Cour d'appel de Paris, 13 décembre 2007, n° 07/16575

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 13 déc. 2007, n° 07/16575
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 07/16575
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 22 novembre 2006, N° 04/10200

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

2e Chambre – Section B

ARRÊT DU 13 DÉCEMBRE 2007

(n° , 15 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 07/16575

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Novembre 2006 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 04/10200

APPELANTE

SCI E F

agissant en la personne de son gérant la SARL WB FRA LLC

dont le siège social est situé chez XXX XXX

représentée par Monsieur G H

XXX

XXX

représentée par la SCP FISSELIER – CHILOUX – BOULAY, avoués à la Cour

assistée de Me Thierry DOURDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P 236

INTIMÉS

XXX

représentée par ses représentants légaux

XXX

XXX

2°) SOCIÉTÉ AMAS INVESTMENT ET PROJECT SERVICES BVI LTD dite 'AIPS', société de droit des Iles Vierges Britanniques

Domicile élu en l’Etude de Maître X, Notaire, demeurant à XXX

C/O MORGAN et XXX

XXX

3°) S.A. BANQUE AMAS

Domicile élu en l’Etude de Maître X, Notaire, demeurant à XXX

XXX

XXX

XXX

représentées par Me Gilbert THEVENIER, avoué à la Cour

assistées de Me Gilles William GOLDNADEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C1773

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue, rapport a été fait conformément à l’article 31 du décret du 28 décembre 2005 modifiant l’article 785 du nouveau code de procédure civile, le 8 novembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. André DELANNE, Président

Mme Dominique DOS REIS, Conseiller

Mme Christine BARBEROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier : lors des débats : Mme Marie-F. MEGNIEN.

ARRÊT :

— contradictoire,

— prononcé publiquement par M. André DELANNE, Président,

— signé par M. André DELANNE, Président, et par Mme Marie-F. MEGNIEN, Greffier présent lors du prononcé.

*************

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 23 novembre 2006 qui a statué ainsi qu’il suit:

— prononce la nullité de l’assignation délivrée le 23 juin 2004 par la société E F à la société Banque Amas et à la société Amas Investment et Project Services BVI LTD ainsi que des écritures subséquentes,

— déboute la société Whole Properties de sa demande de dommages et intérêts,

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

— condamne la SCI E F à payer aux sociétés Whole Properties et Banque Amas la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

— condamne la société E F aux dépens.

Vu, sur l’appel de la S.C.I. E F, l’arrêt de cette chambre en date du 3 mai 2007 qui a:

— dit n’y avoir lieu de surseoir à statuer jusqu’au prononcé d’une décision irrévocable à intervenir sur la requête présentée par les sociétés Whole Properties, Banque Amas et AIPS en complément de jugement,

avant dire droit,

— invité les parties à formuler toute observation utile sur une éventuelle jonction des appels relatifs au jugement du 23 novembre 2006 et à l’ordonnance du 8 mars 2007, enregistrés sous les n° 06/22146 et 07/5377,

— invité la société E F à produire la preuve de l’enregistrement de l’acte du 4 mai 2006 ainsi que cet acte en son entier,

— invité la société E F à produire le rapport établi par son administrateur ad hoc en exécution de l’ordonnance du président du tribunal de première instance de Monaco du 24 mars 2004, relativement aux décisions prises par l’assemblée générale convoquée aux fins de modification des statuts et de la révocation et/ou nomination de tout gérant,

— invité les parties à s’expliquer sur la computation des délais en droit monégasque, afin de déterminer si, par analogie avec la règle française instaurée par l’article 642 du nouveau code de procédure civile, le délai d’un mois ayant expiré le samedi 6 avril 2002 a été prorogé au premier jour ouvrable suivant,

— invité les parties à produire un certificat de coutume indiquant si le droit monégasque comporte des dispositions similaires à celles de l’article L. 124-8 du code de commerce et des articles 1844-12, 1844-16 du code civil français,

— invité les parties à s’expliquer sur l’application éventuelle en la cause des dispositions des articles 1316-1 et suivants du code civil relatives à l’admission en preuve de l’écrit sous forme électronique,

— invité les sociétés Whole Properties, Banque Amas et AIPS à préciser si leurs demandes tendant à la régularisation de la vente par acte authentique sont formées à titre reconventionnel ou 'à titre encore plus subsidiaire',

— invité la société E F à préciser s’il a été statué sur le pourvoi dirigé contre l’arrêt de la Cour de ce siège du 4 avril 2003 relatif au titre de propriété de la société E F sur l’immeuble en cause.

