Cour d'appel de Montpellier, Chambre commerciale, 19 janvier 2021, n° 18/01887

  • Crédit d'impôt·
  • Sociétés·
  • Chauffage·
  • Éligibilité·
  • Concurrence déloyale·
  • Action·
  • Énergie·
  • Pratiques commerciales·
  • Concurrence·
  • Ingénierie

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, ch. com., 19 janv. 2021, n° 18/01887
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 18/01887
Décision précédente : Tribunal de commerce de Montpellier, 25 mars 2018, N° 2017010823
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 19 JANVIER 2021

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/01887 – N° Portalis DBVK-V-B7C-NTUM

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 MARS 2018

TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER

N° RG 2017010823

APPELANTES :

SARL FULL HOME ENERGY – Z FRANCE

[…]

[…]

Représentée par Me Bruno FITA de la SCP FITA-BRUZI, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant

Assisté de Me Julien ROMANO, avocat au barreau des Pyrénées Orientales, avocat plaidant

SARL SOLIDOM – Z INGENIERIE

[…]

[…]

Représentée par Me Bruno FITA de la SCP FITA-BRUZI, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant

Assisté de Me Julien ROMANO, avocat au barreau des Pyrénées Orientales, avocat plaidant

SAS COMWATT

[…]

[…]

Représentée par Me François FERRARI de la SELARL ACTAH, avocat au barreau de BEZIERS

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 10 Novembre 2020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 01 DECEMBRE 2020, en audience publique, Madame A-B C ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Mme A-B C, Conseiller

Mme Marianne ROCHETTE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvia TORRES

ARRET :

— Contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ;

— signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Hélène ALBESA, Greffier.

FAITS, PROCEDURE – PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), prévu par l’article 200 quater du code général des impôts s’applique, notamment, aux dépenses payées, entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2020, au titre de l’acquisition d’appareils de régulation de chauffage.

Ces équipements, matériaux et appareils font l’objet d’une liste fixée par l’article 18 bis de l’annexe IV audit code. Concernant les dépenses pour les appareils de régulation de chauffage, il s’agit de ceux qui permettent le réglage manuel ou automatique et la programmation des équipements de chauffage (…). Ces appareils sont les suivants pour les maisons individuelles :

— systèmes permettant la régulation centrale des installations de chauffage (arrêté du 30 décembre 2015) prenant compte l’évolution de la température d’ambiance (…) ou de la température extérieure avec horloge de programmation (…),

— systèmes permettant les régulations individuelles terminales des émetteurs de chaleur (robinets thermostatiques'),

— systèmes de limitation de la puissance électrique du chauffage électrique en fonction de la température extérieure,

— systèmes gestionnaires d’énergie ou de délestage de puissance du chauffage électrique (arrêté du 30 décembre 2015) lorsqu’ils permettent un arrêt temporaire des appareils concernés dans le cas où la puissance appelée est amenée à dépasser la puissance souscrite.

Ce dispositif fiscal permet aux bénéficiaires de déduire de l’impôt sur le revenu une partie du coût des travaux d’économies d’énergie accomplis avec un taux de déduction variable.

La SARL Z France (anciennement dénommée Eco Avenir), exerçant sous le nom commercial Full Home Energy (la société Z), développe son activité dans le secteur de la domotique et des énergies renouvelables et a créé, notamment, avec la SARL Solidom-Z Ingenierie, en charge de la recherche et du développement, une box domotique, le Z Center, et trois modules Sensor Pilot, Heat & Cool et X Y.

Elle a commercialisé au mois de janvier 2015 une solution ne permettant pas spécifiquement de réguler le chauffage, qui a été considérée par l’administration fiscale par un rescrit du 15 juillet 2015, comme non éligible au CITE.

Par un rescrit du 16 novembre 2015, la Direction départementale des Finances Publiques des Pyrénées-Orientales a considéré que la SARL Solidom, porteuse du projet, est seule habilitée à justifier que les équipements (Z Heat & Coll, Z Sensor Pilot et Z X Y.) répondent aux conditions requises tenant à la définition et aux critères techniques des systèmes gestionnaire d’énergie ou de délestage de chauffage électrique éligibles au crédit d’impôt prévu à l’article 200 quater du code général des impôts.

La SAS Comwatt développe, quant à elle, des solutions brevetées permettant, d’une part, de traiter les problèmes liés à l’autoconsommation électrique dans le cadre d’installations photovoltaïques et, d’autre part, d’optimiser la consommation en régulant les usages d’énergie. Elle propose deux solutions appelées IndepBox Power et lndepBox Easy, qui sont également des box domotiques.

