Cour d'appel de Paris, Pôle 4 chambre 9, 27 novembre 2014, n° 13/03189

  • Monde arabe·
  • Liquidateur·
  • Saisie-attribution·
  • Sociétés·
  • Tiers saisi·
  • Mandataire·
  • Créance·
  • Exécution·
  • Qualités·
  • Créanciers

Chronologie de l’affaire

Commentaire1

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 ch. 9, 27 nov. 2014, n° 13/03189
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 13/03189
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Créteil, 21 juin 2010, N° 09/10522
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 novembre 2022
Lire la décision sur le site de la juridiction

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9

ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2014

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 13/03189

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 22 juin 2010- Tribunal de Grande Instance de Créteil-RG n°09/10522

Arrêt du 30 juin 2011 de la cour d’appel de Paris (Pôle 4-8) – RG n° 10/16229

Arrêt de la Cour de Cassation du 18 octobre 2012- pourvoi n° K 11-24.502

APPELANTS

Monsieur [D] [L]

[Adresse 6]

[Localité 6]

Représenté par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090

Assisté de Me Eric SEBBAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0040

SELARL SMJ en la personne de Maître [J], agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la société YARA

[Adresse 4]

[Localité 4]

Représentée par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090

Assisté de Me Eric SEBBAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0040

SELARL GAUTHIER SOHM , prise en la personne de [W] [H] agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la société YARA PRESTIGE

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090

Assisté de Me Eric SEBBAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0040

INTIMES

Monsieur [K] [S]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Assignation devant la cour d’appel en date du 14/10/2014 contenant dénonciation des conclusions délivrée par remise à l’étude de l’huissier,

Madame [X] [V] épouse [S]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Assignation devant la cour d’appel en date du 03/10/2014 contenant dénonciation des conclusions délivrée par remise à personne,

Fondation INSTITUT [1] représentée par son Président, Monsieur [C] [Q] nommé en vertu de la décision du Conseil d’administration et du Haut Conseil de l’IMA du 25 janvier 2013

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

Assistée à l’audience de Me Julien RIETZMANN avocat au barreau de CRETEIL, substituant Me Andrée FOUGERE de la SELAS D’AVOCAT ANDREE FOUGERE, avocat au barreau de PARIS, toque : J050

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 Octobre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Président de chambre

Madame Patricia GRASSO, Conseillère

Madame Françoise JEANJAQUET, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Catherine MAGOT

ARRÊT :

— PAR DÉFAUT

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Monsieur Jean-Pierre GIMONET, président et par Madame Catherine MAGOT, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****************

L’Institut [1] a obtenu la condamnation de la société Yara Prestige à lui payer la somme provisionnelle de 142 795,55 € avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2007, ce, par arrêt de la cour d’appel de Paris du 2 avril 2008 ;il a été condamné dans le même temps à payer la somme de 13 736,15 € à la SARL Yara Prestige ;

Il a fait pratiquer des saisies-attributions entre les mains de monsieur [D] [L], de la société Yara, de monsieur [K] [S] et de madame [X] [V], tous porteurs de parts, non libérées, dans le capital social de la société Yara Prestige, pour avoir paiement de la somme de 122 431,28 € ;

Estimant que ces tiers saisis n’avaient pas satisfait à l’obligation légale de renseignements prévue par les articles L. 211-4 et R. 211-4 du code des procédures civiles d’exécution, l’Institut [1] les a fait assigner devant le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Créteil, qui par jugement du 22 juin 2010 a :

— dit que les demandes de l’Institut [1] étaient recevables ;

— condamné in solidum, madame [X] [V], monsieur [K] [S] et monsieur [D] [L] à payer à l’Institut [1] la somme de 142.702,17 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2009 ;

— fixé la créance de l’Institut [1] à l’encontre de la société Yara à la somme de 142.702,17 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2009 ;

— dit qu’au total l’Institut [1] ne pourrait percevoir un montant supérieur à la somme de 142.702,17 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2009 ;

— dit que les paiements faits par les différents débiteurs viendraient s’imputer sur la somme totale due ;

— dit qu’il n’est pas dans les fonctions du juge de l’exécution de se prononcer sur les appels en garantie formulés par les défendeurs ;

