Cour d'appel de Nîmes, 4ème chambre commerciale, 14 septembre 2017, n° 16/03687

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nîmes, 4e ch. com., 14 sept. 2017, n° 16/03687
Juridiction : Cour d'appel de Nîmes
Numéro(s) : 16/03687
Décision précédente : Tribunal de commerce de Nîmes, 6 juillet 2016, N° 2015J00303
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N°

R.G. : 16/03687

CC/PS

TRIBUNAL DE COMMERCE DE NIMES

07 juillet 2016

RG:2015J00303

E

S.A.S. HOLDING F E

C/

H

H

J

J

L

N

SA NOTILIA

COUR D’APPEL DE NÎMES

4e CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 14 SEPTEMBRE 2017

APPELANTS :

Monsieur F E

né le […] à […]

[…]

[…]

Représenté par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Elysee CASANO, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A.S. HOLDING F E

Société par actions simplifiée à associé

unique, inscrite au RCS SAINT-ETIENNE soue le N° B 802 637 249 prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[…]

[…]

Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Elysee CASANO, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉS :

Monsieur X H

né le […] à LYON

[…]

[…]

R e p r é s e n t é p a r M e S t é p h a n e G O U I N d e l a S C P LOBIER-MIMRAN-GOUIN-LEZER-JONZO-VOLLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Monsieur I H

né le […] à NIMES

[…]

[…]

R e p r é s e n t é p a r M e S t é p h a n e G O U I N d e l a S C P LOBIER-MIMRAN-GOUIN-LEZER-JONZO-VOLLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Monsieur Y J

né le […] à PARIS

[…]

[…]

R e p r é s e n t é p a r M e S t é p h a n e G O U I N d e l a S C P LOBIER-MIMRAN-GOUIN-LEZER-JONZO-VOLLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Monsieur K J né le […] à RENNES

[…]

[…]

R e p r é s e n t é p a r M e S t é p h a n e G O U I N d e l a S C P LOBIER-MIMRAN-GOUIN-LEZER-JONZO-VOLLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Madame A L

née le […] à VOIRON

[…]

[…]

R e p r é s e n t é e p a r M e S t é p h a n e G O U I N d e l a S C P LOBIER-MIMRAN-GOUIN-LEZER-JONZO-VOLLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Monsieur M N

né le […] à […]

[…]

[…]

R e p r é s e n t é p a r M e S t é p h a n e G O U I N d e l a S C P LOBIER-MIMRAN-GOUIN-LEZER-JONZO-VOLLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

SA NOTILIA

Société NOTILIA, Société Anonyme à Conseil d’Administration,

au capital de 2.074.061 €,

immatriculée au RCS de NIMES, sous le n° 344 696 331,

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège.

[…]

[…]

R e p r é s e n t é e p a r M e S t é p h a n e G O U I N d e l a S C P LOBIER-MIMRAN-GOUIN-LEZER-JONZO-VOLLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 04 Mai 2017

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christine CODOL, Président de Chambre,

Mme Marianne ROCHETTE, Conseiller,

Mme Christine LEFEUVRE, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Patricia SIOURILAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l’audience publique du 08 Juin 2017, où l’affaire a été mise en délibéré au 14 Septembre 2017

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé et signé par Mme Christine CODOL, Président de Chambre, publiquement, le 14 Septembre 2017, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSÉ

Vu l’appel interjeté le 18 août 2016 par la s.a.s « holding F E » et Monsieur F E à l’encontre du jugement prononcé le 7 juillet 2016 par le tribunal de commerce de Nîmes dans l’instance n° 2015J00303.

Vu les dernières conclusions déposées le 16 novembre 2016 par les appelants et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu les dernières conclusions déposées le 23 novembre 2016 par la société anonyme « Notilia », Messieurs X et I H, Messieurs Y et K J, Madame A L, Monsieur M R, intimés, et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu l’ordonnance du 24 février 2017 de clôture de la procédure à effet différé au 4 mai 2017 et de fixation de l’affaire à l’audience de plaidoiries du 8 juin 2017.

* * *

La société anonyme « Socadif » ayant son siège social à Faverges (74) a pour objet social le négoce de pièces détachées et la quincaillerie en gros. Son capital social est composé de 99 120 actions détenues par :

'société « Notilia » : 99 096 actions,

'Monsieur X H : 4 actions,

'Monsieur I H : 4 actions,

'Monsieur Y J : 4 actions,

'Monsieur K J : 4 actions

'Madame A L : 4 actions,

'Monsieur M N : 4 actions.

