Cour d'appel de Paris, 9 novembre 2016, n° 14/07397

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 9 nov. 2016, n° 14/07397
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 14/07397
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Paris, 20 novembre 2013, N° 12/10755

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 9

ARRÊT DU 09 Novembre 2016

(n° , 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 14/07397

Décision déférée à la cour :
jugement rendu le 21 novembre 2013 par le conseil de prud’hommes de
PARIS – section encadrement – RG n° 12/10755

APPELANTE

Madame X Y

XXX

XXX

née le XXX à XXX Z94320)

comparante en personne, assistée de Me Julie SOLAND, avocat au barreau de PARIS, C0749

INTIMEE

SA LECTRA

16-18 rue Chalgrin

XXX

représentée par Me Guillaume VERDIER, avocat au barreau de PARIS, P0505 substitué par Me
Véronique TUFFAL NERSON, avocat au barreau de
PARIS,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 juin 2016, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Christine LETHIEC, conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine SOMMÉ, président

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Madame Christine LETHIEC, conseiller

Greffier : Madame A
B, lors des débats

ARRET :

— contradictoire

— prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Catherine SOMMÉ, président et par Madame Véronique
BESSERMAN-FRADIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et prétentions des parties

Mme X Y a été engagée par la SA
LECTRA, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 6 janvier 2004, pour y exercer les fonctions d’assistante de direction, statut cadre, coefficient 100, position II et en contrepartie d’une rémunération mensuelle brute de 2 916.67 .

Par avenant à ce contrat de travail en date du 29 mars 2005, les parties ont convenu du passage de la salariée à une convention de forfait de 218 jours travaillés par an, à compter du 1er avril 2005, moyennant une rémunération mensuelle brute de 3 123.76 .

L’entreprise qui employait, au jour de la rupture, plus de dix salariés, est assujettie à la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

Par lettre recommandée du 29 juin 2012, la société LECTRA a convoqué Mme X Y à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 11 juillet 2012.

Un licenciement pour insuffisance professionnelle a été notifié à l’intéressée par courrier recommandé du 18 juillet 2012, rédigé en ces termes :

«Les dysfonctionnements que nous avons constatés, dans l’exercice de votre fonction d’assistante de direction, caractérisent une réelle insuffisance professionnelle de votre part qui nous contraint à mettre un terme à nos relations contractuelles.

Nous avons donc le regret de vous informer de notre décision de procéder à votre licenciement pour motif personnel.

Vous avez été embauchée, le 6janvier 2004, en qualité d’assistante de direction au sein de la
Direction des Systèmes d’information (DSI).

Vos missions de secrétariat ont progressivement évolué avec des tâches relatives à l’administration du personnel à la suite du rapprochement de la DSI et de la
Direction des Ressources Humaines (DRH).

Puis, en mai 2010, vous ont été confiées des missions de communication interne sous la responsabilité de Madame C
D E, lesquelles constituent 85% de vos tâches, le solde étant dévolu essentiellement à des actions RH.

Or, nous déplorons que la qualité de votre travail ne soit pas au niveau attendu et se dégrade depuis plusieurs mois malgré nos alertes.

Plusieurs points ont été abordés lors de notre entretien du 11 juillet 2012. Ils caractérisent un non respect des délais récurrent de votre part et un manque de fiabilité dans l’exécution de vos productions.

1} Le premier constat porte sur votre non respect des délais.

Votre principale mission en matière de communication interne est la participation à la « ClickNews ».

Vous contribuez ainsi à la rédaction d’articles de ce journal numérique destiné aux 1350 collaborateurs de l’entreprise en France comme à l’étranger.

C’est dans ce cadre que chaque mais depuis 2 ans, vous devez rédiger une rubrique relative aux nouveaux embauchés dans le respect d’un calendrier précis :

Le 8 du mois : vous devez demander au service ressources humaines les mouvements de personnel, embauches, mobilités internes, survenus depuis la dernière « ClickNews » et récupérer les curriculum vitae et les descriptions de missions. En parallèle, il est convenu que vous sollicitiez les nouveaux entrants pour obtenir une photo. Vous disposez alors d’une semaine pour rédiger les textes sur la base des informations reçues.