Elle présente ses solutions comme éligibles au crédit d’impôt pour la transition énergétique et au taux de TVA réduit à 5,5 %.

Des relations ont existé entre les deux sociétés.

Saisi par acte d’huissier de justice du 5 juillet 2017 délivré par la SARL Z France et la SARL Solidom pour faire cesser tout agissement de concurrence déloyale, le tribunal de commerce de Montpellier a, par jugement du 26 mars 2018 :

« - dit et jugé irrecevable l’action de la SARL Solidom ;

- dit et jugé que la société Comwatt n’a pas commis d’acte de concurrence déloyale à l’égard de la SARL Full Home Energy et de la société Solidom ;

- débouté les sociétés Z et Solidom de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- débouté la société Comwatt de sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 50 000 euros pour procédure abusive ;

- condamné solidairement les sociétés Z et Solidom à payer à la société Comwatt la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

- condamné solidairement les sociétés Z et Solidom aux entiers dépens (…). »

Par déclaration reçue le 11 avril 2018, la société Z et la société Solidom ont régulièrement relevé appel de ce jugement.

Elles demandent à la cour, en l’état de leurs conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 4 mars 2020, de :

« - (…) voir réformer en toutes ses dispositions la décision entreprise,

- voir dire et juger recevable l’action de la société Solidom,

- voir constater que les solutions IndepBox Easy et IndepBox Power commercialisées par la société Comwatt ne sont pas éligibles au CITE,

- voir constater cependant que la société Comwatt présente ses solutions IndepBox Easy et IndepBox Power dans sa communication commerciale comme éligibles au crédit d’impôt précité,

- voir dire et juger que ces agissements constituent un acte de concurrence déloyale à leur égard,

- en conséquence, voir faire interdiction à la société Comwatt de se prévaloir de l’éligibilité de ses solutions IndepBox Easy et IndepBox Power au crédit d’impôt pour la transition energétique, sous astreinte de 5 000 euros par infraction constatée,

- voir condamner la société Comwatt au paiement de la somme provisionnelle de 50 000 euros, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la société Full Home Energy,

- voir désigner tel expert qu’il plaira à la cour, afin de déterminer le préjudice induit sur les trois derniers exercices,

- voir ordonner la parution de la décision à intervenir dans la presse spécialisée et plus particulièrement sur le site Internet wvvw.tecsol.fr,

- voir condamner la société Comwatt au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens. »

Au soutien de leur appel, elles font essentiellement valoir que :

— concernant l’action de la société Solidom, les conditions de fond de l’action en concurrence déloyale ne doivent pas être confondues avec les conditions de recevabilité de cette action,

— de même concernant l’action de la société Z, la disparition du CITE ne sera effective qu’à compter du 1er janvier 2021 et sera remplacée par une prime de transition énergétique, dont seuls les critères et modalités d’attribution diffèrent, et la société Comwatt continuera de faire figurer dans ses documents le nouveau dispositif venant remplacer le CITE,

— le droit de la consommation sanctionne les pratiques commerciales déloyales et trompeuses,

— la concurrence déloyale découle des agissements de l’intimée, qui créent une perturbation du marché dans ce secteur de niche et lui imposent, afin d’être respectueuse de la législation fiscale, une baisse drastique et illégitime des prix afin de rester concurrentielle,

— l’éligibilité au CITE induit une différence de tarif, qui constitue un argument commercial supplémentaire pour les distributeurs et leur permet d’avoir une meilleure marge sur les produits vendus au client final,

— les produits Comwatt qui sont des systèmes de suivi de la consommation et d’optimisation de l’autoconsommation, ils ne constituent pas des appareils de régulation de chauffage et ne peuvent être éligible au CITE et à la TVA au taux réduit,

— le droit fiscal est soumis à un principe d’interprétation stricte et l’article 200 quater du CGI ouvre l’éligibilité au crédit d’impôt que pour l’acquisition d’appareils de régulation de chauffage et non pour les radiateurs ou autres matériels, qui en constituent parfois l’accessoire,

— la société Comwatt détourne la législation fiscale, qui n’a pas évolué par le biais d’une instruction d’août 2017, afin de bénéficier d’un avantage concurrentiel illégitime,

— l’obtention de brevets et de récompenses de sa concurrente est indifférente,

— la société Comwatt s’abstient de procéder à un rescrit fiscal, étant consciente qu’elle se heurterait à un refus,