Vu le second arrêt de cette chambre en date du 20 septembre 2007 qui a:

— infirmé le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

— dit régulière l’assignation délivrée le 23 juin 2004 à la requête de la société E F 'agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux',

— constaté la validité de la procédure d’appel initiée par la société E F,

— confirmé l’ordonnance du juge de la mise en état du 8 mars 2007,

Avant dire droit sur le surplus,

— invité les parties à s’expliquer sur le point de savoir si la créance hypothécaire d’un montant de 2.538.000 € consentie par M. Y, en qualité de mandataire de la société E F, a été déterminante de la volonté des parties dans la conclusion de la promesse de vente du 22 mars 2002.

Vu les dernières conclusions de la S.C.I. E F du 28 septembre 2007 aux termes desquelles celle-ci demande à la Cour de:

Vu le constat certain que la créance hypothécaire d’un montant de 2.538.000 € consentie par M. Y a été déterminante de la volonté des parties dans la conclusion de la promesse de vente du 22 mars 2002,

— constater que la publication de l’assignation du 9 juillet 2004, par la société Whole Properties n’a pas été opérée en conformité des dispositions de l’article 37-2 du décret du 4 janvier 1955,

— prononcer l’inopposabilité aux tiers de cette publication irrégulière,

— constater que le promettant est resté propriétaire de l’immeuble par suite de l’inexistence de la rencontre des consentements requise résultant principalement de l’inexécution de la formalité de purge de préemption,

— constater que la défaillance de la condition suspensive de droit de préemption a engendré de plein droit, l’annulation de la promesse du 22 mars 2002, à la date du 30 juin 2004, en application de la clause contractuelle et du terme extinctif mutuels, qui lient les parties,

— constater que le promettant, qui s’est rétracté le 31 mars 2004, est resté propriétaire de l’immeuble par suite de la non réalisation de conditions suspensives, de la promesse et de la vente, principalement celle du droit de préemption, et qu’il n’a contracté qu’une obligation de faire,

— constater que le prêt de 1.830.000 € du 22 mars 2002 a été remboursé intégralement, en principal et intérêts, par offres réelles authentiques, acceptées par le notaire, le 22 août 2005, et que l’obligation est éteinte,

— constater le renouvellement frauduleux de l’inscription hypothécaire du 4 juillet 2002 que la Banque Amas a effectué le 30 mars 2006, après extinction du prêt du 22 mars 2002 qu’elle garantissait et condamner la Banque Amas à verser, en réparation du préjudice matériel et moral à ce titre, la somme de 500.000 € à la société E F, au titre de dommages-intérêts,

— ordonner la mainlevée de l’inscription hypothécaire du 7 juillet 2002 et de son renouvellement opéré le 30 mars 2006,

— constater l’altération de la promesse de vente du 22 mars 2002 et prononcer la nullité absolue de la promesse dont la substance a été altérée,

— dire que cette altération affecte la substance de la promesse et lui retire son caractère d’authenticité,

— ordonner la mainlevée de la délégation de loyers Brioni, conférée dans l’acte de prêt du 22 mars 2002, remboursé le 22 août 2005,

— constater l’unicité de l’opération, constitutive du prêt et de la promesse du 22 mars 2002, indissociables l’un de l’autre,

— prononcer la nullité absolue de la promesse de vente du 22 mars 2002, affectée d’une condition purement potestative prohibée, en application des articles 1174 et 1172 du code civil,

