Cour d'appel de Paris, 9 avril 2004, n° 2003/0433

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 9 avr. 2004, n° 03/00433
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 2003/0433

Sur les parties

Texte intégral

internet services en ligne – bourse – incidents techniques – preuvre (rom) ~

Nu

COUR D’APPEL DE PARIS

15è chambre, section B

ARRET DU 9 AVRIL 2004

( N pages)

° 3

Numéro d’inscription au répertoire général : 2003/04333

Décision déférée à la Cour : Jugement rendu le 11/12/2002 par le TRIBUNAL

DE GRANDE INSTANCE de PARIS 9/2è Ch. – RG n° : 2000/13874

APPELANTE:

SOCIÉTÉ CPR ONLINE, venant aux droits de la société CPR E*TRADE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 30, […] représentée par la SCP MONIN, avoué à la Cour assistée de Maître Y. MICHEL, Toque D1944, Avocat au Barreau de PARIS,

(SCP MICHEL et Associés).

INTIMÉ :

Monsieur X A B demeurant […] représenté par Maître RIBAUT, avoué assisté de Maître G. LE MAIGNAN, Toque P163, Avocat au Barreau de PARIS, de la SCP TREMOLET de VILLERS et autres, substituant Maître BONNEMIN

Emmanuel.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 04 mars 2004, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur POTOCKI, président
Madame DAVID, conseiller
Madame MOUILLARD, conseiller qui en ont délibéré.

VZ



Greffier, lors des débats: Madame LECYGNE

ARRÊT:

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par Monsieur POTOCKI, président signé par Monsieur POTOCKI, président et par Madame LECYGNE greffier, présent lors du prononcé.

****
M. X était titulaire d’un compte dans les livres de la société de bourse CPR E*TRADE, et avait souscrit, le 2 novembre 1999, une convention de services en ligne lui permettant de passer directement des ordres via Internet.

Le litige porte sur les ordres passés par M. X sur le marché à règlement mensuel le 2 février 2000. La société CPR E*TRADE considère qu’au terme de trois ordres donnés dans la matinée, M. X était en position vendeur de 1500 titres COFACE.

C’est dans ces conditions que, le 3 février 2000, elle a invité
M. X à reconstituer sa couverture puis, par lettre recommandée du

7 février 2000, lui a enjoint de s’exécuter dans le délai d’un jour de bourse, faute elle a, de quoi ses positions seraient liquidées. N’obtenant pas gain de cause, le

9 février 2000, liquidé les engagements dépassant la couverture, l’opération se traduisant par l’inscription au débit du compte d’une somme de 148 472,17 euros, soit 973 913,59 F.

Le 26 juillet 2000, M. X a assigné la société CPR E*TRADE en référé devant le président du tribunal de commerce de Paris afin d’obtenir une expertise.

Le 28 juillet 2000, la société CPR E*TRADE a assigné M. X en paiement du solde débiteur de son compte. M. X s’y est opposé en arguant d’une défaillance du système informatique.

Par jugement du 11 décembre 2002, le tribunal de grande instance de Paris a débouté la société CPR E*TRADE, comme M. X, de leurs demandes et a dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société CPR E*TRADE a interjeté appel le 20 janvier 2003.

Les dernières écritures des parties, prises en compte au titre de

l’article 954 du nouveau Code de procédure civile, ont été déposées le :

- 22 janvier 2004 pour la société CPR ONLINE, venant aux droits de la

ARRET DU 9 AVRIL 2004 Cour d’Appel de Paris RG N° : 2003/04333 2ème page 15è chambre, section B


société CPR E*TRADE,

- 21 novembre 2003 pour M. X.

La société CPR ONLINE demande à la Cour de faire droit à son appel et, vu les dispositions des articles 1134, 1984, 1992 et suivants du Code civil, la loi

n° 96-597 du 2 juillet 1996 et les dispositions du Règlement Général du Conseil des Marchés Financiers, de condamner M. X à lui payer la somme de

232 445,45 F, soit 35 436,08 euros, avec intérêts au taux légal à compter du

23 juin 2000, par voie de conséquence de débouter M. X de ses demandes, notamment celles de circonstances tendant à l’allocation de dommages et intérêts totalement infondés, enfin de condamner M. X à lui payer la somme de 1500 euros par application de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