Le 16 du mois : les textes produits par vos soins sont soumis à votre manager avant validation par l’équipe ressources humaines puis par le Directeur général.

Le 25 du mois les textes valides, ainsi que les photos, doivent être intégrés dans l’outil de publication « Tridion », la traduction puis la validation des traductions se faisant en parallèle.

En fonction du nombre de mouvements internes, les dernières notices peuvent être validées le 25, pour une intégration dans « Tridion » le 28.
Au-delà, nous sommes en retard.

Or, nous avons le regret de constater votre incapacité récurrente à vous tenir à ce calendrier.

Ainsi en juin 2012, alors que vous aviez 13 notices à rédiger, vous n’avez demandé les informations au service du personnel que le 14 juin au lieu du 8 pour livrer les trois premiers textes le 20 et les derniers le 26 au lieu du 18, retardant l’ensemble des processus de validation, de traduction et de publication.

Ce retard a deux conséquences. D’une part, il provoque des tensions inutiles et préjudiciables, avec un rythme de validation très rapide imposé à tous :
votre manager, l’équipe des ressources humaines, les chargés de traduction, le Directeur général.

D’autre part, il conduit à une surcharge pour le reste de l’équipe de la communication interne obligée de pallier vos insuffisances. En effet, rédiger les mouvements internes ne constitue pas votre seule mission puisque vous intervenez sur d’autres textes, soit en rédaction, soit en relecture de traduction, soit en recherche d’images. Sur le mois de juin 2012, du fait de la lenteur du processus, vous n’avez pas été en mesure d’assurer ces tâches.

Enfin, le retard dans la diffusion de la « ClickNews » remet en cause nos objectifs de communication fiable et régulière auprès des collaborateurs
Lectra.

Ce manque de réactivité de votre part et le non respect des échéances et des plannings se sont multipliés ces derniers mots et malgré nos alertes vous n’avez pas modifié votre attitude dilettante.

Déjà en décembre 2011, votre manager avait fait le constat qu’aucun des délais des 3 ème et 4e

trimestres 201I n’avait été respecté.

Ainsi, le 13 juillet 2011, il vous a été demandé de planifier et de coordonner la récupération des photos destinées à enrichir l’annuaire d’entreprise, avec une date cible de démarrage du projet le 30 septembre 2011. Cette première date n’a pas été respectée.

Une deuxième date cible a été fixée au 24 novembre 2011, sans résultats probants. En janvier 2012, vous avez finalement sollicité les collaborateurs dont la photo manquait. La date cible de finalisation du projet était 'n mars 2012. Une requête demandée par votre manager à la DSI le 25 juin dernier indique que sur 710 photos manquantes à la date du 27 octobre 2011, il en reste encore 431 à récupérer.

Au-delà de l’exécution très partielle de cette mission près d’un an après son lancement, nous regrettons que vous n’ayez pas informé régulièrement votre manager de l’avancée du projet,ce que vous avez reconnu.

De même, le 25 aout 2011, il vous a été demande de récupérer auprès des responsables marketing des filiales les photos des sites Lectra, avec comme date cible le 30 septembre 2011. Cette date n’ayant pas été respectée, une nouvelle date cible vous a été fixée au 20 décembre 201I. Le projet n’a pas été mené.

Puis, le 15 septembre 2011, il vous a été demandé de générer un fichier permettant de comparer les noms des managers présents dans l’organigramme communiqué aux nouveaux entrants et ceux figurant dans la rubrique « Global Network» de
Lectra.com. En l’absence de réaction de votre part, une date cible vous a été fixée pour le 30 novembre 2011. Le fichier a finalement été finalisé le 30 janvier 2012, plus que 4 mois après la date de la demande initiale.

De même, le 19 septembre 2011, il vous a été demandé de réorganiser sous l’outil de publication «Tridion» la rubrique «Strategic Intelligence» en ligne sur l’Inet, de façon à optimiser l’accès aux informations diffusées en distinguant les «Newsletters
Fashion », les «Newsletters Automotive» et les études de marché. Faute de tout retour de votre part, une date cible vous a été fixée pour le 20 décembre 2011. Le projet a été finalisé le 30 janvier 2012.