— condamné in solidum madame [X] [V], monsieur [K] [S], monsieur [D] [L] et la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, à payer à l’Institut [1] la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— débouté madame [X] [V], monsieur [K] [S], monsieur [D] [L] et la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, de leurs autres demandes ;

— condamné in solidum madame [X] [V], monsieur [K] [S], monsieur [D] [L] et la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, à supporter les dépens ;

Monsieur [D] [L] a interjeté appel de cette décision et cette cour, par arrêt du 30 juin 2011, a infirmé le jugement, débouté l’Institut [1] de l’ensemble de ses demandes, dit n’y avoir lieu à paiement d’une indemnité pour frais irrépétitibles et condamné l’Institut [1] aux dépens de première instance et d’appel pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile du code de procédure civile ;

La cour a estimé que les actes de saisies contenaient en eux-mêmes la réponse requise, de sorte qu’ils n’appelaient donc pas de réponse spécifique des tiers saisis et que les actes litigieux ne détaillaient pas les modalités d’interpellation des tiers saisis ni ne leur rappelaient précisément les conséquences pécuniaires d’un défaut de déclaration ;

Par arrêt du 18 octobre 2012, la Cour de cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 30 juin 2011, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remis en conséquence la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant l’arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la même cour d’appel, autrement composée ;

La cour a été saisie comme juridiction de renvoi après cassation le 18 février 2013 ;

Par conclusions déposées le 22 septembre 2014, monsieur [D] [L], la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, et la Selarl Gauthier Sohm, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara Prestige, ont demandé à la cour :

Vu la liquidation judiciaire de la société Yara Prestige et l’article L. 632-2 du code de commerce ;

— d’infirmer le jugement ;

— de déclarer l’Institut [1] tant irrecevable que mal fondé en ses demandes ;

— de débouter l’Institut [1] de l’ensemble des ses demandes ;

— subsidiairement, de limiter les effets de la saisie pratiquée entre les mains de monsieur [L] à la somme de 30 000 € ;

— de condamner l’Institut [1] à leur payer la somme de 3 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens devant être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

L’Institut [1] a demandé à la cour par conclusions déposées le 6 octobre 2014 :

— de rejeter l’exception l’incompétence ratione materiae conformément à l’article 74 du code de procédure civile ;

— de confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

— de condamner in solidum madame [X] [V], monsieur [K] [S], monsieur [D] [L] et la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, à lui payer la somme de 20 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— de débouter madame [X] [V], monsieur [K] [S], monsieur [D] [L] et la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, de toutes leurs demandes ;

— de condamner in solidum madame [X] [V], monsieur [K] [S], monsieur [D] [L] et la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, aux entiers dépens, en ce compris les frais générés par l’inscription de l’hypothèque judiciaire provisoire prise sur l’immeuble de monsieur [D] [L] en exécution de l’ordonnance sur requête du 26 novembre 2009, lesdits dépens devant être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile du code de procédure civile ;

Madame [X] [V], épouse [S], et monsieur [K] [S] avaient constitué avocat mais n’ont pas fait déposer de conclusions postérieurement à l’arrêt de la Cour de cassation du 18 octobre 2012 ; les conclusions de l’Institut [1] déposées le 24 septembre 2013, contenant le même dispositif que ses conclusions ultérieures du 6 octobre 2014, ont été signifiées les 27 et 14 novembre 2013 à madame [X] [V] et à monsieur [K] [S] ;

Par conclusions déposées le 4 mai 2011, ils avaient demandé à la cour :

— d’infirmer le jugement ;

— à titre principal, de juger irrecevables et mal fondées les demandes de l’Institut [1] et de dire que leur dette n’était pas fondée en raison des manquements du gérant de la société Yara Prestige, monsieur [B] ;

— subsidiairement, de constater que la saisie-attribution à l’encontre de madame [V] porte sur la somme de 9 000 € et que la saisie-attribution à l’encontre de monsieur [S] porte la somme de 120 000 € et de leur accorder des délais de paiement ;

— en tout état de cause, de condamner monsieur [L] à les garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre ;

— de condamner l’Institut [1] à leur payer la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens devant être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