Le groupe « Notilia » a souhaité céder sa participation au sein de la société « Socadif ».

Par acte sous seing privé du 11 avril 2014, un compromis de cession de la totalité des actions de la société « Socadif » à Monsieur F E au prix de 1 800 000 € était signé sous conditions suspensives. L’acte réitératif de cession était régularisé le 30 juin 2014, les cessionnaires étant en définitive la société « holding F E » à hauteur de 99 917 actions, Monsieur F E pour une action, Madame T E pour une action et Mademoiselle U E pour une action.

Une convention de garantie d’actif et de passif était également signée le 30 juin 2014 entre la société « Notilia », garant, et la société « holding F E » bénéficiaire.

Par courrier du 24 septembre 2014, la société « holding F E» demandait l’application de la convention de garantie en raison de la survenance de 2 types de difficultés :

'conséquences d’une procédure prud’homale concernant le licenciement de Madame Z,

'demandes en paiement de centrales d’achat au titre des ristournes fournisseur (dites remise de fin d’année, RFA) émanant de Carrefour pour un montant de 46 198,05 € et de Castorama pour un montant de 32 661,54 euros.

La société « Notilia » refusait la mise en jeu de la garantie par courrier du 7 novembre 2014. La société « holding F E » réitérait sa demande de garantie par courrier du 12 janvier 2015.

Puis le cessionnaire reprochait à la société « Notilia » de ne pas l’avoir informé de la perte d’un appel d’offres concernant une gamme de produits d’hydrothérapie.

Par exploits des 11,12 et 16 juin 2015, la société « holding F E» et Monsieur F E ont fait assigner la société anonyme « Notilia », Messieurs X et I H, Messieurs Y et K J, Madame A L, Monsieur M R devant le tribunal de commerce de Nîmes qui, par jugement du 7 juillet 2016, a :

'rejeté les demandes financières de la société « holding F E » aussi bien en ce qui concerne l’instance prud’homale que celle fondée sur les ristournes de fin d’année de Castorama ou Carrefour sur la base de la mise en jeu de la garantie actif/passif,

'rejeté la demande financière de la société « holding F E » concernant la perte du marché Gallec/Siplec aussi bien au titre du dol que de la responsabilité civile,

'condamné solidairement la société « holding F E » et Monsieur F E à payer à la société anonyme « Notilia » la somme de 10 000€,

'condamné solidairement les mêmes à payer à la société anonyme « Notilia », Messieurs X et I H, Messieurs Y et K J, Madame A

L, Monsieur M R la somme de 2000 € à chacun,

'condamné la société « holding F E » aux dépens de l’instance.

La société « holding F E » représentée par la s.e.l.a.r.l. V W ès qualités de liquidateur judiciaire, désigné à cette fonction par jugement du tribunal de commerce d’Annecy du 16 septembre 2016 et Monsieur F E ont relevé appel de ce jugement et demandent en substance à la cour, au visa des articles 1116 et 1134 du code civil de :

'condamner la société «Notilia » à payer à la société « holding F E » la somme de 14 269 € TTC au titre des frais avancés d’avocats, de conseil et de préparation du dossier prud’homal opposant la société «Socadif » à son ancienne salariée Madame Z,

A titre principal, en application de la convention de garantie d’actif et de passif,

'condamner la société «Notilia » à payer à la société « holding F E la somme de 78 859 € avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 septembre 2014 au titre des RFA des sociétés Carrefour et Castorama,

Subsidiairement, au vu de la réticence dolosive des intimés,

— condamner in solidum la société anonyme « Notilia », Messieurs X et I H, Messieurs Y et K J, Madame A L, Monsieur M R à payer à la société « holding F E » la somme de 78 859,59 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel subi à raison des modalités de RFA Carrefour et Castorama,

Sur la perte du marché E. Leclerc,

' condamner in solidum la société anonyme « Notilia », Messieurs X et I H, Messieurs Y et K J, Madame A L, Monsieur M R à payer à la société « holding F E » la somme de 653 194 € en réparation de son préjudice matériel résultant de la perte de chance pour la société « Socadif » de réaliser une marge nette sur le marché hydrothérapie avec le groupe Leclerc, outre la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

'condamner les mêmes à payer à Monsieur F E la somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral,

'condamner solidairement les mêmes à payer à la société « holding F E » la somme de 35 000 € titre de l’article 700 du code de procédure civile outre celle de 10 000 € à Monsieur F E au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens,

'faire application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées.

