Cour d'appel de Montpellier, Chambre correctionnelle, 20 octobre 2010, n° 10/00344

  • Adolescent·
  • Professeur·
  • Lit·
  • Mineur·
  • Peine·
  • Domicile·
  • Fait·
  • Code pénal·
  • Partie civile·
  • Enseignant

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, ch. corr., 20 oct. 2010, n° 10/00344
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 10/00344
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Rodez, 2 février 2010

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

3e CHAMBRE CORRECTIONNELLE

ARRÊT N°

DU 20/10/2010

XXX

XXX

prononcé publiquement le Mercredi vingt octobre deux mille dix, par la troisième Chambre des appels correctionnels, par Madame F, en application des dispositions de l’article 485 dernier alinéa du code de procédure pénale.

et assisté du greffier : Madame BOURBOUSSON

qui ont signé le présent arrêt

en présence du ministère public près la Cour d’Appel

sur appel d’un jugement du tribunal de grande instance de RODEZ du 03 FEVRIER 2010


COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :

Présidente : Madame F

Conseillers : Madame B

Monsieur C


présents lors des débats :

Ministère public : Monsieur Y

Greffier : Madame BOURBOUSSON


PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

PREVENU

G AD AL AM

Né le XXX à MONTREJEAU (31), fils de G Julien et de VAN TEENE Anne-Marie, enseignant, de nationalité française, demeurant Chez Madame G Chantal – XXX – XXX

XXX/01/2007, O.C.J. du 07/09/2009 – MAINTIEN DU C.J.)

Prévenu, appelant

Comparant

Assisté de Maître PHUNG Jean-Robert, avocat au barreau de MONTPELLIER et de Maître COHEN Simon, avocat au barreau de TOULOUSE

LE MINISTERE PUBLIC, appelant

PARTIES CIVILES

A J, demeurant 21 RUE SERPENTIE – XXX

Partie civile, intimé

Comparant

Assisté de Maître GOSSET substituant Maître MAZARS Stéphane, avocat au barreau d’AVEYRON

Z H, demeurant ROUTE DE LA CASCADE – XXX – XXX

Partie civile, intimé

Non comparant

Représenté par Maître GUEDON Laurence, avocat au barreau de RODEZ


RAPPEL DE LA PROCEDURE :

Par ordonnance de renvoi du juge d’instruction en date du 7 septembre 2009 a renvoyé M. G AD AL AM devant le Tribunal Correctionnel pour y être jugé des chefs de :

d’avoir au X et en tout cas sur le territoire national, courant décembre 2006 et en tous cas depuis temps non prescrit, commis ou tenté de commettre par violence, contrainte, menace, surprise, des atteintes sexuelles sur la personne de J A en procédant sur lui à des attouchements de nature sexuelle avec cette circonstance que les faits ont été commis par une personne abusant de l’autorité conférée par ses fonctions,

infraction prévue par les articles 222-28 3°, 222-27 du Code pénal et réprimée par les articles 222-28 AL.1, 222-44, 222-45, 222-47 AL.1, 222-48-1 AL.1 du Code pénal

d’avoir au X et en tout cas sur le territoire national, courant décembre 2006 et en tous cas depuis temps non prescrit, commis ou tenté de commettre par violence, contrainte, menace, surprise, des atteintes sexuelles sur la personne de H Z en procédant sur lui à des attouchements de nature sexuelle avec cette circonstance que les faits ont été commis par une personne abusant de l’autorité conférée par ses fonctions,

infraction prévue par les articles 222-28 3°, 222-27 du Code pénal et réprimée par les articles 222-28 AL.1, 222-44, 222-45, 222-47 AL.1, 222-48-1 AL.1 du Code pénal

d’avoir au X et en tout cas sur le territoire national, courant 2006 et en tous cas depuis temps non prescrit, commis ou tenté de commettre par violence, contrainte, menace, surprise, des atteintes sexuelles sur la personne de K L en procédant sur lui à des attouchements de nature sexuelle avec cette circonstance que les faits ont été commis par une personne abusant de l’autorité conférée par ses fonctions,

infraction prévue par les articles 222-28 3°, 222-27 du Code pénal et réprimée par les articles 222-28 AL.1, 222-44, 222-45, 222-47 AL.1, 222-48-1 AL.1 du Code pénal