SUR CE,

SUR L’EXCEPTION D’INCOMPÉTENCE

Considérant que monsieur [D] [L], la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, et la Selarl Gauthier Sohm, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara Prestige, exposent qu’il n’est pas dans les attributions du juge de l’exécution de prononcer une condamnation ni même de fixer une créance au passif d’une société en liquidation judiciaire ;

Qu’ils concluent à l’infirmation de la décision par laquelle le premier juge a dépassé sa compétence d’attribution ;

Considérant que, comme le relève l’Institut [1], l’exception d’incompétence doit, aux termes de l’article 74 du code de procédure civile, être soulevée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir ; qu’il ressort des énonciations du jugement que monsieur [B] et la SARL Yara ont conclu à titre principal à l’irrecevabilité des demandes de l’Institut [1] au motif que le jugement d’ouverture de la procédure collective de la société Yara prestige confère au seul liquidateur le pouvoir de demander la libération du capital de cette société ; que monsieur [B] et la SARL Yara n’ayant donc pas soulevé l’exception d’incompétence devant le juge de l’exécution, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l’exception d’incompétence doit être accueillie ;

Que par ailleurs, si la société Yara Prestige, non comparante en première instance et contre laquelle n’a jamais été formée aucune demande, sollicite également l’infirmation du jugement pour incompétence du Juge de l’exécution, cette prétention ne peut qu’être rejetée dès lors qu’il ressort de l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire que le juge de l’exécution connaît des demandes en réparation fondées sur l’exécution ou l’inexécution dommageables des mesures d’exécution forcée ou des mesures conservatoires ;

SUR LA RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE DE L’INSTITUT [1] CONTRE LES ASSOCIÉS AU REGARD DE L’OUVERTURE D’UNE PROCÉDURE COLLECTIVE À L’ENCONTRE DE LA SOCIÉTÉ YARA PRESTIGE

Considérant que monsieur [D] [L], la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, et la Selarl Gauthier Sohm, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara Prestige, exposent que la liquidation judiciaire de la société Yara Prestige a été prononcée, de sorte que seul le liquidateur peut ordonner la libération du capital par les associés ; qu’ils invoquent le principe de l’arrêt des poursuites individuelles et estiment qu’en demandant la condamnation solidaire de monsieur [L], de monsieur [S] et de madame [V] à lui payer la somme de 142 702,18 € correspondant à la cause des saisies, l’Institut [1] cherche à contourner les règles du code du commerce applicables en cas de liquidation judiciaire et de libération au capital ; qu’ils soutiennent que, condamner les associés à paiement reviendrait à consentir le paiement de leur créance au détriment des autres créanciers de la société Yara Prestige, y compris les créanciers privilégiés, alors que 'la libération du capital constitue une créance de la société sur ses associés’ ;

Que l’Institut [1] soutient que son action en paiement engagée devant le juge de l’exécution ne concerne pas la SARL Yara Prestige, placée en liquidation judiciaire, mais les tiers saisis qui ont une personnalité juridique distincte et auxquels ne s’applique pas le principe de suspension des poursuites prévu par l’article L. 622-21 du code commerce ; qu’il se prévaut de l’attribution immédiate de la créance par l’effet de la saisie ;

Considérant qu’aux termes de l’article L.211-2 du des procédures civiles d’exécution :

'L’acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers ainsi que de tous ses accessoires. Il rend le tiers personnellement débiteur des causes de la saisie dans la limite son obligation.

La notification ultérieure d’autres saisies ou de toute autre mesure de prélèvement, même émanant de créanciers privilégiés, ainsi que la survenance d’un jugement portant ouverture d’une procédure de sauvegarde, redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire ne remettent pas en cause cette attribution..' ;-

Considérant que l’Institut [1] a fait pratiquer les saisies-attributions par actes d’huissiers des 18 et 20 mai 2009 ; que le tribunal de commerce de Créteil a prononcé la liquidation judiciaire de la société Yara Prestige par jugement du 14 octobre 2009 ; que les actes des 18 et 20 mai 2009 ont emporté attribution immédiate des créances saisies au profit de l’Institut [1] ;

Considérant ainsi que la survenance le 14 octobre 2009 de la liquidation de la société Yara Prestige n’a pu remettre en cause l’entrée en mai 2009 dans le patrimoine de l’Institut [1] des créances saisies ; que l’action de l’Institut [1] contre les associés de la société Yara Prestige doit donc être déclarée recevable ;