La société anonyme « Notilia », Messieurs X et I H, Messieurs Y et K J, Madame A L, Monsieur M R demande à la cour de :

Au visa des articles L. 641'9 du code de commerce, 31 et 122 du code de procédure civile,

'déclarer irrecevable l’intégralité des prétentions et l’action formée par la société « holding

F E »,

Au fond, au visa des articles 1116, 1134, 1147 et 1315 anciens du code civil,

'confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

En toute hypothèse,

'débouter Monsieur F E de toutes ses demandes et le condamner à payer, au titre de l’article 700 du code de procédure civile à :

société « Notilia » : 10 000 €

'Monsieur X H : 5000 €

'Monsieur I H : 1000 €,

'Monsieur Y J : 1000 €,

'Monsieur K J : 1000 €,

'Madame A L : 1000 €,

'Monsieur M N : 1000 € ainsi qu’aux dépens.

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur la fin de non-recevoir :

Les intimés soutiennent que la société « holding F E » n’a pas qualité à agir en ce qu’elle a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d’Annecy du 16 septembre 2016 et que seul le liquidateur judiciaire peut exercer les droits et actions du débiteur en liquidation par application de l’article L. 641'9 du code de commerce.

Mais les dernières conclusions des appelants ont été prises pour le compte de la société « holding F E » représentée par la s.e.l.a.r.l. V W pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de ladite société, désigné à cette fonction par jugement du tribunal de commerce d’Annecy du 16 septembre 2016, de sorte que le liquidateur est bien dans la cause. L’instance est donc valablement poursuivie, quand bien même les prétentions sont toujours émises au nom de la société holding dans le dispositif.

Sur le fond :

1°) sur la demande d’indemnisation liée au contentieux prud’homal

Madame B, salariée de la société « Socadif » a été licenciée le 3 mai 2011. Elle a contesté son licenciement et le conseil des prud’hommes de Coutances a rendu un jugement le 16 juillet 2015 en sa faveur. En application de la garantie d’actif et du passif la société « Notilia » a adressé le 31 août 2015 à la société « holding F E » un règlement de 6600 €.

Les appelants font toutefois valoir que des frais de procédure ont été avancés par la société « Socadif » et doivent être remboursés à la société holding à hauteur de 14 269 € TTC.

Les intimés soutiennent que la société garantie est déchue du droit à indemnisation car les notes d’honoraires du cabinet Barthélémy, avocat et de Monsieur C, conseil d’entreprise datent du 27 novembre et 10 décembre 2014 alors que la demande de prise en charge a été faite le 11 février 2015. Ils fondent leur argumentation sur l’article D8 de la convention , lequel stipule : « la responsabilité du garant ne pourra être pleinement engagée que s’il a été avisé par lettre recommandée avec avis de réception ou remise en main propre, en temps utile, et au plus tard (date de réception) dans les dix (10 jours)… de la date à laquelle le bénéficiaire aura eu connaissance de la survenance de tout événement de nature à mettre en jeu la responsabilité du garant au titre de la présente garantie. Le non-respect par le bénéficiaire de la procédure et des délais ci-dessus décrits au paragraphe 8 entraînera la déchéance du droit à indemnisation du bénéficiaire au titre de l’appel en garantie concerné ».

En l’occurrence, le bénéficiaire a adressé le 24 septembre 2014 à la société «Notilia » un courrier dans lequel il indiquait « je tiens à mettre en 'uvre la garantie de passif signée le 30 juin 2014 » à propos notamment d'« une convocation du tribunal des prud’hommes de Coutances pour le 16 octobre 2014 concernant Madame B ». Le bénéficiaire indiquait également avoir contacté le cabinet Barthélémy pour prendre en charge ses intérêts dans le cadre de cette procédure.

