Cour d'appel de Montpellier, 28 mai 2014, n° 12/07144

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 28 mai 2014, n° 12/07144
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 12/07144
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Perpignan, 10 septembre 2012

Texte intégral

XXX

4° chambre sociale

ARRÊT DU 28 Mai 2014

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/07144

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 SEPTEMBRE 2012 CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE PERPIGNAN

N° RG11/00795

APPELANTE :

Madame Z A

XXX

XXX

Représentant : Me MATAS de la SCP PORTAILL-X, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/014966 du 27/11/2012 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMES :

Maître M° C Administrateur judiciaire de la Sté ETS LAPORTE

XXX

XXX

Représentant : Me ROUILLARD de la SCP MARI-BERVILLE-JORON, avocat au barreau de ROUEN

Maître M° E Mandataire judiciaire de la Sté ETS LAPORTE

XXX

XXX

Représentant : Me ROUILLARD de la SCP MARI-BERVILLE-JORON, avocat au barreau de ROUEN

AGS (CGEA ROUEN)

XXX

XXX

XXX

Représentant : Me CLAMENS de la SELARL CHATEL & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

XXX

prise en la personne de son représentant légal

XXX

XXX

Représentant : Me ROUILLARD de la SCP MARI-BERVILLE-JORON, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 945-1 du Code de Procédure civile, l’affaire a été débattue le 01 AVRIL 2014, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, chargé(e) d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Claude DJIKNAVORIAN, Président de chambre

Monsieur Richard BOUGON, Conseiller

Monsieur Robert BELLETTI, Conseiller

Greffière, lors des débats : Mme F G

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure civile ;

— signé par Monsieur Jean-Claude DJIKNAVORIAN, Président de chambre, et par Mme F G, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Le 1er octobre 2007 suivant contrat à durée déterminée à effet jusqu’au 31 janvier 2008 souscrit pour « faire face à un accroissement temporaire d’activité », Mme Z K est engagé par la société (s.a) Etablissements Laporte en qualité de démonstratrice coefficient I4 de la convention collective de l’habillement pour un salaire horaire brut de

8,44 € outre 2 % du chiffre d’affaires hors taxes.

Suivant avenant du 25 janvier 2008 le contrat à durée déterminée du 1er octobre 2007 est renouvelé du 1er février au 31 mai 2008.

Suivant avenant du 27 mai 2008 le contrat à durée déterminée « passe à durée indéterminée à compter du 1er juin 2008 » pour un salaire horaire brut de 8,63 € outre 2 % du « chiffre d’affaires réalisé durant les heures de présence ».

Le 6 décembre 2010 Mme Z K saisit le Conseil de Prud’hommes de Perpignan d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Le 11 août 2011 le médecin du travail sur visite de reprise délivre l’avis d’aptitude suivant : « inapte au poste, apte à un autre. Le poste actuel de démonstratrice n’est pas compatible avec l’état de santé actuel car la station debout continue avec impossibilité de s’asseoir ainsi que les manutentions (de lourds cartons, la mise en rayon, les retours de marchandises…) qui sollicitent fortement la colonne lombaire sont désormais contrindiquées. Une deuxième visite dans un délai minimum de 2 semaines est à prévoir pour décision définitive selon Art R4624-31 du CT ».

Le 6 septembre 2011 le médecin du travail sur visite de reprise délivre un second avis d’aptitude dans les termes suivants : « inapte au poste, apte à un autre. Le poste actuel de démonstratrice n’est pas compatible avec l’état de santé actuel car la station debout continue avec impossibilité de s’asseoir ainsi que les manutentions (de lourds cartons, la mise en rayon, les retours de marchandises…) qui sollicitent fortement la colonne lombaire sont désormais contrindiquées ».

Le 2 décembre 2011 l’employeur notifie à Mme Z K son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 11 septembre 2012 le Conseil de Prud’hommes de Perpignan, section industrie, sur audience de conciliation du 7 février 2011, radiation du 11 octobre 2011, réinscription au 31 octobre 2011 et plaidoiries le 12 juin 2012, « rejette la demande de résiliation judiciaire, déboute Mme Z K de toutes ses demandes à ce titre, dit la procédure de licenciement régulière et déboute Mme Z K de toutes ses demandes indemnitaires, considère équitable de ne pas accorder les demandes respectives des deux parties au titre de l’article 700 du CPC et condamne Mme Z K aux entiers dépens ».