— l’expert judiciaire qu’elle a consulté confirme qu’aucune des solutions Comwatt n’est éligible au CITE et à la TVA minorée, au contraire des solutions Z,

— elle a réalisé de lourds investissements dans le développement de modules éligibles au CITE et à la TVA minorée, ce qui n’est pas le cas de sa concurrente et lui permet de pratiquer des prix très agressifs sur le marché,

— elles subissent une perte de marge, représentant un gain manqué, et un trouble commercial et la société Z subit également un préjudice moral et un préjudice d’image, devant régulièrement s’expliquer sur la différence tarifaire existante entre les deux solutions.

Formant appel incident, la société Comwatt sollicite de voir, aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 31 décembre 2019:

« - (…) juger irrecevable la demande de Z de suppression de la mention du CITE par Comwatt du fait de la disparition du CITE à compter du 1er janvier 2020,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

- jugé que la société Solidom est irrecevable dans ses prétentions, faute d’avoir une activité concurrentielle avec celle de la société Comwatt ;

- débouté les sociétés Z et Solidom de toutes leurs fins et demandes ;

- infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a rejeté la demande reconventionnelle, par voie de conséquence, condamner solidairement les sociétés Z et Solidom au paiement de la somme de 50 000 euros pour procédure abusive ;

- rejeter la demande d’expertise judiciaire comme infondée ;

- condamner solidairement les sociétés Z et Solidom au paiement de la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement les sociétés Z et Solidom aux entiers dépens.»

Elle expose en substance que :

— le crédit d’impôt pour la transition énergétique va disparaître, celui-ci devant être remplacé par une prime payée aux termes de la réalisation des travaux, soumise à conditions de ressources, de sorte que l’action de la société Z tendant à la suppression de la mention du CITE dans ses documents commerciaux est privée de tout intérêt à agir,

— la société Solidom n’est pas concurrente directe ou indirecte de la société Comwatt, elle ne rapporte l’existence d’aucune faute et ne justifie d’aucun préjudice,

— l’action en concurrence déloyale suppose une faute, un préjudice et un lien de causalité ; la faute

s’exprimant par un détournement de clientèle ou encore la désorganisation de la société,

— les faits tels que présentés par l’appelante, à savoir la description des qualités de son matériel, excluent tout détournement de clientèle, aucune désorganisation de l’entreprise par, notamment, un débauchage de personnel n’est rapportée,

— la variation de prix induite par le crédit d’impôt est en réalité faible par rapport au coût moindre de ses produits (et de ceux des autres concurrents),

— elle ne démontre pas que ses solutions ne sont pas éligibles au crédit d’impôt,

— le consommateur ne peut que choisir ses solutions, qui sont moins onéreuses,

— elle n’est pas responsable de la communication commerciale de ses distributeurs auprès des consommateurs et ne peut se voir reprocher une violation des dispositions du code de la consommation,

— elle ne justifie d’aucune désorganisation du marché du fait d’une communication erronée sur l’éligibilité au CITE alors qu’elle-même communique sur le CITE à l’instar des autres acteurs du marché,

— l’assimilation des deux solutions techniques n’est pas démontrée, la société Z présentant une gamme de matériel éclaté en de nombreuses machines alors qu’elle-même produit de boîtes techniques,

— la documentation de l’ADEME n’exclut pas que le matériel éligible au crédit d’impôt puisse avoir des fonctions complémentaires à celle de la régulation du chauffage,

— seul le juge de l’impôt est compétent pour apprécier de l’éligibilité d’un produit technique au dispositif fiscal,

— l’expert consulté a établi un rapport sans valeur juridique, il omet l’instruction fiscale du 7 août 2017 et n’est pas expert en matière de CITE,

— cette action traduit une ranc’ur existant entre les présidents des deux sociétés,

— aucune pièce comptable n’est produite à l’appui du préjudice réclamé alors que le chiffre d’affaires de la société Z entre 2015 et 2018 a augmenté de 420 %,

— cette action est abusive et vise uniquement à convaincre les distributeurs de la société Comwatt de ne plus vendre ses solutions.

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

C’est en l’état que l’instruction a été clôturée par ordonnance du 10 novembre 2020.