Il est ainsi démontré que la société « holding F E » a informé le garant de la survenance d’un événement de nature à mettre en jeu la garantie du passif, peu important que le montant et la nature des sommes réclamées à ce titre ne soit pas encore fixé. En effet, l’article D7 paragraphe 2 précise « que toute réclamation adressée par le bénéficiaire au garant (…) sera de nature à mettre en jeu la présente garantie même si, du fait d’un litige avec un tiers ou entre les parties, le montant exact des sommes dues au titre de cette réclamation n’est déterminé que postérieurement à cette date, en particulier à l’issue d’une instance judiciaire, administrative ou arbitrale ». La communication des frais de procédure, en ce qu’elle s’inscrit dans le cadre du litige prud’homal dénoncé le 24 septembre 2014, n’est par conséquent pas elle-même soumise au délai de 10 jours prévu par l’article D8. Dès lors c’est à tort que les premiers juges ont déclaré le bénéficiaire déchu de sa garantie en application de cet article.

Sur le fond, les intimés estiment ne pas avoir à prendre en charge le coût du travail des salariés de la société « Socadif » pour préparer le dossier prud’homal ni les honoraires de son avocat ainsi que de son conseil d’entreprise car il ne constituent pas un dommage au sens de l’article D3 de la garantie d’actif et du passif.

L’article D3 de la convention énonce : « le montant des sommes dont le garant (Notilia) sera redevable au titre de la présente garantie sera déterminé sur la base du dommage constaté au niveau de la société (Socadif) ou du préjudice subi par le bénéficiaire (holding F E)»…

C’est à juste titre que le garant et les autres intimés font valoir que la société « Notilia » doit prendre en charge les conséquences de l’illégitimité du licenciement de Madame B, c’est-à-dire les condamnations définitives prononcées à l’encontre de la société « Socadif », qui constituent son dommage et non les frais de procédure ou plus généralement de préparation du travail de la défense puisque l’article 6 susvisé ne prévoit aucune indemnisation à ce titre. Au surplus, les 5 attestations identiquement dactylographiées (sauf le nombre de jours) signées par des salariés de la société « Socadif » – et en tant que tels soumis à un lien de subordination avec leur employeur – sont bien trop générales pour justifier des heures soi-disant passées à la recherche des pièces demandées par le cabinet Barthélémy.

En ce qui concerne le dommage subi par le bénéficiaire de la garantie, la société « Notilia » a rempli ses obligations en adressant le 31 août 2015 à la société « holding F E » un règlement de 6600 € correspondant au montant de la condamnation prononcée par le jugement du 16 juillet 2015 déduction faite de la franchise (article D4) et de l’économie d’impôt (article D3).

Il y a donc lieu de débouter les appelants de leur demande relative à l’indemnisation des frais de procédure et du coût de travail des salariés générés par le litige prud’homal concernant Madame B.

2°) sur la demande d’indemnisation au titre des ristournes

Les appelants reconnaissent avoir eu connaissance du déréférencement des produits de la société « Socadif » par les sociétés « Carrefour » et « Castorama » durant les pourparlers précontractuels. Mais ils reprochent aux intimés d’avoir pris des accords avec ses partenaires distributeurs pour organiser la fin des contrats, sans que le cessionnaire n’en ait eu connaissance. Et celui-ci a eu la surprise de recevoir le 23 septembre 2014 une demande en paiement de Carrefour d’un montant de 46 198,05 € correspondant à des ristournes équivalentes à 26,75 % du chiffre d’affaires réalisé entre le 1er janvier 2014 et le 15 avril 2014.

Les intimés réfutent cette argumentation et font valoir en premier lieu que le bénéficiaire est déchu du droit à indemnisation, sa demande de garantie étant tardive.

La société « holding F E » a mis en jeu le 24 septembre 2014 la garantie de passif à propos d'«un montant de RFA de 46 198,05 € réclamé par Carrefour (voir mail client) ». Le courriel joint est daté du 23 septembre 2014 et a pour objet une demande de règlement par promesse de virement de la somme de 46 198,05 € facturée le 29 août 2014 à échéance le 28 septembre 2014. Ce courriel a été transféré par Madame D, employée de la société «Socadif » à Monsieur F E le même jour avec la mention « relance (souligné par la cour) de Carrefour concernant la ristourne 214 » ce qui démontre la connaissance préalable de la dette. Or, sur la facture du 29 août 2014 (pièce 12 des appelantes) est tamponnée la date du 2 septembre 2014, ce qui correspond usuellement à la formalisation de la date de réception du courrier par son destinataire. Il est ainsi établi, comme soutenu par les intimés, que la société « Socadif » a eu connaissance de la reconduction de l’accord commercial de 2013 (jusqu’au 15 avril 2014) à la date du 2 septembre 2014 et non au 23 septembre suivant qui est la date de la relance.