SUR LA DISPONIBILITÉ DES CRÉANCES

Considérant que les créances saisies – des parts sociales représentant des apports en numéraire non libérées- étaient disponibles ; qu’en effet, les parts sociales souscrites par les associés doivent être intégralement libérées dans un délai qui ne peut excéder 5 ans à compter de l’immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés, aux termes de l’article L. 223-7 du code de commerce ; que la société Yara Prestige ayant été immatriculée le 29 avril 2004, le solde des apports en numéraire aurait dû être libéré au plus tard le 29 avril 2009 ;

Considérant que c’est en vain que monsieur [L] soutient que les associés n’ont pas forcément en mémoire la date anniversaire de la signature des statuts et qu’il est en droit de penser qu’il n’est redevable d’aucune somme puisque la société Yara prestige n’a pas sollicité la libération du capital, alors que l’article L.223-7 du code de commerce ne subordonne pas l’obligation des associés de libérer dans les 5 ans l’intégralité des parts sociales représentant des apports en numéraire à une demande du gérant de la société ;

Que pour les mêmes raisons, monsieur [S] et madame [V] ne peuvent valablement soutenir l’absence de créance de la société Yara Prestige en raison des manquements du gérant, monsieur [L], qui n’a pas sollicité la libération des apports ;

Que les créances en cause étaient donc saisissables ;

SUR LA PRISE EN CONSIDÉRATION DE CE QUE LES SAISIES ONT ÉTÉ PRATIQUÉES PENDANT LA PÉRIODE SUSPECTE

Considérant que monsieur [D] [L], la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, et la Selarl Gauthier Sohm, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara Prestige, exposent que la procédure d’exécution est postérieure au 14 avril 2008, date de la cessation des paiements de la société Yara Prestige retenue dans le jugement du tribunal de commerce de Créteil du 14 octobre 2009 ; qu’ils indiquent que tout avis à tiers détenteur, toute saisie-attribution ou toute opposition peut être annulé lorsqu’il a été délivré ou pratiqué par un créancier après la date de cessation des paiements et en connaissance de celle-ci ;

Mais considérant que ce moyen est sans portée dès lors qu’il est constant que l’annulation des saisies-attribution pratiquées après la date de cessation des paiements n’est qu’une faculté et que cette faculté n’a jamais été exercée, étant observé par ailleurs qu’une telle action ne peut aboutir que si la preuve est rapportée de la connaissance par le saisissant de la cessation des paiements du débiteur ;

SUR L’OBLIGATION DE DÉCLARATION DES TIERS SAISIS

Considérant qu’aux termes de l’article L. 211-3 du code des procédures civiles d’exécution : ' Le tiers saisi est tenu de déclarer au créancier l’étendue de ses obligations à l’égard du débiteur ainsi que les modalités qui pourraient les affecter et, s’il y a lieu, les cessions de créances, délégations ou saisies antérieures’ ;

Que selon l’article R. 211-4 : 'le tiers saisi est tenu de fournir sur-le-champ à l’huissier de justice les renseignements prévus à l’article L. 211-3 et de lui communiquer les pièces justificatives…' ;

Qu’enfin, selon l’article R. 211-5 : 'le tiers saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements prévus est condamné, à la demande du créancier, à payer les sommes dues à ce dernier sans préjudice de son recours contre le débiteur ;

Considérant qu’aux termes du procès-verbal de saisie-attribution signifié à monsieur [L] et à la SARL Yara, l’huissier a mentionné : ' Sur place, malgré trois passages le soir après 20 heures, le débiteur est absent ou plutôt ne veut pas m’ouvrir la porte, l’acte est remis en dépôt étude afin d’éviter un dessaisissement des fonds ' ;

Considérant qu’il ressort d’un courrier du 12 mai 2011 de monsieur [O], clerc assermenté à l’étude d’huissiers ayant signifié les saisies que : ' Le lendemain , le 27/05/2009, Monsieur [L] s’est présenté à l’étude afin de retirer les copies dont il était destinataire. ..Monsieur [L] a sollicité des explications quant aux procédures de saisie attribution qui ont été diligentées. Explications que je lui ai données, en l’invitant à procéder aux déclarations utiles, notamment des sommes détenues par les tiers saisis par écrit. Lui précisant également la responsabilité de chaque tiers saisi liée à la non communication de ces informations, responsabilité qui est indiquée dans chaque procès verbaux de saisie..' ;