— prononcer la nullité absolue de la promesse dont le consentement a été vicié par un mandat dolosif, en application des articles 1108, 1116 et 1992 du code civil, et la nullité de l’assemblée du 6 mars 2002, constitutive du mandat dolosif, entachée d’illégalité absolue en la forme, et de fraude statutaire,

— prononcer la nullité de la promesse, pour pacte commissoire prohibé, en application de l’article 2088 du code civil et clause de voie parée,

— constater que la promesse de vente du 22 mars 2002 a été viciée par les manoeuvres abusives de la Banque Amas et de sa filiale interposée, et que la contrainte économique illégitime exercée, constitue une violence économique,

— prononcer la nullité de la promesse de vente du 22 mars 2002, sur le fondement de l’article 1111 du code civil, pour violence économique,

— prononcer la nullité de la promesse de vente du 22 mars 2002 au vu du constat de l’avant dire droit tel qu’énoncé en tête du présent dispositif,

— ordonner la mainlevée de la publication de la promesse du 22 mars 2002 effectuée le 6 septembre 2004, vol 2004 p n° 4428

— ordonner la mainlevée de l’inscription d’hypothèque prise en garantie de la créance éventuelle de dommages-intérêts, le 8 août 2002 vol 2002 p n° 1388,

— condamner les sociétés Banque Amas Amas Investment et Project Services BVI et Whole Properties solidairement au paiement de la somme de 2.500.000 € à titre de dommages-intérêts et à la somme de 150.000 €, sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions de la société BANQUE AMAS, de la société AMAS INVESTMENT & PROJECT SERVICES BVI LTD ( A.I.P.S.) et de la société WHOLE PROPERTIES en date du 24 octobre 2007 demandant à la Cour de:

— dire à titre principal que la créance hypothécaire consentie par le mandataire de la E F n’a jamais été une condition déterminante de la signature de la promesse de vente,

— à titre subsidiaire, dire que M. Y, mandataire parfait de la E, connaissait préalablement à sa signature, la promesse, et avait pouvoir de garantir,

— confirmer le jugement rendu le 23 novembre 2006 en ce qu’il a prononcé la nullité tant de l’acte introductif d’instance du 23 juin 2004 que des écritures subséquentes prises dans l’intérêt de la société E F,

— constater que le Tribunal de Grande Instance de Paris a omis de statuer sur les demandes formulées au titre de l’acte introductif d’instance du 9 juillet 2004 et des écritures subséquentes de la société Whole Porperties venant aux droits de la société AIPS,

En raison de l’effet dévolutif de l’appel, évoquer et statuer au fond en tant que de besoin et constater l’indivisibilité naturelle des deux litiges :

— dire que l’acte authentique de prêt du 22 mars 2002 et la promesse synallagmatique de vente du 22 mars 2002 constituent deux conventions notariées distinctes,

— dire que ces actes authentiques ne souffrent d’aucun vice du consentement susceptible d’en affecter la validité,

— constater l’absence de manoeuvres abusives et de contrainte économique illégitime constituant violence économique effectuées par la Banque Amas à l’encontre de la société E F,

— dire l’absence de tout acte commissoire prohibé,

— débouter la société E F de l’ensemble de ses demandes,

— rejeter la demande de main levée des inscriptions prises en vertu des actes authentiques du 22 mars 2002 sur le bien immobilier situé à Paris 75008, XXX et XXX, cadastré XXX pour une surface au sol de 8 ares et 43 centiares,

En conséquence,

Sur le prêt authentique du 22 mars 2002 :

— dire que l’acte authentique de prêt est conforme aux dispositions des articles D 313-6 du code de la consommation,

— dire que cet acte authentique ne souffre d’aucun vice du consentement susceptible d’en affecter la validité,

— constater l’absence de manoeuvres abusives et de contrainte économique illégitime constituant violence économique effectuées par la Banque Amas à l’encontre de la société E F,

— constater la validité du prêt authentique du 22 mars 2002,

En conséquence,

— rejeter l’ensemble des demandes de la société E F tendant à voir prononcer la nullité de l’acte de prêt,