Pourtant, elle n’a demandé à être garantie du passif ainsi généré que le 24 septembre 2014 'soit plus de 10 jours après la survenance de l’événement’ et c’est à juste titre que les intimés lui opposent la déchéance de garantie prévue à l’article D8 du contrat.

***

La société «holding F E» à défaut d’application de la convention de garantie, soutient qu’elle a été trompée par les réticences dolosives des cédants au sujet de ces ristournes. Elle fait valoir que tant le garant que les autres cédants qui étaient administrateurs de la société « Socadif » connaissaient les conditions de mise en 'uvre financière de la rupture du contrat Carrefour et ont, soit sciemment communiqué des documents ayant valeur contractuelle qui ne reflétaient pas la réalité, soit omis de les communiquer. Le cessionnaire affirme que s’il avait connu ces informations, il n’aurait pas contracté ou ne l’aurait pas fait à ces conditions.

Les intimés réfutent cette argumentation et soutiennent que le bénéficiaire de la garantie d’une part savait tout et d’autre part pouvait se procurer lui-même tous les renseignements dans le cadre des investigations et de l’audit de la société «Notilia » pendant 9 mois.

La pièce 9 produite par les appelantes consistant en un tableau prévisionnel CA /RFA au 31 mars 2014 de Socadif mentionne en ligne 4 que le chiffre d’affaires ristournable au 31 mars 2014 avec la centrale Carrefour est de 221 737,48 euros, le taux 2013 étant de 26,75 % et le taux 2014 de 0 %. Un nouveau tableau est communiqué à Monsieur F E le 1er juillet 2014 (pièce 11 des appelantes) spécifiant que le chiffre d’affaires réalisé au 30 juin 2014 s’élève à 172 703,15 euros « les dernières commandes étant prévues jusqu’au 16 avril ».

Si le tableau du 31 mars 2014 comporte une apparente contradiction entre un taux de ristourne mentionné à 0 % pour 2014'qui peut toutefois s’expliquer par le fait que le taux de 2013 était reconduit en vertu de l’accord commercial jusqu’au 15 avril 2014 et qu’il n’y avait pas de taux 2014' et un chiffre d’affaires indiqué comme étant ristournable, il appartenait à Monsieur E, professionnel avisé et rompu au secteur de la grande distribution, revendiquant 28 années d’expérience en la matière, d’effectuer les investigations complémentaires relatives aux ristournes applicables sur le chiffre d’affaires dégagé au premier quadrimestre 2014 et plus généralement sur les conditions de rupture du contrat avec Carrefour, rupture dont il avait connaissance depuis le 13 février 2014 au moins, puisqu’il en fait état dans un courriel de cette date. Par ailleurs les appelants ne rapportent la preuve d’aucune volonté de dissimulation de la part des cédants et, au contraire, Monsieur E a reconnu dans la convention de garantie avoir pu réaliser toutes investigations et audits, avoir pu poser toutes questions et obtenir toutes explications.

C’est donc à bon droit que les premiers juges ont débouté les appelants de leur demande d’indemnisation au titre des ristournes « Carrefour ».

***

Les appelants soutiennent avoir eu connaissance d’une transaction intervenue le 22 mars 2013 entre la société «Socadif » et Castorama lors d’une commande postérieure à la cession. Ils ont alors constaté que les montants de RFA étaient différents de ceux qui leur avaient été communiqués dans les tableaux prévisionnels. Ils réclament donc que la différence entre le montant connu sur le chiffre d’affaires réalisé en 2014 et le montant effectivement réclamé, soit la somme de 32 661,54 euros, par application des stipulations de la convention de garantie d’actif et de passif.

Les intimés insistent sur le fait que la société « holding F E » avait connaissance du référencement Castorama et ce point n’est pas contesté par la partie adverse. Ils en tirent la conséquence que Monsieur E, professionnel expérimenté et entouré de conseils devait solliciter tout renseignement complémentaire et procéder à toutes investigations ou audits lui paraissant opportuns.