Le 21 septembre 2012 Mme Z K, bénéficiaire de l’aide juridictionnelle totale, interjette appel et demande :

— à titre principal la réformation par fixation de sa créance au passif de la société des établissements Laporte aux sommes de :

* 3.000 € de dommages et intérêts sur le fondement de l’article R 4624-10 du code du travail ;

* 5.000 € de dommages et intérêts sur le fondement de l’article R 4624-11 du code du travail ;

* 13.650,03 € sur le fondement de l’article L 1235-3 du code du travail pour rupture abusive ;

* 1.092,02 € d’indemnité de licenciement sur le fondement de l’article L 1234-9 du code du travail ;

* 1.365,03 € d’indemnité de préavis sur le fondement de l’article L 1226-14 du code du travail ;

* 2.787,70 euros de salaire dus pour la période du 6 octobre au 6 décembre 2011 ;

— à titre subsidiaire en cas de rejet de la demande de résiliation du contrat de travail la fixation de sa créance au passif de la société des établissements Laporte aux sommes de :

* 13.650,03 € de dommages et intérêts ;

* 1.161,55 € de solde d’indemnité spéciale de licenciement ;

* 2.787,70 euros de salaire dus pour la période du 6 octobre au 6 décembre 2011 ;

— en tout état de cause de dire opposable à l’AGS CGEA de Rouen la décision à intervenir avec condamnation de Maître Y E en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Etablissement Laporte, outre aux entiers dépens, à payer à :

* Mme Z K 1.500 € au titre de l’article 700 du CPC ;

* à la SCP Portaill & X la somme de 3.500 € sous réserve de renonciation au bénéfice de l’indemnité contributive de l’état et sur le fondement de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

La société des établissements Laporte, Maître Y E en sa qualité de liquidateur de la société des établissements Laporte et Maître B C en sa qualité d’administrateur à la liquidation judiciaire de la société des établissements Laporte sollicitent la confirmation avec condamnation de Mme Z K, outre aux entiers dépens, à payer à Maître Y E et Maître B C « ès-qualité » une somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’association centre de gestion et d’étude AGS (CGEA) de Rouen demande la confirmation.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère au jugement du conseil de prud’hommes et aux conclusions notifiées par les parties, auxquelles elles ont expressément déclaré se rapporter lors des débats du 1er avril 2014.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le salaire du 6 octobre au 6 décembre 2011

Il est établi qu’à l’issue du délai d’un mois à compter de la date de l’examen médical de reprise du travail du 6 septembre 2011 Mme Z K, déclarée inapte, n’a été ni reclassée dans l’entreprise ni licenciée sans que l’employeur ne lui verse le salaire correspondant à l’emploi qu’elle occupait avant la suspension de son contrat de travail.

Dès lors la demande en paiement est fondée, étant totalement indifférent que Mme Z K n’ait « pas répondu à la proposition de reclassement adressée par l’employeur dans les délais légaux ».

Sur la demande de résiliation

Lorsqu’un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée et c’est seulement dans le cas contraire qu’il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l’employeur.

Lorsqu’un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, il appartient au juge de vérifier si les faits invoqués par le salarié à l’appui de sa demande sont établis et, dans l’affirmative, si ces manquements présentent une gravité suffisante pour en justifier la résiliation aux torts de l’employeur.

La résiliation judiciaire du contrat de travail prononcée à l’initiative du salarié et aux torts de l’employeur produit les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

L’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat, doit en assurer l’effectivité.

Le 3 novembre 2008 Mme Z K est victime d’un accident du travail qui « n’entraîne pas d’arrêt de travail ».

Du 14 au 16 novembre 2008 Mme Z K est en arrêt de travail suite à accident du travail.

Du 13 au 22 février 2009 Mme Z K est en arrêt de travail suite à accident du travail.

Le 23 février 2009 Mme Z K demande à son employeur d’organiser " la visite médicale légale à la médecine du

travail ".

En sa version applicable au litige tel qu’issu de l’article 5 du décret n°2008-244 du 7 mars 2008 (en vigueur du 1er mai 2008 au 1er juillet 2012) l’article R4624-21 du code du travail prévoit que tout salarié doit bénéficier d’un examen de reprise de travail par le médecin du travail après une absence d’au moins huit jours pour cause d’accident du travail, après une absence d’au moins vingt et un jours pour cause de maladie ou d’accident non professionnel et en cas d’absences répétées pour raisons de santé.