Par jugement contradictoire en date du 3 février 2010 le Tribunal correctionnel de Rodez :

* sur l’action publique : a déclaré AD G coupable d’agression sexuelle par personne abusant de l’autorité que lui confère sa fonction commis le 1er janvier 2003 et jusqu’au 31 décembre 2003 à X et en répression l’a condamné :

à titre de peine principale à la peine de 3 ans d’emprisonnement dont 30 mois avec sursis mise à l’épreuve pendant 2 ans comportant les obligations particulières de soins et de réparer le préjudice ;

à titre de peine complémentaire à l’interdiction d’exercer l’activité professionnelle dans l’exercice ou à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise pour une durée de cinq ans;

* sur l’action civile : a reçu MM. Z H et A J en leurs constitutions de parties civiles, et condamné le prévenu à verser à chacun d’eux la somme de 3.000 € de dommages et intérêts, outre celle de 1.000 € en application des dispositions de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale.

APPELS :

Par déclaration au greffe le 5 février 2010 le conseil du M. G AD a interjeté appel à titre principal des dispositions pénales et civiles de ce jugement.

Le Ministère public a formé appel incident le même jour.

* *

A l’audience du 29 avril 2010, l’affaire a fait l’objet d’un renvoi à l’audience du 23 juin 2010.

A cette audience l’affaire a été appelée et le prévenu a posé une question prioritaire de constitutionnalité.

Par arrêt du 1er juillet 2010 la Cour a dit n’y avoir lieu ni à surseoir à statuer, ni à transmettre à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité et a renvoyé l’affaire contradictoirement à l’égard de toutes les parties à l’audience du 8 septembre 2010 à 14 heures.

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l’appel de la cause à l’audience publique du 08 SEPTEMBRE 2010 Madame la Présidente a constaté l’identité du prévenu.

Madame B, Conseillère, a fait le rapport prescrit par l’article 513 du code de procédure pénale.

Le prévenu est présent et assisté de Maîtres COHEN et Maître PHUNG qui ont déposé des conclusions, lesquelles ont été visées par la présidente et la greffière, mentionnées par cette dernière aux notes d’audience et jointes au dossier.

Le prévenu après avoir exposé sommairement les raisons de son appel, a été interrogé.

M. A J partie civile, présent et assisté par Maître GOSSET substituant Maître MAZARS a été entendu.

M. Z H partie civile, est représenté par son avocat Maître GUEDAR Laurence qui a déposé des conclusions, lesquelles ont été visées par la présidente et la greffière, mentionnées par cette dernière aux notes d’audience et jointes au dossier.

Le Ministère Public a été entendu en ses réquisitions.

Maîtres PHUNG et COHEN ont été entendus en leurs plaidoiries.

Le prévenu a eu la parole en dernier.

A l’issue des débats, la Cour a mis l’affaire en délibéré et Madame la Présidente a averti les parties que l’arrêt serait prononcé à l’audience publique du 20 OCTOBRE 2010.

Les faits

J A

Le 22 janvier 2007, AH AI épouse A portait plainte à rencontre de AD G pour des faits d’agressions sexuelles commis sur son fils J.

Ce dernier était âgé de 16 ans pour être né le XXX. Il était élève de 4e au collège Q R de SAINT GENIEZ D’OLT. Les mauvais résultats enregistrés durant le premier trimestre conduisaient le professeur principal à convoquer l’adolescent et sa mère afin de discuter de nouvelles orientations. Monsieur AD G proposait, en sa qualité de professeur de mathématique, d’aider J en lui donnant des cours particuliers non-rémunérés.

Le premier cours était donné au domicile du professeur le 28 décembre 2006. Le soir même, J déclarait ne plus vouloir y retourner. Interrogé sur cette décision, il répondait à sa mère: « de toutes façons je n’y vais plus, il m’a mis les mains sur les couilles ».

Mi-janvier, AD G se présentait au domicile de Madame A afin de récupérer J. Il restait dans la voiture, se contentant de klaxonner sans que l’adolescent descende. Le véhicule faisait alors demi-tour. A partir de cet épisode, J A refusait de retourner au collège. Aux dires de sa mère, cette perspective provoquait une véritable crise de nerf.