Lors de notre entretien du 11 juillet 2012, vous avez déclaré laconiquement que « dans tout projet il y du retard ». Nous ne partageons pas ce point de vue et estimons au contraire que le respect des échéances est en soi un objectif important et non secondaire.

2) Le second constat porte sur votre manque de fiabilité et de qualité des livrables.

Dans le cadre de vos missions de communication interne vous devez vous assurer de la bonne qualité des documents publiés, textes ou photos. Or, à plusieurs reprises, nous avons constaté la légèreté avec laquelle vous effectuez les relectures des articles traduits ou les opérations de mise en page.

Ainsi, par exemple, nous avons eu à déplorer, en mai 2012, votre relecture très superficielle du texte relatif au «kick off Amérique du sud des 27 et 28 mars 2012 ». La traduction en français de ce sujet par le prestataire était approximative et vos corrections loin d’être satisfaisantes.

De même, pour l’article « Lectra participe aux
Fashion Weeks des Universités de Caroline du Nord et de Donghua » qui malgré vos corrections a dû être entièrement repris.

Votre manque d’efficacité est d’autant plus regrettable, que la relecture des documents traduits est une mission basique, qui lorsqu’elle est négligée, peut discréditer l’intranet et par la-même l’image de fiabilité de la société.

En outre, vous ne prenez pas l’initiative de modifier régulièrement le carrousel d’animation de la page d’accueil de l’intranet afin d’actualiser les images, ce qui est pourtant de votre ressort. Or, il est essentiel pour un site de communication interne de présenter une première page dynamique pour accrocher le lecteur.

Lors de notre entretien du 11 juillet 2012, vous avez précisé avoir sollicité, sans succès, des formations afin d’être plus efficace. Or, lorsque votre manager a organisé,à votre demande, une formation sur le logiciel de mise en ligne « Tridion » le 29 décembre 2011, vous avez eu un comportement déplacé et irrespectueux à son égard en l’interrompant de manière brusque et en mettant fin au rendez-vous.

Ces différents griefs cumulés ne sont pas, à notre sens, acceptables au vu de votre statut de cadre et ne nous permettent pas d’envisager la poursuite de notre collaboration.

Votre préavis, que nous vous dispensons d’effectuer, débutera à compter de la date de

première présentation de cette lettre pour prendre fin à l’issue d’une période de trois mois ».

Estimant ne pas être remplie de ses droits, Mme X Y a saisi, le 1er octobre 2012, le conseil de prud’hommes de Paris, lequel, par jugement rendu le 21 novembre 2013, a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la société LECTRA à verser la somme de 23 000 à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre une indemnité de 700 en en application de l’article 700 du code de procédure civile. La salariée a été déboutée du surplus de ses demandes.

Mme X Y a régulièrement interjeté appel de cette décision le 30 juin 2014.

Par conclusions visées par le greffe le 13 juin 2016 et soutenues oralement, Mme X Y demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse mais de l’infirmer en ses autres dispositions et de condamner la société LECTRA à lui verser les sommes suivantes :

—  3 670 à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de procédure,

—  3 670 à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des circonstances vexatoires du licenciement

—  44 000 à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  10 000 à titre de dommages et intérêts pour violation de l’ obligation d’adaptation et de formation professionnelle,

—  6 000 à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions de l’article 14 de l’accord national du 28 juillet 1998 sur l’organisation du travail dans la métallurgie,

—  14 680 à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,

—  2 500 sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées par le greffe le 13juin 2016 et soutenues oralement, la société LECTRA demande à la cour d’infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, de dire que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, que la procédure est régulière, qu’il n’y a pas eu dégradation des conditions de travail de la salariée, ni une dégradation de son état de santé en résultant, que les circonstances de la rupture n’étaient pas vexatoires et qu’elle a respecté son

obligation d’adaptation et de formation professionnelle ainsi que ses obligations conventionnelles relatives à l’organisation du travail de la salariée.

La société LECTRA conclut au rejet de l’intégralité des prétentions de Mme X Y et elle forme une demande reconventionnelle de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées oralement lors de l’audience des débats.