Sur la promesse authentique de vente du 22 mars 2002 :

— dire que l’assemblée générale du 6 mars 2002 de la société E F a été d’une part enregistrée dans le délai légal d’un mois et n’est frappée d’autre part d’aucune nullité statutaire relative,

— dire que la télécopie du 22 mars 2002 contenant le pouvoir donné à M. Z de représenter régulièrement la société AIPS dans le cadre de la signature de la promesse de vente du 22 mars 2002 emporte toute force probante sur le fondement des dispositions de l’article 1316-1 du code civil,

— dire inopérante la prétendue rétraction de la société E F,

— dire la société AIPS aux droits de laquelle se substitue la société Whole Properties SA a dûment exécuté ses obligations de bénéficiaire de la promesse,

— constater que la société AIPS aux droits de laquelle se substitue la société Whole Properties SA a expressément fait savoir au notaire le 22 avril 2004 de ce qu’elle entendait renoncer au bénéfice des conditions suspensives précitées et de sa volonté de poursuivre la vente,

— constater que la société E F a refusé de procéder à la signature de la déclaration d’aliéner,

— constater l’absence de toute condition potestative aux termes de la promesse de vente du 22 mars 2002,

— constater comme inopérant les arguments tirés de la prétendue nullité de l’assemblée générale du 6 mars 2002,

— constater l’absence de tout mandat dolosif affectant la validité de la promesse de vente,

— dire que la promesse synallagmatique de vente vaut vente aux termes de l’article 1589 du code civil,

— constater la résistance abusive et dolosive de la société venderesse,

— constater l’absence d’altération des faits dans la rédaction de la promesse de vente du 22 mars 2002,

— constater que la demande de la SCI E F tendant à voir déclarer l’assignation du 9 juillet 2004 délivrée à la requête de la société Whole Properties SA inopposable aux tiers, constitue une demande nouvelle présentée en cause d’appel,

— en conséquence, et conformément aux dispositions de l’article 564 du nouveau code de procédure civile, débouter purement et simplement la SCI E F, de sa demande de voir déclarer l’assignation du 9 juillet 2004 délivrée à la requête de la société Whole Properties SA inopposable aux tiers,

— subsidiairement, dire que les dispositions de l’article 37-2 du décret du 4 janvier 1955 ne sont pas d’ordre public,

— en conséquence, constater que la société E F n’a pas le caractère de tiers à la publication de l’assignation du 9 juillet 2004 au sens de l’article précité,

— encore plus subsidiairement, constater qu’il a été procédé à ladite publication conformément aux dispositions réglementaires,

— débouter en conséquence la société E F de sa demande tendant à voir prononcer l’inopposabilité aux tiers de l’assignation du 9 juillet 2004,

— en conséquence, dire que la société E F devra dans les trois mois de la signification de l’arrêt à intervenir se présenter en l’étude de Me I-J K ou de son successeur, à l’effet de régulariser la vente consentie à la société Whole Properties SA portant sur l’immeuble situé à Paris 8e, XXX et XXX, correspondant au lot n° 1 d’un ensemble immobilier cadastré section XXX pour une contenance de 8 ares et 43 centiares, moyennant le prix de 17 millions d’euros payables comptant,

— dire que, faute par la société E F de régulariser la vente dans les conditions qui viennent d’être précisées, l’arrêt à intervenir tiendra lieu d’acte de vente au profit de la société Whole Properties,

— ordonner dans ce cas la publication de l’arrêt à intervenir au 1er bureau de la conservation des hypothèques de Paris,

— condamner la société E F à payer à la société Whole Properties la somme de 4.500 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et dolosive,

— condamner la société E F à payer à la société Whole Properties et à la Banque Amas la somme de 15.000 € pour appel abusif,

— la débouter de toutes ses demandes,

— condamner la société E F à payer à la société Whole Properties SA et à la Banque Amas la somme de 70.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile.