Le 18 janvier 2007, Mme A rencontrait la directrice du collège en la personne de Madame E. Son fils et Monsieur G étaient présents. Elle était interloquée par le comportement de J, ce dernier faisant son possible pour éviter son professeur. Elle l’interrogeait le soir sur son attitude. Il réitérait ses déclarations concernant les attouchements subis lors du cours donné le 28 décembre 2006.

L’adolescent était entendu par les services d’enquête. Il décrivait des scènes identiques à celles évoquées par sa mère devant les enquêteurs.

Selon ses déclarations, AD G était venu le chercher chez lui le premier jeudi des vacances de D pour le conduire à son domicile situé sur la commune de X.

C’est dans le bureau où il était installé pour travailler que J A affirmait avoir subi les premiers attouchements. Son professeur s’était rapproché de lui, l’avait embrassé à plusieurs reprises sur le front et lui avait caressé la cuisse.

AD G lui proposait ensuite de voir sa guitare dans la chambre à coucher ; alors qu’il se saisissait de l’instrument pour l’observer, AD G en profitait pour lui faire « des câlins », à savoir des caresses et des baisers faits autour du cou. J A expliquait ne pas avoir réagi lorsque AD G lui déclarait « on est bien tous les deux ». Il justifiait son mutisme par la peur que lui inspirait la scène.

AD G le faisait asseoir sur le lit et continuait à le caresser. Il passait sa main sur le ventre de l’adolescent et lui caressait les parties génitales.

Il le poussait finalement sur le lit, s’agenouillait sur J qui se trouvait alors sur le ventre. Le jeune homme affirmait avoir tenté de se dégager à plusieurs reprises sans y parvenir. Selon ses déclarations « il me bloquait parce que j’essayais de me débattre et il me remettait sur le lit à chaque fois ». L’adolescent subissait des caresses auxquelles il ne parvenait pas à s’opposer.

J A expliquait ne pas avoir fui au regard de la distance qui le séparait de son domicile, du froid qui sévissait et de l’autorité qu’il accordait à son professeur. Il ne pouvait par ailleurs appeler sa mère, le forfait de son portable étant épuisé.

La scène aurait duré, selon la victime, trois quart d’heures. Par la suite, AD G se rendait dans sa cuisine et préparait à manger.

Ils se remettaient au travail après manger. A l’issue de quelques heures d’enseignement, AD G revenait à l’assaut. Il caressait à nouveau l’adolescent, lui embrassait la joue et le front sans plus de réaction. J A expliquait une nouvelle fois sa passivité par la peur que lui inspirait la situation.

Il prétextait un rendez-vous sur RODEZ afin d’être plus rapidement libéré de son professeur. Ce dernier le conduisait en ville tout en lui recommandant de ne rien dire de ce qui s’était passé.

J A fournissait un croquis de la chambre dans laquelle il déclarait avoir subi les agressions les plus graves.

Son entourage le trouvait particulièrement choqué par ce qu’il avait dénoncé. L’expertise psychiatrique confirmait un état de stress réel en lien avec la crainte que lui inspirait le fait d’entrer en contact avec son professeur.

* *

H Z avait également bénéficié des cours privés de AD G. Il était âgé de 16 ans et demi pour être né le XXX.

Courant décembre, le professeur contactait avec insistance la mère de l’adolescent. Il lui proposait de l’héberger ou tout au moins de le faire venir chez lui afin de travailler. Les demandes étaient fréquentes, parfois excessives au point que Mme Z ne répondait pas à certains appels. Elle acceptait néanmoins la proposition.

H Z expliquait avoir été alerté par J A sur le comportement de AD G mais n’avait pas souhaité donner crédit aux accusations formulées.

Le premier cours avait lieu début janvier 2007. Comme pour J A, AD G venait chercher l’élève à domicile pour le conduire chez lui.

Tout se passait bien durant la matinée. L’après midi, H Z accompagnait son professeur en promenade. Ils poursuivaient leur conversation dans une des chambres de la maison. Blessé au genou lors d’un match de foot, H Z s’asseyait sur le lit. AD G prenait place à ses cotés. Il s’engageait à lui masser l’endroit douloureux et l’embrassait sur le front.