SUR QUOI LA COUR

Sur la rupture du contrat de travail

L’article L 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement pour motif personnel à l’existence d’une cause réelle et sérieuse.

L’article L 1235-1 du code du travail dispose qu’en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute persiste, il profite au salarié.

Ainsi l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties mais, en application de l’article
L.1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement doit comporter l’énoncé de faits précis et matériellement vérifiables, à défaut de quoi le licenciement doit être jugé sans cause réelle et sérieuse.

En l’espèce, la société LECTRA reproche à la salariée une insuffisance professionnelle, caractérisée par plusieurs manquements dans l’exécution de son travail.
Elle lui reproche enfin un comportement déplacé et irrespectueux à l’égard de son manager le 29 décembre 2011.

Pour constituer une cause légitime de rupture, l’insuffisance professionnelle doit être établie par des éléments objectifs, constatée sur une période suffisamment longue pour ne pas apparaître comme passagère ou purement conjoncturelle, directement imputable au salarié et non la conséquence d’une conjoncture économique difficile ou du propre comportement de l’employeur.

Mme X Y conteste cette insuffisance professionnelle portant sur des tâches relatives à de nouvelles attributions suite à une modification de son contrat de travail, intervenue sans avenant signé des parties et sans formation ni adaptation préalable.

La société LECTRA fait valoir qu’il s’agit d’un simple changement des conditions de travail n’entrainant aucune altération des responsabilités, ni modification de la qualification ou de la rémunération de la salariée.

Avant de reprendre chacun des griefs reprochés à la salariée, invoqués dans la lettre de licenciement qui lie les parties et le juge, en les analysant au vu des observations précitées, il convient d’apprécier si le contrat de travail de Mme X
Y n’a pas été modifié unilatéralement par l’employeur.

La modification du contrat de travail par l’employeur, pour quelque cause que ce soit, nécessite l’accord du salarié ; toutefois, dans le cadre de son pouvoir général de direction, l’employeur peut changer les conditions de travail d’un salarié, le fait que la tâche donnée à un salarié soit différente de celle qu’il effectuait antérieurement ne caractérise pas une modification du contrat, si elle correspond à sa qualification et à la condition qu’elle n’entraîne pas une réduction des responsabilités du salarié

ou une modification de la nature même de ses fonctions.

Mme X Y, titulaire d’un DEA en anglais, a été engagée par la société LECTRA, à compter du 6 janvier 2004, pour exercer les fonctions d’assistante de direction, statut cadre, au sein de la direction des systèmes d’information, sous la direction de Mme F G.

L’article 3 du contrat de travail relatif à la classification de la salariée mentionnait:

« Le classement des fonctions qui vous sont confiées est le suivant , statut cadre, coefficient 100, position II, de la grille de classification de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie ».

L’article 21 de la convention collective prévoit que les ingénieurs et cadres confirmés sont classés dans la position II et la position III, en donnant du cadre position II la définition suivante :

« ingénieur ou cadre qui est affecté à un poste de commandement en vue d 'aider le titulaire ou qui exerce dans les domaines scientifique, technique, administratif commercial ou de gestion des responsabilités limitées dans le cadre des missions ou des directives reçues de son supérieur hiérarchique ».

L’appréciation de la modification de la qualification professionnelle se fait au regard des fonctions réellement exercées par le salarié par lui.

Dans un courriel du 12 décembre 2007 portant sur l’entretien d’évaluation et de progrès de Mme X Y, Mme F G rappelle les principales missions d’assistante de direction confiées et qui sont les suivantes :

— « ' Me seconder sur la gestion des dossiers '.

— '.Assurer mon secrétariat personnel et celui de l’équipe de Paris en ce qui concerne le traitement et archivage des mails et suivi des différents dossiers….

— '.Organiser le suivi de l’activité du département( consolidation du rapport mensuel d’activité, consolidation des tableaux de bord etc…)

— Assurer le suivi administratif et logistique pour l’équipe( gestion du planning, organisation des déplacements, prise des messages et transferts d’appels lors des absences, suivi des congés '.)

— Organiser l’interface téléphonique avec les intervenants de l’équipe en fonction de l’importance et de l’urgence des informations ou des sujets à traiter.
Communiquer les informations pertinentes avec réactivité … ».