La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR:

Considérant, en premier lieu, que l’arrêt du 20 septembre 2007 a, d’ores et déjà, dit régulière l’assignation délivrée le 23 juin 2004 à la requête de la S.C.I. E F et constaté la validité de la procédure d’appel initiée par celle-ci, infirmant ainsi le jugement entrepris; que cet arrêt a, par ailleurs, confirmé l’ordonnance du juge de la mise en état du 8 mars 2007;

Considérant, en deuxième lieu, s’agissant de la promesse synallagmatique de vente consentie par la S.C.I. E F au profit de la société A.I.P.S. reçue par acte authentique de Maître I-J K, notaire à Paris le 22 mars 2002, que sa lecture fait apparaître qu’il s’agit d’une promesse de vente au contenu des plus classique: qu’elle contient, comme à l’accoutumée, une faculté de dédit au profit du promettant en contrepartie de l’octroi au bénéficiaire de la possibilité, dans l’hypothèse d’une défaillance du promettant dans la régularisation de l’acte authentique, de le contraindre par toutes voies de droit à la signature de cet acte ou d’y mettre fin par le versement de dommages-intérêts garantis par une hypothèque conventionnelle;

Que les garanties hypothécaires qui ont été prises aux termes de la promesse de vente sont, manifestement, intervenues dans le seul but de garantir le paiement du dédit qui était d’un montant conséquent (1.538.000 €) ainsi que le paiement des éventuels dommages-intérêts forfaitaires ( 2.538.000 € ) susceptibles d’être mis à la charge de la S.C.I. E F en cas de refus par celle-ci de réaliser la vente;

Que l’inscription hypothécaire n’a finalement été prise qu’à hauteur de 1.538.000 €, montant de la clause parfaitement légitime de dédit; qu’elle ne portait que sur le lot n°1, objet de la promesse de vente, et non sur la totalité de l’ensemble immobilier possédé par la S.C.I. E F;

Que la S.C.I. E F ne peut prétendre utilement qu’elle n’aurait pu assumer la charge de la créance née de la mise en jeu de la faculté de dédit puisqu’aussi bien les seuls loyers semestriels du lot n°2 – qu’elle conservait – représentaient à eux seuls30% du montant du dédit;

Que le contenu de la lettre que la S.C.I. E F a adressé le 26 février 2002 à la société BANQUE AMAS ( n°36 du bordereau de pièces des intimées) démontre que les parties avaient convenu librement d’assortir la faculté de dédit octroyée au promettant d’une affectation hypothécaire et que cette affectation hypothécaire ne constituait nullement une condition sine qua non imposée in extremis par la société BANQUE AMAS au mandataire de la S.C.I. E F au moment de la signature de la promesse;

Que les termes de la promesse de vente authentique du 22 mars 2002 correspondent très exactement au projet d’acte qui a été approuvé par l’ assemblée générale des associés de la S.C.I. E F du 6 mars 2002 ( n°40 du bordereau de pièces des intimées) qui a donné tous pouvoirs à son mandataire, Monsieur M-N Y, co-gérant statutaire, pour représenter la S.C.I. lors de la signature de la promesse;

Que le mandat donné ce jour-là par la S.C.I. E F à Monsieur Y répond aux exigences du droit monégasque, s’agissant d’aliéner et d’hypothéquer;

Que la S.C.I. E F prétend que la délibération de l’ assemblée générale de ses associés qui s’est tenue le 6 mars 2002 serait nulle au motif qu’elle n’a été enregistrée que le 8 avril 2002, soit au-delà du délai d’un mois à compter de sa date;

Que, cependant, l’article 972 du code civil monégasque prévoit que 'si le dernier jour d’un délai quelconque est un jour férié ou un samedi, ce délai sera prorogé jusqu’au premier jour ouvrable qui suit le jour férié ou le samedi';

Qu’en l’espèce, le 6 avril étant un samedi, le délai prévu pour l’enregistrement de la délibération litigieuse a été, effectivement, prorogé au premier jour ouvrable suivant, soit le lundi 8 avril 2002; que cette délibération a, par conséquent, bien été enregistrée dans le délai prévu par les articles 2 et 9 de la loi monégasque n°797 du 18 février 1966;