Après une heure de travail, H Z s’allongeait à nouveau sur un lit se trouvant dans la chambre à coté du bureau. AD G le rejoignait.

Il engageait une discussion sur les relations amoureuses que l’adolescent trouvait déplacée. Il déclarait que: « pendant la discussion, il a glissé sa main sous mon vêtement au niveau du cou en me disant j’ai froid aux mains et je me réchauffe. Je ne savais pas quoi faire. A un moment donné, il a mis également sa main sur ma cuisse droite en me demandant si je n’avais pas de problèmes aux abducteurs. J’ai répondu non et lorsque sa main s’est rapprochée un peu trop de mon sexe, j’ai dit c’est bon, on va reprendre le cours ».

Il précisait la scène en décrivant les gestes accomplis. Selon l’adolescent « lorsque nous étions sur le lit, il m’a pris dans ses bras et m’a serré. Il m’a fait allonger et s’est allongé à côté de moi sur mon côté droit. Il me tenait au niveau des épaules. Je me suis dégagé en lui disant: là c’est bon, tu arrêtes »

Pendant le retour, AD G demandait à son élève de ne rien dire à personne. La mère de H notait cependant d’importants changements dans son attitude. Son fils invoquait toutes sortes de prétextes pour ne pas aller en cours et AD G n’appelait plus à son domicile.

* *

Les expertises psychologiques des deux adolescents faisaient état d’un ressenti réel et authentique sans que soit décelés de risques d’affabulation.

Les investigations réalisées révélaient que AD G était une personne estimée de tous et qu’il se donnait entièrement à son travail. De nombreux élèves rapportaient avoir bénéficié de cours de soutien sans autres difficultés. Certains évoquaient toutefois des caresses sur les épaules, des débuts de massages réalisés en classe auxquels il était immédiatement mis fin à la première réaction de désapprobation.

* *

AD G était placé en garde à vue. La perquisition réalisée à son domicile permettait la découverte de plusieurs vidéos pornographiques mettant en scène de jeunes garçons sans qu’il soit possible d’affirmer qu’ils étaient mineurs.

Il contestait dans un premier temps les accusations dont il faisait l’objet. Il tempérait par la suite ses dénégations, indiquant que J A et H Z avaient mal interprété ses gestes. Il déclarait à ce sujet « j’ai joué comme si j’avais 15 ou 16 ans pour être proche d’eux… c’est des jeux, de la bagarre ». Il précisait ces termes en indiquant « pour moi ce sont des gestes que font les gamins en train de se chercher, de s’amuser ». Il reconnaissait que ces actes pouvaient être considérés comme déplacés. A ce titre, il déclarait avoir embrassé les adolescents sur le front et la joue.

Concernant J A, il confirmait s’être retrouvé allongé sur le lit et décrivait un épisode proche de celui décrit par l’adolescent.

Sur la contrainte exercée, AD G déclarait « qu’étant à genou au-dessus de lui, un genou de part et d’autre, il a pu se sentir bloqué ».

Il confirmait les massages réalisés sur le ventre tout en indiquant être resté au niveau du nombril. Il en était de même concernant les caresses sur la cuisse.

Précisant ses propos, AD G déclarait « ces gestes de jeux permettent de se mettre au niveau de la pensée du jeune. Néanmoins, à posteriori, ils peuvent, venant d’un adulte, être jugés de déplacés ». Il ajoutait « lorsque j’ai posé ma main sur le ventre de J, lorsque j’ai dû soulever le jogging de celui-ci, il est possible que la paume ou le poignet aient été en contact avec son sexe. Mais il n 'y avait là aucune intention délibérée de lui toucher le sexe » et précisait « j’ai senti qu’il avait un début d’érection et j’ai arrêté ».

AD G confirmait avoir palpé le genou de H Z afin, selon lui, de repérer la douleur. Concernant les caresses, il affirmait que ce n’était qu’un jeu.

Il contestait en revanche avoir touché ou caressé les parties génitales des adolescents et réfutait les avoir mis en garde de ne rien révéler de ce qui s’était passé.