Elle conclut en ces termes :

« ' j’apprécie ton attitude et je suis très confiante pour le futur de notre collaboration '

Encore merci pour ton implication. Je compte sur toi».

Les correspondances échangées entre les parties établissent que Mme F G a rapidement pris des fonctions de ressources humaines, que Mme X Y a exercé ses fonctions d’assistante de direction tant dans le département direction des systèmes d’information que dans celui de la direction des ressources humaines et qu’à compter de septembre 2009, la salariée a travaillé sous la direction de Mme C D, exerçant les fonctions de chargée de communication interne.

Le projet d’entretien d’évaluation et de progrès, établi en 2010 par Mme C
D, indique :

« X s’est bien adaptée à sa nouvelle fonction. Progressivement, elle a su se plier aux contraintes de temps imposées par la fréquence mensuelle de la Clicknews et a appris à gérer son temps entre son rôle d’assistante et celui de chargée de communication ».

Ce document récapitule les principales missions du poste de chargée de communication interne confiées à la salariée et qui sont les suivantes :

« - Mission principale ( raison d’être dans l’organisation )

Dans le cadre du développement de la communication interne, sa mission sera de contribuer à l’élaboration et à la publication du journal interne (
Clicknews) et à l’animation de l’intranet.

— Finalités et activités principales ( domaines de résultats et actions de travail ) :

Rédaction et rewritting…..

Traduction vers le français….

Préparation et intégration de media….

Coordination des Cnews e langue italienne et esapgnole et agents '.

Création d’animation sous windows movie parker….

Suivi ponctuel de projets d’évolution , en coordination avec l’équipe MOE. »

Dans ce projet non validé, Mme X Y a fait part de son étonnement qu’une simple réunion de travail se transforme en entretien d’évaluation et qu’il ne soit pas tenu « compte de la partie administrative et assistanat » de ses rôles.
Il a, également, été rappelé la nécessité de faire bénéficier la salariée d’une formation multimedia et l’intéressée a fait part de son souhait d’être « associée à certaines réunions pour bien appréhender la portée et le message stratégique que souhaite transmettre la direction afin d’éviter les éditions et réécritures pour gagner en temps et en pertinence ».

Ces divers éléments établissent que les attributions de Mme X Y en qualité de chargée de communication interne sont totalement différentes de celles exercées précédemment en tant qu’assistante de direction, ce que d’ailleurs confirment le projet d’entretien d’évaluation et de progrès, établi en 2010 et indiquant qu’il s’agit d’une « nouvelle fonction » ainsi que le courriel de Mme F G adressé le 19 juillet 2011 et qui demande à la salariée de se rendre davantage disponible pour la communication interne dès lors que lui ont été retirées les tâches de gestion des congés, de classement des documents et qu’elle n’a aucun travail de secrétariat ni de traitement de mail.

Le compte rendu de l’entretien d’évaluation et de progrès, établi le 30 mai 2011 par Mme C
D et signé des parties, mentionne au titre du bilan :

« Après une période d’adaptation réussie, X a continué de vrais progrès rédactionnels, assimilant peu à peu la terminologie de Lectra et a gagné en rapidité.

X a néanmoins encore du mal à se plier aux contraintes de temps imposées par la fréquence mensuelle de la Clicknews. Ceci est particulièrement vrai depuis trois mois.

En dehors des mouvements internes, X n’a eu le temps ni de rédiger , ni de traduire d’autres textes. Ceci s’explique par une des tâches d’assistanat et administrative RH d plus en plus importante , une situation qui risque de perdurer ( cf voir objectifs)…
»

A cet égard, il convient de relever que le premier projet initial de cette évaluation indique que la salariée a « des difficultés à gérer les priorités entre son rôle d’assistante et celui de chargée de communication » mais que cette mention a été supprimée dans la version définitive.