Que la S.C.I. E F soutient encore que l’ assemblée générale du 6 mars 2002 serait atteinte d’une nullité statutaire qui entraînerait de ce fait la nullité de la promesse de vente;

Que la S.C.I. E F soutient – sans en justifier – que l’un des trois associés, la succession B, n’aurait pas été convoqué à cette assemblée générale;

Qu’en tout état de cause, la S.C.I. E F n’a pas exercé d’action en nullité de l’ assemblée générale du 6 mars 2002 avant la prescription de trois ans de l’article 1707 du code civil monégasque;

Qu’en outre, la délibération litigieuse devait, pour être adoptée, réunir plus des trois quarts du capital social (article 12 des statuts); que la succession de Peter B possédait une part alors que le capital social en comportait 1.000;

Qu’il importe peu que le pouvoir conféré à Monsieur Z par la société A.I.P.S. en vue de signer la promesse de vente du 22 mars 2002 ait été annexé à la minute de l’acte sous forme de télécopie, l’original n’étant parvenu au notaire que le 25 mars 2002, dès lors que la télécopie est bien en tous points conforme au document original et que l’écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l’écrit sur support papier sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité, ce qui est le cas en l’espèce;

Que la S.C.I. E F soutient que l’absence d’envoi de la déclaration d’intention d’aliéner permettant la purge du droit de préemption dans le délai conventionnel a entraîné la défaillance de la condition suspensive; que la promesse est, dès lors, réputée n’avoir jamais existé;

Que, cependant, c’est précisément la S.C.I. E F qui avait la charge de procéder aux formalités nécessaires à la purge du droit de préemption; que la S.C.I. E F n’a pas satisfait à ses propres obligations; que la société A.I.P.S. aux droits de laquelle s’est substituée en cours de procédure la société WHOLE PROPERTIES a expressément informé le notaire de ce qu’elle entendait renoncer au bénéfice de cette condition suspensive et de sa volonté de poursuivre la vente;

Qu’ainsi que l’énonce l’article 1178 du code civil, 'la condition est réputée accomplie lorsque c’est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l’accomplissement';

Que la S.C.I. E F allègue également que le défaut de purge du droit de préemption ne serait finalement pas une condition suspensive mais une exigence préalable à la rencontre effective des consentements, requise au stade même de la formation de la convention et constituerait en réalité une condition essentielle pour la validité de ladite convention au sens des articles 1108 et suivants du code civil; que la S.C.I. E F oublie qu’en matière de promesse synallagmatique de vente, l’échange des consentements rend la vente parfaite; qu’elle ne peut nier que les co-contractants ont bien échangé leurs consentements;

Que la S.C.I. E F soutient pour la première fois en appel, comme le relèvent les intimées, que la publication de l’assignation du 9 juillet 2004 de la société WHOLE PROPERTIES serait inopposable aux tiers en tant qu’elle ne respecterait pas les dispositions de l’article 37-2 du décret du 4 janvier 1955;

Qu’une telle demande n’est pas irrecevable car il ne s’agit pas en réalité d’une demande nouvelle mais d’une fin de non-recevoir qui peut être soulevée en tout état de cause;

Que, cependant, les publications visées à l’article 37-2 du décret du 4 janvier 1955étant facultatives, la fin de non-recevoir tirée de la publication défectueuse est inopérante;

Qu’en outre, cette publication est parfaitement régulière; qu’il importe peu qu’elle reproduise avec diverses fautes de frappe ou encore avec des interversions de mots ou enfin avec des oublis de mots non essentiels à sa compréhension, le texte de la promesse authentique de vente du 22 mars 2002;

Que l’expression 'littéralement reproduits’ figurant à l’article 37-2 du décret du 4 janvier 1955 ne signifie pas que toute erreur du copiste entraîne l’inopposabilité aux tiers du documents publié; qu’il suffit que le texte reproduit ne soit pas dénaturé et soit compréhensible;

