Cour d'appel de Montpellier, 4ème b chambre sociale, 18 décembre 2019, n° 16/00079

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 4e b ch. soc., 18 déc. 2019, n° 16/00079
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 16/00079
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Montpellier, 26 juillet 2016, N° 15/00479
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

PC/MD

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

4e B chambre sociale

ARRET DU 18 DECEMBRE 2019

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 16/00079 – N° Portalis

DBVK-V-B7A-M2BM

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 JUILLET 2016

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER N° RG 15/00479

APPELANT :

Monsieur A X

de nationalité Française

[…]

[…]

Représenté par Me Jean baptiste ROYER, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

SARL LE JOGGING Prise en la personne de son Gérant en exercice

[…]

[…]

Représentée par Me HENRY avocat de la SCP BELLISSENT – HENRY, avocat au barreau de BEZIERS

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 14 Octobre 2019

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 NOVEMBRE 2019, en audience publique, ayant fait le rapport prescrit par l’article 785 du même code, devant la cour composée de :

M. Jean-Pierre MASIA, Président

Mme Martine DARIES, Conseillère

Madame Magali ISSAD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

— contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ;

— signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCEDURE:

Monsieur A X était embauché le 18 juin 2012 sans contrat de travail écrit par la sarl Le Jogging pour exercer dans l’établissement de restauration Les Caves de Trinque Fougasse exploité 1581 route de Mende à Montpellier.

Les relations de travail prenaient fin le 10 août 2012.

Monsieur X saisissait le 26 mars 2013 le conseil de prud’hommes de Montpellier aux fins d’obtenir paiement de rappels de salaires et faire constater la résiliation judiciaire du contrat de travail ouvrant droit à diverses indemnités.

Par décision du 27 juillet 2016, le conseil de prud’hommes de Montpellier:

— Jugeait que la demande de résiliation de son contrat de travail introduite initialement le 26 mars 2014 par A X aux torts de la Sarl Le Jogging est irrecevable, la relation de travail ayant cessé entre les parties le 10 août 2012 à l’initiative du demandeur,

— Déboutait A X de toutes demandes de ce fait,

— Disait également que les demandes de rappels de salaires et de paiement d’heures supplémentaires doivent être rejetées faute d’éléments sérieux les fondant et déboutait A X de toutes demandes à ce propos,

— Déboutait les parties de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile , faute de justification et de frais exposés au Conseil,

— Laissait les dépens à la charge de A X.

Le salarié interjetait appel de ce jugement le 09 septembre 2016.

PRETENTIONS DES PARTIES:

Dans ses conclusions régulièrement déposées au RPVA, le 10 novembre 2016, Monsieur X sollicite un rappel de salaire sur taux horaire, exposant qu’il a été engagé sans contrat de travail en qualité de cadre responsable de magasin et que le taux horaire afférent à cette fonction est supérieur à celui attaché à la qualité de serveur portée sur les bulletins de salaires.

Il expose également qu’il a travaillé un nombre d’heures supplémentaires bien supérieur à celui mentionné sur ses bulletins de paie et donc non rémunérées de juin 2012 à août 2012. Il réclame paiement de celles-ci outre d’une indemnité pour travail dissimulé.

Invoquant l’inexécution de ses obligations contractuelles par la sarl Le Jogging, il sollicite le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail à durée indéterminée, laquelle doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvrir droit à indemnisation.

Monsieur X demande donc à la Cour de:

— Le dire parfaitement recevable tant sur le fond que sur la forme,

— Réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Vu les articles 1184 du Code civil, L1234-1 et suivants du Code du travail, les articles L1235-5 et suivants du Code du travail, L8211-5 et suivants du Code du travail, la convention collective des hôtels, cafés et restaurants,

— Condamner la Sarl Le Jogging à lui payer la somme de 3 077,19 euros au titre des rappels de salaires, outre celle de 307,72 euros au titre des indemnités de congés payés sur rappels de salaires,

— Constater la résiliation judiciaire du contrat de travail, laquelle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse

— Condamner l a Sarl Le Jogging à lui payer les sommes suivantes :

. Indemnités de préavis : 1 078,23 euros net

. Indemnités de congés payés sur préavis : 107,82 euros net

. Dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail : 6'500 euros,

. Dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement : 2 156,46 euros net

. Dommages et intérêts pour travail dissimulé : 12 938,76 euros,

— Condamner la Sarl Le Jogging à lui verser la somme de 2'000 euros au titre des frais irrépétibles de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

— Ordonner l’exécution provisoire.

