiement de la SAS Y et Associés,•

• débouté la SAS X et Associés de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et de prononcé d’une amende civile,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et ajoutant,

Condamne la SAS X et Associés à payer à la SELARL A, prise en la personne de Me C, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Y et Associés, la somme de 98'071€ avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 10 avril 2018,

Déboute la SAS X et Associés de sa demande de frais irrépétibles pour la première instance et d’appel,

Condamne la SAS X et Associés à payer à la SELARL A, prise en la personne de Me C, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Y et Associés, la somme de 8'000€ au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel, Condamne la SAS X et Associés aux dépens de première instance et d’appel, ces derniers avec droit de recouvrement.

Le Greffier, Le Président,
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