* *

Par un réquisitoire introductif en date du 31 janvier 2007, une information judiciaire était ouverte pour des faits d’agressions sexuelles par personne abusant de l’autorité conférée par sa fonction.

Entendu dans le cadre de son interrogatoire de première comparution, AD G affirmait ne pas avoir accompli les actes qui lui étaient reprochés.

Il confirmait toutefois l’ensemble des propos tenus en garde à vue. Il en allait ainsi des baisers sur la joue et le front, des caresses sur la nuque, des circonstances dans lesquelles il s’était trouvé allongé sur J A et des massages pratiqués. Sa main s’était bien retrouvée sous le caleçon de l’adolescent.

Il confirmait également les propos tenus concernant les caresses et massages faits sur H Z.

Il regrettait ses gestes tout en maintenant qu’il n’y avait aucune intention d’agresser sexuellement ses élèves.

Il revenait sur les avertissements donnés de ne rien dire à personne. Il s’agissait selon lui d’une méprise en ce qu’il avait voulu mettre en garde ses élèves contre la jalousie que pouvait susciter le fait qu’ils aient bénéficié de cours particuliers.

Il reconnaissait une certaine carence sexuelle et de réels besoins affectifs.

* *

Deux autres élèves avaient bénéficié, courant 2006, de soutiens scolaires privés de la part de AD G dont K AA.

K AA était âgé de 16 ans pour être né le XXX. Il était connu de la justice des mineurs pour d’importantes difficultés d’ordre éducatif. A ce titre, AD G l’hébergeait chez lui durant le printemps 2006.

Entendu une première fois, l’adolescent affirmait que son professeur n’avait jamais eu de gestes déplacés à son encontre. Bien au contraire, il s’occupait de lui et l’aidait à une époque où tout allait mal. Les personnes proches de K V l’affection qu’il portait à son professeur.

L’adolescent était néanmoins réentendu par les services d’enquête. Il évoquait alors des gestes similaires à ceux décrits par J A et H Z.

Il s’agissait de massages, de caresses notamment sur les fesses qui avaient selon lui une dimension sexuelle avérée. Il expliquait ne pas s’être enfui du domicile de son professeur du fait des attentions dont il bénéficiait de sa part. Il évoquait des achats de vêtements, des repas copieux, une chambre pour lui seul (D135).

Entendu à ce sujet par le juge d’instruction, AD G expliquait avoir été très lié à K AA mais contestait tout acte de nature sexuelle commis sur le garçon.

Une confrontation était réalisée au cours de laquelle chacun maintenait sa version. K AA déclarait en fin d’audition être prêt à affronter l’audience. Il se constituait partie civile après avoir pourtant refusé de le faire. Selon lui « je me dis que s’il ne reconnaît pas ça, je ne sais pas ce qu’on dit les autres, mais il ne doit pas le reconnaître et ça doit être pire ».

AD G était mis en examen à ce sujet et à l’issue de l’instruction un non-lieu était ordonné sur ces faits.

* *

Les confrontations organisées avec J A et H Z n’apportaient pas d’éléments supplémentaires, chaque partie maintenant sa version des faits.

PERSONNALITÉ

AD G est né le XXX. Son casier judiciaire ne fait mention d’aucune condamnation.

Aucun événement particulier ne marque sa vie sociale et affective.

Il est titulaire d’un CAPES de mathématique en 1989. Il a enseigné un an à TOULOUSE et 6 ans dans l’EURE avant de rejoindre SAINT GENIEZ D’OLT pour y être nommé professeur de mathématiques au collège public.

L’expertise psychiatrique est réalisée courant mars 2007. L’expert exclut abolition ou altération du discernement durant la période des faits reprochés.

AD G a rapporté durant l’examen avoir effectué des bises, des massages, des effleurements, des caresses auxquels il a toutefois contesté toute connotation sexuelle. Il leur a donné un sens affectif correspondant selon lui à un très fort sentiment d’empathie.

L’expert note toutefois que les divers rôles joués par le sujet auprès des adolescents peuvent être compliqués ou ambigus. Pour autant, aucun signe pathologique de pédophilie n’a été détecté ni d’attirance sexuelle ou érotique irrépressible.

La sexualité est marquée par une homosexualité avérée, une forte inhibition et des passages à l’acte rares.