Dans ses conclusions régulièrement déposées au RPVA, le 06 janvier 2017, la sarl Le Jogging conteste la qualité et la classification du poste alléguées par Monsieur X au motif qu’il n’a pas été engagé comme cadre mais comme serveur dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet.

Elle réfute qu’il ait accompli des heures supplémentaires non rémunérées pendant ses 53 jours de travail, alors même que la période d’embauche en été 2012 était particulièrement calme pour le restaurant Trinque Fougasse O’Nord et qu’elle ne le lui a pas demandé d’en effectuer.

La sarl conclut à l’irrecevabilité et à tout le moins au rejet comme étant infondée de la demande de résiliation judiciaire à la suite du courriel de Monsieur X du 10 août 2016 qu’elle considère comme étant une démission ayant mis fin au contrat de travail. A titre subsidiaire elle sollicite la minoration d’une éventuelle condamnation.

La sarl Le Jogging demande donc à la Cour de:

A titre principal,

— Confirmer dans toutes ses dispositions, le jugement déféré,

— Débouter Monsieur A X de l’intégralité de ses demandes,

A titre subsidiaire,

— Dans le cas où la Cour considérerait devoir prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts de l’employeur, ramener à plus juste proportion toute éventuelle condamnation prononcée,

En tout état de cause,

— Condamner Monsieur X à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile et encore Monsieur X aux entiers dépens d’instance.

Pour l’exposé des prétentions et leurs moyens, il est renvoyé, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 14 octobre 2019.

MOTIFS:

Sur le rappel de salaire sur taux horaire quant à la fonction et la classification:

Monsieur X allègue qu’il devait être engagé en qualité de responsable de magasin (niveau 4 échelon 2), emploi pour lequel la convention collective des hôtels, cafés et restaurants prévoit une rémunération horaire de 15,23 euros et non comme serveur (niveau 1 échelon 1) au taux horaire inférieur, tel que mentionné sur les bulletins de salaires ( précision étant faite que le bulletin de juin ne comporte pas la nature de l’emploi).

L’employeur oppose qu’un poste d’encadrement n’était ni promis, ni vacant et que celui de responsable de salle était occupé par Monsieur Y, dont le contrat de travail est produit.

Cela est confirmé par ce dernier dans une attestation aux termes de laquelle il rappelle sa fonction et l’existence d’un incident intervenu avec Monsieur X pour lui avoir fait une observation sur son travail.

Sur le planning versé à la procédure Monsieur X est inscrit en qualité de serveur.

Le seul fait pour Monsieur X d’avoir été gérant d’un restaurant antérieurement à son engagement, sans qu’il ne communique d’attestation ou de compte-rendu de réunions, ne permet pas de démontrer qu’il devait occuper un poste de cadre, ne produisant aucune pièce démontrant qu’il aurait exercé les fonctions revendiquées. Il sera débouté de sa demande de reclassification et rappel de salaires à ce titre.

Le jugement du conseil de prud’hommes est confirmé sur ce point.

Sur le rappel de salaires au titre des heures supplémentaires:

Il résulte de l’article L 3171-4 du Code du travail qu’en matière d’heures supplémentaires, la preuve est libre et n’incombe spécialement à aucune des parties. Le salarié qui demande le paiement des heures supplémentaires doit au préalable fournir au juge des éléments factuels de nature à étayer sa demande, revêtant un minimum de précision et permettant à l’employeur de répondre. En présence de ces éléments, l’employeur doit à son tour fournir au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Monsieur X affirme qu’il a travaillé plus que les 38,99 heures supplémentaires décomptées par mois sur les bulletins de salaires tel qu’il résulte des feuilles de présence produites par lui correspondant aux heures réellement travaillées:

— au mois de juin 2012, à compter du 18 juin pour 117,75 heures au lieu de 70 heures, soit 47,75 heures supplémentaires,

— au mois de juillet 2012: 238 heures au lieu de 151,67 heures, soit 86,33 heures supplémentaires,

— au mois d’août 2012 jusqu’au 09: 52,75 heures au lieu de 35 heures, soit 17,75 heures supplémentaires.

Il réclame donc une somme de 3077,19 euros à ce titre outre 307,72 euros de congés payés afférents sur la base de bulletins de salaires modifiés établis selon ses dires par un expert comptable.

Les récapitulatifs d’horaires rédigés par le salarié sont précisés par jour et comportent les horaires et le nombre d’heures accomplies, repas déduits.