Considérant que monsieur [L] soutient qu’il était en droit de penser qu’il n’était redevable d’aucune somme puisque la société Yara Prestige n’a pas sollicité la libération du capital ; qu’il apparaît qu’il n’a pas même cru bon de faire connaître cette contestation ; que, gérant notamment des sociétés Yara Prestige et Yara et administrateur d’une société anonyme, il apparaît rompu au monde des affaires ;

Considérant que monsieur [L] expose encore que le procès-verbal de saisie-attribution donnait, par lui-même, la réponse à l’acte intrinsèque de saisie dès lors qu’il indiquait : 'En votre qualité d’associé au sein de la société débitrice (500 parts détenues), conformément à l’article L.223-7 du Code du Commerce, vous êtes tenu de vous libérer du solde du capital de 60 % depuis le 29 avril 2009, soit à hauteur de la somme de 30.000 € ' ;

Qu’il soutient que n’étant 'pas professionnel du droit, il pouvait penser par le montant ainsi évoqué par l’Institut du [1], dont l’acte du 20 mai 2009 était parfaitement connu de ce dernier, ne justifiait pas une réponse de quelque manière que ce soit ' ;

Mais considérant que le rappel de son obligation envers la société Yara Prestige n’exonérait pas monsieur [L] de son obligation de fournir les renseignements prévus à l’article L. 211-3 du code des procédures d’exécution ; que s’étant délibérément abstenu, sans motif légitime, de fournir les dits renseignements il encourt la sanction prévue par l’article R. 211-5 du code des procédures civiles d’exécution ;

Considérant que la société Yara n’a pas fourni de réponse à la suite du procès-verbal de saisie-attribution qui lui a été signifié le 20 mai 2009 ;

Considérant qu’à la suite du procès-verbal de saisie-attribution qui lui a été signifié le 18 mai 2009, monsieur [K] [S] a répondu ce qui suit : ' Je ne peux vous répondre dans l’immédiat. Une réponse sera fournie par mon avocat dans les plus brefs délais. Je fais protestation compte tenu des dispositions légales en matière de réponse du tiers saisi’ ; qu’il n’a communiqué par la suite aucun renseignement ;

Que monsieur [S] ne peut valablement soutenir qu’il n’était pas informé de la situation de la société Yara Prestige, alors que, gérant de société, donc normalement rompu au fonctionnement d’une société, il ne pouvait ignorer en tout état de cause qu’il n’avait libéré qu’une partie du capital social, comme le lui rappelait d’ailleurs le procès-verbal de saisie qui le mettait en garde sur les conséquences d’un défaut de communication des renseignements demandés ;

Considérant qu’à la suite du procès-verbal de saisie-attribution qui lui a été signifié le 18 mai 2009, madame [X] [V], épouse [S], a répondu ce qui suit : 'Je vois avec mon mari qui s’occupe de cette affaire.' ; qu’elle n’a communiqué par la suite aucun renseignement ;

Que c’est en vain que madame [V] fait valoir sa qualité de profane pour être exonérée de toute condamnation causée par le manquement à son obligation de déclaration , alors que, dentiste de profession, elle pouvait aisément comprendre la mise garde figurant dans le procès-verbal de saisie-attribution selon laquelle le tiers saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements prévus est condamné à la demande du créancier à payer les sommes dues à ce dernier ;

Que c’est encore en vain que les parties soutiennent qu’elles n’ont pas manqué à leur devoir de renseignement dès lors qu’elles ont cru n’avoir pas à répondre aux demandes d’information de l’huissier de justice puisque le procès-verbal contenait en lui-même la réponse, alors que le rappel dans le procès-verbal des obligations des tiers saisis n’exonérait pas ceux-ci de leur obligation de fournir les renseignements prévus ;

Que la société Yara, monsieur [K] [S] et madame [X] [V] s’étant abstenus, sans motif légitime, de fournir les renseignements sollicités d’eux sur le fondement des article L. 211-3 et R. 211-4. du code des procédures civiles d’exécution, il encourent la sanction prévue par l’article R. 211-5 ;