La transaction du 22 mars 2013, dont les appelants soutiennent qu’elle n’a pas été portée à leur connaissance, entérine la cessation des relations commerciales entre la société «Socadif » et Castorama au 30 juin 2014 en ce qui concerne la connectique gaz et au 31 décembre 2013 en ce qui concerne les accessoires pour machine à laver. Les parties ont défini les conditions commerciales de leurs relations pour les années 2013 et 2014 dans des accords commerciaux qui sont en synthèse les suivants :

'un taux global de ristourne de 21,3 % sur le chiffre d’affaire annuel brut facturé hors-taxes, taux connu par le cessionnaire car mentionné dans les tableaux prévisionnels d’activité sur lesquels il se fonde pour asseoir ses prétentions,

'une ristourne quantitative pour réalisation d’un montant de chiffre d’affaires annuel dont les paliers sont différents pour 2013 et 2014, à savoir pour 2013 3 % si le chiffre d’affaires est supérieur à 2,4 millions d’euros, le palier étant réduit à 780 000 € en 2014, ce que le cessionnaire allègue avoir ignoré,

'une ristourne de progression de chiffre d’affaires non réclamée en 2014.

Il n’y a pas lieu, à la différence du dol, de rechercher si la transaction a été dissimulée au cessionnaire mais seulement d’examiner si les conditions de la garantie du passif sont remplies. En tout état de cause, la production par les appelants de la transaction du 22 mai 2013 ne signifie pas qu’ils en avaient connaissance avant la cession d’actions, car ils avaient accès à toutes les informations de la société lors de leur reprise.

L’article D1 stipule que « dans le cas où la société serait ultérieurement amenée à comptabiliser un passif non comptabilisé ou non provisionné dans les comptes de référence ayant une cause ou une origine antérieure à leur date d’arrêté, le garant sera tenu de verser au bénéficiaire une indemnité à titre de révision du prix de cession des droits sociaux, déterminé dans les conditions prévues au paragraphe 3 et 4 ci-après ». Les comptes de référence sont les comptes sociaux de la société au 31 décembre 2013.

La société Castorama a envoyé le 14 octobre 2014 une note de débit n° 14 N0001935 d’un montant de 27 217,95 euros hors-taxes (32 661,54 euros TTC) correspondant à la ristourne quantitative de 3 % sur un chiffre d’affaires de 907 264 €. Or, il était indiqué dans le tableau des RFA communiqué à Monsieur E le 1er juillet 2014 que le chiffre d’affaires réalisé au 30 juin 2014 s’élevait à 900 377,72 euros et que « le CA donnant droit au palier supplémentaire de 3 % ne sera pas atteint». Cette information était fausse puisque le palier de 780 000 € était d’ores et déjà atteint.

Mais les intimés objectent que les RFA sollicitées ne pouvaient être comptabilisées ou provisionnées dans les comptes de référence arrêtés au 31 décembre 2013 et qu’il n’y a pas lieu à garantie.

Il est évident que ces ristournes , calculées sur le chiffre d’affaires 2014, ne pouvaient être comptabilisées sur les comptes annuels de l’exercice 2013. Mais elles n’ont pas été provisionnées non plus alors que le détail du compte de résultat de référence fait apparaître un produit de vente de machines à laver de 966 125,97 euros et un produit de vente France gaz de 1 574 936,01 euros (sauf erreurs matérielles de peu d’importance résultant de la mauvaise qualité des copies versées aux débats) laissant supposer que la ristourne quantitative de 3 % allait devoir s’appliquer en 2014 eu égard au nouveau palier de 780 000 €, quand bien même les livraisons de machines à laver étaient stoppées au 31 décembre 2013 et celles relatives à la connectique gaz au 30 juin 2014.

Dans la mesure où ce passif non provisionné a eu une cause antérieure à la date d’arrêté, à savoir la transaction du 22 mars 2013, c’est à bon droit que les appelants demandent à être garantis du passif constitué par la ristourne quantitative de 3 %, la créance de 32 661,54 euros devant toutefois être réduite de 33 % en raison de l’économie d’impôt sur les sociétés issue de la prise en charge de ce passif par la société « Notilia », par application de l’article D3 de la convention . Cette dernière sera par conséquent condamnée à payer à la société « holding F E » la somme de 21 883,23 euros avec intérêts au taux légal à compter du 21septembre 2014, date de la demande d’application de la garantie .