Qu’enfin, les parties à l’acte ne peuvent être considérées comme des tiers au sens de la publicité E; que la S.C.I. E F n’est pas un tiers à la publication de l’assignation mais le destinataire direct de cet acte introductif d’instance;

Que la S.C.I. E F soutient que la promesse de vente signée le 22 mars 2002 serait en fait une promesse de vente synallagmatique conditionnelle et à terme; que la rétractation du promettant exclurait toute rencontre de volonté réciproque de vendre et d’acheter; qu’il s’agirait d’une simple créance mobilière au profit du bénéficiaire de la promesse sous forme de dommages-intérêts dont il aurait pu se prévaloir à l’encontre de la S.C.I. E F s’il avait lui-même exécuté ses obligations réciproques, à savoir réitérer par acte authentique la promesse stipulée au plus tard le 21 juillet 2004 et verser le prix de vente et les frais y afférent;

Qu’en réalité, il résulte de la lecture de la promesse de vente que les deux parties se sont engagées à conclure le contrat projeté qui est totalement assimilé à l’acte définitif; que la promesse de vente vaut vente lorsqu’il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix, ce qui est le cas en l’espèce; que le contrat est ainsi réputé parfait dès l’origine;

Que le 22 avril 2004, conformément aux termes de la promesse synallagmatique de vente du 22 mars 2002, la société WHOLE PROPERTIES venant aux droits de la société A.I.P.S., a fait connaître au notaire sa volonté de renoncer au bénéfice des conditions suspensives non réalisées à ce jour et auxquelles la promesse lui reconnaît le droit de renoncer et sa volonté de poursuivre la vente;

Que le promettant ne pouvait, dès lors, s’opposer à la poursuite de la promesse et que la vente était désormais définitive, le promettant devenant ainsi débiteur d’une obligation de donner et non pas d’une obligation de faire;

Que la S.C.I. E F évoque sa rétractation du 31 mars 2004 qui aurait été acceptée par le bénéficiaire;

Que le promettant ne pouvait, cependant, se dégager de ses obligations que par la faculté de dédit; que, non seulement la société WHOLE PROPERTIES n’a pas accepté cette rétractation mais que c’est à cette occasion qu’elle a fait connaître au notaire qu’elle entendait poursuivre la vente en renonçant au bénéfice des conditions suspensives non réalisées;

Que la S.C.I. E F dénonce le fait que la promesse de vente du 22 mars 2002 n’avait pas prévu le paiement d’un acompte par la société A.I.P.S.; que, pourtant, le paiement d’un acompte ne constitue en rien une obligation légale; que son absence n’est pas susceptible d’affaiblir la validité juridique de la promesse;

Considérant, en troisième lieu, que l’acte authentique ayant constaté le prêt consenti le 22 mars 2002 par la société BANQUE AMAS à la S.C.I. E F est indépendant de la promesse authentique du même jour;

Qu’aucun de ces deux actes ne fait référence à l’autre comme condition de sa validité; que la S.C.I. E F ne démontre pas que ces deux actes constituent un ensemble contractuel unique;

Que la S.C.I. E F a bénéficié d’un temps suffisant pour nourrir sa réflexion quant à la signature du prêt; que c’est elle qui est venue solliciter la société BANQUE AMAS aux d’obtenir des fonds destinés à entreprendre des travaux de ré novation sur ses lots; que ces circonstances écartent nécessairement le vice de violence économique qu’invoque la S.C.I. E F;

Que la S.C.I. E F allègue que la société BANQUE AMAS aurait commis un renouvellement frauduleux de l’inscription hypothécaire relative au prêt qu’elle a souscrit le 22 mars 2002 dans la mesure où le remboursement du prêt serait intervenu antérieurement à ce renouvellement;

Que la société BANQUE AMAS rappelle qu’une somme de 236.927,39 € demeure encore due par la S.C.I. E F au titre de divers frais relatifs à l’exécution du prêt authentique; que cette somme constituant des accessoires du prêt, elle a cru devoir renouveler le 20 mars 2006 l’inscription hypothécaire du 4 juillet 2002, ce qui est exclusif de tout comportement frauduleux;