M. X demande à la Cour de constater que la société CPR ONLINE ne rapporte pas la preuve de sa prétendue créance, de constater au contraire que le système s’est trouvé paralysé début février 2000 à la suite d’incidents techniques, en conséquence de dire son appel mal fondé et de confirmer le jugement. Il demande reconventionnellement, à titre principal, la condamnation de la société CPR ONLINE à lui payer la somme de 43 800 euros, représentant la contre-valeur de 600 actions COFACE au taux de 73 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 28 février 2000, date de la mise en demeure par application de l’article 1153 du Code civil, et subsidiairement, à supposer que la couverture ait été dépassée, la condamnation de la banque au paiement d’une somme de 35 436,08 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement des articles 1142 et suivants du Code civil, assortie de la compensation légale des dettes et créances des parties conformément à l’article 1289 du Code civil, enfin la condamnation de la société CPR ONLINE à lui payer la somme de 2 286,74 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

CELA ÉTANT EXPOSÉ

LA COUR :

Considérant que la société CPR ONLINE, venant aux droits de la société CPR E*TRADE, soutient que, le 2 février 2000, M. X a passé trois ordres :

- à 9 h 28 vente de 550 actions COFACE,

- à 9 h 55: vente de 450 actions COFACE,

- à 10h 17: vente de 500 actions COFACE, de telle sorte qu’en fin de journée, il était en position vendeur de 1500 actions

COFACE ; qu’elle fait valoir qu’il l’a d’ailleurs aussitôt appelée par téléphone pour lui annoncer qu’il allait lui faire parvenir la somme de 200 000 F en reconstitution de sa couverture ;

Que M. X, qui reconnaît avoir donné trois ordres aux heures

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dites, prétend que le premier et le troisième étaient des ordres d’achat, de sorte qu’en fin de journée, il était en position acheteur de 600 titres COFACE ; que, s’il reconnaît avoir appelé la société CPR E*TRADE le jour même, il prétend que c’était pour confirmer cette position et annoncer effectivement l’envoi d’un virement de 200 000 F ;

Considérant que l’expert commis en référé, M. Y, s’est adjoint un sapiteur, expert en informatique et comptabilité, M. Z, qui a exclu qu’un ordre ait pu être inversé par le système;

Que M. X critique le rapport du sapiteur, à qui il reproche d’avoir effectué ses opérations hors sa présence et d’avoir déposé son rapport sans lui avoir soumis un pré-rapport ; qu’il conteste ses conclusions au motif que le système informatique de la société CPR ONLINE avait changé entre-temps, sans qu’il ait recherché à quelle date, et sans qu’il ait contrôlé si, comme la société CPR E*TRADE le prétendait, le système qu’elle lui présentait était bien celui utilisé lors des faits ; qu’il invoque enfin une attaque menée par des

« HACKERS » qui a pu bloquer aussi l’ordinateur de la société CPR E*TRADE ;

Considérant qu’il résulte du rapport d’expertise qu’après que
M. X eut accepté l’intervention d’un sapiteur le 20 avril 2001, les parties, dont il était, se sont réunies dans les locaux de la société CPR E*TRADE avec M. Z le 26 avril 2001, à la suite de quoi ce dernier a adressé son rapport à l’expert le 17 mai 2001 ; que c’est donc à tort que M. X reproche à M. Z d’avoir procédé à des opérations non contradictoirement ; que, la rédaction d’un pré-rapport n’étant pas exigée, le rapport déposé par le sapiteur n’est donc pas formellement critiquable;

Considérant que M. Z a relevé que la société CPR E*TRADE avait conservé le programme utilisé antérieurement afin de lui permettre de procéder aux vérifications dans les conditions existant à l’époque des faits, attendant son intervention pour le supprimer ; qu’aucune contestation de la réalité de cette assertion n’ayant été alors élevée par M. X, ce dernier ne peut à présent reprocher à l’expert de ne pas l’avoir contrôlée plus avant;

Considérant que M. Z a constaté que tout ordre donné devait être confirmé par le biais d’une boîte de dialogue récapitulant les caractéristiques essentielles de l’opération, notamment une estimation de son montant total, permettant au client de la vérifier avant de la valider, et en déduit que, bien qu’il soit toujours possible qu’une erreur intervienne sur un système informatique et ne se reproduise pas, cette occurrence lui parait quasiment impossible en

l’espèce ;

Considérant qu’en outre, M. X, qui a été en relation téléphonique le jour même avec la société CPR E*TRADE – pour, précisément, lui annoncer

l’envoi du complément de couverture requis par les opérations que celle-ci prétend qu’il venait d’ordonner- a nécessairement eu connaissance de la position de son compte, telle que cette dernière la lui a rappelée par écrit dès le lendemain,