En violation de ces dispositions Mme Z K ne bénéficie pas d’un examen de reprise de travail par le médecin du travail pour sa reprise du travail à compter du 23 février 2009 alors qu’il est justifié que du 13 au 22 février 2009, soit plus de 8 jours, Mme Z K est en arrêt de travail suite à accident du travail.

L’employeur tenu de l’obligation de sécurité de résultat ci-dessus rappelé ne saurait raisonnablement et sérieusement conclure que « la visite de reprise n’a pas eu lieu » car il « pensait que Mme Z K l’avait sollicitée directement des services de la médecine du Travail comme elle l’indiquait dans son courrier du 23 février 2009 (pièce n° 8) » et qu’elle « ne démontre aucun préjudice directement lié à la visite de reprise non réalisée »'

La violation par la société des établissements Laporte des dispositions de l’article R4624-21 du code du travail lors de la reprise du travail à compter du 23 février 2009 constitue un manquement de gravité suffisante à justifier la résiliation du contrat de travail à ses torts au 2 juillet 2011.

Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse

En raison de l’ancienneté de la salariée (supérieure à deux ans), de son âge au moment du licenciement (née en janvier 1958), du montant de sa rémunération brute (1.365,03 €), des précisions et justificatifs sur sa situation ultérieure et du fait que la société des établissements Laporte emploie au moment de la rupture plus de onze salariés (177selon l’attestation Pôle Emploi), il y a lieu de fixer à la somme de 13.000 € l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au vu des dispositions contractuelles et conventionnelles, Mme Z K est également fondée en sa réclamation des sommes de :

* 1.092,02 € d’indemnité de licenciement ;

* 1.365,03 € d’indemnité compensatrice de préavis ;

L’absence de visite médicale de reprise lors de la reprise du travail à compter du 23 février 2009 cause à Mme Z K un préjudice distinct qui sera réparé par l’allocation d’une somme de 500 € de dommages intérêts.

L’absence de visite médicale d’embauche cause à Mme Z K un préjudice distinct qui sera réparé par l’allocation d’une somme de 500 € de dommages intérêts.

L’employeur tenu de l’obligation de sécurité de résultat lors de l’organisation de la visite médicale d’embauche dont il doit s’assurer de l’effectivité ne peut pas plus conclure qu’il n’était pas tenu de l’organiser puisque « la visite médicale d’embauche n’est pas obligatoire lorsque le salarié, et occupe un emploi identique, et que le médecin du travail est en possession de sa fiche d’aptitude, et qu’aucune inaptitude n’a été reconnue dans les six derniers mois lorsqu’il change d’entreprise et qu’il ne bénéficie pas d’une surveillance médicale particulière » et qu’il « n’est donc pas justifié de ce que Mme Z K n’ait pas fait l’objet d’une visite médicale de travail qui l’aurait déclarée apte à l’emploi dans les six mois précédent son embauche par la société des établissements Laporte compte-tenu du changement d’employeur sans période d’arrêt ».

Sur les dépens

En raison de la solution apportée au présent litige et de l’issue du présent recours les dépens de première instance et d’appel doivent être laissés à la charge de Maître Y E en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Etablissement Laporte.

PAR CES MOTIFS

La Cour ;

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement du 11 septembre 2012 du Conseil de Prud’hommes de Perpignan, section industrie ;

Statuant à nouveau ;

Fixe la créance de Mme Z K au passif de la société des établissements Laporte aux sommes de :

* 2.787,70 € de salaire pour la période du 6 octobre au 6 décembre 2011;

* 500 € de dommages et intérêts pour défaut de visite médicale d’embauche ;

* 500 € de dommages et intérêts pour défaut de visite médicale de reprise;

* 13.000 € d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 1.365,03 € d’indemnité compensatrice de préavis ;

* 1.092,02 € d’indemnité de licenciement ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions des articles 700 du CPC et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Déclare opposable à l’AGS CGEA de Rouen la présente décision ;

Ordonne sans astreinte la délivrance des documents sociaux rectifiés selon les prévisions du présent arrêt ;

Laisse les dépens de première instance et d’appel à la charge de Maître Y E en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Etablissement Laporte.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

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