La sarl Le Jogging y oppose:

— un planning hebdomadaire mentionnant les noms des salariés dont celui de l’appelant et des tranches horaires journalières et un nombre d’heures global par salarié,

— une attestation de Monsieur Z, second de salle, déclarant que durant l’été 2012 lorsque Monsieur Y était en congé, il a établi des plannings de moins de 44 heures hebdomadaires sans difficulté car il s’agissait d’une période calme où il n’était pas nécessaire d’être plus d’un en service et un au bar à vin,

— une attestation de Monsieur Y, responsable de salle, ayant exercé du 20 septembre 2010 au 30 décembre 2012, aux termes de laquelle il rappelle qu’il gérait toute l’équipe au niveau des plannings et atteste que les plannings joints sont ceux établis pour la période estivale 2012 ( il s’agit de celui versé à la procédure),

— trois témoignages de salariés ayant travaillé sur la même période que Monsieur X déclarant que les heures supplémentaires leur sont normalement et habituellement payées.

Les éléments fournis par l’employeur sont insuffisants pour rejeter les récapitulatifs horaires précis de l’appelant en l’absence de communication d’un système de contrôle applicable dans l’entreprise.

En effet le planning sur lequel figure que tout dépassement de 44 heures doit être signalé, est contesté par l’appelant, ne comporte aucune date, ni signature.

Il existe une contradiction entre les attestations de Monsieur Z, se disant auteur du planning mais n’y figurant pas et Monsieur Y qui y est inscrit et atteste qu’il se rapporte à l’été 2012 alors qu’il aurait été en congé, outre le fait que la société ne rapporte pas la preuve que la dite période nécessitait peu d’employés en salle alors même que le planning mentionne 4 salariés en cuisine.

Si les autres témoignages se rapportent au paiement des heures supplémentaires, ils n’évoquent aucunement l’emploi et les conditions de travail de Monsieur X qu’ils ont côtoyé sur la même période.

En conséquence, il sera fait droit à la demande de condamnation à paiement de la sarl à hauteur de la somme de 2562,89 euros de rappels de salaire majorés ( selon la qualification de serveur et non de celle de cadre) outre 256,28 euros de congés payés afférents.

Le jugement déféré sera infirmé sur ce chef.

Sur le travail dissimulé :

Selon l’article L8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié, le fait soit de se soustraire intentionnellement à la déclaration préalable à l’embauche, soit de se soustraire à l’obligation d’établir un bulletin de paie ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

En l’espèce, l’employeur n’a pas déclaré les heures de travail supplémentaires effectuées par le salarié ce qui caractérise l’élément intentionnel de dissimulation.

Il sera alloué la somme de 12938,76 euros correspondant à 6 mois de salaires à titre d’indemnité pour travail dissimulé.

Le jugement déféré sera infirmé sur ce chef.

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail:

Monsieur X invoquant l’application de l’ancien article 1184 du code civil sur l’inexécution de ses obligations par l’employeur, a initié le 26 mars 2013 une action en résiliation judiciaire.

La sarl y oppose l’irrecevabilité pour cause de démission préalable du salarié.

Une action en résiliation judiciaire laisse subsister la relation contractuelle que le salarié peut ultérieurement rompre.

Or en l’espèce Monsieur X a quitté son emploi le 10 août 2012, départ formalisé par un courriel de cette date par lequel il déclare arrêter 'la collaboration ' par absence de visuel et de perspective et se plaint de ne pas avoir signé de contrat de travail et de ne pas être payé de toutes les heures supplémentaires.

Il écrit dans ses conclusions 'avoir été contraint de prendre acte de la rupture de son contrat de travail', les conditions convenues oralement n’ayant pas été respectées.

La prise d’acte entraînant la rupture immédiatement du contrat de travail, une action en résiliation judiciaire postérieure est irrecevable de même que les demandes d’indemnités afférentes.

La Cour n’est saisie au titre de la rupture d’aucun autre moyen.

Sur les demandes accessoires:

Il convient de condamner la sarl Le Jogging au paiement de la somme de 1000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour l’intégralité de la procédure de première instance et d’appel.

Partie perdante, la sarl Le Jogging sera tenue aux entiers dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS:

La Cour,

Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Montpellier en date du 27 juillet 2016 sauf en ce qui concerne les heures supplémentaires, le travail dissimulé, l’article 700 du code de procédure civile et les dépens,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

Condamne la Sarl Le Jogging à payer à Monsieur A X les sommes suivantes :

—  2562,89 euros de rappels de salaire au titre d’heures supplémentaires non rémunérées outre 256,28 euros de congés payés afférents,

—  12938,76 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé,

Condamne la Sarl Le Jogging à verser une somme de 1000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure ainsi qu’aux dépens pour l’intégralité de la procédure de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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