MOTIFS de la DECISION :

1- La recevabilité de l’action en concurrence déloyale de la société Solidom, tirée d’un défaut d’intérêt et de qualité à agir, n’est pas soumise à la démonstration préalable du bien-fondé de cette action, alors qu’au demeurant, celle-ci, n’impose nullement au titre de ses conditions de fond nécessaires à son succès, l’existence d’une situation concurrentielle entre les sociétés concernées, de sorte que l’action de la société Solidom est recevable.

De même, la recevabilité de l’action en concurrence déloyale de la société Z, tirée d’un défaut d’intérêt à agir, n’étant pas soumise à la démonstration préalable du maintien du crédit d’impôt à la transition énergétique au-delà du 31 décembre 2020 (celui-ci étant définitivement supprimé depuis le 1er janvier 2021 et remplacé par une prime 'Ma Prime Rénov'), qui, en tout état de cause, ne fait pas disparaître rétroactivement la situation anti-concurrentielle, dont elle se prévaut, l’action de la société Z est ainsi également recevable.

Le jugement sera dès lors réformé et complété.

2- En vertu du principe de la liberté du commerce et de l’industrie, principe à valeur constitutionnelle, toute personne peut accéder au marché de son choix et à y exercer l’activité économique choisie afin de développer une clientèle, quand bien même celle-ci serait déjà exploitée par un concurrent.

L’action en concurrence déloyale, fondée sur l’article 1240 (anciennement 1382 et 1383) du code civil, vise à sanctionner un comportement violant cette règle en raison d’actes illicites, à charge pour celui qui s’en prévaut de faire la démonstration des actes fautifs de son concurrent et d’un lien de causalité entre ceux-ci et le préjudice qu’il invoque.

Selon l’article L 121-1 du code de la consommation, inséré dans un chapitre consacré aux pratiques commerciales interdites, les pratiques commerciales déloyales sont interdites et une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé à l’égard d’un bien ou d’un service.

Ainsi, une pratique commerciale est, notamment, selon les dispositions légales suivantes, réputée trompeuse lorsqu’elle contient des informations fausses ou lorsqu’elle est susceptible d’induire en erreur et porte sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir, ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires (…) le prix ou le mode de calcul de son prix (…) ou la portée des engagements de l’annonceur, la nature, le procédé ou le motif de la vente ou de la prestation de service.

Il est établi que la société Z et la société Comwatt sont des sociétés exerçant leur activité dans un secteur concurrentiel et que la société Comwatt, qui est un professionnel, se prévaut dans sa communication et ses offres commerciales (site internet, plaquettes commerciales et lettre d’information) à destination finale des consommateurs, même si ses produits sont vendus et posés par le biais de distributeurs, de l’éligibilité de ses produits au crédit d’impôt pour la transition énergétique prévu par l’article 200 du code général des impôts.

La société Z fait grief à son concurrent de se prévaloir de cette éligibilité pour ses produits Indepbox et de détourner la législation fiscale afin de bénéficier d’un avantage concurrentiel illégitime alors que lesdits produits, qui ne sont que des systèmes de suivi de la consommation et d’optimisation de l’autoconsommation, qui n’ont pas pour seul but de réguler le chauffage.

Elle reproche également à sa concurrente de se prévaloir de l’application d’un taux réduit de TVA de 5,5 %, qui correspond aux travaux de rénovation énergétique (dépenses en faveur d’économie d’énergie, d’isolation thermique ou d’équipements de production d’énergie utilisant une source d’énergie renouvelable) sans, pour autant, caractériser à ce titre un manquement aux règles de la libre concurrence ci-dessus rappelées et aucun comportement déloyal à ce titre ne sera retenu.

La société Z n’allègue d’aucune violation de règles déontologiques définies pour la profession concernée ou, pour le moins, d’usages professionnels, résultant de règles définies ayant vocation à régir ladite activité.

La revendication de l’éligibilité des produits et services, proposés à la vente, à un avantage de nature fiscale ne relève d’aucune des 22 pratiques commerciales trompeuses énumérées par l’article L. 121-4 du code de la consommation.

Il appartient ainsi à la société Z, en l’absence de présomption de déloyauté, de rapporter ce caractère et d’établir qu’elle subit un préjudice du fait du message publicitaire critiqué.

Elle produit un rapport en date du 4 juin 2018, émanant d’un expert qu’elle a désigné, selon lequel, contrairement à ce qu’elle soutient, le produit IndepBox Power, selon certaines configurations (associé aux « thermostats Secure » ou aux « robinets thermostatiques Danfoss Popp ») est éligible au CITE sous réserve de considérations relatives à leur coût, qui sont indifférentes, et sans avoir examiné les mêmes types de configurations pour le produit IndepBox Easy, de sorte qu’elle ne rapporte pas la preuve que la communication commerciale critiquée est fausse ou de nature en induire en erreur et, par là, trompeuse.