Dans l’évaluation définitive, Mme X H a apporté le commentaire suivant :

«Cette évaluation ne prend en compte que la partie contributive à la communication interne et non la partie assistanat avec les tâches administratives inhérentes répétitives et très chronophages et intempestives ( 50 % des activités ) : voyages, TR, prise de rdv, appels, diverses sollicitations, etc…

Il est indiqué dans le point 2 sur les missions que la raison d’être dans l’organisation est principalement sur la communication interne. Qu’en est-il de la part administrative des tâches récurrentes qui continuent de m’incomber ' Serait-il possible d’avoir une clarification '…..

— Est-ce possible de faire une formation « introduction à la communication », ne serait-ce que pour bien camper le poste ' Tout ce que je fais sur les animations demande 2 fois de plus de temps car je « m’autoforme » au fur et à mesure sur les outils.
Je fonctionne donc à taton sur certaines tâches ce qui est chronophage ».

L’examen du curriculum vitae de Mme X H révèle que celle-ci n’a aucune expérience professionnelle autre que dans les domaines de l’assistanat de traduction et de direction. La salariée justifie, également, n’avoir pu bénéficier d’aucune formation efficiente en communication interne alors même qu’elle en a fait de nombreuses demandes par courriels et lors de ses entretiens d’évaluation et que la spécificité de cette fonction est, implicitement, admise par la société LECTRA laquelle, dans une offre d’emploi mise en ligne le 9 juillet 2012 pour un poste de chargée de communication en CDD de six mois, indique que le profil recherché est idéalement, une personne diplômée BAC + 3 en communication interne ou journalisme.

En l’état des explications et des pièces fournies, notamment les nombreux courriels produits, la cour constate que si Mme X Y a conservé sa qualification et sa rémunération, il lui a été imposé des missions de chargée de communication interne, qu’il lui a été difficile d’exercer, en raison de l’absence de formation préalable efficiente et de l’importance de ce travail supplémentaire nécessitant des compétences professionnelles spécifiques, qu’elle n’a fait l’objet d’aucune évaluation professionnelle sur ses fonctions d’assistante de direction dont elle avait perdu une partie des attributions d’assistanat et administratives RH mais qui de l’aveu même de l’employeur, restaient significatives, de sorte que ces circonstances traduisent un changement total des attributions de la salariée et caractérisent une modification de son contrat de travail qui devait recueillir, au préalable, son accord.

Il en résulte que l’employeur est mal fondé à invoquer les griefs de manquements de la salariée dans les missions de communication interne caractérisés par un non respect des délais et un manque de fiabilité et de qualité des livrables.

Par ailleurs l’employeur ne développe pas dans ses écritures le dernier grief invoqué dans la lettre de licenciement relatif au « comportement déplacé et irrespectueux » de la salariée le 29 décembre 2011 à l’égard de son manager ; en tout état de cause ce grief n’est pas susceptible à lui seul de justifier le licenciement prononcé à l’encontre de l’intéressée.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que le licenciement de Mme X Y est dépourvu de cause réelle et sérieuse ainsi que l’a retenu le conseil de prud’hommes dont la décision sera

confirmée à ce titre.

Sur les conséquences indemnitaires de la rupture du contrat de travail

Aux termes de l’article L 1235-3 du code du travail, si un licenciement intervient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et qu’il n’y a pas réintégration du salarié dans l’entreprise, il est octroyé au salarié à la charge de l’employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

En application des dispositions de l’article R 1234-4 du code du travail et compte tenu des bulletins de salaires versés aux débats, il convient de fixer le salaire moyen brut des douze derniers mois précédant la notification de la rupture du contrat de travail de Mme X Y à la somme de 3 584.79 .

Compte tenu de l’effectif de l’entreprise supérieur à dix salariés, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme X Y, de son ancienneté de huit années et six mois, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelles et des conséquences du licenciement à son égard, en particulier de la période de chômage persistante à ce jour à l’exception de missions d’intérim ponctuelles d’assistante de direction, il y a lieu de lui allouer, en application de l’article
L 1235-3 du code du travail, une somme de 35 000 à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, par infirmation du jugement entrepris sur le montant alloué.

L’application de l’article L 1235-3 du code du travail appelle celle de L 1235-4 du même code de sorte que la société LECTRA sera condamnée à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Mme X Y, dans la limite de six mois.

Mme X Y sollicite par ailleurs une indemnité pour non respect de la procédure de licenciement.