SUR QUOI LA COUR

Sur la recevabilité des appels.

Les appels du prévenu et du ministère public, interjetés dans les formes et délais de la loi, sont recevables.

Sur l’Action Publique

* Demandes des parties

Par conclusions déposées et soutenues à l’audience M. G plaide la relaxe. Il fait valoir que l’infraction n’est pas constituée , les faits n’ayant pas de connotation sexuelle et aucune menace, violence, contrainte ou surprise n’étant alléguée ou établie. Il soutient que les accusations des plaignants empreintes de contradictions, d’inexactitudes voire d’invraisemblances, ne peuvent être considérées comme une preuve suffisante de sa culpabilité aucun élément matériel extérieur ne venant les conforter. Les conclusions de l’expert psychiatre ne sont que l’expression d’une opinion ne sauraient être retenues comme indice matériel ou preuve. Enfin la preuve d’une intention sexuelle n’étant pas rapportée, la présomption d’innocence dont il bénéficie n’est pas détruite.

Par conclusions déposées et soutenues à l’audience M. Z demande à la cour de retenir M. G dans les liens de la prévention et de prononcer à son encontre telle peine que de droit.

Motivation de la Cour

AD G est poursuivi du chef d’agressions sexuelles par violence, contrainte, menace ou surprise par personne abusant de l’autorité conférée par ses fonctions.

Il est établi et non contesté par le prévenu qu’il a « fait des bises » aux trois mineurs , mis ses mains dans le cou et sous les vêtements de H Z, l’a massé à même la peau, l’a serré dans ses bras alors qu’ils étaient allongés sur un lit et qu’il a pratiqué des massages sous le caleçon de J A et sur Benoit AC. Il a reconnu que ces massages ont été effectués alors que les mineurs étaient allongés et pour J A qu’il se trouvait à califourchon au-dessus de lui. Enfin il a lui-même admis qu’en pratiquant les massages sous les vêtements de J A ses doigts ont pu effleurer le pénis de celui-ci.

Ces faits, à savoir procéder à des baisers sur la face et dans le cou d’adolescents pubères, préliminaire à la pratique de massages réalisés sur des adolescents allongés sur un lit dans une chambre à coucher, AD G étant lui-même assis ou allongé à côté, voire à califourchon au-dessus, les massant à même la peau et dans la région génitale et étant amené à toucher leur pénis, ,sont sans équivoque de nature sexuelle et ne sauraient, comme prétendu par le prévenu, être un jeu ou le moyen de se mettre à la portée d’adolescents, sauf à méconnaître totalement leur psychologie et leurs besoins.

Les déclarations du prévenu, même si elles sont moins explicites que celles des mineurs, viennent corroborer la description des faits par les trois plaignants, qui décrivent un mode opératoire identique.

Si K AC a d’abord déclaré ne pas avoir été victime des agissements de son professeur et lui être redevable de son accueil, ses déclarations postérieures devant les gendarmes, le juge d’instruction et en confrontation, décrivent explicitement l’évolution du prévenu à son égard et un mode opératoire semblable à celui décrit par les deux autres mineurs.

Le prévenu qui a lui-même évolué dans ses déclarations ne saurait s’exonérer de sa responsabilité en se prévalant de variations dans les déclarations des plaignants, ni avancer une machination ou une concertation de leur part, vu la réticence de H Z et de K AC à dénoncer les faits et à porter plainte.

AD G soutient qu’aucun élément objectif ne confirme les déclarations des plaignants.

Or J A a dénoncé les faits à sa mère, le jour même de leur commission , dans des termes non équivoques; tout comme H Z ,il a refusé de retourner chez AD G mais également au collège, ce qui constitue un élément objectif attestant de leur malaise suite aux faits dont ils avaient été victimes.

De même, les trois mineurs ont parlé de cadeaux et pour les deux premiers d’une invitation à se taire, propos reconnus par AD G qui leur attribue toutefois un autre sens(ne pas susciter la jalousie des autres élèves pour ces cours privés), explication qui n’a pas convaincu la cour au regard du contexte.

Enfin il est constant et établi que AD G a de lui-même proposé aux trois victimes de leur dispenser des cours de maths à son domicile durant les vacances et obtenu pour ce faire l’accord de leurs parents , Mme Z évoquant même des demandes insistantes.