***

Les appelants indiquent que le distributeur Édouard Leclerc est devenu le premier client de l’entreprise par l’intermédiaire de sa centrale d’achat Gallec du fait de la défection de Carrefour et de Castorama. Ils prétendent avoir été informés le 29 septembre 2014 que la société « Socadif » avait été déréférencée par suite de la perte de l’appel d’offres de Siplec. Ils estiment avoir été victime d’un dol de la part du cédant et réclament réparation de leur préjudice.

La société « Socadif » a été invitée le 17 février 2014 à répondre à un appel d’offres sur le sanitaire de la Siplec, société d’importation en charge des produits marque distributeur du mouvement Leclerc. Le cédant a répondu à cet appel d’offre le 14 mars 2014. Il est constant que la société «Socadif » n’a pas été retenue.

Mais les appelants ne rapportent nullement la preuve de ce que la perte de ce marché a conduit au déréférencement de la centrale d’achat Gallec qui est distincte de la société Siplec. La seule pièce produite en ce sens relate que par suite de l’échec de l’appel d’offres Siplec, il est à craindre que le contrat Gallec ne soit pas maintenu, étant précisé qu’il s’agit de contrats cadre annuels. Mais les appelants ne versent aux débats aucune pièce entérinant cette crainte et en tout état de cause, le renouvellement de contrats fait partie des aléas des affaires.

Il convient aussi de relever que la société Siplec aurait été un nouveau client qui aurait eu vocation à augmenter le chiffre d’affaires de la société « Socadif » mais ne pouvait générer aucune perte du fait de l’échec de l’appel d’offres qui n’était aucunement lié avec les opérations effectuées dans le cadre du référencement Gallec.

Il s’ensuit que la perspective d’un éventuel nouveau client qui ne s’est pas concrétisée ne peut constituer un passif supplémentaire et par là-même un préjudice résultant d’une réticence dolosive.

De surcroît, Monsieur E est un professionnel expérimenté dans le domaine de la grande distribution et a pu mener toutes les investigations qu’il estimait nécessaires, indiquant dans un courrier du 24 septembre 2013 qu’il mettait en place un audit complet de la société « Socadif » et de fait les pourparlers précontractuels ont eu lieu pendant 9 mois.

Enfin, les appelants ne rapportent la preuve d’aucune volonté de dissimulation de la part des cédants.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté les appelants de leur demande d’indemnisation relative à la perte du marché Leclerc’Galec.

Sur les frais de l’instance :

Monsieur F E qui succombe dans la totalité de ses demandes, supportera les dépens de première instance et d’appel.

L’équité n’impose pas l’indemnisation des frais irrépétibles des parties, que ce soit en première instance ou en appel.

En ce qui concerne les frais d’exécution forcée auxquels devrait faire face la s.a.s « holding F E », actuellement représentée par son liquidateur, la Cour n’ayant pas à connaître de l’exécution de ses décisions, ni à statuer par anticipation sur un litige qui n’est pas encore né, la demande de prise en charge de frais d’huissier non engagés sera rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Reçoit l’appel.

Au fond,

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté la s.a.s « holding F E », actuellement représentée par son liquidateur, de sa demande d’indemnisation au titre du litige prud’hommal, ainsi que la s.a.s « holding F E » et Monsieur F E de leurs demandes d’indemnisation fondées sur le dol au titre des ristournes Carrefour et de la perte du marché Gallec,

L’infirme pour le surplus et statuant à nouveau,

Déclare la s.a.s « holding F E » déchue de son droit à indemnisation au titre des ristournes Carrefour,

Condamne la société « Notilia » à payer à la la s.a.s « holding F E » la somme de 21 883,23 euros avec intérêts au taux légal à compter du 21septembre 2014 au titre des ristournes Castorama,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit que Monsieur F E supportera les dépens de première instance et d’appel.

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées.

La minute du présent arrêt a été signée par Madame Christine CODOL, présidente, et par Madame Patricia SIOURILAS, greffière présente lors de son prononcé.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Nîmes, 4ème chambre commerciale, 14 septembre 2017, n° 16/03687