Toutefois l’indemnité pour inobservation de la procédure de licenciement ne se cumulant pas avec l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse allouée sur le fondement de l’article L.
1235-3 du code du travail, la salariée doit être déboutée de ce chef de demande par confirmation du jugement à ce titre.

Mme X Y demande également paiement d’une indemnité au titre des circonstances brutales et vexatoires de la rupture.

Elle reproche à la société LECTRA de ne pas l’avoir informée, lors des pourparlers de rupture conventionnelle, de son droit à être assistée, de lui avoir annoncé, oralement le 2 juillet 2012, son intention de la licencier avant la tenue de l’entretien préalable, d’avoir publié, le 9 juillet 2012, une offre d’emploi correspondant au poste auquel elle était affectée, soit avant la tenue de l’entretien préalable ayant eu lieu le 11 juillet 2012, et de l’avoir dispensée de se présenter à son poste de travail.

La société LECTRA conteste tout caractère brutal et vexatoire du licenciement.

Il ressort des éléments de ce dossier que des pourparlers de rupture conventionnelle étaient engagés entre les parties mais il n’est pas démontré que la société LECTRA ait omis d’informer la salariée de son droit à être assistée.

Cependant, dans sa lettre recommandée datée du 4 juillet 2012, Mme X Y rappelle que, dès le 12 juin 2012, elle a été informée par Mme F G de la décision de la société
LECTRA de rompre le contrat de travail dans le cadre d’une rupture conventionnelle ou d’un licenciement et que ces propos ont été réitérés par Mme C
D, lors de la tentative de

remise en mains propres de la convocation à l’entretien préalable, le 2 juillet 2012, la salariée étant invitée à rentrer chez elle du fait de son licenciement.

Ces propos sont confirmés dans le compte rendu de l’entretien préalable du 11 juillet 2012 établi par Mme I J en sa qualité de déléguée du personnel et ils ne sont pas utilement contestés par Mme C D ni par M. K
L, assistant DRH, présents tous deux à cet entretien.

La salariée qui a été informée oralement à deux reprises de l’intention de son employeur de rompre le contrat de travail avant la notification de son licenciement, et à laquelle il a été demandé, dès la réception de la convocation à l’entretien préalable, de ne plus se présenter à son poste de travail, justifie avoir subi un préjudice distinct généré par les circonstances brutales de la rupture qu’en l’état des explications et des pièces produites, il convient d’indemniser à hauteur de la somme de 3 000 .
Le jugement déféré qui a rejeté ce chef de demande sera infirmé à ce titre.

Sur la demande indemnitaire à titre de préjudice moral

Mme X Y sollicite l’indemnisation de son préjudice moral en soutenant qu’elle a du subir une modification de son contrat de travail et que la dégradation de ses conditions de travail a eu des répercussions sur son état de santé.

Toutefois la salariée qui n’établit pas que les problèmes de santé rencontrés soient consécutifs à sa situation professionnelle, ne justifie pas avoir subi un préjudice moral distinct de celui résultant de la rupture.

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris qui a débouté la salariée de ce chef de demande.

Sur la demande indemnitaire au titre du préjudice subi du fait de l’absence de toute formation ou adaptation

Mme X Y sollicite l’indemnisation du préjudice spécifique qu’elle a subi en raison de l’absence de formation, en soutenant que durant la relation de travail elle n’a effectué qu’un bilan de compétences et une formation d’une heure 30 sur l’outil «
Tridion ».

Le conseil de prud’hommes n’a pas statué sur ce chef de demande.

La société LECTRA verse aux débats l’historique de formation de la salariée au cours des années 2010, 2011 et 2012, en contestant tout manquement à son obligation de formation.

Selon les termes de l’article L. 6321-1 du code du travail :

« L’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations…..

Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences…
».

L’examen de l’historique de formations de Mme X Y révèle que celle-ci a bénéficié de neuf jours de formation en trois ans dont un bilan de compétence de trois jours mais qu’elle n’a reçu aucune formation pour exercer ses nouvelles fonctions de chargée de communication interne alors même que, titulaire d’un DEA en anglais et n’ayant exercé, précédemment, que des fonctions d’assistante, elle avait réclamé une formation spécifique pour mieux aborder ces nouvelles fonctions, tant dans ses courriels que lors de ses entretiens annuels d’évaluation et que ses supérieurs hiérarchiques avaient admis le bien fondé de ces demandes.