La surprise qui consiste à obtenir des faveurs sexuelles en trompant la confiance de la victime est constituée En effet, se rendant au domicile de son enseignant pour des cours de maths J A ne pouvait imaginer être en butte au comportement déplacé de celui-ci, de même pour H Z qui n’avait porté aucun crédit aux dires du premier.

Il en va de même pour K AC qui après avoir reçu normalement, au domicile de son professeur, des cours lors des vacances scolaires de février, lui a demandé de l’héberger pour deux mois en raison de graves difficultés familiales ;ce faisant ,il ne pouvait imaginer que la nature des relations élève/professeur évoluerait au point qu’il subirait de la part de celui-ci des massages.

La contrainte est également constituée par l’isolement géographique dans lequel se trouvaient J A et H Z car les faits les concernant ont été commis en décembre,alors qu’ils habitaient à plus de 20 kms du domicile de leur professeur qui était venu lui-même les chercher en voiture et n’ignorait pas, de son propre aveu en ce qui concerne J A, qu’il ne disposait plus de forfait téléphonique pour joindre sa mère. Ces jeunes ne pouvaient donc s’enfuir aisément ,ce qui explique que les faits aient été commis pour J A à deux reprises dans la journée.

De plus, J A comme H Z connaissaient des difficultés scolaires mais également des difficultés familiales et avaient été confiés par leur parents à un enseignant d’excellente réputation; K AC , pour sa part ,était en difficulté dans sa famille et une demande de placement était en cours d’instruction. Ces éléments ajoutés à la différence d’âge entre ces mineurs qui au moment des faits étaient des adolescents âgés de 16 ans à l’aube de leur vie sexuelle , peu expérimentés voire inexpérimentés en la matière alors que le prévenu était âgé de 45 ans, suffisent à caractériser la contrainte visée à l’article 222-28 du Code Pénal.

La qualité d’enseignant de AD G est reconnue et revendiquée par lui;c’est à ce titre qu’il a obtenu l’accord des mineurs, puis l’autorisation de leurs parents pour les accueillir à son domicile aux fins de leur dispenser des cours de maths pour J A et H Z, et d’héberger K AC durant deux mois. Ses qualités d’enseignant aux compétences professorales unanimement reconnues par tous(Cf. procédure et attestations produites par M. G à l’audience) lui conféraient auprès des trois plaignants une autorité en lien direct avec sa fonction , dont il a abusé en procédant à des attouchements sexuels sur ces jeunes qu’il avait connus et choisis dans son milieu professionnel.

Enfin M. G ne peut valablement soutenir l’absence d’élément intentionnel, au vu des stratagèmes mis en place pour amener les mineurs à se rendre seul à son domicile, au lieu des faits (sur un lit dans une chambre à coucher), à la nature des attouchements à même la peau et sur les organes génitaux, aux propos tenus aux mineurs «  on est bien tous les deux », aux conversations intrusives tenant à leur vie sexuelle, d’autant qu’il avait précédemment été mis en garde par sa hiérarchie sur sa proximité avec les jeunes.

L’expertise psychiatrique, obligatoire en matière d’infraction sexuelle, dont les conclusions ne sont pas contestées par AD G, ne constitue nullement une preuve comme il le soutient, mais éclaire sa personnalité et la caractère ambigu de son fort sentiment d’empathie envers les adolescents.

En conséquence de quoi ,les délits reprochés étant établis , le jugement critiqué sera confirmé sur la culpabilité pour les faits tels que visés dans l’ordonnance de renvoi, le dispositif du jugement ayant visé par erreur les faits de 2003 qui ont fait l’objet d’un non-lieu.

En ce qui concerne la peine à infliger, tenant l’absence de mention au casier judiciaire, M. G sera condamné à titre de peine principale à 18 mois d’emprisonnement assortis en totalité d’un sursis et à titre de peine complémentaire, par application de l’article 222-45 3° du Code Pénal, tenant sa persistance à minimiser les faits reprochés, à une interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec les mineurs pour une durée de 2 ans , ce qui autorise compte tenu de ses qualités professorales un enseignement auprès de majeurs ou à distance (CNED ,par ex)

Sur l’action civile

Demandes des parties

Par conclusions déposées et soutenues à l’audience H Z demande à la Cour d’accueillir sa constitution de partie civile et de lui allouer, en réparation du préjudice moral subi, la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts outre celle de 1.000 € sur le fondement des dispositions del’article 475-1 du Code de Procédure Pénale.