Considérant qu’en définitive, il convient de faire droit à la demande des intimés tendant à ce que la S.C.I. E F soit condamnée à se présenter dans les trois mois de la signification du présent arrêt en l’étude de Maître D, notaire à Paris, à l’effet de régulariser la vente consentie à la société WHOLE PROPERTIES, venant aux droit de la société A.I.P.S. et de dire que, faute par la S.C.I. E F de régulariser cette vente, le présent arrêt tiendra lieu d’acte de vente au profit de la société WHOLE PROPERTIES ;

Considérant, en quatrième lieu, que la société WHOLE PROPERTIES fait valoir qu’elle aurait dû exercer son droit de propriété sur le bien litigieux depuis le mois de juillet 2004 et que le comportement abusif de la S.C.I. E F lui a occasionné un préjudice puisqu’elle aurait pu louer les locaux du lot n°1 depuis cette époque et en retirer des loyers substantiels qui n’auraient pas été inférieurs à ceux que la S.C.I. E F a perçu pendant la même période pour le lot n°2;

Que, cependant, ce préjudice a pour contrepartie le fait que la société WHOLE PROPERTIES va acquérir en 2008 un ensemble immobilier au prix de l’année 2002 dont elle ne paiera le prix qu’également en 2008;

Qu’au surplus, elle ne justifie nullement de la somme (1.425.210,30 €) qu’elle allègue comme constituant son manque à gagner locatif;

Que, dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’allouer à la société WHOLE PROPERTIES des dommages-intérêts à ce titre;

Que, de même, le caractère téméraire de l’appel de la S.C.I. E F n’est pas suffisamment abusif pour permettre à la Cour d’allouer des dommages-intérêts de ce chef aux intimées;

Considérant, par contre, qu’il serait inéquitable et économiquement injustifié de laisser à la charge des intimées la totalité des frais non compris dans les dépens qu’elles ont dû exposer pour assurer leur défense en cause d’appel; qu’il convient de leur allouer, en sus de la somme qui leur a déjà été accordée en première instance et qui est confirmée, celle de 70.000 € à la charge de la S.C.I. E F , sur le fondement des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement,

Vu les arrêts avant-dire droit des 3 mai et 20 septembre 2007,

Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a condamné la S.C.I. E F au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et aux dépens;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute la S.C.I. E F de toutes ses prétentions;

Dit que la S.C.I. E F, société civile immobilière de droit monégasque, au capital de 152.000 € dont le siège société est à Monaco (Mc 98000) 11 avenue Saint-Michel, Immeuble Le Buckingham Palace, immatriculée au répertoire spécial des sociétés civiles de Monaco sous le n° 89 SC 5850, devra dans les trois mois de la signification de l’arrêt à intervenir se présenter en l’étude de Me I-J K ou de son successeur, à l’effet de régulariser la vente consentie à la société Whole Properties SA, société de droit luxembourgeois au capital de 31.000 € dont le siège social est au Luxembourg (L 2086) XXX, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Luxembourg sous le n° B 956 74, portant sur l’immeuble situé à Paris 8e, XXX et XXX, correspondant au lot n° 1 d’un ensemble immobilier cadastré section XXX pour une contenance de 8 ares et 43 centiares, moyennant le prix de 17 millions d’euros payables comptant,

Dit que, faute par la S.C.I. E F de régulariser la vente dans les conditions ci-dessus précisées, le présent arrêt tiendra lieu d’acte de vente au profit de la société WHOLE PROPERTIES;

Ordonne, dans ce cas, la publication du présent arrêt au 1er bureau de la conservation des hypothèques de Paris;

Rejette toutes conclusions autres, plus amples ou contraires;

Condamne la S.C.I. E F à payer à la société WHOLE PROPERTIES et à la société BANQUE AMAS , ensemble, la somme de 70.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel et admet Maître THEVENIER, avoué, au bénéfice des dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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Cour d'appel de Paris, 13 décembre 2007, n° 07/16575