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8)


à la fois par l’avis d’opéré et par la demande de couverture ;

Qu’à cet égard, il ne peut être reproché à la société de bourse de ne pas avoir conservé l’enregistrement de cette conversation, qui n’avait pas pour objet de transmettre les instructions de M. X ; qu’en effet, les décisions du Conseil des marchés financiers n° 99-05 relative à la conservation des données afférentes aux transactions sur les instruments financiers admis aux négociations sur le marché réglementé et n° 99-06 relative à l’enregistrement des conversations téléphoniques imposent aux prestataires de ne conserver que l’enregistrement des conversations par lesquels leurs clients leur passent des ordres et les autorisent à supprimer les enregistrements des conversations par lesquelles eux-mêmes rendent compte à leurs clients des conditions d’exécution de leurs ordres, dès qu’ils en ont émis un compte rendu écrit ; que, tel a bien été le cas en l’espèce, la société CPR ONLINE ayant remis à l’expert le compte rendu écrit de la conversation tenue avec M. X le 2 février 2000 (p. 14 de son rapport); qu’au demeurant, il doit être souligné que les ordres de M. X ont été conservés en mémoire sur le disque dur de la société CPR E*TRADE, ainsi que le sapiteur a pu le constater (p. 4 de son rapport);

Considérant que, bien qu’il ait reçu les avis d’opérés, les messages relatifs à la couverture que la société CPR E*TRADE lui avait adressés le 3 février et le

7 février puis enfin le décompte de liquidation du 21 février, ce n’est que le

28 février que M. X a protesté auprès de la société CPR E*TRADE pour contester les ordres ainsi enregistrés ; que, toutefois, en l’état des éléments ci-dessus rappelés, qui confirment la réalité des ordres passés, cette réclamation de M. X apparaît tardive et ne permet pas d’accréditer la thèse soutenue par lui, étant encore observé qu’une attaque de « hackers » n’est finalement évoquée qu’à titre d’hypothèse ;

Qu’il suit de là que que la société CPR ONLINE rapporte la preuve de sa créance, dont le quantum n’est pas autrement contesté, et que sa demande en paiement doit être accueillie;

Considérant qu’à titre subsidiaire, M. X reproche à la société de bourse de ne pas avoir mis un place le système bloquant les ordres excédant la couverture, précisant que, même s’il avait connaissance des règles de couverture des opérations, la société CPR E*TRADE restait tenue d’une obligation

d’information et de mise en garde tout au long de l’exécution du contrat;

Mais considérant, d’une part, que M. X reconnaît lui-même qu’il connaissait l’exigence de couverture, ce que démontre encore l’appel téléphonique qu’il a passé le jour même des opérations litigieuses à la société

CPR E*TRADE pour lui assurer qu’il s’y conformerait ;

Que, d’autre part, à supposer que l’article 10 de la décision n° 99-07 du

Conseil des marchés financiers -qui n’est pas produite- fasse obligation au prestataire de services d’investissement offrant un service d’exécution d’ordres de bourse comportant une réception de ces ordres via Internet de bloquer l’entrée

Cour d’Appel de Paris ARRET DU 9 AVRIL 2004

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d’un ordre en cas d’insuffisance de provision ou de couverture, ce texte a seulement pour objet d’appliquer à ce type d’opération l’obligation de couverture de portée générale dont le but est d’assurer la protection du marché et des intermédiaires contre l’insolvabilité éventuelle du donneur d’ordre ; que
M. X n’est donc pas fondé à reprocher à la société CPR ONLINE de ne pas avoir mis en place un tel système ;

Qu’il suit de là que les demandes de M. X doivent être rejetées ;

Et considérant que la société CPR ONLINE a dû exposer des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge; qu’il convient de lui allouer une somme de 1500 euros à ce titre;

PAR CES MOTIFS

INFIRME partiellement le jugement déféré, en ses seules dispositions ayant débouté la société CPR ONLINE de ses demandes ;

Et statuant à nouveau,

Condamne M. X à payer à la société CPR ONLINE la somme de

35 436,08 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2000;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne
M. X à payer à la société CPR ONLINE la somme de 1500 euros et rejette sa demande;

Condamnne M. X aux dépens de première instance et d’appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau Code de procédure civile;

LE PRÉSIDENT LE GREFFIER

Clayful 8

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