Motivation de la Cour

La Cour dispose des éléments d’appréciation suffisants pour confirmer le jugement sur l’action civile, les premiers juges ayant fait une juste appréciation des conséquences civiles de l’infraction.

L’équité commande de faire bénéficier H Z , partie civile de la somme de 1.000 € en application des dispositions de l’article 475-1 du Code de procédure pénale, à raison des frais exposés en cause d’appel et non payés par l’Etat.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire à l’égard du prévenu et des parties civiles, en matière correctionnelle, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

EN LA FORME

Reçoit les appels du prévenu et du ministère public.

AU FOND

SUR L’ACTION PUBLIQUE :

Confirme le jugement entrepris sur la déclaration de culpabilité, sauf à préciser que M. G AD est reconnu coupable des faits visés à l’ordonnance de renvoi

L’infirme sur la peine et statuant à nouveau,

*à titre de peine principale : condamne AD G à la peine de 18 mois d’emprisonnement.

Dit toutefois qu’il sera sursis à l’exécution de cette peine dans les conditions, le régime et les effets du sursis simple défini aux articles 132-29 à 132-39 du Code Pénal.

Rappelle au condamné que s’il commet une nouvelle infraction qualifiée crime ou délit de droit commun dans les cinq ans de la présente décision il pourra faire l’objet d’une nouvelle condamnation qui sera susceptible d’entraîner l’exécution de la présente peine avec sursis sans confusion avec la seconde et qu’il encourra les peines de la récidive dans les termes des articles 132-9 à 132-10 du Code Pénal.

* à titre de peine complémentaire : prononce par application des dispositions de l’article 222-45 3° du Code Pénal et pour une durée de 2 ans une interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs.

Constate par application de l’article 706-53-2 du Code de Procédure Pénale que la présente condamnation sera de droit inscrite au FIJAIS.

SUR L’ACTION CIVILE :

Confirme le jugement en toutes ses dispositions civiles, et en ce qu’il a condamné AD G à payer à J A et H Z la somme 3.000 € de dommages et intérêts outre celle de 1.000 € en application de l’article 475-1 du Code de Procédure Pénale,

Y ajoutant,

Condamne AD G à payer à H Z la somme de 1.000 € sur le fondement des dispositions del’article 475-1 du Code de Procédure Pénale ,pour les frais exposés en cause d’appel.

Conformément à l’article 706-15 du Code de Procédure Pénale, la Cour informe les parties civiles de leur possibilité de saisir la commission d’indemnisation des victimes (CIVI), saisine qui devra intervenir dans le délai prévu à l’article 706-5 du même code.

Par application de l’article 474-1 du Code de Procédure Pénale, dans le cas où la victime serait non éligible à la CIVI, la personne condamnée est informée qu’en l’absence de paiement volontaire de sa part dans le délai de 2 mois à compter du jour où la décision sera devenue définitive, le recouvrement pourra être exercé par le fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions, si la victime le demande.

Dans ce cas une majoration de 30% des dommages et intérêts permettant de couvrir les dépenses engagées par le fond au titre de sa mission d’aide, sera perçue par le fonds, en sus des frais d’exécution éventuels, dans les conditions déterminées à l’article L 422-9 du Code des Assurances.

Dit que le condamné sera soumis au paiement du droit fixe de procédure d’un montant de 120 euros prévu par l’article 1018 A du Code général des impôts. Il est avisé par le présent arrêt que ce droit sera diminué de 20% s’il s’en acquitte dans le délai d’un mois à compter du prononcé de la présente décision.

Le tout conformément aux articles visés au jugement et au présent arrêt et aux articles 512 et suivants du code de procédure pénale.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique les jours, mois et an susdits ; le présent arrêt a été signé par la Présidente et le greffier présents lors de son prononcé.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Montpellier, Chambre correctionnelle, 20 octobre 2010, n° 10/00344