Au demeurant, cette communication commerciale indique que les produits Indepbox Power et Indepbox Easy et leurs accessoires sont éligibles au CITE lorsqu’ils pilotent un ou plusieurs radiateurs.

À cet égard, le rescrit de l’administration fiscale du 15 juillet 2015 a exclu les produits soumis par la société Z en ce qu’ils avaient pour but d’optimiser la consommation électrique, et que, bien que permettant une régulation du chauffage, n’étaient pas des équipements de régulation de chauffage au sens des textes applicables.

De même, la société Comwatt verse aux débats des communications commerciales d’autres sociétés concurrentes faisant état de l’éligibilité au CITE de leurs produits ('solutions 4-noks', 'système SolarEdge' et 'MyLight Systems') au regard de leurs capacités à piloter le mode de chauffage tandis que les communications commerciales, produites par la société Z, provenant d’autres sociétés commercialisant des box domotiques ('système Fibaro', box 'Jeedom Smart' et box 'Eedomus'), qui ne mentionnent aucune possibilité de régulation du chauffage, ne font nullement état d’une telle éligibilité.

Par ailleurs, l’altération du comportement économique du consommateur doit être substantielle et doit atteindre fondamentalement sa décision. Or, la société Comwatt expose, sans être contredite, que l’application du crédit d’impôt sur le prix de vente de ses produits est limitée au regard d’un prix de vente moins élevé que les produits de la société Z, ayant les mêmes fonctions, qui demeurent plus onéreux même si ledit avantage n’est appliqué que pour ces derniers.

Ainsi, la décision d’achat du consommateur, auquel s’adresse au final la communication commerciale, ne peut reposer essentiellement sur l’éligibilité au crédit d’impôt, et l’absence de véracité du message publicitaire, qui, en tout état de cause, n’est pas avérée, paraît indifférente.

Enfin, pour justifier de son préjudice, outre celui qui s’infère nécessairement d’actes de concurrence déloyale, la société Z fait état de lourds investissements dans le développement de modules éligibles, qu’elle ne démontre aucunement à l’appui de pièces justificatives tandis que la prétendue perte de marge repose sur un chiffrage correspondant à une diminution du prix de vente (1 200 – 500 euros) en 2017 des modules Sensot Pilot et ce au profit d’un unique distributeur (la société Solipac) par rapport au prix, en 2015, du pack Z (et non du seul module concerné).

En conséquence, à défaut de rapporter l’existence de comportements déloyaux constitutifs d’actes de concurrence déloyale et des préjudices susceptibles d’en découler alors qu’une mesure d’expertise judiciaire ne viserait qu’à pallier cette carence, l’ensemble des demandes des sociétés Z et Solidom ne pourront prospérer.

Le jugement sera donc confirmé et complété.

3- La société Comwatt, qui se contente, à défaut de tout élément justificatif, de soutenir que les sociétés appelantes ont utilisé la présente procédure à des fins étrangères à son objet, visant en réalité à remettre en cause la confiance de ses distributeurs, n’établit pas que l’action en justice exercée par celles-ci soit le fruit de la malice, de la mauvaise foi ou le résultat d’une erreur grossière et qu’ayant dégénéré en abus, elle ait été source de préjudice. Sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive sera donc rejetée.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

4- Succombant sur leur appel, la société Z et la société Solidom seront condamnées in solidum aux dépens et au vu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 2 000 euros, leur demande sur ce fondement étant rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Réforme le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 26 mars 2018, mais seulement en ce qu’il a déclaré irrecevable l’action de la SARL Solidom,

Statuant à nouveau de ce seul chef, déclare recevable l’action de la SARL Solidom-Z Ingenierie,

Confirme le jugement entrepris dans le surplus de ses dispositions,

Y ajoutant, rejette les demandes de la SARL Solidom-Z Ingenierie,

Condamne in solidum la SARL Z France et la SARL Solidom-Z Ingenierie à payer à la SAS Comwatt la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette la demande de la SARL Z France et la SARL Solidom-Z Ingenierie fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la SARL Z France et la SARL Solidom-Z Ingenierie aux dépens d’appel.

le greffier, le président,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Montpellier, Chambre commerciale, 19 janvier 2021, n° 18/01887