Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 13 septembre 2018, n° 17/01621

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 9, 13 sept. 2018, n° 17/01621
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/01621
Décision précédente : Tribunal de commerce de Melun, 20 novembre 2016, N° 2015F573
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 9

ARRÊT DU 13 SEPTEMBRE 2018

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 17/01621

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Novembre 2016 – Tribunal de commerce de MELUN – RG n° 2015F573

APPELANT :

Monsieur Y X

né le […] à […]

[…]

78690 SAINT-REMY-L’HONORE

Représenté par Me Emmanuel BOURASSET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0160

Ayant pour avocat postulant Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

INTIMÉE :

La SCP A B, représentée par Maître A B, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société LIR PACKAGING

Ayant son siège […]

[…]

Représentée par Me François CHASSIN de l’AARPI CHASSIN COURNOT-VERNAY, avocat au barreau de PARIS, toque : A0210

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 Juin 2018, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Madame I J, présidente, et Madame Christine ROSSI, conseillère, chargées du rapport

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame I J, présidente

Madame Christine ROSSI, conseillère

Monsieur C D, conseiller appelé d’une autre chambre afin de compléter la formation de la cour en application de l’article R.312-3 du code de l’organisation judiciaire

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions de l’article 785 du Code de Procédure Civile.

GREFFIÈRE, lors des débats : Madame K L M

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par I J, présidente et par Madame Hanane H, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Lir Packaging, créée en décembre 1987, est une Sas ayant pour activité la fabrication d’emballages en matière plastique.

Par jugement rendu le 21 septembre 2009, le tribunal de commerce de Melun a ouvert une procédure de sauvegarde à l’égard de la société Lir Packaging.

Par un second jugement en date du 19 octobre 2009 le tribunal de commerce de Melun a converti cette procédure de sauvegarde en redressement judiciaire.

Par jugement en date du 18 octobre 2010, le tribunal de commerce de Melun a arrêté le plan de redressement par continuation de l’entreprise sous certaines conditions, notamment sous le cautionnement personnel de Monsieur Y X en sa qualité de représentant légal de la société, à hauteur de 40.000 euros afin de garantir le paiement du passif restant dû en cas de résolution du plan.

Le même jour monsieur X signait un acte de cautionnement dans les termes suivants:

Je soussigné Monsieur Y X,

Né le […] à […]

[…],

Déclare en ma qualité de Président, me porter caution de la SAS Lir Packaging 12, avenue de la Voulzie […].

Avec renonciation au bénéfice de discussion et de division pour les obligations résultant du plan de continuation qui lui serait consenti par le Tribunal de Commerce de Melun au cours de l’audience du 18.10/2010 dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouvrert par jugement en date du 19/10/2009.

Cet engagement est donné pour une somme de 40.000 € (raturé) (quinze mille Euros (barré) quante mille Euros)

Fait à Provins le 18 octobre 2010.

Signature

Par jugement en date du 18 janvier 20l2, le tribunal de commerce de Melun a, sur déclaration de cessation des paiements de Monsieur X, prononcé la liquidation judiciaire de la société Lir Packaging après avoir prononcé la résolution du plan d’apurement du passif qui lui avait été consenti.

Dans ces conditions, le liquidateur a tenté, sans succès, de recouvrer auprès de Monsieur X le cautionnement consenti à hauteur de 40.000 euros.

Suivant exploit d’huissier de justice en date du 16 novembre 2015, la Scp A E, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Lir Packaging, a fait assigner Monsieur X aux fins de le voir condamner à lui payer notamment la somme de 40.000 euros outre intérêts à compter du 3 octobre 2012, ainsi que la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par jugement rendu le 21 novembre 2016 assorti de l’exécution provisoire, le tribunal de commerce de Melun a jugé que le liquidateur de la société Lir Packaging n’avait pas la qualité de créancier professionnel, de sorte que les dispositions du code de la consommation ne pouvaient s’appliquer, que l’acte de cautionnement de Monsieur X était valable dès lors que l’engagement de caution de 40.000 euros est précisé dans le jugement en date du 18 octobre 2010 qui lui a été signifié et dont aucun appel n’a été interjeté, et qu’au surplus un acte séparé d’engagement de caution a été rédigé par ses soins précisant la portée de son engagement, que le liquidateur de la société Lir Packaging ne justifiait pas d’un préjudice distinct du simple retard de paiement lequel est indemnisé par l’allocation de l’intérêt au taux légal et que la situation financière de Monsieur X justifie qu’il soit fait application des dispositions de l’article 1244-1 du Code Civil.

Ce faisant, le tribunal de commerce de Melun a, d’une part condamné Monsieur X à verser à la Scp A B, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Lir Packaging, la somme de 40.000 euros en sa qualité de caution personnelle, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 3 octobre 2012, payables en 24 mensualités égales à compter de la signification du jugement, et, d’autre part, dit n’y avoir lieu à dommages et intérêts pour résistance abusive.

Selon déclaration en date du 19 janvier 2017, Monsieur X a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 26 mai 2017, la Scp A B a demandé au conseiller de la mise en état d’ordonner la radiation du rôle de l’affaire dès lors que l’appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d’appel.

Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 13 septembre 2017, M. X a demandé au conseiller de la mise en état de constater que l’intimé n’avait pas conclu dans le délai prescrit par l’article 909 du code de procédure civile, et de le juger en conséquence irrecevable à conclure.

Par ordonnance rendue le 28 septembre 2017, le conseiller de la mise en état a débouté la Scp A B de sa demande de radiation et l’a déclaré irrecevable à conclure au fond.