Du fait de cette absence de formation, Mme X Y qui avait plus de huit années d’ancienneté au sein de la société, n’a pu améliorer ses compétences professionnelles et assurer son employabilité sur le marché de l’emploi ainsi que l’atteste la précarité de sa situation professionnelle actuelle et elle justifie avoir subi un préjudice distinct, indépendamment du caractère abusif de la rupture, qu’en l’état des explications et des pièces produites, il convient de chiffrer à la somme de 3 000 .

Sur la demande nouvelle en indemnisation pour non-respect des dispositions de l’accord national du 28 juillet 1998 sur l’organisation du travail dans la métallurgie

Mme X Y forme une demande nouvelle en indemnisation du préjudice qu’elle a subi du fait de l’absence d’entretien annuel sur sa charge de travail et l’organisation de celui-ci.

La société LECTRA fait valoir que la salariée a bénéficié d’entretiens annuels portant sur sa charge de travail et l’organisation de son travail.

Selon l’article 14 de l’accord national du 28 juillet 1998 sur l’organisation du travail dans la métallurgie:

« Conformément à l’article L212-15-3, III, du Code du Travail, la formule du forfait défini en jours sur l’année peut être convenu avec les salariés qui ne sont pas occupés selon l’horaire collectif applicable au sein de l’atelier, du service ou de l’équipe auxquels ils sont intégrés, de telle sorte que la durée de leur temps de travail ne soit pas prédéterminée.

Le supérieur hiérarchique du salarié ayant conclu une convention de forfait défini en jours assure le suivi régulier de l’organisation du travail de l’intéressé et de sa charge de travail.

En outre, le salarié ayant conclu une convention de forfait défini en jours bénéficie, chaque année, d’un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées l’organisation et la charge de travail de l’intéressé et l’amplitude de ses journées d’activité. Cette amplitude et cette charge de travail devront rester raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail des intéressés. A cet effet, l’employeur affichera dans l’entreprise le début et la fin de la période quotidienne du temps de repos minimal obligatoire visé à l’alinéa 7 ci-dessus. Un accord d’entreprise ou d’établissement peut prévoir d’autres modalités pour assurer le respect de cette obligation ».

En l’espèce, les entretiens d’évaluation et de progrès démontrent que la charge de travail de la salariée ainsi que son organisation étaient des sujets régulièrement abordés par l’employeur .

En tout état de cause Mme X Y ne justifie pas avoir subi un préjudice résultant de l’absence d’entretien annuel allégué.

Il convient de débouter Mme X Y de ce chef de demande.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

La société LECTRA qui succombe supportera la charge des dépens d’appel, en versant à Mme X Y une indemnité de 2 500 au titre des frais irrépétibles exposés, en vertu de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement en ce qu’il a dit que le licenciement de
X Y est dépourvu de cause réelle et sérieuse et en ce qu’il a débouté la salariée de ses demandes d’indemnités pour irrégularité de la procédure de licenciement et pour préjudice moral

INFIRME le jugement en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau et ajoutant,

CONDAMNE la SA LECTRA à verser à Mme X Y les sommes suivantes

—  35 000 à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

—  3 000 à titre de dommages et intérêts pour circonstance brutales et vexatoires du licenciement

—  3 000 à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation d’adaptation et de formation professionnelle

DEBOUTE Mme X Y de sa demande d’indemnité au titre de la violation des dispositions de l’article 14 de l’accord national du 28 juillet 1998 sur l’organisation du travail dans la métallurgie

CONDAMNE la SA LECTRA à rembourser à Pôle
Emploi les indemnités de chômage versées à Mme X Y, dans la limite de six mois

CONDAMNE la SA LECTRA à verser à Mme X Y une indemnité de 2 500 sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la SA LECTRA aux dépens d’appel.

La Greffière Le
Président

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Cour d'appel de Paris, 9 novembre 2016, n° 14/07397