SUR L’ÉTENDUE DE LA SANCTION

Considérant que chacun des procès-verbaux de saisie-attribution reproduisait le contenu des dispositions légales relatives aux conséquences encourues en cas de défaut de réponse à la demande de renseignements : 'le tiers saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements prévus est condamné à la demande du créancier à payer les sommes dues à ce dernier..' ;

Considérant que monsieur [S] et madame [V] reprochent à tort au premier juge de n’avoir pas caractérisé le nécessaire lien de causalité entre leur faute et le préjudice ; qu’en effet, c’est une demande de condamnation à payer les causes de la saisie qui est formée contre eux et cette sanction ne se confond pas avec une demande de paiement de dommages-intérêts étrangère à la cause ;

Considérant que monsieur [S] et madame [V] ont demandé à la cour de constater que la saisie-attribution à l’encontre de madame [V] porte sur la somme de 9 000 € et que la saisie-attribution à l’encontre de monsieur [S] porte la somme de 120 000 € ;

Considérant que monsieur [D] [L] expose qu’il est redevable d’une somme de 30 000 € à l’égard de la Société Yara Prestige et qu’il appartient au seul mandataire judiciaire de la lui réclamer ; qu’il demande que les effets de la saisie soient limités à cette somme de 30 000 € ;

Mais considérant que la cour a déjà jugé que la survenance de la liquidation de la société Yara Prestige n’avait pu remettre en cause l’entrée dans le patrimoine de l’Institut [1] des créances saisies ; que par ailleurs il résulte de l’article R. 211-5 que le tiers saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements prévus est condamné à payer au créancier les sommes qui lui sont dues ; que les sommes dues au créancier saisissant par le débiteur que le créancier peut réclamer au saisi n’ont pas à être limitées au montant dû par ce tiers saisi au débiteur ;

Qu’il s’ensuit que monsieur [D] [L], la société Yara, monsieur [K] [S] et madame [X] [V] sont débiteurs de la totalité des sommes dues à l’Institut [1] en vertu de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 2 avril 2008 ;

Considérant que la créance de l’Institut [1] actualisée au 22 septembre 2009 s’élève à la somme non contestée de 142 702,18 € ;

Que monsieur [D] [L], la société Yara, monsieur [K] [S] et madame [X] [V] apparaissant débiteurs in solidum de ladite somme, c’est donc à juste titre que le premier juge à condamné in solidum, madame [X] [V], monsieur [K] [S] et monsieur [D] [L] à payer à l’Institut [1] la somme de 142.702,17 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2009 et fixé la créance de l’Institut [1] au passif de la procédure collective de la société Yara à la somme de 142.702,17 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2009 ;

Que le jugement sera confirmé ;

SUR LES AUTRES DEMANDES

Considérant qu’il n’y a pas lieu d’octroyer les délais de paiement que madame [V] et monsieur [S] ont d’ailleurs demandés dans le corps de leurs conclusions sans former une telle prétention dans le dispositif de ces écritures ;

Considérant que la demande de monsieur [S] et de madame [V] tendant à la condamnation de monsieur [L] à les garantir de toutes condamnation doit rejetée, cette demande échappant à la compétence de la cour statuant comme juge de l’exécution étant observé en outre qu’ils sont condamnés à paiement à raison de leurs propres faute dans l’exécution de leur obligation de tiers saisis ;

PAR CES MOTIFS

La cour

Déclare monsieur [D] [L] et la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, irrecevables à soulever l’exception d’incompétence du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Paris ;

Déboute la Selarl Gauthier Sohm, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara Prestige, de sa demande d’infirmation du jugement pour incompétence du juge de l’exécution ;

Déclare recevable l’action de l’Institut [1] contre les associés de la société Yara Prestige ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Déboute les parties de toutes autres demandes ;

Condamne in solidum monsieur [D] [L], monsieur [K] [S], madame [X] [V], épouse [F] Sebaiti, et la SELARL SMJ, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Yara, à payer à l’Institut [1] la somme de 8 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’appel comprenant les frais d’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire prise sur l’immeuble de monsieur [D] [L] ;

Dit que lesdits dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 4 chambre 9, 27 novembre 2014, n° 13/03189