***

Dans ses dernières conclusions au fond auxquelles il est expressément référé, notifiées par voie électronique le 19 avril 2017, M. X demande à la Cour’de :

— infirmer le jugement du Tribunal de Commerce de Melun rendu le 22 novembre 2016 en toutes ses dispositions,

En conséquence':

— débouter la Scp A B de toutes ses demandes, fins et conclusions et en particulier':

dire et juger que la Scp A B agit en qualité de créancier professionnel et que les dispositions du code de la consommation s’appliquent ;

— dire et juger que la mention manuscrite portée sur l’engagement de caution du 18 octobre 2010 n’est pas identique aux mentions prescrites par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation ;

— dire et juger irrégulière la mention manuscrite portée en toutes lettres du montant de l’engagement de caution du 18 octobre 2010 ;

— dire et juger en conséquence, sur le fondement des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation et de l’article 1326 du Code civil que l’engagement de caution est nul et que M. Y X est déchargé de son engagement de caution ;

— condamner la Scp A B à payer à M. X une somme de 1.800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépenses d’appel qui seront recouvrées, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

SUR CE

Sur l’application du droit de la consommation

L’appelant soutient en premier lieu que son acte de cautionnement est irrégulier au regard du droit de la consommation. Il fait ainsi valoir, d’une part, que le droit de la consommation est applicable à l’espèce dès lors que l’intimé a la qualité de créancier professionnel au sens de l’alinéa 3 de l’article préliminaire du code de la consommation et d’autre part qu’il est nul au vu des dispositions des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation dès lors que sa signature n’est pas précédée des mentions manuscrites imposées par lesdits articles.

Enfin, l’appelant précise que son acte de cautionnement ne comporte aucune mention de la durée de l’engagement.

La cour rappelle qu’un créancier professionnel au sens de l’article L 341-2 et L 341-3 du code de la consommation est un créancier dont la créance est née dans l’exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec l’une de ses activités professionnelles, même si elle n’est pas principale.

En l’espèce ce sont les créanciers de la société Lir Packaging figurant dans la plan de continuation qui sont les bénéficiaires du cautionnement, ces créanciers étant représentés dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire par la Scp A B, mandataire judiciaire.

La Scp B, en sa qualité de mandataire judiciaire de la société Lir Packaging puis de commissaire à l’exécution du plan puis de mandataire liquidateur, remplit tous les critères de la définition donnée par une jurisprudence constante au créancier professionnel. Les créances figurant dans le plan d’apurement du passif sont l’objet même de l’exercice de sa profession.

Il convient en conséquence d’infirmer le jugement en ce qu’il a écarté les dispositions du code de la consommation sur ce fondement.

Sur la nullité du cautionnement

Monsieur X soutient en second lieu que son acte de cautionnement est nul en application du droit commun, et en particulier aux termes des dispositions de l’article 1326 du code civil, dès lors que la mention du montant du cautionnement en toutes lettres comporte des ratures et des rajouts rendant incertaine la détermination de l’étendue du cautionnement.

Aux termes des dispositions de l’article L 341-2 du code de la consommation 'Toute personne physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : « En me portant caution de X…, dans la limite de la somme de … couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de …, je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X… n’y satisfait pas lui-même. »

L’article L 341-2 est limité aux actes sous seing privé et exclut les engagements qui résulteraient d’un acte authentique.

L’article L 341- 3 du même code est relatif à la clause de solidarité.

En l’espèce, la cour relève que monsieur X a signé le 18 octobre 2010 un engagement de caution pour une somme de 15.000 euros pour les obligations qui résulteraient du plan de continuation 'qui lui serait consenti par le Tribunal de Commerce de Melun au cours de l’audience du 18/10/2010 dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire (…)'.

Il résulte des termes de cet engagement que celui-ci était antérieur à l’audience du tribunal de commerce et donc au jugement.

Le jugement du 18 octobre 2010 arrête le plan de redressement aux conditions suivantes : '(…)
-caution personnelle de Mr X Y en sa qualité de représentant légal de l’entreprise Sté LIR PACKAGING, à hauteur de QUARANTE MILLE EUROS (40.000. 00 euros) , dans le but de garantir le paiement du passif restant dû en cas de résolution du plan

Dit que Mr G Y devra justifier de cette caution entre les mains du Commissaire à l’exécution du plan dans la quinzaine du présent jugement (…)'.

L’acte de cautionnement a, par la suite ou concomitamment, été modifié sur le montant de la somme cautionnée.

L’engagement de caution de monsieur X n’a pas été recueilli dans le jugement arrêtant le plan de continuation puisqu’il y est mentionné que monsieur X devait justifier de la caution auprès du commissaire à l’exécution du plan dans les 15 jours du jugement.

Le formalisme de l’article L 342-1 du code de la consommation doit en conséquence s’appliquer, l’engagement de cautionnement n’ayant pas été homologué par une décision de justice.

La lecture de l’acte de cautionnement montre qu’aucune des mentions prescrites par la loi n’y figure. En outre la somme cautionnée est raturée.

Il convient en conséquence de réformer le jugement entrepris et d’annuler cet acte.

Sur l’article 700 du Code de procédure civile

Monsieur X sollicite le paiement de la somme de 1.800 euros sur ce fondement.

Il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais qu’il a exposé et qui ne sont pas compris dans les dépens. Il convient en conséquence de faire droit à la demande.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement rendu le 22 novembre 2016 par le tribunal de commerce de Melun,

Statuant à nouveau,

ANNULE l’engagement de caution consenti par monsieur Y X au profit des créanciers de la liquidation judiciaire de la société Lir Packaging,

CONDAMNE la Scp A B, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Lir Packaging à payer à monsieur Y X la somme de 1.800 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

DIT que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

La Greffière La Présidente

Hanane H I J

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 13 septembre 2018, n° 17/01621